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Le Burkina Faso de Blaise Compaoré se prépare à passer à une nouvelle étape de son développement économique et social (3/5)

Publié le jeudi 31 mai 2007 à 07h52min

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P.Ernest Yonli à l’Assemblée

Le Burkina-Faso est confronté à un double défi. Se moderniser, et donc former des agents techniques, des techniciens, des cadres moyens et supérieurs, sans laisser à la traîne la grande masse de la population encore très majoritairement rurale, largement analphabète (y compris au sein de la jeunesse) et soumise à des conditions de vie difficiles du fait de l’absence de ressources naturelles majeures.

En deux mots (ou une image) Ouaga 2000 (le nouveau quartier de la capitale, là où vivent ceux qu’on appelle ici les "gourous") ne doit pas faire oublier Ouaga. Les Burkinabé ont effectivement la volonté "d’émerger" économiquement et socialement ; mais "tous ensemble". La "Révolution " a laissé des traces (inconscientes parfois) dans les mentalités et la solidarité sociale est encore une valeur : il faut que les "gourous " évitent les comportements trop ostentatoires s’ils ne veulent pas que la paix sociale soit remise en question ! Les responsables politiques sont conscients de cette situation à risque ; ils s’efforcent d’éviter les ghettos et poussent les uns à mieux s’intégrer parmi les autres.

"Globalement satisfaisant". On peut reprendre la caractérisation du Premier ministre, Paramanga Ernest Yonli (lorsqu’il parle de l’exécution du budget 2006) pour caractériser la situation macro-économique. Le souci des autorités est de passer à la vitesse supérieure sans fragiliser les acquis. Le développement rural (et sa composante incontournable : l’aménagement du territoire) va atteindre ses limites. Confronté à la précarité des pluies, à la pauvreté et à la dégradation des sols, les autorités mettent l’accent sur l’hydraulique (en matière de construction de retenues d’eau, la réalisation de 12 barrages a été achevée en 2006, et 14 autres sont en cours d’exécution ; en outre, 7 ouvrages hydro agricoles sont en instance de démarrage, précise le Premier ministre) et l’environnement (qui porte également sur la récupération des terres dégradées et la fixation des dunes).

Le Burkina Faso est devenu le premier producteur africain de coton (806.000 tonnes lors de la campagne 2006-2007, soit + 12 %) mais, comme le souligne le Premier ministre, "malgré ces excellents résultats en terme de production, la baisse tendancielle des prix aux producteurs depuis trois campagnes, peut être source de découragement pour les braves paysans de notre pays, d’où les mesures de redressement financier prises par le gouvernement pour soutenir la filière (fonds de lissage [c’est sur ce fonds de lissage qu’est adossé le nouveau mécanisme de fixation du prix au producteur], recapitalisation de la Sofitex) ".

Dans sa "quête permanente d’une sécurité alimentaire" (cette année, l’excédent céréalier prévisionnel dépasse 1 million de tonnes, "soit une couverture supplémentaire de 43 % des besoins du pays"), le Burkina Faso a choisi l’intensification de la production. "La production et l’utilisation des semences améliorées ont contribué à l’accroissement des rendements des céréales de 25 à 50 % ; pour la campagne 2007-2008, ce sont 5.456 tonnes de semences certifiées qui vont être mises à la disposition des producteurs ; de nouvelles variétés améliorées et mieux adaptées à nos conditions agro-climatiques comme celles du maïs "Espoir", du riz "Nerica", du manioc à haut rendement mis au point par l’INERA feront l’objet de vulgarisation auprès des producteurs", souligne l’annexe du Discours sur la situation de la nation.

Le Burkina Faso ne peut pas attendre de miracles en matière agricole compte tenu du double handicap d’être un pays enclavé et un pays sahélien. Mais le pays a su aller plus loin que le simple possible grâce à son programme SAAGA (qui permet de limiter la précarité des pluies -un radar a été installé à Bobo-Dioulasso et un troisième King Air 200 a été acquis) et à son choix en faveur des nouvelles technologies offertes par la recherche agronomique (on se souvient que Ouaga été en pointe, en Afrique noire francophone, dans le domaine des OGM).

