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Youssouf Ouédraogo : Un cartésien à la tête de la diplomatie burkinabè

Publié le lundi 2 avril 2007 à 08h25min

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Youssouf Ouédraogo

Seul à avoir organisé trois conférences des ambassadeurs et consuls généraux de son pays en tant que ministre des Affaires étrangères, notamment en 2000, 2003 et 2006, Youssouf Ouédraogo détient aussi le record de longévité à ce poste, qu’il occupe depuis le 14 janvier 1999. Un record de longévité qu’il doit sans doute à son sens pratique, à sa fidélité au président du Faso à sa bonne connaissance des relations internationales.

C’est là, incontestablement, une prouesse à saluer chez un homme sorti tout droit des moules de l’économie et du marketing, plutôt que des plates-formes diplomatiques. Mais la diplomatie, n’est-ce pas aussi du marketing politique ?

Rien ne prédisposait à priori ce brillant économiste, formé aux techniques du marketing à l’Université française de Dijon, à la carrière de ministre des Affaires étrangères. Son profil très technocratique - enseignant d’économie, ministre de la Planification sous la révolution - lui aurait sans doute conféré un super maroquin de ministre de l’Economie et des finances, que personne n’aurait été surpris.

Mais, comme sous tous les cieux, les choix d’un président de la République sont insondables et discrétionnaires. Ainsi, après l’avoir choisi comme son premier chef du gouvernement en 1992, Blaise Compaoré l’a voulu comme son chef de la diplomatie depuis 1999.

Selon divers témoignages, la proximité entre Blaise Compaoré et Youssouf Ouédraogo date de la fin des années 80, alors que le nouveau président et l’enseignant d’économie passaient des soirées à échanger sur les grandes théories économiques. Une proximité sans doute forgée plus tard par la nature et la complexité des dossiers confiés par le président à son ministre.

Une complicité qui intrigue et qui vaut au chef de la diplomatie burkinabè, la sourde inimitié de certains camarades de parti ou encore les railleries de certains éditorialistes qui l’ont affublé du sobriquet de « Youssouf Ziniaré », comme pour insinuer qu’il est plus prompt à se préoccuper de son chef et de son village (le président Compaoré est originaire de Ziniaré) au détriment des affaires de son bled à lui, Tikaré.

Malgré les critiques quelquefois très acerbes, le ministre burkinabè des Affaires étrangères maintient le cap : « Je suis au service de mon pays et j’accomplis la volonté du président qui impulse les grandes orientations de la diplomatie burkinabè. »

Porte-parole dans les cénacles internationaux

Par monts et par vaux, ce quinquagénaire porte la parole du Burkina dans les cénacles internationaux et agrandit le cercle des amis du Burkina. Disposant d’un épais carnet d’adresses, sans doute l’un des plus fournis du pays, il compte parmi ses connaissances des émirs fortunés du Golfe persique comme le prince saoudien Al Walid, huitième fortune mondiale.

Il tutoie Louis Michel, le commissaire européen au développement et aux actions humanitaires, et est bon copain avec son homologue thaïlandais, Sathirathai Surakiart. Quand son épouse, Sally, est hospitalisée en France en 2005, le Premier ministre français, Dominique de Villepin, lui fait porter un bouquet de fleurs accompagné d’un mot signé de sa belle plume.

Youssouf Ouédraogo est avant tout un homme de contacts et de réseaux. C’est ainsi qu’en décembre 2003, il rencontre à Washington - privilège assez rare quand on ne possède pas de ressources pétrolières - l’ancien secrétaire d’Etat américain, Colin Powell. Ce tête-à-tête inédit permettra de rabibocher le Burkina et les Etats-Unis et d’amorcer le dégel des relations entre les deux pays, en froid depuis la fin des années 1990.

Musulman pratiquant, le « sherpa » de Blaise Compaoré fait pourtant partie des premières personnalités politiques africaines à s’incliner sur la dépouille du pape Jean Paul II, en avril 2005 au Vatican.

Attentif au quotidien de son patelin

Toujours entre deux avions, d’un continent à un autre, et malgré les décalages horaires, ce solide gaillard - il a un physique de basketteur mais se passionne plutôt pour le tennis - se tient informé, « minute par minute », de l’actualité internationale et nationale. L’un de ses intimes affirme ainsi qu’il ne rompt jamais les amarres avec le village, ainsi que le font croire certains. « Même quand il est en mission, son téléphone est toujours ouvert et il s’informe de ce qui se passe », indique-t-on.

