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Démarrage tardif de la campagne agricole : Les producteurs s’inquiètent, les techniciens rassurent

Publié le lundi 25 juin 2007 à 08h05min

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La campagne agricole 2007- 2008 connaît un démarrage difficile dans la boucle du Mouhoun. Les quantités d’eau de pluie tombée n’ont pas permis un démarrage effectif de la campagne à temps, comme la campagne précédente. C’est une période difficile que vit le monde paysan qui est partagé entre le doute et l’espoir.

A la date du 15 juin dernier, la quasi-totalité de la région de la boucle du Mouhoun enregistrait une poche de sécheresse précoce qui retarde le démarrage effectif des cultures. La plupart des poches pluviométriques dégagent un cumul déficitaire de 10 à 30 mm par rapport à la campagne agricole écoulée. Les pluies ont certes été précoces, mais n’ont pas été régulières, ni bien réparties dans le temps et dans l’espace. Cette situation inquiète certains producteurs qui sont partagés entre le doute et l’espoir. Lassina Sabo est de ceux-là.

Selon lui, il faut s’en remettre à Dieu et aux techniciens, avant d’affirmer qu’à la même période des années précédentes il avait terminé toutes ses opérations d’emblavure et avait même commencer le sarclage. Mais à la date du 15 juin, aucun grain n’a été mis en terre, faute de pluie. "Nous serons obligés de faire recours à des variétés à cycle court", dit-il. La raison qu’il avance à ce niveau, c’est que l’issue de la campagne est incertaine parce qu’elle sera très courte.

Pour Karim Traoré, président de la Chambre régionale d’agriculture, l’heure n’est pas au découragement. Tout en reconnaissant que le taux de réalisation d’emblavures est inférieur à celui de l’année dernière, l’espoir est tout de même permis selon lui. Aussi souhaite-t-il que les pluies soient réparties dans le temps et dans l’espace pour le reste de la campagne. De Souri à Kamendéna en passant par Badala, Massala, Kari et Douroula, les producteurs s’activent et ont le regard levés vers le ciel. Certains labourent et d’autres sèment à sec comme à Badala au bord du fleuve.

Tout le monde est unanime, la campagne connaît un démarrage difficile et certains producteurs ont déjà renoncé à la culture du coton faute de pluie suffisante jusqu’à la période optimum. Les prochaines décades et la durée de la saison pluviale seront déterminantes pour les producteurs. S’il est vrai que les facteurs climatiques ont une incidence sur les activités agricoles et inquiètent les producteurs, Maurice Traoré, directeur régional de l’Agriculture, de l’Hydraulique et des Ressources halieutiques rassure que la campagne sera bonne à la vue des prévisions météorologiques qui prévoient une pluviométrie satisfaisante pour la campagne 2007-2008. Certains spéculent déjà sur un probable décalage dans le régime des pluies et le producteur Sotisse Ouédraogo ne s’inquiète pas outre mesure. Agé de 70 ans, il affirme avoir vécu des moments plus critiques que cette année. Aussi invite-t-il les producteurs à la pratique du zaï et à semer à sec en attendant les pluies.

Pour l’instant, le retard n’est pas encore préjudiciable pour les céréales, reconnaît Louis Sama de l’Union nationale des promoteurs de semences. Cependant, le coton prendra un coup quelle que soit l’issue de la campagne, confesse-t-il. Il reconnaît que l’inquiétude des uns et des autres est légitime, cependant il ne faut pas s’alarmer. L’agriculture burkinabè est fortement tributaire des facteurs climatiques (pluviométrie) car il faut l’eau, la chaleur et la lumière pour faire pousser les plantes. Aussi le DR de l’agriculture voit-il l’importance de l’irrigation d’appoint qui consiste à utiliser les eaux de réserve pour sauver les cultures en attendant la pluie. Le retard des pluies et de la faible réalisation des emblavures n’ont point influencé les prix des céréales. Mieux, le prix des céréales a connu ces derniers temps une chute. Ainsi, de 200 F CFA la boîte de tomate communément appelée "anan pa mooré", cette mesure se vend à 175 F de nos jours. La campagne 2006- 2007 a été largement excédentaire dans la région. Mais il n’en demeure pas moins que si la situation se dégrade, cela pourrait entraîner une rétention des céréales qui occasionnera une hausse des prix et va sans doute détériorer les conditions de vie de certains ménages.

Le démarrage tardif a aussi une répercussion sur le cheptel. En effet, le pâturage est complètement pauvre et dénudé à cause des premières pluies qui ont pourri le peu d’herbe qui restait. La croissance des végétaux n’est pas pour le moment suffisant pour améliorer l’alimentation des animaux qui en souffrent. C’est une période très difficile pour les éleveurs qui sont obligés de faire recours aux sous-produits agro-industriels notamment les tourteaux dont les prix ont été multipliés par deux. Le sac de tourteau se vend entre 4 500 et 5 000 F à Dédougou contre 10 000 F à Djibasso. La prolongation de la période de soudure suite au retard des pluies a affecté l’embonpoint des animaux et le docteur Jules Palm conseille aux éleveurs un déparasitage des animaux pour limiter les maladies parasitaires.

En attendant l’installation définitive de la campagne agricole, le DR de l’agriculture conseille la préparation des sols (labour, scarifiage) pour ceux qui le peuvent car cela facilitera la rétention des eaux des quelques pluies qui tombent, l’utilisation de la fumure organique qui en même temps enrichit les sols intervient dans la rétention de l’eau de pluie pour la plante, l’utilisation des semences améliorées dont le cycle est connu et s’adapte à la situation pluviométrique au Burkina, l’irrigation d’appoint pour les producteurs qui travaillent au fleuve et ont un moyen d’exode de l’eau, la gestion rationnelle des stocks de vivre disponible en évitant les bradages et les exportations massives hors de la région. En attendant, les différentes confessions religieuses intensifient les prières afin que le ciel ouvre ses vannes pour le bonheur des producteurs.

Par Serge COULIBALY

Le Pays

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