Mais c’est surtout dans le domaine de la petite irrigation que l’effort a été conséquent (et payant). Selon le rapport annexe au Discours du Premier ministre sur la situation de la nation, ce "développement de la petite irrigation a permis d’aménager 26.000 hectares, déformer des milliers de paysans aux techniques d’irrigation, de gestion de l’eau et d’entretien des périmètres aménagés, de récolter 186.000 tonnes de produits agricoles (maïs, fruits et légumes, niébé, etc.) ".

Pour rester dans le domaine des ressources naturelles, notons l’explosion du secteur minier burkinabé. Le Premier ministre a précisé dans son Discours sur la situation de la nation que, "conscient du poids du secteur minier dans le développement de notre économie, le gouvernement a intensifié au cours de l’année écoulée, les activités de recherche géologique, minière et des substances des carrières. Cela a permis de porter le nombre de titres miniers et autorisations de 133 en 2005, à 237 en 2006, soit une progression de 78 %".

Il ne faut pas s’enthousiasmer outre mesure et penser que le Burkina Faso va devenir le "Zaïre" ou la "Guinée" de l’Afrique de l’Ouest ; sur ces 237 titres miniers, on peut distinguer 117 permis de recherche, 4 permis d’exploitation industrielle, 1 permis d’exploitation artisanale semi mécanisée, 88 autorisations d’exploitation artisanale traditionnelle et 27 autorisations d’exploitation de carrières. "Nous notons avec satisfaction, précise le Premier ministre, le démarrage effectif de la construction des mines d’or de Youga dans le Boulgou et de Taparko dans le Namentenga, dont nous attendons les premiers lingots avant la fin de l’année en cours". Par ailleurs, l’étude de faisabilité de trois projets miniers significatifs a été lancée : les deux mines d’or de Mana-Fooiri dans les Balé (13,5 milliards de francs CFA de taxes, impôts et droits attendus pour 180 emplois directs), et d’Inata, dans le Soum (12 milliards de francs CFA de royalties, impôts et taxes attendus pour 160 emplois permanents) ; la mine de zinc de Perkoa (37,8 milliards de francs CFA de redevances minières et d’impôts sur les bénéfices attendus pour 300 emplois directs). Par ailleurs, le gouvernement entend se donner les moyens d’intensifier la recherche pétrolière et la prospection de l’uranium (sites de Bossié et de Kodjari).

En matière d’investissements et d’avantages fiscaux accordés aux investisseurs, 51 autorisations d’implantation d’unités industrielles ont été enregistrées (16 milliards de francs CFA d’investissements prévisionnels pour la création de 1.316 emplois) tandis que 43 agréments ont été accordés pour un volume (prévisionnel !) d’investissements de plus de 193,5 milliards de francs CFA permettant la création de 2.346 emplois.

En 2006, le démarrage des activités de 14 entreprises agréées au Code des investissements a été constaté permettant la création de 343 emplois permanents. Notons que l’effort industriel du gouvernement vise notamment à "amorcer la transformation sur place de notre coton, ce qui permettra de créer plus de valeur ajoutée pour notre économie". Il faut noter que la création d’une nouvelle zone industrielle à Ouaga fait l’objet, actuellement, d’études de faisabilité et que la révision du Code des investissements est d’ores et déjà envisagée afin de "le rendre plus attractif. La tenue des Etats généraux de l’industrie est, par ailleurs, prévue courant 2007.

Restons dans l’entreprise pour remarquer que les 14 sociétés d’Etat burkinabé ont toutes réalisé des résultats nets positifs "et amélioré leurs soldes significatifs de gestion " : croissance du chiffre d’affaires (+ 10,8 %), de la valeur ajoutée (+ 12,4 %), du résultat net (18,4 %), de leur contribution au budget national (3,77 %) et des dividendes versés à l’Etat (+ 8,59 %). Un bilan plutôt exceptionnel en Afrique où la réhabilitation des entreprises publiques a été plus souvent un slogan qu’une réalité !

A suivre

Jean-Pierre Béjot
La Dépêche Diplomatique

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