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FESPACO : Aller vers l’Union africaine du cinéma

Publié le vendredi 2 mars 2007 à 08h45min

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Plus qu’un jour, et les rideaux seront baissés sur la 20e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO). Producteurs, réalisateurs, comédiens, acheteurs, en un mot tous les acteurs, mais aussi les amoureux du 7e Art qui s’étaient donné rendez-vous une semaine auparavant vont se quitter, se promettant de se revoir en 2009 pour la 21e édition.

La question essentielle qu’il est permis de se poser est celle de savoir si les ateliers, les colloques et les table- rondes qui ont été organisés dans le cadre de cette édition sur les questions propres au cinéma africain, ces réunions qui ont été animées par d’éminents spécialistes, ont trouvé des réponses satisfaisantes. Ou au contraire, la présente édition, à l’instar sans doute de celles qui l’ont précédée, a posé des questions plus qu’elle n’en a apporté de réponses.

Le FESPACO n’aura-t-il été qu’un espace festif ? Citons pêle-mêle quelques-unes des interrogations qui reviennent de manière itérative à chaque édition : " Quel cinéma pour quel public ? Le cinéma africain est fait pour quel spectateur ? Traduit-il les réalités des sociétés africaines ? Quel cinéma face à la mondialisation et la globalisation ? Le cinéma africain nourrit-il son homme ? Existe-t-il un statut pour l’artiste comédien africain ?"

Les festivaliers ont certes réfléchi longuement sur ces différentes questions, mais il y a des doutes que des réponses adéquates aient été trouvées pour toutes. En 2009, d’autres préoccupations ne manqueront pas de s’ajouter à la liste. Cela est dû à la nature de l’activité cinématographique, une activité en perpétuelles mutations, surtout avec l’irruption des nouvelles technologies comme le numérique qui, s’il résout la question des budgets et de la fabrication des films, ne pose pas moins celle de la qualité, donc de la promotion du cinéma africain à l’étranger. Comme les précédentes fois, il est peu probable que les spécialistes de la question aient pu donner des réponses satisfaisantes aux préoccupations du monde du cinéma pris dans son ensemble. En l’espace d’une semaine, cela semblait une gageure. Il serait préférable, souhaitable que les professionnels du cinéma n’attendent plus le temps du FESPACO pour poser les problèmes qui handicapent le développement de l’activité cinématographique de Afrique. Les problèmes étant presque identiques d’un pays à l’autre, n’est-il pas plus judicieux que chaque structure nationale recense ses problèmes spécifiques et que lors des réunions qui se tiennent dans le cadre de chaque biennale africaine du cinéma, on procède à une mise en commun qui suscitera une réflexion commune pour dégager des solutions pour tous ? On s’acheminera ainsi vers "un sommet" du cinéma africain, un sommet où les représentants des pays sont les spécialistes du cinéma et non les chefs d’Etat. Il faudrait aujourd’hui aller vers une sorte d’Union africaine du cinéma. Entendons-nous : il ne s’agit pas d’amener les chefs d’Etat du continent à s’impliquer directement dans les affaires du cinéma africain. Mais il est plutôt question d’adopter une procédure technique à l’image de celle des sommets des chefs d’Etats, où les dossiers sont examinés d’abord par les experts, puis les ministres, avant d’échoir entre les mains des présidents. Le FESPACO n’aura pas d’autre choix s’il veut résister à l’arrivée massive et incontrôlée de la vidéo, des films indiens, chinois, et des films de bas étage prônant la violence, le culte du sexe et toutes voies pour s’enrichir illégalement et vite.

"L’union fait la force", dit-on. Les professionnels africains du cinéma l’ont certes compris, en créant la Fédération panafricaine des cinéastes (FEPACI). Mais aujourd’hui, la FEPACI se doit d’être très offensive, d’une part, pour faire accepter la diversité culturelle africaine au niveau mondial, d’autre part, pour protéger les productions cinématographiques africaines de l’envahissement des cinémas des autres continents qui sont mieux lotis en moyens financiers et technologiques.

Les femmes et les hommes qui se rappellent l’engouement de la population de Ouagadougou, voire du Burkina Faso tout entier pour "son" FESPACO dans les années 70 et 80, se demandent pourquoi ce désintérêt aujourd’hui. La pauvreté à elle seule ne saurait expliquer cette situation. Cet engouement avait amené le gouvernement du général Aboubacar Sangoulé Lamizana à nationaliser à l’époque les salles de cinéma. A présent, on assiste à un mouvement inverse : des salles de cinéma se ferment, d’autres sont simplement et purement vendues. Devant une telle situation, l’intérêt du public pour le cinéma ne peut que baisser. Même si l’on s’accorde à dire que le temps des grands budgets pour réaliser des films dignes de ce nom est révolu, il faut reconnaître que même avec l’entrée en scène du numérique, les films africains coûtent encore cher, comparés à ceux des autres continents qui disposent d’infrastructures performantes de production et de distribution.

Le cinéma est un enjeu politique évident pour les Etats africains. Mais, le temps des films produits avec des budgets colossaux, la plupart du temps financés par l’étranger, semble révolu. Pour le cas du Burkina Faso, de nouveaux réalisateurs, à l’instar de Boubacar Diallo et de Aboubakar Zida Sidnaaba, produisent avec des budgets modestes, des films qu’on peut qualifier de films populaires parce que traitant des réalités sociales des populations. Le problème qui pourrait se poser est celui de la compétivité. Doit-on se contenter de faire des films pour la consommation locale ? Le cinéma est appelé 7e Art parce qu’il obéit à des normes universellement reconnues et acceptées. Le FESPACO, manifestation culturelle mondialement reconnue, ne peut pas se contenter des productions qui n’auraient pas le label international.

C’est le grand défi des professionnels africains du cinéma, mais aussi des Etats qui ont le devoir de les soutenir financièrement. Pour ces professionnels, aller vers une Union africaine du cinéma semble une voie pour préserver et la qualité et la promotion des oeuvres cinématographiques du continent. Mais les artistes sauront-ils être un exemple pour les hommes politiques en réussissant l’intégration culturelle ? Voici un programme pour le FESPACO.

"Le Fou"

Le Pays

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