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Le Burkina Faso de Blaise Compaoré se prépare à passer à une nouvelle étape de son développement économique et social (2/5)

Publié le mardi 29 mai 2007 à 07h46min

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Si, malgré son enclavement, la faiblesse de ses ressources naturelles et les effets collatéraux de la "crise ivoirienne ", le Burkina Faso se porte, économiquement, plutôt bien (la croissance est passée de 4,6 % en 2004 à 7,1 % en 2005 pour atteindre 6,4 % en 2006, avec une forte progression des exportations : + 24,5 % en 2006, et une inflation contenue sinon maîtrisée : + 2,4 % en 2006), c’est que le gouvernement et la population ont une ambition ("faire du Burkina Faso un pôle économique majeur en Afrique de l’Ouest").

Et ils et se donnent les moyens de leur ambition, tout particulièrement en désenclavant autant que possible le pays et, au sein du pays, les provinces (ce que l’on appelle ici le "désenclavement de proximité").

Il ne s’agit pas seulement, en la matière, de réalisation d’infrastructures (même si c’est le volet majeur) mais également d’actions de formation (tout particulièrement des acteurs privés dont on sait le poids économique qu’ils représentent dans la sous-région). Transports aériens, transports routiers, transports ferroviaires (c’est, sans doute, en cette matière, que les projets sont les plus ambitieux puisque, depuis l’indépendance de l’AOF, il n’y a pas eu d’évolution notable malgré le mot d’ordre de "bataille du rail" qui a fait, autrefois, les beaux jours de la Révolution et de la post-révolution burkinabé et a justifié l’érection d’une statue en centre ville !) mais aussi téléphonie (y compris rurale - rappelons que 51 % du capital de Onatel a été cédé à Maroc Télécom pour un peu plus de 144,3 milliards de francs CFA) et énergie (y compris solaire - le gouvernement met l’accent, aussi, sur la politique de responsabilisation des populations riveraines des forêts).

C’est sur ce socle, qui est loin d’être achevé, que le gouvernement s’est efforcé de construire un Burkina Faso différent de ce qu’il était. Thomas Sankara, voici un quart de siècle (ce qui signifie que rares sont les cadres actuels de la vie politique, économique et sociale à avoir vécu, en tant que cadres, cette époque), voulait ancrer le Burkina Faso dans une "pauvreté" quelque peu sublimée. Blaise Compaoré, depuis, a entrepris de donner d’autres ambitions à ce pays.

Les Burkinabé, aujourd’hui, estiment être sur le chemin de l’émergence et entendent avancer, plus vite, plus loin, dans cette voie (sans, pour autant, perdre de vue totalement l’idéal de fraternité et de solidarité qui était celui, affirmé, de la "Révolution"). Ce pays a cessé d’être recroquevillé dans son coin pour s’affirmer pleinement dans la sous-région comme un pôle de croissance et de développement. Et c’est une évolution récente qu’il convient de noter !

En ce qui concerne la situation économique et sociale du Burkina Faso, les réalités sont simples : la main-d’œuvre est au Burkina Faso (et ailleurs en Afrique de l’Ouest, au sein de la diaspora) mais l’usine se trouve, principalement, en... Côte d’Ivoire. C’est donc aux hommes et aux femmes (sans oublier, bien sûr, les enfants et les jeunes) que le gouvernement accorde sa priorité. Le meilleur signe en est que 50 % des annexes du Discours du Premier ministre, chef du gouvernement, Paramanga Ernest Yonli, devant l’Assemblée nationale (29 mars 2007), est consacré aux secteurs sociaux : santé bien sûr, éducation et enseignement bien évidemment, jeunesse et emploi, travail et sécurité sociale, etc. mais aussi à des actions moins classiques.

