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Procès François Compaoré contre l’Evènement : "Ainsi donc, ce n’est pas lui"

Publié le mercredi 24 janvier 2007 à 07h54min

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Comme nous l’indiquions dans notre édition d’hier, le Tribunal de grande instance de Ouagadougou siègeant en matière correctionnelle a rendu son verdict dans l’affaire qui opposait François Compaoré au journal L’Evènement, le plaignant reprochant à notre confrère de l’avoir diffamé. Retour sur un procès qui s’est déroulé dans une ambiance « électrique » et parfois passionnelle.

D’entrée de jeu et comme pour dépassionner les débats au regard de la forte affluence et des « Youyou » qui ont salué l’entrée des prévenus dans la salle d’audience, le président du Tribunal, Seydou Millogo, a tenu à indiquer que ce n’était pas « le procès de la presse », qui était fait. Aussi a-t-il souligné que ce procès ne constituait pas une atteinte à l’exercice de la liberté d’opinion, mais visait à rétablir un citoyen qui s’estimait lésé et diffamé dans ses droits et sa dignité.

A peine la lecture des griefs faits aux prévenus terminée, (ceux-ci étaient accusés d’avoir porté atteinte à l’honneur et à la considération de M. François Compaoré par des écrits parus dans l’Evènement du 25 octobre 2006) que la défense soulevait une série de questions préjudicielles tendant à faire annuler le déroulement du procès.

Première exception de nullité, la non comparution de François Compaoré jugée « anormale » par les avocats de la défense au motif qu’elle portait une entorse au caractère contradictoire du procès pénal. « Faux » a rétorqué la partie civile, « François Compaoré n’étant pas prévenu, il n’est donc pas tenu de comparaître personnellement.

Tout au plus a-t-il l’obligation de se faire représenter, ce qui était le cas ». Même son de cloche au niveau du parquet pour qui le principe du contradictoire est établit et qui a demandé de « faire l’économie d’une polémique ». Autres exceptions soulevées par la défense, le sursis à statuer en attendant la clôture du dossier Norbert Zongo (sous-entendu que François Compaoré pourrait y être impliqué) et la régularité de la citation faite à Newton Ahmed Barry qui a « bafoué » les règles prescrites en la matière.

Autant d’arguments qui n’ont pas prospérés, le Tribunal s’étant borné à indiquer qu’il n’avait pas à connaître du dossier Norbert Zongo d’une part et les avocats de la défense ayant argué que Newton Ahmed Barry a reçu confirmation de la notification par huissier d’autre part. Et puis, l’article 553 du code de procédure pénale indique que « dès lors qu’une partie comparaît à l’audience, aucune nullité n’est recevable ».

« Nous n’avons pas l’intention de nuire à François Compaoré » Dès lors, le Tribunal pouvait joindre les exceptions au fond et l’audience proprement dite, commencer par l’audition des prévenus. Pour Germain Bittiou Nama ils écrivent sur cette affaire « depuis 1998 et ils n’ont pas « varié » dans leur position. Il ne voit donc pas « où ils ont diffamé, François Compaoré » et demande à la partie civile de « prouver » le fait incriminé. Son de cloche quasi-identique chez Newton Ahmed Barry qui a ajouté que « jusqu’à présent on pensait à lui sans le nommer et RSF vient de franchir le rubicon ».

Ils ont donc fait « une approche d’analyse et d’interprétation » des allégations de RSF, travail à l’issue duquel ils ont conclu que « la mise en cause de François Compaoré coule de source ». Germain Nama prendra le soin de préciser que c’est François Compaoré lui-même qui a porté atteinte à son honneur en ne portant pas à la connaissance de la justice la mort de son chauffeur David Ouédraogo.

Le parquet s’est offusqué de cette « légèreté », soulignant que RSF avait fait ces allégations pour les lui soumettre. Les ayant rejeté le 21 octobre 2006, le ministère public ne comprend pas que des journalistes s’en soit saisi pour porter ainsi « gravement atteinte » à l’honorabilité d’un citoyen. « La mort vaut mieux que la honte », a martelé le parquetier Adama Sagnon, qui a souligné par ailleurs que les prévenus n’avaient pas respecté le principe de la présomption d’innocence.

