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Affaire Norbert Zongo : "La justice ne doit pas être au service de clans"

Publié le mardi 31 octobre 2006 à 08h48min

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Nous avons reçu du Collectif des organisations démocratiques de masse et de partis politiques, la lettre circulaire directive n° 41 ci-dessous qui porte sur l’évolution du dossier Norbert Zongo.

Compagnons de lutte,

Le 18 juillet 2006, le juge d’instruction chargé du dossier Norbert Zongo, Wenceslas llboudo, a pris la grave décision de prononcer un non-lieu pour Marcel Kafando, unique inculpé dans ledit dossier et en étendant ce non-lieu à X.

En rendant cette décision de non-lieu, le juge Wenceslas llboudo a également décidé de déposer le dossier au Greffe du tribunal de grande instance de Ouagadougou pour, dit-on, être repris en cas de faits nouveaux. Dans le jargon juridique, on dit qu’il s’est dessaisi du dossier, tout en prenant soin de le clôturer. Le 16 août 2006, la Chambre d’accusation de la Cour d’appel de Ouagadougou présidée par le juge Georges Sanou, statuant sur appel de la partie civile, a continué l’ordonnance de non-lieu du juge Wenceslas Ilhoudo. C’est clair : pour le pouvoir de la IVe République, le dossier Norbert Zongo est enterré.

Ainsi, après huit (8) années de tergiversations, de fuite en avant, de faux fuyants, la justice burkinabé, tenue en laisse par le pouvoir de la IVe République, pense le moment enfin venu d’enterrer un dossier plus que encombrant pour lui ; celui du journaliste émérite Norbert Zongo, directeur de publication de l’hebdomadaire "l’Indépendant". En effet, comment un dossier déposé sans aucune enquête, sans aucune instruction, peut-il révéler des faits nouveaux lorsqu’un juge doté de tous les moyens financiers, matériels et humains, pendant sept ans d’instruction n’a pu rien faire ?

Les masses populaires ont, légitimement et de manière multiforme, réagi à cette cascade de dénis de justice qui n’a fait qu’aggraver la crise politique, économique et sociale qui perdure dans notre pays depuis l’assassinat de Norbert Zongo et de ses compagnons le 13 décembre 1998.

Le dossier Norbert Zongo ne sera jamais rouvert tant que le peuple burkinabé et le Collectif contre l’impunité ne se mobiliseront pas pour exiger « Vérité et Justice ». Il appartient aux militants du Collectif des organisations démocratiques de masse et de partis politiques, aux démocrates et progressistes de notre pays, d’avoir une bonne compréhension des motivations profondes de cette grave décision ainsi que ses enjeux pour la lutte contre l’impunité et pour la démocratie au Burkina Faso. C’est ce qu’a compris le mouvement syndical en l’intégrant dans sa plate forme de lutte.

Le bureau de la coordination du Collectif, après la déclaration du 26 juillet, la conférence de presse du 8 août et la déclaration du 17 août dernier, s’adresse par la présente aux organisations démocratiques de masse et de partis politiques membres, aux Collectifs provinciaux, départementaux et de zones, aux militant(e)s et sympathisante )s du pays réel, aux démocrates et progressistes, afin qu’ensemble nous prenions conscience de la gravité de la situation et nous mobiliser en conséquence pour les luttes à venir.

1. Contexte national dans lequel intervient le non-lieu, les implications pour le dossier Norbert Zongo et les raisons qui ont motivé une telle prise de décision : La décision du juge Wencelas intervient dans un contexte d’approfondissement de la crise structurelle et multilatérale que vit notre pays, notamment depuis l’assassinat de Norbert Zongo. Au plan politique, on assiste à une remise en cause des acquis de la lutte du Collectif, à un verrouillage progressif du processus démocratique tout court : le code électoral actuel a été relu pour la quatrième fois en cinq ans dans le sens de garantir les intérêts du CDP ; le fameux article 37 a aussi été interprété de façon tendancieuse et la polémique qui a entouré la dernière élection présidentielle à propos de la candidature de Biaise Compaoré a Fini de convaincre même les plus sceptiques de la volonté de ce dernier de ne pas quitter de sitôt le fauteuil présidentiel.

Les élections municipales ont quant à elles, montré le manque d’habilité du fichier électoral et le tripatouillage du processus électoral au niveau de la ŒNI et de ses démembrements. Il est apparu clairement au cours des dernières élections que le refus des candidatures indépendantes, traduit la volonté du pouvoir de la IVe République de maintenir le processus démocratique sous coupe réglée. Enfin, le dernier renouvellement des membres de la CENI a clairement montré les limites de l’indépendance réelle de ladite institution !