Et dès que l’agenda international lui offre des plages vides, le natif de Tikaré ne rate pas la première occasion pour sillonner les villages du département du Bam (il possède une résidence à Kongoussi, le chef-lieu du département) et pour se ressourcer auprès des siens dans son patelin de Tikaré. Non sans avoir sacrifié à un rituel immuable : se recueillir sur la tombe de son feu père dans le caveau aménagé dans sa résidence.

Quand il ne se rend pas le week-end dans l’une de ses fermes ou ne dispute pas une partie de tennis dans l’un des hôtels de la capitale, ce père de deux enfants est plutôt casanier, profitant ainsi de la délicatesse et des mets exquis de son épouse, Sally, auquel le lie une tendre et inoxydable complicité, vieille de plus de deux décennies.

Talentueux et bardé de certitudes, le chef de la diplomatie burkinabè cultive à l’excès un sens du détachement que certains de ses collaborateurs assimilent à de la suffisance, voire de l’arrogance. « Pour moi, tout découle de la logique. Les décisions doivent être prises sans état d’âme, sans passion et sans pression. Si c’est cela de la suffisance... »

Et quand ses proches voient dans la création, en avril 2006, d’un syndicat au ministère des Affaires étrangères, une ultime manœuvre de ses adversaires visant à le déstabiliser, Youssouf Ouédraogo préfère y voir « l’expression de la démocratie », bottant ainsi en touche, comme pour ne pas donner du grain à moudre aux échotiers de la presse nationale. Pour lui, « les syndicalistes sont dans leur rôle ».

C’est aussi cela le style Youssouf, empreint de retenue et de finesse, à la manière d’un escrimeur doté d’un esprit cartésien.

Par Samori Ngandè

Fasozine

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Vos commentaires

  • Le 2 avril 2007 à 13:12, par KGB En réponse à : > Youssouf Ouédraogo : Un cartésien à la tête de la diplomatie burkinabè

    C’est toujours bien de se faire faire un portrait dans les journaux burkinabe : vous n’aurez jamais de defaut.
    Je n’ai rien contre Youssouf mais c’est un "Human being" qui a forcement ses limites. Donc il faut reecrire ce papier et nous dire aussi la ou issouf a ECHOUER... parce que votre travail vous oblige a l’equilibre no matter how big is the amount of the Gombo you received.

    • Le 2 avril 2007 à 13:49, par Lefaso.net En réponse à : > Youssouf Ouédraogo : Un cartésien à la tête de la diplomatie burkinabè

      Si vous lui connaissez des limites, pourquoi ne le dites-vous pas directement ?

      Le journaliste a écrit qu’on lui reproche d’être trop proche du chef de l’Etat, d’être coupé de son village et même d’être suffisant. Il faut savoir lire entre les lignes.

      Si vous en connaissez d’autres, dites-le au lieu de lui faire un faux procès au journaliste. Et pourquoi ne prendrait-il pas son gombo s’il y en a ? Si vous avez lu cet article, c’est parce qu’il a pris la peine de l’écrire !!!

      Tampousga

  • Le 2 avril 2007 à 14:10, par Le Gonze En réponse à : > Youssouf Ouédraogo : Un cartésien à la tête de la diplomatie burkinabè

    Voici là un bel hommage à un homme de plus en plus contesté au sein du Département ministériel qu’il dirige depuis 1999, même si ce n’est que la récente invalidation partielle du scrutin municipal dans sa localité qui a par exemple permis aux habitants de la zone de découvrir que ce fils était capable d’un "depassement de soi" pour ce qui concerne les réalisations concrètes dont ils avaient besoin, lui qui depuis 1984 flirte avec les plus hautes cimes du pouvoir dans notre pays...

  • Le 2 avril 2007 à 14:16, par Le Gonze En réponse à : > Youssouf Ouédraogo : Un cartésien à la tête de la diplomatie burkinabè

    Je suis d’accord avec KGB. L’équilibre de l’information au public requiert que l’on évite de peindre uniquement en rose les gens. Maintenant s’agissant du gombo, je me demande si le recevoir ne constitue pas une compromission fautive au plan déontologique. Au plan pénal, ce serait en tout cas clair,...si le fait est prouvé.

