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Presse burkinabè : Les griefs de la mauvaise foi et de l’ignorance

Publié le vendredi 9 février 2007 à 07h26min

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Pour comprendre la facturation, il faut d’abord et avant tout admettre que l’information est une denrée. C’est la denrée de consommation courante par excellence. Et comme telle, elle a un prix, elle a son prix. L’information se vend ; elle s’achète.

De même qu’aucune personne ne peut consommer une bière, se procurer une chemise ou faire une course dans un taxi, encore moins se soigner dans une clinique sans bourse délier, de la même manière, cette personne ne pourrait voir publier dans la presse les activités qu’elle organise sans auparavant payer pour le reportage et la diffusion desdits événements. La presse a un coût. Elle coûte cher. Très cher même !

La fabrication d’un journal, support de l’information écrite et le montage d’une émission, support de l’information audio-visuelle suit un long processus qui requiert des compétences et des techniques et du matériau ; mais surtout des moyens humains et financiers considérables. C’est dire donc qu’un travail préalable est nécessaire pour récolter l’information et la publier. C’est donc une mauvaise foi que de critiquer le principe de la facturation en cours dans les journaux publics et privés notamment.

Des hommes et des femmes continuent de faire des griefs à la presse, essentiellement à la presse privée, au sujet de la facturation des reportages. Des hommes et des femmes qu’on serait loin d’accuser d’ignorance, car à même de savoir la réalité de la presse, surtout de la presse privée burkinabè. Alors, est-ce la mauvaise foi ou l’ignorance lorsqu’on entend les critiques de ces gens à la vue d’une facture de reportage ?

Hâtons-nous de dire que ce ne sont pas tous les reportages, loin s’en faut, qui sont facturés. Hâtons-nous également de dire que le principe de la facturation, tel qu’il existe au Burkina Faso aujourd’hui, est avant tout une question de survie pour la presse privée. On le sait, le coût de la publicité est dérisoire, comparativement au coût pratiqué dans beaucoup de pays de la sous-région ouest-africaine. Le Burkina Faso est l’un des très rares pays de la sous-région où le journal se vend à 200 F CFA.

La règle est que partout ailleurs on vous vend 8 ou 12 pages à trois 300 F CFA. Le coût de la publicité est par ailleurs l’un des plus faibles. Et pourtant, en tant que pays continental, tous les matériaux reviennent très cher. Au Burkina Faso, on a comme l’impression qu’on veut voir la presse privée disparaître à force de l’asphyxier par une fiscalité lourde.

Il convient de préciser, pour la compréhension de la suite de cette chronique, que chaque journal a une connaissance sociologique de son lectorat vis-à-vis duquel il a des engagements. Satisfaire ce lectorat est sa seule raison d’exister. Ce lectorat est exigeant, et ce n’est pas toutes les informations qui l’intéressent.

Les articles sur les ouvertures et clôtures des ateliers, les reportages sur les cérémonies de signature de conventions, etc., n’intéressent pas nécessairement le lectorat d’un journal privé. Ce qui n’est pas le cas pour la presse gouvernementale, ou presse d’Etat qui peut solliciter et obtenir l’aide de l’Etat, l’acquisition des d’équipement et dont le personnel est par ailleurs payé par le Trésor public. En dehors de la subvention annuelle que le Trésor public alloue aux organes de presse privée (la part, par organe varie entre 2 et 6 millions), celle-ci doit se battre seule pour assurer sa survie, sa promotion, payer son personnel, ses impôts, l’eau, l’électricité, le téléphone, etc.

Lorsque la presse privée est sollicitée pour couvrir une manifestation, c’est vraiment faire montre de mauvaise foi que de lui en vouloir si elle demande une juste rémunération du travail fait. La facturation d’un reportage doit être comprise comme une contribution au fonctionnement du journal. Deux catégories d’hommes et des femmes se présentent dans les locaux des organes de presse écrite ou audiovisuelle pour demander la couverture des événements qu’ils organisent. Il y a d’abord la catégorie de ceux qui sont à la recherche de preuves, de justificatifs, de témoignages pour leurs partenaires, nationaux ou étrangers. Les preuves, les justificatifs, sont des coupures de journaux, des photos et des bandes sonores qui permettent de convaincre les bailleurs de fonds.

