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Bilan du congrès du CDP : Ce que des militants demandent à Roch M.C Kaboré et Salif Diallo

Publié le lundi 18 décembre 2006 à 09h08min

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Salif Diallo et Roch Kaboré

Des militants du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) donnent dans l’écrit ci-dessous leur lecture du congrès ordinaire du parti, tenu du 9 au 11 novembre derniers à Ouagadougou. Ils sont formels : "Le populisme, le one man show, la démagogie, les airs de suffisance, les attitudes de desperado et de va-t-en guerre, les pulsions négatives incontrôlées n’ont pas leur place dans le nouveau bureau exécutif national".

"A la veille du congrès statutaire du CDP qui s’est tenu les 9, 10 et 11 novembre 2006 à Ouagadougou, nous avions porté à la connaissance des instances du parti et à toutes les opinions - nationale et internationale - notre compréhension de certains sujets sensibles en relation avec le mégaparti. Cette vision militante des choses avait été publiée dans le journal "Le Pays" dans sa parution n° 3744 du 8 novembre 2006. Nous nous devions de respecter la logique intellectuelle de notre démarche.

C’est pourquoi dans ces lignes qui suivent nous tirons les leçons de cette grande consultation interne en six points : la participation des militants au congrès, les débats qui y ont été menés, l’indiscipline au sein du parti, la promotion des cadres du parti, le nouveau bureau exécutif national, et la participation de l’ADF-RDA au gouvernement. Nous avons attendu que les lampions de cette grande manifestation s’éteignent et que la fièvre de ce congrès retombe avant d’entreprendre la présente démarche.

Avant de passer en revue ces différents points, permettez-nous de présenter nos remerciements les plus sincères à la Direction de publication du journal "Le Pays", qui a su accompagner notre démarche de contribution à la réussite de ce congrès. En écoutant les uns et les autres au cours de ces assises, nous nous sommes rendus compte que la grande majorité des congressistes partageaient sensiblement les mêmes préoccupations que nous.

La publication de notre écrit est la preuve que "Le Pays" est avec L’Obersavateur paalga, un des ces organes de presse qui participent effectivement à la promotion de l’expression plurielle, de la pluralité de l’expression et de la liberté d’opinion. Que de tels actes servent d’exemples pour que la démocratie rayonne dans notre pays et pour que la liberté de la presse ne soit un vain mot ! Comme pour emprunter la formule chère à Rabi Mitibkeita, passons à présent en revue les cinq points retenus :

De la participation des militants au 3e congres du CDP

La mobilisation sans précédent des militants venus de toutes les contrées du Burkina Faso a été, à notre avis, l’expression d’une certaine mutation profonde. Gigantesque aux allures de mammouth, le CDP était devenu au fil des temps, une pieuvre dont les tentacules ne répondaient plus au commandement du cerveau de l’animal.

Les libertinages, les airs de suffisance et autres morcellements du pouvoir politique étaient devenus monnaie courante et avaient achevé de transformer le CDP en un véritable no man’s land que l’on raccommode le temps d’une élection pour remporter des strapontins. Un tel climat porte en lui les germes de l’indiscipline, du clanisme, de la division et des complots tous azimuts. Le 3e congrès du parti a quelque peu bouleversé cette donne.

Dans un élan de solidarité et de prise en compte de la gravité de la situation, les militants ont donné l’image d’un malade conscient de son état de santé qui a recouru à ses dernières énergies pour trouver des ressources nécessaires qui pourraient le faire échapper la mort. Un parti ne doit pas se contenter d’être une machine électorale. Un parti c’est un comportement, une mentalité, une éducation, une pérennité de certaines valeurs acquises dans le temps et dans l’espace. C

es éléments constitutifs d’une grande formation politique ont été, à notre avis, retrouvés à ce congrès des 9, 10 et 11 novembre 2006. Ceci est à mettre à l’actif des organisateurs dudit congrès, en particulier SEM Blaise Compaoré, SEM Roch Marc Christian Kaboré, et le ministre d’Etat Salif Diallo dont nous saluons l’investissement personnel dans la réussite de l’événement.

Des débats en commissions et en plénières

De mémoire des rencontres organisées par le parti depuis sa création, nous pensons qu’il n’y a jamais eu de débats d’une très grande qualité comme ceux qui ont été entrepris lors de ce 3e congrès du CDP. Liberté de ton, liberté d’opinion, débat ouvert, évocation de tous les sujets même ceux qui peuvent fâcher, tels ont été les caractéristiques des débats à ces assises. Nous saluons cette grandeur d’esprit et ce début de rupture.

