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Big Ben et Maguy : Les kundé 2004 de l’improvisation

Publié le jeudi 6 mai 2004 à 11h24min

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Il y a quatre ans de cela, quand Salfo Soré dit Djah Press lançait les kundé, ces awards de la musique burkinabè, les pyrrhoniens étaient les plus nombreux. Mais aujourd’hui, cette manifestation a pris incontestablement des galons et est chaque année attendue par l’ensemble des mélomanes burkinabè.

Et pour sûr, outre les gens de la jet society qui s’arrachent les tickets d’entrée aux kundé à 20 mille balles, ils se comptent en centaines de milliers ceux-là qui suivent l’événement douillettement calés devant leur poste téléviseur. Soit parce qu’ils n’ont pas les moyens d’aller cotôyer Chantal Compaoré dans la salle des banquets de Ouaga 2000, soit parce qu’ils préfèrent la tranquillité de leur salon.

C’est aussi pour cela que l’organisation des kundé doit être impeccable et ne laisser aucune place à l’improvisation, à l’amateurisme d’autant plus que des médias internationaux comme TV5 et RFI en sont partenaires. Malheureusement, le professionnalisme, ce n’est pas ce qui a été servi au public lors de cette cuvée 2004 des kundé. En effet, le cafouillage organisationnel et technique était criard et n’a pas manqué de choquer spectateurs et téléspectateurs.

Côté technique, on a eu l’impression que les animateurs et le réalisateur de la TNB n’avaient pas le même conducteur. Sinon comment comprendre les ratés dont ils ont fait étalage ? Alors qu’on parlait du kundé de la meilleure musique francophone, la bande-annonce, elle, affichait kundé de la diaspora burkinabè.

Chaque nominé au kundé d’or avait droit à un message. S’il n’y avait rien à redire à propos du message de Zaksoaba, celui des Yéleen, réalisé au téléphone, n’était pas aisé à écouter : il fallait tendre l’oreille pour saisir des bribes de phrase.

Quant au message d’Amity Meria, annoncé à plusieurs reprise, il ne passera jamais sans qu’on ne sache pourquoi. Big Ben et la charmante Maguy Leslie Oka, deux animateurs hors pair d’habitude, se sont fourvoyés cette fois. Ils ont passé tout le temps à se contredire. Ils ne devaient certainement pas avoir le même programme.

Sinon qu’on nous explique pourquoi alors que l’un annonçait une prestation d’artiste, pour l’autre c’était le moment de découvrir le lauréat de telle catégorie de kundé. Il n’y avait vraiment pas de coordination entre eux et on peut se demander si les deux animateurs ont eu à répéter leur rôle ensemble. C’est grave s’ils ne l’ont pas fait, mais c’est encore plus grave si effectivement il y a eu répétition.

En effet, la présentation d’un événement comme les kundé doit se préparer à l’avance. Les animateurs ne doivent pas se réunir pour savoir seulement quelle veste ou quelle robe porter ni comment "mogobiter" pour amuser la galerie. Il y a plus que cela : ils doivent se partager les rôles et répéter pour ne pas faire étalage de lacunes le jour J.

Les techniciens aussi doivent prendre part à ses séances de répétition et surtout disposer du même conducteur de travail que les animateurs sinon attention aux bourdes.

Quand un événement draine tant de monde et est dans le même temps retransmis en direct à la télévision, il ne doit pas y avoir de la place pour l’improvisation. Les organisateurs des kundé doivent vérifier à l’avance que tous les nominés ou lauréats sont effectivement là, dans la salle des banquets.

Le monsieur du port autonome d’Abidjan, on l’a tous vu, n’a pas pu remettre le trophée, car le lauréat était absent et malgré les appels de Big Ben et Maguy à "un ami ou un représentant du lauréat" à recevoir le trophée, personne ne s’est présenté. C’est certainement tout penaud que notre ami du port d’Abidjan a regagné sa place et ça ne fait pas bien.