Au plan social, la lutte contre la vie chère et contre l’impunité, engagée par les travailleurs de notre pays dans une unité d’action syndicale salvatrice, a montré une fois de plus, que seule une lutte ferme et conséquente peut contraindre le pouvoir méprisant de la IVe République à faire des concessions. Le Collectif salue une fois de plus l’unité d’action des syndicats de notre pays ainsi que les résultats positifs obtenus : baisse sensible du prix des hydrocarbures, relèvement des allocations familiales, hausse du SMIG, engagement de règlement du l’incidence financière des avancements des fonctionnaires, prise en charge des risques professionnelles des agents publics, etc. Il les encourage et les exhorte à demeurer vigilants pour sauvegarder les fruits de la lutte et pour arracher de nouvelles victoires.

Les réactions des masses populaires contre le non-lieu dans l’affaire Norbert Zongo, contre le port obligatoire du casque, les acquis obtenus par la lutte unitaire des syndicats, incitent en exergue un des acquis importants de la lutte du Collectif a savoir, l’éveil des consciences populaires pour un engagement conscient dans les luttes pour la défense de leurs droits et de leurs intérêts fondamentaux.

2. Le non-lieu du juge Wenceslas est une conséquence logique du comportement du pouvoir de la IVe République depuis le drame de Sapouy. En effet :

a. Au lendemain de l’assassinat de Norbert Zongo, l’installation de la Commission d’enquête indépendante (CEI) a été le fruit d’une véritable bataille entre le pouvoir et le Collectif, bataille remportée par le Collectif. Au dépôt de ses conclusions fort pertinentes en matière d’investigation, le pouvoir, à travers certains médias d’Etat et des journaux de service, a engagé toute une campagne pour discréditer ces résultats ou minimiser leur portée : les résultats de la CEI ont été qualifiés par ces médias, tantôt « d’indices », tantôt de « pistes » qui devraient permettre au juge d’instruction de travailler, rien de plus ;

b. au cours des sept années qu’a duré l’instruction du dossier (si instruction il y a eu), les dignitaires du pouvoir et leurs instruments n’ont eu de cesse de marteler qu’il fallait « un climat d’apaisement pour que la justice fasse son travail » ’, « une vraie justice ne peut être rendue sous pression », tels ont été les slogans de cette tendance ;

c. toutes les manifestations du Collectif visant à s’adresser à la justice ont toujours été réprimées d’une façon ou une autre. En particulier, le palais de justice est devenu une tour inaccessible aux citoyens du pays réel, toujours barricadé de l’intérieur comme de l’extérieur par les forces de l’ordre à l’occasion des manifestations sur la voie publique du Collectif. Ce fut encore le cas le 16 août dernier lors du procès en appel.

C’est fort logiquement que la justice burkinabé à travers un juge de service, Wenceslas Ilhoudo, a non seulement blanchi Marcel Kafando, mais aussi blanchi d’avance X, et permis au pouvoir d’enterrer le dossier.

L’assassinat de Norbert Zongo et de ses compagnons n’a donc, selon elle, été commis par personne. Tel est le résultat des sept (7) longues années d’investigation de la justice burkinabé, années au cours desquelles elle n’a trouvé qu’un seul inculpé, l’adjudant-chef Marcel Kafando ( lequel avait déjà été identifié par la CEI), et un seul témoin à charge, le sergent-chef Jean Racine Yaméogo.

3. La grave décision prise par le juge Wenceslas Ilboudo approfondit davantage la crise de confiance entre la justice burkinabé et les citoyens du pays réel. Elle constitue un ferment pour la poursuite de la lutte du Collectif pour la satisfaction de sa plate-forme d’action réactualisée.

L’ordonnance de non-lieu pour Marcel Kafando et pour X, pour l’opinion tant nationale qu’internationale ne peut que confirmer ou à tout le moins, renforcer la suspicion des démocrates à l’égard du pouvoir de la IVe République. Les rapports des commissions tels que le Collège des sages, la Haute autorité de lutte contre la corruption, la Commission nationale d’éthique, confirment bien la faillite dudit pouvoir et le règne de l’impunité.

La mise en place du Collège de sages, la Journée nationale de Pardon, les nombreuses autres commissions n’étaient que duperies ; il s’est toujours agi pour Blaise Compaoré de trouver une sortie de crise sans vérité ni justice. Le Collectif sait en effet que tous les acquis de sa lutte, il les doit à la mobilisation du pays réel qui a conduit entre autres au jugement et à la condamnation des éléments de la sécurité présidentielle dont l’adjudant-chef Marcel Kafando, dans l’affaire David Ouédraogo. La lutte doit se poursuivre avec persévérance malgré et contre le non-lieu pour Marcel Kafando et X.

