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Verdict de la tentative de putsch : Des partis politiques jugent

Publié le jeudi 22 avril 2004 à 07h14min

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Le procès sur la tentative de putsch, débuté le 6 avril, s’est
achevé le 17. Verdict : 7 condamnés, 6 acquittés. Comment les
partis politiques ont-ils accueilli le déroulement du procès et la
décision du Tribunal militaire ? Me Bénéwendé Sankara de
l’UNIR/MS, Gilbert Ouédraogo de l’ADF/RDA et Boukaré
Sébastien Zabsonré de PDP/PS apprécient.

Me Bénéwendé Sankara Président de l’UNIR/MS)  :
"Il y a eu machination"

C’est un procès criminel qui, après l’enquête préliminaire, a fait
l’objet d’une instruction. Ce dossier a été apprécié par la
Chambre de contrôle avant d’être jugé. C’est en fait le
déroulement de la procédure telle que prévue par le Code de
procédure pénale et le Code de justice militaire.

Au cours de l’instruction de cette affaire, Me Prosper Farama,
constitué pour Norbert Tiendrebéogo (Président du FFS) a été
inculpé parallèlement. Les droits de la défense sont des droits
constitutionnels. Quand un avocat est inquiété, son client est
alors désemparé. Quand les droits de la défense sont touchés,
on ne parle plus de liberté constitutionnelle.

Ainsi, le premier
sentiment que j’ai eu malgré le démenti formel de Reporters
sans frontière, était que l’on cherchait à ériger des obstacles à
cette procédure. Mais depuis le début de cette affaire, l’opinion
est restée très dubitative. Au niveau des partis politiques de
l’opposition, la réaction ne s’est pas fait attendre. Tout le monde
a crié à la machination et exigé la lumière, la vérité et la justice
dans cette affaire.
Ainsi, les partis sankaristes ont appelé leurs
militants au calme et à la sérénité pour suivre le procès et s’en
faire une opinion.

Grâce à la presse que nous saluons d’ailleurs, l’opinion
nationale et internationale a su que, selon les témoignages, des
gens comme Norbert Tiendrebéogo, leader d’un parti politique,
ne devaient pas du tout être inquiétés.

Autre élément d’intérêt, c’est que des membres du Régiment de
sécurité présidentielle, anciens collaborateurs du régime, ont dit
leur ras-le-bol pour avoir été "utilisés et jetés comme du klinex",
selon leur propre expression.

En tant que responsable de parti politique, donc leader
d’opinion, notre souhait a toujours été que la justice soit rendue
conformément au droit. Nous ne souhaitons pas que la justice
soit rendue selon la volonté du père ou parce qu’on veut régler
des comptes à quelqu’un. Mais nous avons eu l’impression que
de 2001 à 2003, il y a eu machination. Ce qui confirme d’ailleurs
nos prises de positions à travers les déclarations que nous
avons publiées. Mais le procès s’est déroulé dans une
ambiance qui a permis aux accusés de dire à la face du monde
ce qui les animait.
Aujourd’hui, on a plus d’informations sur l’affaire Norbert Zongo.
C’était notre souhait. Si Me Prosper Farama a subi des
tracasseries, c’est parce qu’il a demandé que le sergent Babou
Naon soit entendu par le juge d’instruction en charge du dossier
Norbert Zongo. Cela est du reste normal de la part d’un avocat.
Si aujourd’hui, des anciens collaborateurs du Régiment de
sécurité présidentielle affirment qu’ils connaissent les chefs de
mission et ceux qui ont exécuté Norbert, ils rendent de ce fait
un grand service au peuple burkinabè.
Je suis satisfait de l’acquittement de Norbert Tiendrebéogo,
parce que mon parti, l’UNIR/MS, a constitué un avocat pour le
défendre. Au-delà des condamnations et des acquittements,
l’opinion publique a compris qu’il n’ y avait pas possibilité de
coup d’Etat. Cela n’était pas possible au regard des moyens mis
en oeuvre et au regard des hommes. Il n’ y avait pas non plus le
mobile du crime. Or, pour qu’une infraction criminelle soit
établie, il faut les mobiles et les éléments d’une infraction. Ces
éléments n’existent pas, même s’il y avait une intention comme
l’a dit le capitaine Diapagri Luther Ouali qui, depuis 1998, a été
interpellé par le peuple burkinabè. Il voulait qu’on mette fin à la
"Compaorose". Mais il ne suffit pas de dire qu’on veut renverser
un régime pour que cela soit une réalité.

Dans le sérail politique, certains ont voulu utiliser cette intention
de Ouali pour régler les comptes à d’autres personnes. La
preuve, c’est que le Général Lougué a été éjecté.
En tout cas, le peuple burkinabè aura compris qu’on a utilisé
des gens mécontents dans le but de régler des problèmes
politiques. C’est vraiment dommage.

Me Gilbert Ouédraogo (Président de l’ADF/RDA) :"Un procès éducatif"

J’ai suivi le procès avec beaucoup d’attention. J’estime qu’il a
été éducatif pour la population burkinabè. Toute la classe
politique et la société civile doivent tirer de grands
enseignements de ce procès. Ce fut une grande école.
L’ADF/RDA avait déjà fait une déclaration pour réaffirmer son
attachement aux valeurs républicaines en condamnant toute
forme de prise de pouvoir par la force. Nous disions que le RDA
est très bien placé pour apprécier cela puisqu’il a eu à souffrir à
plusieurs reprises de ce phénomène et que le RDA est
conscient que ce n’est que par la voie des urnes que le peuple
peut avoir son salut. Nous avons également demandé à
l’époque que les droits des accusés soient respectés. Nous
avions aussi interpellé le gouvernement à tirer toutes les
conséquences de cette tentative.

Aujourd’hui, nous nous félicitons des conclusions de ce
procès. Je me réjouis de l’acquittement de six des treize
accusés surtout de celui du président du FFS, Norbert
Tiendrébéogo. Nous sommes satisfaits que ce procès ait
abouti à la conclusion qu’aucun homme politique n’était mêlé à
cette tentative de putsch. Et nous souhaitons que chacun de
nous puisse en tirer des enseignements pour l’avenir. La seule
voie de développement de notre pays, c’est la démocratie.

Boukaré Sébastien Zabsonré (Secrétaire général du PDP/PS)
"Tous les accusés devaient être acquittés"

Le fait d’avoir saisi les tribunaux pour une tentative de coup
d’Etat montre que l’Etat de droit avance même si cela se fait
timidement. Nous pensons que la tenue du procès constitue
une avancée significative pour la démocratie et l’Etat de droit.
Maintenant, par rapport à ce qui a été dit au cours du procès,
nous percevons difficilement où se trouve la tentative de putsch.
Critiquer le pouvoir ne saurait constituer une atteinte à la sûreté
de l’Etat. Qui ne fait pas de critiques à l’encontre des
gouvernants ? Pour nous, tous les accusés devraient être
acquittés. Il faut aussi souligner que certaines révélations ont
été faites au cours du procès. Y aura-t-il une suite ? Norbert
Tiendrebéogo a promis de donner des noms au cours des
meetings qu’il compte organiser. Nous attendons.

Propos recueillis par Hervé D’AFRICK et Adama SAVADOGO

Le Pays

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