La chambre n°1 de l’hôtel Indépendance actuel Azalaï Indépendance est restée réservée au nom de Sembène Ousmane pendant une semaine durant laquelle s’est déroulée la dernière édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO). Pendant cette période, le locataire habituel, à ce FESPACO était absent pour raison de santé. Mais pas question de mettre la chambre en location. L’intéressé pouvait débarquer à tout moment à Ouagadougou et il ne fallait pas le décevoir si tel était le cas. Selon l’attaché commercial de l’hôtel, Moussa Ouédraogo, “l’homme à la pipe”, décédé le 10 juin 2007, avait une préférence particulière pour cette chambre, la plus grande de la maison à l’époque.

“Nous lui apprêtions la loge en question une semaine avant le début de chaque FESPACO” se rappelle M. Ouédraogo. Et la responsable commerciale, Esther Kibora d ‘ajouter “On ne peut dire les raisons de son attachement à cette chambre. Mais il y tenait à tel point qu’une fois il a menacé de ne pas descendre à l’hôtel si elle ne lui était pas octroyée”. De l’avis des responsables de la structure d’hébergement, celui qu’ils appellent affectueusement “Le vieux” était une personne ouverte. Il apportait une ambiance particulière et agréable pendant ses séjours. En effet, la gotha du cinéma africain se réunissait à l’hôtel parce qu’il s’y trouvait.

Cela s’explique car il fait partie des pères fondateurs de la semaine du cinéma africain (créée en 1969) devenue FESPACO depuis 1972. En outre, les étudiants et les élèves s’organisaient pour rencontrer cette icône du cinéma et de la littérature au bord de la piscine de l’hôtel, son lieu préféré pour échanger ou parler affaire. Tous voulaient s’abreuver à la source de connaissance de Sembène toujours disposé.

Sa célébrité attirait du monde à son pied-à-terre et avec lui tout ce que cela engendre comme bénéfice : augmentation des ventes (boissons, ouvrages, repas). Par conséquent, tout était mis en œuvre pour entretenir le parfait amour entre l’écrivain et l’hôtel. “Nous avons construit un nouveau bâtiment dans lequel se trouve une autre chambre n°1. Nous avions laissé la latitude à Sembène de faire le choix entre l’ancienne et la nouvelle chambre”, confie Salifou Traoré, responsable de la restauration.

Sembène habiterait-il dans la nouvelle chambre n°1 ou resterait dans l’ancienne qu’il a occupée depuis plus de vingt ans ? Avec la disparition de celui que le personnel de Azalaï Independance continue de pleurer du côté de l’avenue du président Sangoulé-Lamizana, cette interrogation restera à jamais sans réponse. “Son départ brutal pour le voyage sans retour a choqué tout le personnel de Azalaï”, confie M. Ouédraogo.

Les responsables de l’hôtel ont décidé avec la construction d’un nouveau bâtiment de ne plus mettre les chambres du bâtiment où se trouve la préférée de Sembène en location. Une véritable coïncidence avec le départ de l’écrivain. En tous les cas, à Azalaï on n’entend pas rompre le lien avec la disparition du “Vieux”. Une solution non des moindres a été trouvée.

Les responsables de l’infrastructure vont lui rendre un vibrant hommage. Ils ont décidé de donner son nom à la salle d’Immaco annexe. “Lorsque des personnes de divers horizons se rencontreront ici ils se souviendront de l’homme à la pipe” argumente M. Ouédraogo. Le personnel de l’hôtel, quant à lui, aura en souvenir l’image de cet homme et sa préférence pour la désormais ex chambre n°1. Mais les raisons de son attachement restent méconnues comme les mystères qui entourent tout grand homme.

Hamadou TOURE
Séraphine SOME

Sidwaya