Qu’il plaise donc au tribunal de les condamner à « six mois d’emprisonnement avec sursis » et à suspendre la parution du journal pour une période de six mois. « La liberté de presse ne doit pas être confondue avec la liberté d’ivresse », a terminé le parquet, qui en a appelé à plus de « responsabilité » de la part des journalistes. La défense on s’en doute, a pris le contre-pied de tout cet argumentaire, préférant s’attarder sur la liberté « d’opiner » qui doit être reconnue à tous. S’appuyant sur la déclaration des Droits de l’homme produite par les révolutionnaires français le 4 août 1789, maître Prosper Farama a clamé qu’il fallait « laisser la plume libre ».

La liberté d’expression est aussi vitale pour l’homme que celle d’aller et de venir, et, en tentant de « l’assassiner » à travers ce procès, on porte un coup de frein au processus démocratique qui a cours dans notre pays. Un argumentaire déclamé sur un ton pathétique qui n’a pas ému le tribunal, lequel a condamné les prévenus comme nous l’indiquions dans notre édition d’hier. Auparavant, Germain Bittiou Nama avait tenu à indiquer qu’il « n’en voulait aucunément » à François Compaoré et qu’il n’avait jamais dit qu’il était « l’assassin » de Norbert Zongo. « Qu’il nous pardonne s’il l’a cru », toute chose qui a conforté la partie civile sur le fait « qu’ainsi donc, ce n’est pas lui ». Les inculpés ont néanmoins indiqué de concert avec leurs avocats, qu’ils allaient relever appel du jugement rendu.

Boubacar SY


Impression d’après-verdict

Après le prononcé du verdict, l’un des prévenus ainsi que l’avocat de la défense Bénéwendé Sankara se prononcent sur celui-ci.

Bénéwendé Sankara : « Nous avons décidé de relever appel parce que nous ne voyons pas où se situe la faute. Pensez-vous en tant que journaliste qu’il y a eu faute professionnelle. Absolument pas. J’ai fait mon travail et au moment où je vous parle je peux être poursuivi pour complicité de diffamation et vous aussi ».

Germain Bittiou Nama : « Nous n’avons pas l’intention de diffamer François Compaoré. Nous avons uniquement fait notre travail à la lumière de certains faits. C’est plutôt François Compaoré qui a porté atteinte à sa propre responsabilité en ne portant pas la mort de son chauffeur David Ouédraogo à la connaissance de la justice. Avec nos avocats nous allons relever appel de ce jugement.

Propos recueillis par B. SY

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 24 janvier 2007 à 21:24 En réponse à : > Procès François Compaoré contre l’Evènement : "Ainsi donc, ce n’est pas lui"

    Relever appel d’une telle décision clémente, alors que les prévenus après avoir reconnu les faits, ont, expressément demandé pardon, à l’audience publique, à Monsieur François COMPAORE, constitue, sans aucun doute, le conseil inadéquat des pseudos avocats de l’accabit de Me SANKARA et FARAMA. Je ne suis pas surpris de leurs bêtises habituelles et de leur hérésie procédurale. Ces deux avocats traduisent véritablement ce que les avocats ne doivent pas faire : « le procès de rupture ». Bref, de la meeeerrrde politique quoi.... Et je suis encore poli. Ange, France.

  • Le 25 janvier 2007 à 15:08, par herve En réponse à : > Procès François Compaoré contre l’Evènement : "Ainsi donc, ce n’est pas lui"

    mon oeil ANGE . ton impolitesse est meme caracterise`.si c`est ta facon de lire le droit nous avons besoin de toi pour la reouverture du dossier norbert .

    • Le 25 janvier 2007 à 22:21 En réponse à : > Procès François Compaoré contre l’Evènement : "Ainsi donc, ce n’est pas lui"

      Cher Hervé, le dossier Norbert Zongo peut être réouvert à tous moments en cas de faits nouveaux.
      Je vous mets au défi de rapporter ces faits nouveaux et, à ce moment, le Procureur prendra ses responsabilités.
      Le reste n’est que tergiversation politique alors que le droit doit garder sa sérénité et sa force légendaires. Ange, France.

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