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Négociations inter-ivoiriennes : Les leçons du passé

Publié le mercredi 14 février 2007 à 08h39min

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Gbagbo_Compaoré

Le dialogue direct sur la Côte d’Ivoire a ouvert ses portes, lundi dernier à Ouagadougou. Sous la conduite de Blaise Compaoré, le président du Faso, on peut dire que c’est le round de la dernière chance. Pour ne pas échouer, à l’instar de ces devanciers, Ouagadougou doit s’inspirer de tout ce qui a auparavant été fait dans le cadre de la recherche de la paix pour la Côte d’Ivoire.

Blaise Compaoré, on le sait, a assez d’expérience dans ce type d’exercice. Il a à son actif, plusieurs réussites dans la conduite de négociations pour réconcilier des frères fâchés, souvent pour des raisons futiles. Mais ici, il marche sur des charbons ardents, le cas ivoirien étant unique en son genre. Jamais pays n’a autant mobilisé à son chevet la communauté internationale. Depuis le déclenchement de la crise en 2002, le sujet Côte d’Ivoire a été de tous les sommets organisés en Afrique. Le nombre de forums sur le problème est aussi, sinon plus grand que la superficie du Soudan. Et pourtant, on semble toujours être à la case départ. La complexité de la question n’est pas à faire et pourtant tout le monde se dit que cette fois doit être la bonne. Pourquoi ?

Parce qu’après avoir refusé pendant longtemps de dialoguer avec les rebelles, donc des hors-la-loi, Laurent Gbagbo est revenu en arrière. Cette fois c’est un face-à-face et qui n’a qu’un seul et unique intermédiaire. Ensuite, le facilitateur connaît le sujet et de surcroît, il a autant besoin que les Ivoiriens de la paix chez son voisin, vu les liens unissant les deux pays. Deux arguments qui pèsent certes, mais la paix en Côte d’Ivoire ne pourra se faire que si sont capitalisées à Ouagadougou, toutes les tables rondes organisées pour la réconciliation nationale et qui pour des raisons et d’autres n’ont pas fructifié.

De Marcoussis à Jo’Burg

Oui, tout le monde se souvient de Linas-Marcoussis. Réunion entre Ivoiriens, partis prenantes de la crise et menée au pas de charge par le chiraquien, juriste de formation Pierre Mazaud. Mais, Marcoussis ne résistera pas à la primauté de la constitution ivoirienne sur tout ce qui sera décidé sur la crise, dira-t-on à contre sens de ce texte supérieur. Depuis, la légalité constitutionnelle mettra à mal les bonnes intentions jusqu’aux résolutions onusiennes prises pour résorber la crise ivoirienne. L’expérience première à sortir de tous ces essais manqués, serait de travailler selon le schéma intégrant les difficultés nées de la mise en œuvre des propositions antérieures. Difficultés qui peuvent être résumées dans une interprétation des résolutions, faite par chaque camp selon la vision qui arrange ses intérêts. Aussi, quel que soit ce qui sortira du conciliabule de Ouagadougou, la traduction du texte suivant un langage compris et accepté par tous constitue une condition sine qua non à la fermeture des échanges. Pour avoir mesuré les conséquences dommageables des lectures trop diverses des conclusions de négociations aujourd’hui sans intérêt, il serait indiqué que la mise en œuvre fasse l’objet d’un pan du document final sorti dudit dialogue direct. C’est pourquoi, aussi adroit que soit Blaise Compaoré, la clé se trouve entre les mains ivoiriennes. Si comme ils le disent tous, ils sont fatigués de la crise, Ouagadougou sera le dernier round d’un combat jusque-là sans fin.

Se hâter lentement

Lever en préalable tous les quiproquos suppose de prendre le temps qu’il faut, même si ce temps-là n’existe pas à souhait d’ici à octobre 2007, date butoir pour enfin tenir la présidentielle.

Si les bonnes intentions émises de part et d’autre sont à saluer, elles ne serviraient pas à grand chose sans un minimum de concessions acceptées et faites. C’est pourquoi, il ne faut rien brusquer du tout en voulant danser alors que la musique n’est pas partie.

On remarque beaucoup d’impatience médiatique, au constat des commentaires entendus ici et là. Il y a comme une sorte de force poussant derrière pour le face-à-face prévu Gbagbo-Soro.

Or, il ne s’agit pas de penser qu’un accord interviendra ainsi sur un simple claquement de doigt. Le problème est complexe faut-il le rappeler et y remédier demandera un peu de patience.

A l’heure où, on a le sentiment réel ou virtuel d’impasse, la solution passe d’abord par effacer les ressentiments et rancœurs. Ensuite, la restauration de la confiance, seul gage pour engendrer un accord accueilli avec bienveillance par les deux camps en débats. Enfin, aller chercher à l’origine les causes d’une crise et convaincre les uns et les autres à la prendre comme le fil conducteur de la discussion.

Avec le temps filant, qui encore a en mémoire "cette poudrière identitaire", formule trouvée par un Ivoirien pure souche, qui à l’époque avait pris la distance nécessaire lui ayant permis de situer d’où est venue la fracture nationale. Il ne faudra pas occulter, tous ces mis au banc de la nation et qui ne demandaient alors qu’un peu de reconnaissance. A une époque difficile, où l’humanité a oublié que c’est la considération de l’humain, qui cimente la cohésion et l’harmonie du monde, et sans verser dans un angélisme primaire, on veut se dire que Gbagbo et Soro sauront se mettre au-dessus des passions partisanes.

En prenant le pari de marcher au rythme des protagonistes ivoiriens, Blaise Compaoré fait de l’option de l’écoute et de se hâter lentement son credo. Les leçons du passé dictent pour beaucoup cette conduite.

Souleymane KONE

L’Hebdo

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