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Conférence de Paris sur le Darfour : Quelle solution sans l’Afrique ?

Publié le mardi 26 juin 2007 à 08h07min

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La réunion de Paris sur la crise au Darfour accouchera-t-elle d’une souris ? Il y a fort à craindre que cette initiative ne rencontre pas le succès escompté avec l’absence du Soudan et de l’Union africaine. Au fond, c’est un coup d’accélérateur que les grandes puissances (France, Etats-unis, Chine et Russie) et les Nations unies veulent donner aux efforts pour mettre fin à ce drame sanglant qui a déjà fait plus de 200 000 morts et entraîné le déplacement de plus de 2 millions de personnes.

Dans ce sens, ces pays ont annoncé leur intention de financer le déploiement des forces hybrides et de soutenir l’économie du Soudan, ce qui est un engagement de taille pour la résolution de la crise du Darfour. Pour s’être retrouvée au chevet du Soudan, l’Afrique devrait donc être reconnaissante à la communauté internationale, qu’on a souvent accusée de fermer les yeux sur certains drames humanitaires sur le continent. En revanche, organiser une réunion internationale sur le Darfour sans la participation du Soudan et de l’Union africaine, en même temps que cela peut paraître inopérant, relève du mépris suprême pour le continent, pourtant très affecté par la crise.

Une fois de plus, on infantilise les Africains. On veut leur appliquer des solutions toutes faites en les tenant hors des discussions. Tout se passe comme si l’Afrique avait échoué et qu’il fallait maintenant la relayer. Et pourtant, que n’a-t-elle pas fait pour arriver à réconcilier les frères ennemis ? Il n’y a aucun doute que l’Union africaine a pris le problème du Darfour à bras le corps, en témoigne l’envoi de ses troupes dans cette partie en conflit. Mais si les moyens lui ont fait défaut pour mettre en application ses recettes, doit-elle en rougir ? Elle aurait eu le coup de pouce nécessaire de la communauté internationale que la situation aurait sans doute été plus enviable.

En tout état de cause, en l’ignorant superbement comme ils le font, les initiateurs de la rencontre de Paris témoignent du peu d’intérêt qu’ils portent à une solution africaine de la crise. Ce qui serait dommage, l’exemple de la crise ivoirienne, pour ne pas la citer, ayant montré que les solutions aux conflits africains étaient parfois géographiquement plus proches qu’on ne le croyait.

Il n’est pas superflu de rappeler que le Soudan a enfin accepté la mise en place d’une force hybride d’intervention au Darfour. C’est peut-être là un important pas en avant. Mais rien n’est joué d’avance.

Le fait de n’avoir pas associé les Africains à cette rencontre internationale sur le Darfour pourrait tenir de la personnalité de Nicolas Sarkozy. On le sait débordant d’idées et d’énergie, toujours prompt à prendre les devants et à imposer, à la limite, sa vision.

Nicolas Sarkozy est assurément un homme-orchestre pour qui cette conférence est une "trouvaille" pour se positionner sur le plan international.

Pour la France, c’est certainement un baroud d’honneur. On le sait, le ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, n’avait pas atteint les résultats escomptés malgré la noblesse de l’idée défendue en son temps, à savoir la mise en place d’un corridor humanitaire.

Quant aux Etats-Unis, l’ambiguïté de leur position n’est pas pour favoriser une réussite de la conférence de Paris. Certes, dans la crise du Darfour, l’administration Bush a imposé des sanctions économiques à Khartoum. Certes, à la veille de la réunion du groupe de contact international à Paris, la secrétaire d’Etat américaine, Condoleeza Rice, a encore sommé le pays de Omar El Béchir d’accepter l’aide internationale. Mais, les Etats-Unis auront toujours quelque part les poings liés au regard de leurs importants intérêts économiques et géostratégiques dans la région. Et puis, il y a la lutte contre le terrorisme, un thème sur lequel les deux pays sont en total accord. Dans les discussions au plan international, les Etats-Unis seront toujours obligés d’en tenir compte.

Il faut espérer que le Soudan, dans un sursaut d’orgueil, préparera une solution propre à lui qui puisse mettre un terme à la crise. S’étant lui-même marginalisé, on peut se demander comment le président Omar El Béchir peut convaincre la communauté internationale de sa sincérité, lui qui dit accepter la mise en place d’une force hybride. Il ne veut sans doute pas se faire piéger par des décisions qu’il serait amené à entériner par sa présence à Paris. Dans ce cas, El Béchir aurait-il derrière la tête, sa solution personnelle ? Ce serait en tout cas une étape considérable si la conférence internationale de Paris amenait indirectement Omar El Béchir à abattre définitivement les cartes de la paix au Darfour.

Le Pays

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