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Projets et programmes : Pour un développement collectif ou individuel ?

Publié le vendredi 15 décembre 2006 à 07h23min

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La quatrième Assemblée générale des chefs de projets a révélé tout le paradoxe qui entoure les chantiers de développement au Burkina Faso. Au nom de la lutte contre la pauvreté, les technocrates et autres éclairés chargés d’exécuter les programmes et d’apporter le bien-être aux populations sont ceux-là mêmes, qui s’épanouissent à une vitesse exponentielle tandis que les principaux bénéficiaires croupissent dans leur légendaire misère.

Réalisant cette contradiction, le Premier ministre, Paramanga Ernest Yonli a saisi les assises des chefs de projets du 4 au 5 décembre 2006 pour les rappeler à l’ordre : « Réduisez votre train de vie ». Cette intervention du chef de gouvernement doit sonner comme un gong d’avertissement au « Cercle très puissant et très fermé » des chefs de projets. Et Paramanga Ernest Yonli d’ajouter courageusement : « L’aide au développement doit réellement revenir aux principaux bénéficiaires, les populations-cibles ».

L’aide publique au développement annuelle accordée au Burkina Faso est estimée à environ quatre cents (400) millions de dollars US, soit deux cents (200) milliards F CFA. Ces ressources financières ont permis de lancer plusieurs projets et programmes dans divers secteurs socioéconomiques à travers toutes les régions du pays. Mais combien de ces chantiers atteignent véritablement leurs objectifs de développement ? Ils sont peu.

Tout semble bouger dans la localité pendant l’exécution du projet. Mais tout le monde redoute sa fin. L’appropriation des actions de développement par les populations demeure une préoccupation. Combien de chefs de projets respectent réellement les 10% dévolus aux frais de fonctionnement dans le budget alloué à la réalisation du projet. Charges de personnel, (salaires, missions, motivations), dépenses courantes (eau, électricité, téléphone...) passent prioritairement devant les investissements sur le terrain pour contribuer au bien-être des populations.

A cela, s’ajoutent les rutilantes 4 x 4 et les salaires exorbitants. Conséquence, le progrès se lit à l’oil nu chez ceux chargés d’exécuter les projets alors que pour s’en apercevoir auprès des bénéficiaires, il faut un minutieux exercice de suivi et d’évaluation. Servir devient se servir au détriment du progrès collectif.

Ce qui est destiné aux zones rurales se retrouve ainsi dans les grands centres urbains car investi dans de grosses voitures et de belles villas. Ce paradoxe observé dans la conduite du processus de développement donne quelque part raison à René Dumont et à Axelle Kabou respectivement auteurs des deux ouvrages : « L’Afrique noire est mal partie », « Et si l’Afrique refusait le développement » ? Des réflexions qui montrent qu’au-delà de toute approche ou modèle, le développement est avant tout une affaire de conviction, de volonté, de sacrifice et surtout de mentalité.

Et c’est à la lecture de ces ouvres que Paramanga Ernest Yonli, invite les chefs de projets et de programmes de développement à mieux cerner leurs missions : « Il me semble utile de rappeler que les projets de développement doivent être gérés dans les conditions du Burkina Faso. Face au constat que seule une faible part des budgets affectés aux projets atteint véritablement leurs bénéficiaires, les dépenses de fonctionnement, trop souvent et trop injustement élevées, doivent baisser au maximum ». Ils doivent se référer à l’histoire, à Axelle Kabou et à René Dumont pour recadrer le tir.

Et s’apercevoir que l’on a beau engloutir jadis des milliards pour le développement des régions du Sahel et du Nord burkinabè, le retard que l’on a voulu combler demeure toujours. En réalité, l’argent a été utilisé à d’autres fins autres que le progrès de ces localités, le bien-être des populations. Le développement d’un pays signifie que tout progresse dans la Nation, que les populations avancent collectivement et non individuellement.

Jolivet Emmaüs

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 15 décembre 2006 à 13:56, par Aemed. En réponse à : > Projets et programmes : Pour un développement collectif ou individuel ?

    Chers amis,
    Suis vraiment heureux de constater que des voix se lèvent pour dénoncer un fait qui a été longtemps décrié mais qui persiste, génération après génération. On constate de plus en plus que l’homme a tendance à croire qu’il est le seul qui doit tirer avantage de toutes les situations qui se présentent à lui, tel est puissant son égot, et n’ écartant rien du tout pour parvenir à son but. Il oublie très souvent son soi même pour se tranformer en un autre être se comportant comme un loup au milieu d’un troupeau de bétail. Le moi inconditionnel nous fait ignorer la réalité des autres personnes qui nous entourent. L’histoire du Burkina Faso ces 20 dernières années doit nous donner à réfléchir et tenter de ne pas souiller ce joli nom qu’a ce pays. Un constat est que nous sommes entrain de perdre ce sens solidaire et d’honêteté qui nous caractérise, pour nous tourner uniquement vers le profit (individuel) et cela est bien domage. A mon niveau je ne parle pas seulement de l’ADMINISTRATION PUBLIQUE, car la même situation se rencontre au niveau de la Société Civile.
    Je souhaite que nous prenions tous concience de cette tare qui mine notre société afin que nous puissions nous dire tous les jours en nous levant que nous avions bien rempli notre mission et être heureux de voir les réels bénéficiaires des differents projets encore plus heureux que nous mêmes. Me dira t-on que cela est une utopie voir les choses de cette manière mais sachons que la morale nous y oblige.
    Mes salutations cordiales.

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