Ces principes fondamentaux de la démocratie dans un parti ont permis à beaucoup de militants de se prononcer sur les grandes questions du CDP. Toutefois, au nombre des problématiques qui ont été abordées, nous voudrions revenir sur l’une d’elles pour réaffirmer notre position militante. Il s’agit de la question de la ligne idéologique du parti.

A notre avis, cette question a été escamotée alors qu’elle constitue l’essence même d’une formation politique. La définition que la social- démocratie a connue au 3e congrès du CDP, nous parait écorchée, réductrice de la notion et quelque peu décalée avec les réalités politiques, économiques sociales de notre pays. Le président de la commission I a d’ailleurs été interpellé sur la question et un militant s’est vu obligé de faire un petit exposé théorique afin d’attirer l’attention de l’assistance sur les errements qu’une telle définition de la social-démocratie pouvait avoir, fût-eIIe conjuguée à l’imparfait et aux pratiques nationales du Burkina Faso.

Pour notre part, nous disons que les privatisations des sociétés d’Etat, les licenciements, notre attachement au NEPAD et à l’OMC, la libre concurrence, l’abandon du capitalisme d’Etat, les voitures de luxe, les constructions de chalets ou d’immeubles futuristes à la World Trade Center sont incompatibles avec une théorie de la social-démocratie. Nous pensons plutôt que nos pratiques convergent vers celles d’un social-libéralisme, d’un libéralisme social ou carrément d’un républicanisme social. Il y a même du centrisme de gauche se confondant parfois à un centrisme de droite dans nos comportements.

Bref, en essayant de qualifier notre ligne idéologique, vous aurez compris que nous-mêmes sommes plongés dans des doutes et des incertitudes. Ceci mérite un éclaircissement de la part de la Direction du parti pour que le voile soit levé dans ce sens. Par ailleurs, nous militons pour que le programme du CDP connaisse une large diffusion auprès des militants. Notre attachement au programme du Président Compaoré ne nous empêche pas de faire connaître notre propre projet de société qui évidemment est inspiré du "progrès continu pour une société d’espérance."

De l’indiscipline et des sanctions retenues

Nous saluons les conclusions du congrès sur ce chapitre de l’indiscipline. Effectivement, les militants doivent comprendre que le parti fonctionne sur la base d’un règlement intérieur, et que tout militant qui venait à enfreindre les prescriptions contenues dans cette sorte de loi fondamentale, s’expose à des sanctions exemplaires. Nous saluons le principe de délivrance des certificats de félicitations aux militants convaincus qui se seraient distingués dans ses pratiques quotidiennes, et nous proposons à la Direction du parti de ne pas attendre l’organisation triennale du congrès pour délivrer ces certificats.

Aux sessions du BP, ces distinctions peuvent se poursuivre pour encourager les militants dévoués et disciplinés. Nous sommes également favorables à la non publication, dans les organes de presse, de la liste des sanctionnés du parti. Notre parti doit apprendre à entretenir des rapports de respect envers tout militant qui s’est trompé. En s’amendant et en faisant leurs propres examens de conscience, ces camarades peuvent revenir au bercail. Cependant, nous regrettons amèrement que ces sanctions ne soient pas rétroactives pour s’appliquer aux camarades Zénabo Drabo et Pascal Ouédraogo dit Zindamba qui, à nos yeux, sont les véritables précurseurs d’une telle pagaille dans le parti.

De la promotion des cadres du parti

Nous nous félicitons de la recommandation que le 3e congrès a prise sur la promotion des cadres.

Cela veut dire que la valorisation des militants est une des préoccupations majeures de la Direction du parti. Notre position sur les ministres technocrates a connu une adhésion sensible au cours du congrès. Nous rappelons simplement qu’il serait désormais dommage que dans notre parti, il y ait des camarades qui mouillent le maillot pour que d’autres, du fait de leur proximité ou de leur amitié avec telle ou telle sommité du parti, se la coulent douce, sans la moindre reconnaissance des efforts consentis pour conquérir le pouvoir.

Voyez-vous, avec la stabilité, la paix sociale, la liberté d’opinion retrouvée et l’avancée radieuse de la démocratie, certains camarades ne se rappellent plus qu’au lendemain du 15 octobre 1987, l’étiquette de membre du Front populaire avait été dévalorisante, parfois même inhumaine. Composer avec le pouvoir de Blaise Compaoré était devenu synonyme de pactiser avec le diable. Ce sentiment de dégoût et de haine atteindra son pic avec les élections de 1992 où voter pour l’ODP-MT pouvait être considéré comme un acte d’accompagnement des assassins du peuple.

