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Guinée-Conakry : La grande désillusion

Publié le vendredi 6 juillet 2007 à 08h48min

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Les syndicats sont en train de revenir sur terre en Guinée-Conakry après des semaines de lutte pour de meilleures conditions de vie. Ils sont désabusés face au Premier ministre, Lansana Kouyaté qu’ils accusent de ne pas tenir ses promesses, notamment les mesures tendant à baisser considérablement les prix des produits de première nécessité.

Et pourtant Lansana Kouyaté avait suscité à sa nomination, un espoir certain même si les plus sceptiques avaient estimé que les syndicalistes auraient dû pousser plus loin leurs revendications. Le Premier ministre guinéen s’était même entouré de technocrates qui devaient être ses lieutenants dans le vaste champ de réformes annoncées.

Après quelques mois, la réalité est là, bien triste : l’économie est toujours sous la coupe réglée des proches du président Conté, les populations guinéennes broient du noir parce que rien ou presque n’a véritablement bougé. La réalité du pouvoir est toujours détenue par celui qui est à l’origine de tous les malheurs des Guinéens : Lansana Conté. Les violentes manifestations qui ont fait au moins 130 morts, n’ont pas servi à grand-chose, sinon qu’à ébranler, sans déboulonner, un système mafieux tenu à bout de bras par le célèbre grabataire de Wawa.

Le président Lansana Conté, après la tempête, est visiblement en train de reprendre la situation en main. La preuve, il ne s’est pas gêné récemment de déclarer qu’il est le seul maître à bord, traitant par la même occasion les autres d’être ses subordonnés. Interrogé sur la question, Lansana Kouyaté n’a pu répondre, visiblement gêné de se voir rappeler qu’il ne contrôle en rien la situation.

Le Premier ministre guinéen, en effet, est prisonnier de sa légitimité qu’il tire de Conté. Et il ne fait rien, le mot n’est pas trop fort, pour se secouer et revendiquer son indépendance. Il oublie certainement le contexte dans lequel il est arrivé à la primature. Sinon, comment comprendre qu’il puisse ignorer aujourd’hui les syndicats dans ses initiatives (c’est l’un des reproches qu’on lui fait), eux qui ont occupé la rue pendant des mois pour exiger le changement ?

Lansana Kouyaté est affaibli et c’est Conté qui sauve son fauteuil de président encore pour quelques années. A sa décharge, le Premier ministre n’a peut-être pas bénéficié de l’appui nécessaire des partenaires techniques et financiers de son pays, pour mener à leur terme les réformes annoncées au début de sa nomination. Il n’est donc pas étonnant que les résultats soient bien maigres et suscitent à juste titre, la désillusion des syndicats.

Dans l’hypothèse où ceux-ci décidaient de recommencer la lutte, pourraient-ils remobiliser avec autant de succès les populations guinéennes ? Ce n’est pas évident. Il apparaît donc, avec le recul, que les syndicats auraient dû aller jusqu’au bout, c’est-à-dire obtenir le départ de Conté. Le problème de la Guinée-Conakry, c’est Conté et tant qu’il restera en place, il ne faut pas s’attendre à un changement. Cette lutte patriotique aurait dû déboucher sur le départ du régime Conté qui, pendant des décennies, a travaillé à clochardiser le peuple guinéen.

Maintenant que les acquis de la lutte syndicale ont été dissipés par l’inertie du Premier ministre, il reste deux possibilités à Lansana Kouyaté. Soit, il démissionne pour montrer effectivement qu’il n’a pas les mains libres pour agir, soit il continue de rester prisonnier de Conté. En tout cas, la lune de miel semble pratiquement terminée entre Lansana Kouyaté et le peuple guinéen.

Le retour dans la rue est donc vraisemblablement pour bientôt et le ton a été déjà donné avec les émeutes qui ont éclaté la semaine dernière à cause de coupures d’électricité. Les syndicats auront-ils les ressorts nécessaires pour passer à la vitesse supérieure ? Les prochaines semaines nous apporteront probablement des reponses.

Le Pays

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