Alors, on vent que la presse vienne battre le tam-tam pour aider à garantir ou à débloquer des fonds, sans aucune contrepartie pour elle. Cela ne semble pas juste. Par ailleurs, couvrir un événement facturé n’engage en rien le journaliste dans la narration des faits. Un séminaire, un atelier, une inauguration, une visite sur le terrain, ce sons des faits et rien d’autre et ces faits sont rapportés tels quels, sans commentaires.

En tout état de cause, là où il y a des informations, la presse est là, elle ne se fait pas prier pour se rendre sur les lieux parce qu’elle sait que ces informations intéressent au plus haut point ses lecteurs. Et puis, face à la forte demande des couvertures médiatiques, à laquelle la presse ne peut pas toujours faire face, il n’y a pas d’autres moyens que de les filtrer en instaurant le principe de la facturation pour les événements qui n’intéressent pas particulièrement les lecteurs. Autrement, la presse contribuerait à accréditer le reproche selon lequel elle ne parle que de séminaires, d’ateliers et d’inaugurations.

Les gens doivent comprendre aussi que la presse n’est pas toujours à la recherche de l’argent mais aussi à éduquer, sensibiliser, informer, distraire. Elle se bat aussi pour réaliser des dossiers, de grands reportages, faire des commentaires, des enquêtes sociales etc. Cela l’amène parfois dans les zones périphériques de Ouaga mais aussi dans d’autres villes. Et cela nécessite des moyens qu’elle doit trouver.

Il se trouve aussi des personnes pour accuser la presse privée de manque de courage pour n’être pas aller au fond des choses comme elles le souhaitent. Il s’agit ni plus ni moins que de gens qui veulent voir les journalistes manger leur piment à leur place. Au contraire, ce sont des personnes qui n’ont pas le courage de s’assumer elles-mêmes. La presse, dans ce dernier cas de figure, sert de moyen qui doit leur permettre de fantasmer.

Si au Burkina Faso, on veut mettre fin au système de la facturation des organes de presse privée, il importe dans un premier temps de l’exonérer de certains impôts, à l’instar de la presse d’Etat. Dans un second temps, il convient de lui trouver une fiscalité spécifique. Au Sénégal, un budget de un milliard de F CFA a été voté pour la promotion de l’ensemble de la presse sénégalaise. Au Bénin, c’est une subvention de 300 millions de F CFA qui est distribué annuellement à la presse privée. La presse privée burkinabè, en dépit de ses milles et un handicaps, fait des efforts pour se situer dans le peloton de tête dans la sous-région. Si nous nous disons fiers de cette presse, il y a un prix à y mettre.

"Le Fou"

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 16 février 2007 à 14:03 En réponse à : > Presse burkinabè : Les griefs de la mauvaise foi et de l’ignorance

    La majorite des clients de la presse comprend la facturation.

    Ce dont les gens se plaignent plus ce n’est pas la facturation mais la maniere de facturer. Elle se fait souvent a la tete du client. Plus on pense que vous avez bcp d’argent plus vous etes sur de player plus cher pour la meme couverture qu’un autre client moins fortune payerait a moindre prix. Et la ce n’est pas des questions de remises de 5% ou 10% qui font la difference entre les deux cas. Souvent on va du simple au double si ce n’est plus.

    La tele Nationale est passee championne dans les facturation a la tete du client. On ne tarde pas a vous lancer d’aller vous faire voir ailleurs si vous ne voulez pas payer. Mieux quand meme vous payez la "rancon" le travail est parfois fait a la hate et vous n’avez rien a dire parce que dira-t-on "vous ne vous y connaissez pas". Pourtant les clients voyagent et voient comment les couvertures payees sont publiees.

    En somme notre presse doit elle meme ameliorer son image en evitant des pratiques qui ressemblent beaucoup plus a du racket qu’a de la facturation honnete.

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