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Côte d’Ivoire : Les politiciens à la conquête des ex-zones rebelles

Publié le samedi 19 mai 2007 à 08h49min

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Alassane Dramane Ouattara

Après presque cinq ans de crise, le Nord ivoirien, contrôlé par les Forces nouvelles (ex-rebellion), renoue avec les activités des partis politiques au grand enthousiasme des populations. En point de mire : les élections générales prévues avant la fin de l’année, selon l’accord de paix signé en mars entre les principaux belligérants.

Au rythme des tam-tams, la foule des militants du RDR (Rassemblement des républicains) chante et danse. Sur le podium, Mamadou Coulibaly Sangafowa, l’un des responsables de ce parti d’opposition ivoirien, lance au millier de spectateurs massés à Kassirimé, un quartier de Korhogo (630 km au nord d’Abidjan) : "Unis pour porter le Dr Alassane Dramane Ouattara au pouvoir !".

Et, les militants enthousiastes de scander en chœur "ADO ! ADO ! (acronyme du nom de l’ex-Premier ministre, musulman originaire du Nord, NdIr)". En cet après-midi du 7 mai, le RDR tient meeting, le énième en deux mois dans cette région de la moitié nord du pays, occupée depuis le 19 septembre 2002 par les Forces nouvelles (FN, ex-rébellion).

Avant le 4 mars, jour de la signature au Burkina-Faso de l’accord de paix entre Guillaume Soro, le leader des FN, et le président Laurent Gbagbo, le RDR ne pouvait publiquement mener aucune activité politique dans les localités septentrionales Tout comme le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI, ex-parti unique), le Front populaire ivoirien (FPI, au pouvoir) et les autres formations.

Ce qui n’était pas le cas au sud du pays, en zone dite loyaliste, où, après les accords de Marcoussis en janvier 2003, les partis ont commencé à jouir d’une certaine liberté d’action même si, à ce jour, ils ne peuvent toujours pas organiser de marches. Au Nord, un "régime d’exception", caractérisé entre autres par l’interdiction de toutes activités partisanes, régnait alors dans les ex-zones de guerre. "Il était même interdit de porter des habits à l’effigie de nos hommes politiques", sourit Kuonan Silué, de la section Jeunes du PDCI à Dikodougou, village situé au sud de Korhogo. Les soldats des FN et leurs partisans battaient au sang les contrevenants.

Le regard malicieux, Ouagnonsienré Coulibaly, secrétaire d’une des sections locales du PDCI, confie non sans humour avoir été "copieusement tabassé à mort en 2006 en compagnie d’un autre camarade à cause de leur militantisme".

Fin des représailles politiques

Les FN et leurs partisans visaient alors surtout les militants du FPI de Laurent Gbagbo, chrétien originaire du Sud, qui serait, selon eux, à l’origine de la crise militaro-politique. Ils l’accusaient d’avoir divisé les Ivoiriens en utilisant à son profit l’idéologie xénophobe, prônée par "l’ivoirité". L’usage de ce terme, lancé en 1995 par l’ancien président Henri Konan Bédié puis repris dans la Constitution de 2000, avait permis de dénier la nationalité ivoirienne à Alassane Ouattara, du coup écarté de la course à l’élection présidentielle.

Nagalourou Coulibaly, agriculteur, avait depuis 2002 caché son militantisme pro-FPI parce que, justifie-t-il, "j’ai été prié de fermer ma bouche si je voulais rester en vie". Mais, pour beaucoup d’Ivoiriens, tout cela relève maintenant du passé. La nomination, en mars dernier, de Soro au poste de Premier ministre, la formation du gouvernement de transition, la suppression de la zone de confiance entre le Nord et le Sud, etc. constituent autant d’événements qui suscitent un grand espoir de retour de la paix. Dans le nord du pays, les langues se délient, les exilés politiques rentrent au bercail.

C’est le cas de Abou Mapiéchon, militant du FPI, qui s’était réfugié à Abidjan, la métropole économique au sud du pays, après avoir reçu des menaces de mort à Korhogo, sa terre natale. "À présent, je suis un homme très heureux, car j’ai retrouvé toute ma famille ", lâche-t-il d’une voix émue. Les partis politiques, qui pour la plupart ont leur siège national à Abidjan, se lancent à présent à la conquête de l’électorat du Nord où, avant la crise, vivaient 40 % des dix-huit millions d’Ivoiriens.

Pour eux, l’enjeu reste la participation victorieuse aux élections générales, législatives et présidentielle, prévues selon l’accord de paix avant fin 2007 et devant couronner l’exécution des étapes du processus de sortie de crise (intégration des soldats des FN dans l’armée ivoirienne, identification des populations, établissement de nouvelles listes électorales...).

