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Assassinat du président Juvénal Habyarimana : Le Rwanda est-il l’Israël des Grands Lacs ?

Publié le vendredi 24 novembre 2006 à 07h45min

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Juvénal Habyarimana

S’il y a un sujet qui va longtemps encore occuper les colonnes des journaux, c’est bien le débat né de la recommandation du juge antiterroriste Jean-Louis Bruguière de poursuivre le président rwandais, Paul Kagamé, devant le tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), pour sa participation présumée à l’attentat du 6 avril 1994 contre l’avion de son prédécesseur Juvénal Habyarimana.

Selon une source judiciaire, le magistrat a demandé, vendredi dernier, dans une ordonnance de soit-communiqué transmis au parquet, l’avis du ministère public sur les arrestations de neuf membres de l’entourage du chef de l’Etat rwandais dont le chef d’état-major de l’armée, dans le cadre de son enquête sur le fameux attentat.

Le parquet, ainsi que le demandait le juge Bruguière, a alors requis l’émission de mandats d’arrêt internationaux contre les personnes dont il est question.

Son enquête sur l’attentat d’avril 1994, on se rappelle, le juge français l’avait ouverte à Paris quatre ans après, à la suite des plaintes déposées par les familles des coopérants qui conduisaient le Falcon 50 offert par la France.

Le génocide rwandais qui a opposé les Hutu aux Tutsi est parti de là pour ne se terminer qu’après la victoire militaire du Front patriotique rwandais (FPR), créé en 1987-1988 par le chef historique Fred Rwigema, vieux compagnon de Paul Kagamé, qui lui succéda d’ailleurs à sa mort en 1990.

Le bilan de ce carnage a fait état d’environ 800 000 morts selon l’Organisation des Nations unies (ONU) et depuis, tout a été mis en œuvre pour panser les plaies.

Les termes de l’enquête du juge Bruguière viseraient les rebelles du FPR parmi les responsables de l’attentat et l’identité de certains témoins a depuis plusieurs années été révélées dans la presse, mais aucune information officielle n’a été communiquée à ce sujet.

Dans cette affaire, Paris et Kigali se sont toujours regardés en chien de faïence et le rebondissement causé par la dernière sortie du magistrat Bruguière ne pouvait qu’exacerber les points de vue. Difficile de désigner un coupable et une victime.

Autant il est complexe de prouver que l’homme fort de Kigali est le principal instigateur de l’attentat contre l’avion d’Habyarimana, autant il est risqué de disculper Paris quant à sa responsabilité dans l’imbroglio créé dans les Grands Lacs, lui qui est à son tour accusé d’avoir été à l’origine de l’entraînement et de l’armement des auteurs du génocide et d’avoir favorisé la fuite des véritables responsables des massacres dans le cadre de l’opération militaro-humanitaire organisée par la suite au Rwanda.

Ni l’un ni l’autre ne semble blanc comme neige et c’est d’ailleurs pour quoi il serait judicieux pour chacun en ce qui le concerne, de battre sa coulpe. Bien malin celui qui dira à quand la cicatrisation des profondes blessures provoquées par le génocide.

Tout doit conduire à un mea-culpa collectif, donc un repentir absolu et sincère. Ce qui est arrivé aux Rwandais ne laisse pas indifférent.

Il suscite plus que de la compassion, mais il ne manquerait plus que ces derniers s’illustrent en Juifs de l’Afrique, à l’image de ceux de l’Etat hébreux qui ne peuvent être critiqués sans qu’on ne vous soupçonne d’antisémitisme.

Sur cette question d’attentat qui met le Rwanda et son emblématique président, Paul Kagamé, au devant de la scène, la France ne saurait être un donneur de leçons, mais de là à lui refuser son droit le plus absolu de participer à la manifestation de la vérité, il y a peut-être un pas qu’on ne pourrait allègrement franchir.

Kagamé n’a pas manqué de qualifier monsieur Bruguière de politicien, d’imposteur..., mais en dehors de toute considération politique et politicienne, les droits de l’homme restent universels et c’est pour cela que le cas rwandais mérite qu’on s’y intéresse sérieusement.

D. Evariste Ouédraogo

L’Observateur Paalga

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