Cette culture de la haine connaîtra son degré le plus élevé avec les événements du 13 décembre 1998, où être militant du CDP rimait avec être le diable en personne. Il y a des cadres du parti qui ont vécu avec ces moments difficiles dans la vie d’un homme, qui ont bravé toutes ces étapes et qui sont restés fidèles au président Compaoré et au CDP. Ces camarades méritent respect et considération de la part de ceux qui ont pris le train en marche.

Loin de nous un discours lepéniste et divisionniste. Nous sommes pour le renforcement des potentialités de notre parti. Notre objectif est de demander à chaque camarade qui a eu la chance d’être appelé aux plus hautes fonctions de l’Etat de se soucier des autres militants de ce parti dont la majorité à l’Assemblée nationale a permis de les nommer. Ils devraient profiter de cette opportunité qui leur est offerte pour accroître les capacités mobilisatrices du parti.

Nous réaffirmons à la Direction du parti notre souhait de voir former un gouvernement composé essentiellement de ministres plus politiques, plus attachés aux idéaux du parti et plus rassembleurs dans leurs fiefs respectifs. Tenez, sur la liste de ministres technocrates que nous avions cités et qui pourrait se prolonger avec les camarades Hippolyte Lingani, Justin Koutaba et Boly Yéro, ils ne sont pas nombreux à s’être présentés aux assises du 3e congrès du CDP. Ceux qui se sont présentés ont brillé par leur volonté de ne pas s’afficher en portant les signes ostentatoires du parti - pagnes, tee-shirts, casquettes - Ce comportement est-il tolérable pour un militant de ce niveau ?

Du bureau exécutif national entrant

Comme tous les militants du parti qui ont assisté à ce congrès, nous félicitons le BEN sortant et nous acclamons le nouveau BEN. Nous félicitons les camarades Roch Marc Christian Kaboré et Salif Diallo pour leur reconduction à la tête du parti et leur demandons de ne pas tergiverser sur l’application du règlement intérieur du parti. Le respect strict des consignes que le congrès a retenues sur les sanctions disciplinaires, doit être leur cheval de bataille. Nous ne cesserons de répéter que tout militant qui ne respecte pas le CDP ne respecte pas Blaise Compaoré, et s’expose de ce fait à des sanctions exemplaires.

Nous déplorons certaines décisions du congrès qui ne nous ont guère donné satisfaction.

- La reconduction des commissaires politiques du Centre-Est et du Sahel. Dans notre précédente contribution, nous avions indiqué l’urgence et la nécessité de se pencher sur certaines coordinations régionales qui présentaient un motif sérieux de réflexions profondes. Trois de ces régions ont connu un changement de commissariat politique. Nous ne sommes que des militants du parti à qui il ne revient pas de statuer sur la nomination des commissaires des deux autres régions citées, mais nous tenons à attirer l’attention de la Direction du parti que les coordinations régionales du Centre-Est et du Sahel connaissent des turbulences graves. Les applaudissements nourris et parfois frénétiques au cours des plénières du congrès à l’appel de certains noms ne reflètent guère la quiétude. Et nous ne sommes pas sûrs que la nomination des commissaires politiques adjoints changeront les choses.

- Certains camarades ont connu des déboires électoraux aux dernières municipales dans leur province. A notre grand étonnement, leurs noms figurent toujours sur la liste des membres du BEN. Faut-il craindre ici les vieux démons du copinage et du parrainage aveugle ? Sinon, comment comprendre que le camarade Dieudonné Bonané soit maintenu sur les tablettes de la plus grande instance du parti alors qu’il est en perte de vitesse dans son Sourou natal ?

Nous remarquons que certains camarades tels que Seydou Bouda et Tamini Pascaline ont été enrôlés au BEN à une vitesse exponentielle comme pour rattraper l’insuffisance politique relevée par notre thèse sur l’amateurisme politique de certains ministres. Le problème demeure car aussi vrai que les ministres Bouda Seydou et Pascaline Tamini sont des cadres talentueux et dirigent brillamment leurs départements, il n’en demeure pas moins qu’ils sont méconnus des structures du parti de leurs provinces d’origine. Ceci est valable pour les camarades Odile Bonkougou et Aline Koala que l’on a vite fait d’élire au BP pour colmater les brèches. Il y a eu un peu de bricolage dans ces nominations.

La promotion en fonction du système pyramidal n’a pas été respecté. Nous notons que le camarade Benoît Ouatara a été appelé à la tête des Cascades. Nous faisons confiance à la Direction Nationale qui dispose de raisons valables pour le faire. Il faudra que les uns et les autres nous comprennent sur cette question de promotion sur la base du mérite, de la conviction et de l’expérience. Nous sommes tout simplement partisans de renforcement des capacités de mobilisation en qualité et en quantité. Nous sommes surtout partisans de la promotion de l’élite du parti.

