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Condoléances de la Côte d’Ivoire : Un acte de mépris

Publié le mardi 6 avril 2004 à 05h27min

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Après avoir semé la mort et la désolation dans les rangs des
Burkinabè vivant en Côte d’Ivoire à l’occasion de la répression
sanglante des manifestations du 25 mars dernier, le président
de ce pays a, par la voix de son ministre de l’Intégration,
présenté ses condoléances au gouvernement et au peuple
burkinabè.

Et c’est chaque fois ainsi : après avoir causé du tort à
nos ressortissants, un officiel ivoirien vient, confiant et conscient
de la magnanimité légendaire du Burkinabè, déclamer des vers
de réconciliateur, et le tour est joué.

Souvenons-nous que le
ministre ivoirien des Transports avait affiné un argumentaire
pour convaincre les autorités politiques et les opérateurs
économiques du Faso que désormais le mal des tracasseries
routières était aplani et que les transporteurs pouvaient, sans
crainte, se réapproprier le corridor ivoirien. A l’expérience, ce
corridor s’avère le plus redoutable pour tout Burkinabè voulant
se rendre en Côte d’Ivoire pour quelque affaire.

A force d’être trop scrupuleux, nous confortons le complexe de
supériorité légendaire qu’une frange d’Ivoiriens a toujours nourri
à notre égard. Voilà un pays, le Burkina Faso, dont on accable
les ressortissants à l’extérieur et que l’on vient ridiculiser de
l’intérieur. Et la présente démarche des autorités "ivoiritaires"
s’inscrit dans cette logique. La présentation des condoléances
telle qu’il nous a été offert de voir est indécente. Elle est venue "
ex-nihilo", alors qu’elle aurait dû être le couronnement d’un long
processus.

La reconnaissance officielle de la responsabilité du
gouvernement ivoirien dans ces victimes et les excuses
devaient normalement précéder les condoléances . Au lieu
d’adopter cette démarche qui est conforme à la morale, l’on
tente de nous convaincre que ces massacres sont à mettre sur
le compte d’éléments infiltrés qui ont entraîné des "dérapages".
Mais l’on doute que des "éléments infiltrés" aient piloté des
hélicoptères MI-23 et des avions Sukoy pour répandre la mort.

De tous les pays africains, le Burkina Faso est celui qui paie le
plus lourd tribut à la crise ivoirienne. Aucun autre pays n’a perdu
autant de ressortissants dans le bourbier ivoirien. Mais il
appartient aux autorités burkinabè de taper du poing sur la table
si elles veulent que les choses changent. Il faut adopter le
comportement approprié à la situation. Les règles
diplomatiques de bienséance ne doivent pas être le moteur
exclusif des échanges avec les émissaires ivoiriens.

A côté de
l’accueil par le Burkina Faso d’en haut, il faut inclure celui du
Burkina Faso d’en bas. Dominique de Villepin, lors de son
voyage en Côte d’Ivoire, a eu droit à l’accueil des " jeunes
patriotes" qui n’ont pas manqué de saisir cette occasion pour
dire ce qu’ils pensaient de la gestion que la France fait du
problème ivoirien. A ce niveau, la société civile burkinabè a un
rôle à jouer. Il n’est pas suffisant de faire des déclarations
ponctuelles dans la presse à l’occasion de tout nouveau
dérapage du régime de Gbagbo. La venue d’un de ses
émissaires doit être une occasion à travers laquelle, le
sentiment profond du peuple doit se manifester concrètement
sur la place publique.

A-t-on idée de la colère populaire qui
accueillerait un officiel Israëlien parti présenter ses
condoléances au peuple palestinien suite à des assassinats ?
Une telle visite est impensable au regard des risques encourus
par son auteur.

Pour donner du répit aux Burkinabè de Côte d’Ivoire, le Faso a
intérêt à changer de mode de gestion de la crise ivoirienne. Les
Français ont compris cela : ils ont menacé d’intervenir si des
ressortissants français sont victimes d’exactions. Le résultat est
qu’aucun Français n’a jusqu’à présent, été recensé parmi les
victimes directes ou collatérales des massacres du 25 mars.

Le
Burkina Faso, quant à lui, peut jouer sur la corde sensible de
l’économie. Ce pays compte beaucoup pour la Côte d’Ivoire sur
le plan économique. Ainsi, le ressort essentiel des différentes
démarches des autorités ivoiriennes à l’endroit du Burkina Faso
est la question économique. C’est cela qui les intéresse au
premier chef et non la vie de nos compatriotes.

Venu présenter
des condoléances, Mel Eg Théodore n’a pas manqué de faire
un clin d’oeil à la relance de la Commission mixte
ivoiro-burkinabè. Une démarche grossièrement indécente eu
égard à la gravité de la situation. Laurent Gbagbo et ses
hommes savent qu’ils ne peuvent pas se passer de commercer
avec le Burkina.

Mais avant que l’activité commerciale puisse
produire tous les effets escomptés, il faut d’abord protéger les
droits fondamentaux des résidents en Côte d’Ivoire, et le droit le
plus fondamental est le droit à la vie.

Mais, tant qu’au Burkina les autorités publiques et les
composantes de la société civile continueront d’avoir ce
comportement d’extrême gentillesse à la limite de la démission,
les Ivoiriens ne changeront pas de regard. Un regard qui n’est
que le reflet du mépris qu’ils ont à notre endroit.

"Le Pays"

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Vos commentaires

  • Le 6 mars 2006 à 11:21, par Sally En réponse à : > Condoléances de la Côte d’Ivoire : Un acte de mépris

    Je félicite l’auteur de cet article : Condoléances de la Côte d’Ivoire : Un acte de mépris

    Depuis très longtemps je souffre et je bouillonne quand j’analyse l’attitude de nos autorités face à la crise ivoirienne.
    D’abord je voudrais leur dire qu’ils sont tous des irresponsables !! et c’est triste !
    J’ajoute que c’est parcequ’on n’a pas encore égorgé leur femme ou leur fils sous leur yeux qu’ils pensent
    au côté économique de la crise !
    Un seul burkinabé tué en côte d’ivoire c’est trop !!!
    Tout le monde sait que quand on dit que la côte d’ivoire est riche, c’est parceque des burkinabé sont au travail dans les champs de banane, de café et de cacao.
    Tout le monde sait que quand on dit que la Côte d’ivoire est le pillier de l’UEMOA, c’est parceque des burkinabé sont au travail dans les champs de banane, de café et de cacao.

    Mais tout le monde sait que des centaines de burkinabé ont été tué en côte d’ivoire.

    J’ai honte de moi en tant que burkinabé.
    Et je ne pardonnerai jamais aux autorités actuelles de mon pays pour le sang du Burkinabé versé en côte d’ivoire.

  • Le 31 août 2006 à 14:40, par bigzoum En réponse à : > Condoléances de la Côte d’Ivoire : Un acte de mépris

    95/100 de militants du RDR sont burkinabe.s’ils se mellent de nos petards ons les farcie piannnnnnnnn

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