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Benoît XVI en Turquie : La main-tendue du Pape

Publié le vendredi 1er décembre 2006 à 07h38min

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Le Pape Benoît XVI séjourne en Turquie. Il a profité de son voyage dans ce pays au Carrefour de l’Occident et l’Orient pour prêcher pour un monde où Chrétiens et Musulmans cohabitent dans la diversité religieuse. En outre, il a souhaité l’adhésion de ce pays musulman à l’Union européenne. Reste à souhaiter que la main-tendue du Souverain pontif soit bien perçue des musulmans.

Le voyage du Pape Benoît XVI en Turquie est chargé de symboles. D’abord parce que c’est un Turc, Mehmet Ali Agça, qui a tenté en 1981 d’assassiner le Pape Jean-Paul II en tirant sur lui à bout portant Place Saint Pierre de Rome. Ensuite parce que Benoît XVI, alors Cardinal Joseph Ratzinger en 2004 s’est déclaré contre l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne.

Enfin, parce que les propos tenus par le souverain pontife en septembre dernier à Ratisbone, en Allemagne sont encore dans les mémoires. Il avait mis en cause les risques de violence au sein de l’Islam en se référant aux propos d’un empereur Byzantin du XIVe siècle.

Cette déclaration avait suscité une indignation au sein des musulmans. Une vague de manifestations à travers tous les continents eu lieu. La Turquie a été l’un des plus virulents dans la critique des paroles de Benoît XVI. Cette colère de milliers de personnes ne s’est pas encore apaisée. Ils ont manifesté contre la venue du souverain pontife en Turquie.

Pour éviter tout dérapage, les autorités turques ont pris toutes les mesures sécuritaires pour garantir le bon déroulement du séjour du Pape. Trois mille policiers ont quadrillé la capitale pour endiguer toute manifestation. Tireurs embusqués, artificiers, forces antiterroristes, policiers anti-emeutes sont en veille. Des hélicoptères de la police survoleront Ankara, Istanbul et Izmir. Des commandos de la marine patrouilleront quant à eux dans le détroit du Bosphore.

Les forces de sécurité turques ont déjà assuré la visite de personnalités tels que Bush et Clinton mais cette fois, ils émettent des craintes malgré un dispositif sécuritaire plus renforcé. Cela parce que le 2 novembre, un homme a tiré des coups de feu devant le consulat italien en Turquie pour protester contre la venue du Pape et menacé de l’étrangler avant d’être arrêté. Aussi, des groupes musulmans extrémistes sont actifs en Turquie. Al Quaïda est même cité, ces derniers sont accusés d’avoir tué cinquante huit (58) personnes dans une vague d’attentats suicides contre des synagogues et des intérêts britanniques à Istambul il y a trois ans.

Des observateurs notent par ailleurs que le N°2 d’Al Quaïda, Ayman al Zawahri compare le souverain pontife au Pape Urbain II qui avait ordonné la première croisade. Déjà le cinq (5) février, un adolescent turc a tué le prêtre italien Andrea Santoro à Trabzon, ville portuaire sur la mer Noire ; Deux autres ecclésiastiques catholiques avaient ensuite été attaqués en Turquie. Ces incidents seraient liés à l’affaire des caricatures de Mahomet qui avaient déclenché de vives protestations chez des musulmans.

En sus de ce sentiment d’hostilité, un récent roman turc « attentat contre le Pape » de Yucel Kaya évoque un vaste complot de l’Opus dei, de la Loge maçonnique italienne P2 et des services secrets américains contre le souverain pontife. Selon lui, ce complot a pour objectif de lancer une attaque contre l’Iran. La couverture du livre montre Benoît XVI mis en joue par un homme barbu avec le sous-titre « Qui tuera le Pape à Istambul ».

La détermination du Pape

En tous les cas, le Pape Benoît XVI ne s’attendait pas à une visite de tout repos et il sait que pour apaiser la tension entre lui et le monde musulman, il faut braver les obstacles. C’est ce qu’il a fait en se rendant dans ce pays au carrefour de l’Occident et de l’Orient. Mais cette fois, avec une autre vision que celle de ses premières opinions.

En effet Benoît XVI est allé jouer la carte de l’apaisement. Lors de sa rencontre avec le grand mufti Ali Barda Koglu, le Pape a souligné la nécessité pour les chrétiens et les musulmans de se connaître mieux, de respecter leurs différences et de reconnaître ce qu’ils ont en commun : « Nous croyons au même Dieu, bien que de manière différente ».

Appelant de ses vœux à un dialogue sincère et à un échange entre amis avec « optimisme et espoir ». Le chef du gouvernement turc, Tayyip Erdogan s’est félicité du message du Pape à l’adresse de l’islam.

Pour lui, le souverain pontife a réitéré qu’il considère l’islam comme « pacifique et affectueuse ». Le Pape Benoît XVI multiplie les gestes d’apaisement à la célèbre mosquée bleue d’Istambul. C’est seulement la seconde fois qu’un Pape pénètre dans une mosquée, après Jean Paul II en mai 2000 aux Omeyyades à Damas en Syrie.

La rencontre du souverain pontife avec le patriarche de Constantinoppe Bartholomée Ier, le représentant des orthodoxes revêt aussi une grande importance. Les deux hommes doivent publier aujourd’hui 30 novembre une déclaration commune pour démontrer leur volonté de réconcilier leurs branches séparées depuis un millénaire.

Cette initiative pourrait éventuellement constituer un premier pas vers une rencontre de Benoît XVI avec le patriarche Alexis II, chef de l’Eglise orthodoxe russe, passage obligé pour un rapprochement entre catholicisme et orthodoxie. La visite du Pape dans un pays où les chrétiens sont moins de cent mille, soit 0,15% de la population n’est pas seulement à vocation religieuse. Il a souhaité l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne.

C’est vrai que Benoît XVI ne fait pas de calcul comme les politiciens qui ne voient pas en la Turquie qu’un marché potentiel pour l’Union européenne. Pour lui il s’agit d’admettre la Turquie au sein d’une communauté où toutes les religions cohabitent. Les autorités turques, en tous les cas, ont vu dans ce geste du Pape, un signe d’apaisement.

Le Premier ministre turc dont le pays frappe avec insistance à la porte de l’UE en grande partie réticente a opté en dernière minute seulement, pour une entrevue en coup de vent avec le Pape avant de se rendre au sommet de l’OTAN à Rifa.
Il en a été gratifié. Le Pape a donné sa « bénédiction » à la candidature turque.

Ainsi, après les nombreuses excuses présentées au musulmans de Ratisbonne, le Pape a fait un pas où il met en avant la paix, la réconciliation des cœurs et démontré que Rome ne voudrait pas d’une crise civilisationnelle ou religieuse. Aussi, cette démarche du Pape mettra un baume dans les cœurs meurtris des musulmans.

Hamadou TOURE

Sidwaya

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