Mobilisation politique tous azimuts

Vêtus de chemises à l’effigie de leur leader, Henri Konan Bédié, les militants du PDCI ont marché dans les rues de Korhogo le 14 avril dernier et tenu un meeting, le premier depuis plus de quatre ans ! "Korhogo, fief des ex-rebelles, demeure un bastion du PDCI", constate Ezaley Georges, membre du bureau politique du parti tandis que Ouagnonsienré Coulibaly clame partout "si je meurs, mettez-moi en guise de linceul un pagne aux couleurs vert-blanc du PDCI !".

Pour Lassiné Koné, du RDR, la stratégie actuelle consiste à "accélérer la réorganisation des structures locales du parti, faire la sensibilisation de proximité pour amener nos militants à participer massivement aux audiences foraines et à se faire recenser sur les listes électorales, car bon nombre de nos concitoyens demeurent encore sans carte nationale d’identité".

Même objectif au FPI qui, en attendant la tournée imminente, mais non encore programmée de Laurent Gbagbo, multiplie les contacts avec ses militants et installe ses structures partout dans le Nord. A sept mois des élections générales, la mobilisation politique bat déjà son plein.

Ditiaba Semper OUARIS (Syfia International)

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 19 mai 2007 à 12:53, par LaPlume En réponse à : > Côte d’Ivoire : Les politiciens à la conquête des ex-zones rebelles

    Je crois qu’il faut eviter des expressions du genre "musulman du Nord" pour parler d’ADO et celui de "Chretien du Sud" quand a Gbagbo. Ce sont ces genres de qualificatifs qui ont entraines les problemes en Afrique en tout temps et creer la division. ADO est le president d’un parti ca suffit, a part ca c’est un ivoirien, pas besoin de lui ajouter sa religion, de meme que Gbagbo !! La revolution a sauve le Burkina de cette betise a nous identifier par nos ethnies, alors l’Afrique gagnera a eviter de se diviser par les religions et surtout des religions non-africaines par surcroit !! Alos Mrs les journalistes eviter ces genres de sous-entendus dans vos articles, SVP. J’en ai lu aussi a propos de notre president, du genre, "Blaise Compaore, mossi du centre, ..." c’est pas bon pour la generation future...Vous ne lirer jamais en Europe ce genre de qualificatif, ca fait pas Nation...Sorry...

    • Le 20 mai 2007 à 06:26 En réponse à : > Côte d’Ivoire : Les politiciens à la conquête des ex-zones rebelles

      voici des remarques qui merite de figurer sur le net , ce monsieur cherche a éviter des problemes a lafrik merci pour votre suggestion

      • Le 20 mai 2007 à 14:56, par LUCIE En réponse à : > Côte d’Ivoire : Les politiciens à la conquête des ex-zones rebelles

        L’analyse faite par Laplume vaut pour tous les citoyennes et citoyens africains mais surtout pour nos journalistes. Eviter de creer la division avec votre plume. Peut etre que certains journalistes ne percoivent pas la portee negative de telle distinction. Mais il est temps qu’ils fassent plus attention car pour un rien tout peut derapper. Les journalises sont les premiers a informer la population de tout ce qui se passe dans un pays. Vous etes oblige de faire tres attention a tout ce que vous dites car nous sommes nombreux a croire peut etre naivement que ce que vous dites est vrai. Les expressions du genre a diviser la societe selon la religion, l’ethnie, etc.. sont a eliminer. En Afrique nous cherchons toujours notre voie vers l’integration effective des populations. Nous ne sommes meme pas encore arrive a l’integration nationale. A quand donc l’ integration sous regionale ? Alors faisons tres attention. Cette vigilance doit commencer dans les familles et continuer dans les cercles d’amis, dans les services etc. C’est un langage que nous devrons tous proscrire car il porte les germes de la division dont nous n’avons pas besoin pour construire nos pays.

        • Le 21 mai 2007 à 00:39, par Twomi En réponse à : > Côte d’Ivoire : Les politiciens à la conquête des ex-zones rebelles

          Salut,cher lecteurs
          Les termes "musulman du nord et chrétien du sud" m’ont donné la chair de poule en les lisant, quand on connait les conséquences qu’ils ont déjà eues et qu’ils pourraient encore engendrer.Certes nous ne devons pas non plus les passer à la loupe,mais je pense qu’aucun lecteur ne restera indifférent à leur emploi.Juste pour attirer d’avantage l’attention de nos"teneurs de plumes informantes",qu’ils devront faire très attention aux expressions qui seraient peut être très banales pour eux.

          Que nos chers lecteurs les considèrent juste comme une inattention de la part du redacteur.

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