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Onatel : La privatisation de trop ?

Publié le lundi 15 janvier 2007 à 07h43min

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Les nostalgiques d’un Office national des télécommunications toujours service public n’ont plus que leurs yeux pour pleurer. Les « mauvaises » langues disent qu’à force de « tout brader » le gouvernement burkinabè, dans sa frénésie à privatiser, a fait passer le joyau Onatel sous la coupe de Maroc Télécom.

Pour quelque 144 310 540 000 de francs CFA, cette société devient l’actionnaire majoritaire de la nationale des télécommunications en y détenant 51% du capital.

Maintenant que le vin est tiré, il faut le boire, mais les Burkinabè continuent d’exprimer des inquiétudes. Fallait-il obligatoirement vendre cette grosse et stratégique boîte alors qu’elle continue de prouver au monde entier que le public peut faire aussi de bonnes choses ?

Pour cette dernière privatisation, le gouvernement est comme pris dans son propre piège. Pendant longtemps, en effet, il a chanté que les sociétés qu’il vendait étaient boiteuses, et qu’il n’y avait que la privatisation pour éviter leur liquidation. Alors pourquoi le juteux Onatel passe-t-il, lui aussi, dans la casserole de la privatisation ?

Il ne serait pas faux d’écrire que dans ce cas précis, le pouvoir agit sous des injonctions. En tout cas, on a comme une impression de forcing utilisé par le gouvernement pour vendre coûte que coûte l’Onatel avant la date butoir du 31 décembre 2006.


Pour tous ceux qui ont suivi les péripéties de cette privatisation, la proposition de Maroc Télécom arrive trop juste pour ne pas susciter des interrogations. D’où la question de savoir pour qui roulent nos autorités ? Les excellents résultats de l’Onatel étaient tels qu’il n’y avait pas péril en la demeure. Le gouvernement aurait pu se donner encore le temps d’attendre une meilleure offre, celle qui, tout en misant gros, préserverait encore mieux les acquis sociaux de la boîte.

Le gouvernement a-t-il pris le soin de préserver l’avenir de cet important outil de développement de notre pays ? Certaines privatisations antérieures ne rassurent pas, bien au contraire. Or dans ce 21e siècle, siècle de communication par excellence, l’Onatel se devait d’être le moteur du progrès économique et social.

A-t-on la certitude que les repreneurs sont disposés à aller dans certaines zones plus reculées du Faso pour y promouvoir la téléphonie rurale alors que la rentabilité n’y est pas garantie ? Tout privé ayant d’abord les yeux rivés sur le profit - chose difficile à obtenir pour l’instant dans ces zones - l’Onatel nouvelle mouture ne devra-t-il pas faire le deuil du rêve « le téléphone pour tous les Burkinabè » ?

Il y a de gros risques, en effet, que l’actionnaire majoritaire ne concentre l’essentiel de ses investissements dans la promotion de l’Internet et d’autres services qui ne feront que l’affaire des seuls citadins. Et pourtant, il est indispensable que le territoire national se développe avec la téléphonie rurale pour donner un sens à la lutte contre la pauvreté. Autant de raisons qui suggéraient au gouvernement burkinabè de garder l’Onatel dans le giron du service public tout en renforçant sa capacité d’investissement en recourant, par exemple, à un emprunt dont tout porte à croire qu’il aurait été facile à obtenir au regard de la santé financière de la boîte.

En outre, avec ce qu’on sait de l’ardoise de l’Administration publique en termes d’arriérés de facture de communication, les 144 milliards annoncés risquent d’être un simple jeu d’écriture. En tout état de cause, si l’Etat a cédé l’Onatel pour disposer de l’argent frais pour prendre à bras le corps le combat pour plus d’écoles et de centres de santé au Faso, on ne devrait pas tarder à le sentir sur le terrain.

Maintenant, s’il ne s’agit que d’une privatisation pour plaire à l’extérieur, les autorités viennent de prendre une lourde responsabilité dont l’onde de choc se fera ressentir pendant plusieurs décennies encore, surtout si les quelque 1 300 travailleurs devaient connaître la moindre détresse.

Adam Igor

Journal du jeudi

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Vos commentaires

  • Le 19 janvier 2007 à 13:53 En réponse à : > Onatel : La privatisation de trop ?

    La privatisation en soi n’est pas forcemment un mauvais choix meme si par ailleurs l’Etat semble repondre a des injonctions.
    Le probleme reel est que l’Etat laisse toute la latitude aux repreneurs de nos societes de faire tout ce qu’ils veulent. C’est a peine si on sent la presence de l’Etat apres la privatisation. Pourtant c’est bien connu, la repartition des parts est de 51% pour le repreneur et 49% pour l’Etat. Il faut que pour une fois l’Etat ne baisse pas la garde. Il faut sauvegarder les interet de la nation apres la privatisation. Et cela va plus loin que le sort des travailleurs - qui soit dit en passant fait egalement partie des interets du Burkina

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