- Depuis un certain temps, des bruits se font de plus en plus persistants sur une discorde entre les camarades Salif Diallo et Yonli Paramanga. Vrai ou faux, toujours est-il que nous avons pu noter nous- mêmes au congrès que l’ambiance n’est pas si cordiale entre les deux camarades. Ce sujet dépasse les compétences de simples militants que nous sommes, mais nous voudrions faire appel aux grandes qualités humaines que chacun de nous reconnaît surtout au camarade Salif Diallo pour que cette passe d’armes prenne fin. Le Président Kaboré devrait s’investir dans ce sens afin de nous éviter de tomber dans des pratiques inutiles d’auto- dérision ou d’autoflagellation.

- L’arrivée de certains camarades comme Dim Salif Sawadogo et Simon Compaoré nous inquiète à plus d’un titre. Dans un proche passé, on se rappelle que ces camarades s’étaient négativement illustrés en prenant des libertés sur certaines questions sensibles de la vie du parti. Nous ne reviendrons pas sur les déclarations quelque peu précipitées survenues après les événements du 13 décembre 1998, les airs de grandeur du temps de l’Inspection Générale au Contrôle Immobilier - IGCI - et des enquêtes parlementaires de 1996 qui pourraient être cités comme exemples de ces insuffisances énormes et grotesques.

A l’heure où le parti cherche à rassembler très large et à discipliner ses militants, ces deux camarades seront-ils en mesure d’opérer une mutation nécessaire et juste dans le sens de la cohésion au sein du BEN ? Dans tous les cas, le populisme, le one man show, la démagogie, les airs de suffisance, les attitudes de desperado et de va-t-en guerre, les pulsions négatives incontrôlées n’ont pas leur place dans ce nouveau BEN.

De la participation de l’ADF-RDA au gouvernement

Dans notre dernière contribution, nous avions marqué en outre notre souhait de voir se former à l’avenir des gouvernements débarrassés de toutes intrusions politiques quelconques. Nous voyons à présent que plus on se rapprochera des législatives de 2007, plus il faudra résoudre une des plus grandes équations de notre gouvernance politique actuelle. Il s’agit du statut de l’ADF-RDA. Si l’ADF-RDA est un parti de la mouvance présidentielle, le CDP la traite comme tel au même titre que l’UPR, le MOP, le PARI, etc.

Mais si l’ADF-RDA veut se considérer comme un parti de l’opposition, il n’y a plus de raison qu’elle se présente aux législatives de 2007, avec presque les mêmes armes que le CDP. Comme dirait une célébrité de notre pays, on ne saurait clamer haut et fort être des fantassins aux ordres d’un général sans reconnaître son armée face à laquelle on a essuyé un cuisant revers. A moins que le Président Compaoré nous prouve le contraire, nous pensons que son gouvernement actuel n’est ni un gouvernement de crise, ni un gouvernement de protocole, ni un gouvernement d’union nationale. C’est un gouvernement de majorité parlementaire. Il faudra donc élucider cette question, car elle prête à confusion.

A notre avis, l’ADF-RDA ne peut plus participer au gouvernement de Yonli. Nous ne doutons pas que des accords ont été passés au plus niveau pour aboutir à un tel ralliement mais les contextes politiques fluctuent avec le temps. Entre août 2005 et décembre 2006, beaucoup d’eaux ont coulé sous les ponts. Les municipales d’avril 2006 sont passées par là et nous ont prouvé que l’ADF-RDA n’avait rien apporté ou très peu au score de 80,35% du Président Blaise Compaoré. Aujourd’hui ce parti constitue un véritable boulet pour notre démocratie. Un réajustement s’avère nécessaire. A bon entendeur, salut.

Au revoir camarades militantes et militants et à bientôt en 2009. Inch Allah"

Ont signé, les mêmes militants de la province du Kadiogo qui avaient apporté leur contribution à la veille de l’ouverture du 3e congrès du CDP : Nikièma Salfo - secteur 2 de Ouagadougou, Ouédraogo Bila Xavier - secteur 7 de Ouagadougou, Tiendrebéogo Gilbert - secteur 9 de Ouagadougou, Bambara Charlemagne - secteur 14 de Ouagadougou, Bako Ghislain - secteur 15 de Ouagadougou, Pierre Nabaloum de Bassinko, Claude Guigemdé de Pabré et Sawadogo Serge - secteur 24 de Ouagadougou ¬

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