Un des points à critiquer également est sans doute le vote par SMS avec TELECEL. C’est un vote qui, à notre sens, ne doit pas être pris en compte pour plusieurs raisons. Premièrement il est discriminatoire, car il s’agit d’un vrai vote censitaire. En effet, il fallait être un abonné de TELECEL pour voter. Sont d’office exclus de cette opération les mélomanes qui sont sur TELMOB, CELTEL ou qui n’ont que le téléphone fixe.

De plus, les abonnés de TELECEL pouvaient voter autant de fois qu’ils voulaient puisqu’un bonus de communication était réservé à ceux qui voteraient au moins 100 fois. C’est absurde, car aucun dénombrement en mathématiques n’arrive à atteindre une combinaison de cent possibilités de vote si on se fonde sur le nombre de nominés au kundé d’or.

Rappelons qu’ils étaient seulement trois nominés (Yéleen, Amity Meria et Zaksoaba). C’est dire que cette possibilité de voter autant de fois que l’on voulait enlevait de facto au vote par SMS tout son crédit. L’eau est apportée à notre moulin par les animateurs eux-mêmes, qui ont passé tout le temps à rappeler en substance au public que le vote par SMS n’affectait pas les délibérations du jury. Dans ce cas, ou bien on supprime ce genre de vote, ou bien pour le prendre en compte, on instaure carrément un prix du public. Le commissariat général des kundé peut explorer cette nouvelle piste que nous suggérons.

La salle de banquets de Ouaga 2000 fait la fierté du Burkina. Moderne, elle est climatisée d’habitude. Mais jusqu’à aujourd’hui, on n’a pas encore compris pourquoi dans la salle les gens transpirait tant. La chaleur, visiblement, y était torride, car les pochettes et autres kleenex s’arrachaient comme de petits pains. Soit la climatisation était défectueuse, soit elle a été mise en marche en retard. On imagine que pour faire sentir le "fêfê" dans une grande salle comme celle-là, c’est des heures à l’avance qu’il faut actionner la climatisation.

Pour terminer, attirons l’attention du commissariat général des kundé sur la nécessité d’"utiliser" à fond les vedettes étrangères invitées. En 2003 tout comme en 2004, ces vedettes n’ont même pas fait 10 minutes sur scène.

A moins qu’elles ne soient que des invitées d’honneur, et pour parler cru, des appâts pour attirer la foule à Ouaga 2000. Comme dirait l’autre, on cherche à comprendre. En effet, pourquoi payer le billet d’avion d’une star, la prendre en charge (logée, nourrie et blanchie) et lui verser un "gombo" pour seulement une ou deux prestations scéniques ? Pour preuve, Bailly Spinto a proposé deux chants de même que Tabouley, idem pour le duo Cheela et Jocelyne Labyle.

Il y a ici comme un marché de dupe d’autant plus que beaucoup ont fait le déplacement de Ouaga 2000 notamment à cause de ces "galactiques". C’est comme si Zidane et Beckam venaient ici pour un match de foot. Assurément, le Tout-Ouaga ferait le déplacement du stade du 4-Août. Et l’on comprendrait l’amertume du public si ces deux stars ne jouaient qu’une dizaine de minutes chacune.

Loin de nous l’idée de dénigrer les kundé, bien au contraire. Mais nous pensons faire œuvre utile en interpellant les premiers responsables de cette manifestation pour que de telles erreurs soient évitées à l’avenir. Cela y va de l’intérêt des kundé, de notre musique et même du Burkina.

Comme Chantal Compaoré l’avait souhaité déjà lors de l’édition 2003, une femme a été kundé d’or. Bravo à la charmante et douce Amity Meria. Mais que Salfo Soré et ses camarades "fassent gaffe" et apportent rapidement les correctifs nécessaires pour que les ratés de l’édition 2004 ne soient qu’un banal accident de parcours des kundé, que tous les Burknabè ont maintenant adoptée. Et c’est pour cela qu’il faut être exigeant.

San Evariste Barro
L’Observateur

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