    • Le 2 avril 2007 à 20:35, par mouss En réponse à : > Youssouf Ouédraogo : Un cartésien à la tête de la diplomatie burkinabè

      C’est à cause des prises de position comme les votres que nos journalistes se prennent pour des supermen ou des Zorro . Faut il etre injurieux envers les hommes politiques pour avoir le label de journaliste d’xtreme droite ? Moi , J’ai aime ce portrait qui fait decouvrir un homme , avec ses forces et ses limites . le journaliste dit qu’il est suffisant ,qu’il est bardé de certitudes et releve qu’il est plus proche de Ziniaré que de son village . Voulez vous qu’il l’insulte , ou qu’il utilise des noms d’oiseaux pour comprendre ? Elevons le debat . Nous lisons tous ici des grands journaux comme le Monde , Liberation , le Figaro ( prennent ils le gombo ???) , et nous savons que le portrait est un art , qui necessite doigté et tact . Comme l’a dit qqun , faut savoir ligne entre les lignes . Je trouve que c’est equilibré et agréable à lire .
      Peace and love

  • Le 3 avril 2007 à 11:27, par Le Gonze En réponse à : > Youssouf Ouédraogo : Un cartésien à la tête de la diplomatie burkinabè

    C’est justement parce qu’on lit aisément entre les lignes que la conviction se renforce quant au caractère "déséquilibré" de cet article" ! Voyez-vous même : être proche du Chef de l’Etat, du village de ce dernier et être plein de certitudes.. ne constituent pas des défauts, en vérité. Ce n’est rien d’autre que le trait de caractère de la plupart de nos politiciens, surout ceux du bord présidentiel. Combien sont-ils à arpenter les 30 kms qui séparent Ouaga de Ziniaré les week-ends à bord de véhicules remplis de présents de toutes sortes pour aller "saluer" ? Combien accourent à la plus "petite" des manifestations culturelles ou sportives de ce patelin, histoire d’être vus ? Combien dans Ouaga ne se reclament-t-ils pas de la parentée proche ou des relations du Boss, histoire de faire peur quand c’est nécessaire ? Il faut accepter la critique, et reconnaitre que le style journalistique de cet article peut susciter de telles réactions. La démocratie, c’est aussi cela..., no matter how important are your relationships with them !

  • Le 3 avril 2007 à 15:46, par Noraôgo En réponse à : > Youssouf Ouédraogo : Un cartésien à la tête de la diplomatie burkinabè

    ce parti pris du journaliste ou plutôt du journal Fasozine pose la question de son sérieux et á qui il est destiné. il faudrait chercher á voir et á lire tout le magazine. Le journaliste doit savoir que ceux qui lisent un tel article surtout d’un homme politique africain sont des avertis. Il aurait dû quelque que soit l’orientation éditoriale de son magazine d’avoir des infos des syndicats du ministère des affaires étrangères et surtout d’un habitant de Tikaré. Savez vous Monsieur le Journaliste comment Youssouf a plus ou moins perdu les élections municipales dans son propre fief ? Savez vous pourquoi y a t-il un syndicat au sein de ce ministère ? Youssouf il est bien mais quand même pas un"saint" . Un peu des deux côtés s’il vous plait ! Si vous continuez de cette manière votre magazine risque de prendre un coup surtout au niveau de la Diaspora et Youssouf sera toujours au ministère. Bon vent á Fasozine !

    • Le 3 avril 2007 à 17:47, par Lefaso.net En réponse à : > Youssouf Ouédraogo : Un cartésien à la tête de la diplomatie burkinabè

      Il va de soi que Youssouf n’est pas un saint. Mais qui l’est-il ? Vous pensez que la présence d’un syndicat c’est forcément signe que ça ne va pas ? Est-ce que Youssouf a cherché à interdire ce syndicat ? Parce que déjà qu’il est autorisé dans ce ministère est un bon signe, preuve d’ouverture comme le journaliste l’a écrit.
      Dans combien de miinistères, y at-il de syndicats ?

      Les journaux ne sont pas là que pour dire seulement que c’est mauvais, que ça ne va pas. Dans tous les cas, les mauvais côtés que vous auriez voulu savoir, vous les savez déjà, à vous lire.

      C’est quoi ce pessimisme où on doit tout voir en négatif. Vous ne croyez pas qu’il y en a qui s’en occupent suffisamment déjà ?!

      Vous n’avez sans doute pas aimé cet article ; c’est normal. C’est normal aussi de le dire. Mais de là à critiquer le travail du journal de façon générale, vous exagerez à mon avis.

      Et vous, si vous continuez comme ça, vous risquez de mourrir d’ulcères d’estomac, pour cause d’aigreur !!!