La promotion et la protection de l’enfant et de l’adolescent, la promotion et la protection sociale de la famille, la promotion de la solidarité ainsi que la protection des groupes spécifiques, ont été au centre de l’action gouvernementales en 2006, qu’il s’agisse de l’encadrement de la petite enfance, de la sauvegarde de l’enfance en danger, de la lutte contre le trafic interne et transfrontalier d’enfants (917 enfants victimes de trafic ont été interceptés et retournés dans leur famille en 2006 contre 844 en 2005 tandis que 80 filles victimes de trafic ont suivi des formations et des cours du soir dans le cadre de leur réhabilitation, etc., c’est dire l’ampleur du problème). La promotion de la femme fait également l’objet d’actions multiples et diversifiées (notamment pour ce qui est de l’amélioration du statut social et juridique de la femme, la promotion de l’accès des femmes aux sphères de décision ainsi que le renforcement des capacités et l’expertise des femmes).

Mais l’action fondamentale du gouvernement continue de concerner l’éducation, les enseignements secondaire, supérieur et la recherche scientifique. En matière d’éducation de base formelle, le taux brut de scolarisation est passé de 45 % en 2001-2002 à 60,2 % en 2005-2006 (1.390.571 élèves contre 938.230) ; le taux brut de scolarisation des filles a progressé de 5,8 % contre 3,5 % pour les garçons avec un indice de parité de 0,83 contre 0,75 en 2001-2002. Le nombre de classes s’est accru de 37 % tandis qu’en ce qui concerne l’encadrement les effectifs des personnels enseignants du public sont passés de 17.753 en 2001-2002 à 25.441 en 2005-2006 mais le ratio maître-élèves reste quasi-stationnaire (52,2 élèves par enseignant).

Le Premier ministre ne manque pas de souligner, cependant, que malgré les progrès "particulièrement significatifs", "les difficultés se posent, notamment les pesanteurs socioculturelles, la sous-scolarisation liée à la pauvreté des populations, les disparités de tous ordres". C’est pourquoi, aussi, un effort significatif est mené en matière d’alphabétisation et d’éducation non formelle qui touche, toutes actions confondues, plus de 300.000 personnes dont près de 60 % de femmes. En matière d’enseignement secondaire général et d’enseignement technique et professionnel (qui bénéficie d’un appui conséquent de la part de Taïwan), des efforts significatifs sont assurés (taux de scolarisation de 16,42 % contre 15,55 % en 2004-2005) mais le poids du privé est essentiel (sur 680 établissements, dont 596 d’enseignement général et 84 d’enseignement technique et professionnel, 331 seulement sont publics mais c’est, aussi, un choix gouvernemental qui a "le souci d’encourager l’initiative privée en matière de création d’établissements secondaires"). Une préoccupation exprimée par le Premier ministre concerne la formation des professeurs ; malgré les efforts dans ce domaine, un fort déficit (1.200 enseignants pour un effectif total de 5.243 enseignants dont 3.804 dans le public) est enregistré, "en particulier dans les disciplines scientifiques".

En matière d’enseignement supérieur et de recherche scientifique, "le fait majeur est le démarrage effectif de la mise en place du système Licence-Master-Doctorat (LMD) " et les perspectives offertes par l’ouverture des universités de Fada N’Gourma, de Ouahigouya, de Ziniaré et de Ouaga II entre 2007 et 2009.

Il y a quelques mois (19-23 décembre 2006), le Burkina Faso a organisé la deuxième édition du Forum national des jeunes. Son thème : "Une jeunesse porteuse de dynamisme entrepreneurial au service du développement". C’est une préoccupation de longue date des autorités burkinabé (on se souvient des "pionniers" de la vallée du Sourou voici une quinzaine d’années) ; cela reste une priorité : dans cette perspective une Politique nationale de l’emploi (PNE) est en cours d’élaboration afin de définir "un cadre d’orientation pour la promotion de l’emploi et de la formation professionnelle".

Il s’agit, pour le gouvernement, d’améliorer l’employabilité des jeunes et de rendre le marché du travail plus visible. En la matière, il ne s’agit pas seulement des jeunes les moins qualifiés (ou, plus généralement, pas qualifiés du tout) mais, souligne le Premier ministre, "/ ’une des caractéristiques du marché du travail au Burkina Faso est l’accroissement des effectifs des jeunes diplômés de l’enseignement supérieur enfin de cycle, qui éprouvent des difficultés d’insertion socioprofessionnelle ".

A suivre

Jean-Pierre Béjot
La Dépêche Diplomatique

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