Compagnons de lutte, La lutte engagée par le Collectif contre l’impunité à propos du dossier Norbert Zongo a placé le pouvoir dos au mur : l’affaire Norbert Zongo est en effet devenu le principal point focal à travers lequel la démocratie du pouvoir de la IVe République est appréciée. A cet effet, les réactions de rejet de la décision de non-lieu ont été multiples tant au plan national qu’international. Des chancelleries accréditées au Burkina Faso ont également interpellé le gouvernement burkinabé.

Cette décision inique de la justice burkinabé est intervenue à quelques mois du 8e anniversaire de l’assassinat du journaliste. Il revient aux militants du pays réel, aux démocrates et progressistes de notre pays, de relever le défi et montrer à cette occasion que le non-lieu prononcé ne passera pas. La Justice burkinabé ne doit pas être au service d’intérêts de clans.

A travers la présente circulaire, le bureau de la Coordination nationale du Collectif invite l’ensemble des organisations membres du Collectif, les Collectifs provinciaux et départementaux, les Collectifs de zones à :

1. faire de la période qui suit, une période de sensibilisation et de mobilisation à travers des assemblées générales, conférences, réunions diverses notamment sur le non-lieu et sur l’évolution de la situation sociale du pays et la nécessité de poursuivre la lutte du Collectif, contre l’impunité, contre la vie chère et pour la satisfaction de sa plate forme d’action réactualisée ;

2. attendre à tout moment, un mot d’ordre du Collectif pour la poursuite de la lutte contre l’impunité, contre la vie chère, pour les libertés et pour la vérité et la justice pour Norbert Zongo et ses compagnons et pour toutes les autres victimes de crimes impunis ;

3. préparer de façon particulière et pour lui donner un éclat singulier, le 8e anniversaire de l’assassinat de Norbert Zongo.

La Coordination nationale du Collectif au niveau central, travaillera au succès de ces activités et actions avec comme appui indispensable à ce succès, la réalisation des activités sus indiquées par toutes les organisations démocratiques de masse et de partis politiques membres, par tous les Collectifs provinciaux, départementaux et de zones et enfin par tous les militant(e)s et sympathisant(e)s du pays réel.

Comme nous le soulignions dans notre déclaration du 26 juillet 2006, « sans fébrilité, mais avec constance, lucidité et détermination, le Collectif travaillera à relever le défi que notre justice vient de lui lancer : le dossier Norbert Zongo ne sera pas classé sans suite et notre peuple ne sera pas couvert d’opprobre ! ».

• Le non-lieu pour Marcel Kafando et pour X est une imposture qui ne passera pas ! • Ensemble avec patience et sérénité, poursuivons la juste lutte contre l’impunité ! • Justice pour Norbert Zongo et ses trois compagnons ! N’an laara an saara !

Pour la Coordination nationale, le bureau :

Pour le président du Collectif, Dr Henri Compaoré

Tolé Sagnon

Youssouf Sambo Ba

Tiergou P. Dabiré

Ernest R. Traoré

Me Bénéwendé S. Sankara

P.-S.

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Vos commentaires

  • Le 7 novembre 2006 à 22:32 En réponse à : > Affaire Norbert Zongo : "La justice ne doit pas être au service de clans"

    Mais comment Me Bénéwendé SANKARA, qui est avocat ne peut pas éclairer le collectif sur les tenants et les aboutissants d’une telle procédure pénale d’instruction ?
    La politique, qui est une noble mission ne doit pas être galvaudée de cette manière. Lors de l’instruction de ce dossier, pour quelles raisons ces mêmes membres du collectifs n’ont-ils pas apporté des preuves tangibles au magistrat instructeur. Ce n’est certainement pas un magistrat instructeur honnête comme Wens qui peut être plus royaliste que le roi. Il n’avait aucune preuve ; Il n’allait certainement pas inventer de fausses preuves pour faire plaisir au fameux collectif. La loi est dure, mais c’est la loi. "Sed lex dura lex" disaient déjà les romains. Alors je demande au collectif d’arrêter désormais de galvauder la procédure pénale burkinabè à l’instar de Ménard le perturbateur, et d’apporter, le cas échéant de nouvelles preuves pour une éventuelle ré-ouverture de ce dossier. A défaut, shut !!! Le Burkina avance lentement dans sa démocratie. Le Gandaogo National, France.

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