      A bon lecteur....

      Kaboré

      • Le 3 avril 2007 à 21:49, par Lefaso.net En réponse à : > Youssouf Ouédraogo : Un cartésien à la tête de la diplomatie burkinabè

        J’espère que la crainte de Kaboré que Noraogo ait des ulcères ne va pas se réaliser. Néanmoins, je partage son ses critiques contre les critiques de Noraogo. Si Noraogo est un lecteur assidu d Faso.net,il a dû lire le précédent portrait qui est aussi de Fasozine et parlait de cette jeune dame travaillant dans une station d’essence. ici aussi, l’article est plutôt positif et ne dit rien des "mauvais côtés" de la demoiselle. Pourtant personne ne s’en est plaint. Est-ce que parce qu’il ne s’agit pas ici d’un homme politique en vue, proche du PF ?

        Zombra

  • Le 3 avril 2007 à 17:50 En réponse à : > Youssouf Ouédraogo : Un cartésien à la tête de la diplomatie burkinabè

    Je suis déçu des propos de nos compatriotes qui se sont montrés durs envers le journaliste. Lisez un peu la signature de l’article et vous comprendrez mieux le journaliste. Il est d’un journal qui se démarque des propos haineux que certains journaux nous ont habitué.
    Fasozine est, je crois, un magazine qui voudrais contribuer à faire la promotion de notre pays à l’extérieur. Avec une telle ligne éditorial, je crois personnelement que c’est un article balancé qui met effectivement le doigt sur certaines insuffisances d’Yssouf Ouédraogo qui a toujours le visage en l’air, imbu de sa personne. Il y a certainement beaucoup d’autres défauts de l’Homme, mais si je ne les connais pas je ne vais pas les inventer. En plus, si j’en connaissais d’autres, j’allais les verser dans le cadre de ce débat, pour contribuer à compléter le tableau afin qu’on Connnaisse mieux Yssouf. Mais jamais, jamais, je n’en voudrai à un journaliste de n’avoir pas dit ce que moi je souhaitais lire.
    Que voulez-vous qu’il invente si, dans ses investigations, il n’a pas eu assez d’éléments pour "accabler" notre cher ministre ? Dites tout simplement ce que vous savez sur lui, et nous vous serons tous reconnaissant. Si ce sont des allégations sans fondement, nous aviserons aussi.

    • Le 4 avril 2007 à 01:31, par mouss En réponse à : > Youssouf Ouédraogo : Un cartésien à la tête de la diplomatie burkinabè

      Cher ami , le Gonze .
      La critique est aisee mais l’art difficile . Vous reprochez au journaliste d’avoir dresse un portrait partial ? Et vous que faites vous donc ? Vous ne ressortez aucune qualite de ce ministre . Si je vous comprends bien , il est tellement mauvais qu’il ne merite pas un portrait elogieux . Bref puisque vous en savez un bout sur Youssouf , dites nous quelles sont ses defauts , dites nous aussi quelles sont ses qualites pour faire plus impartial . Et puis , moi j’ai lu le Magazine . Ce portrait couronne en fait un dossier sur la conference des ambassadeurs . Ce n’est pas un portrait tombe du ciel . Arretez de voir le diable partout .Fraternellement

  • Le 4 avril 2007 à 13:32, par Le Gonze En réponse à : > Youssouf Ouédraogo : Un cartésien à la tête de la diplomatie burkinabè

    "El diabolo" est en chacun de nous, que l’on soit ou non de la "garde rapprochée" ou de je ne sais quel cercle (1er, 2ème..). Et se faire descendre au lance-flammes (ou au Bazooka) pour avoir émis un avis sur un article, et sur l’action d’un homme dans un domaine bien précis ( mais nullement sur la personne ou les qualités supposées ou réelles, ou sur la ligne éditoriale d’un journal) ne rend que plus fier d’instaurer, même en y laissant quelques plumes, le dialogue et la critique de l’action de nos gouvernants tant recherchés et attendus dans notre système politique au Faso. Quant à l’ulcère et à ses conséquences ( la mort ), on pourra toujours essayer avec nos médécins "locaux" souvent capables de prouesses, sinon, on s’exilera pour tenter la chance ailleurs, vu que les évacuations semblent être également réservées !

    En tout cas, bravo à ce journal pour le débat instauré. Qu’il fasse encore d’autres portraits de ce genre, et nous serons encore là,.... no matter where we are !

    Bonne journée à tous.

    Dubito cogito, ergo sum !

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