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Jacob Daboué, DG du Centre national des arts, du spectacle et de l’audiovisuel : "Personne ne viendra au Faso nous donner des leçons de culture"

Publié le vendredi 27 octobre 2006 à 08h14min

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Jacob Daboué

Plus que quelques semaines et Ouagadougou disposera d’une salle de spectacles polyvalente avec toutes les commodités à la hauteur des dernières technologies en matière de son, de lumière et d’images. En effet, la salle de spectacles du CENASA, le Centre national des arts, du spectacle et de l’audiovisuel est en train d’être toilettée à la manière d’une nouvelle mariée pour offrir aux artistes un espace idoine d’expression.

Pour en savoir davantage sur ce centre culturel national, nous avons rencontré le directeur général du Centre, Jacob Daboué. Homme mordu de littérature et de culture, chef d’orchestre philharmonique formé à l’Académie internationale de musique de Guérande et des pays de la Loire, il nous parle de la structure qu’il dirige, des activités menées, ainsi que des ambitions et des perspectives que le ministère de la Culture, des Arts et du Tourisme assigne au CENASA.

Très brièvement monsieur le directeur, quelle est la carte d’identité du CENASA ?

Je voudrais, avant de répondre à votre question, dire merci à l’Observateur paalga qui a bien voulu s’intéresser à ce que nous faisons au CENASA. C’est le signe du grand intérêt que vous portez à la promotion de nos identités culturelles.

Cela dit, le Centre national des arts, du spectacle et de l’audiovisuel est un établissement public à caractère administratif, intervenant, comme son nom l’indique, dans les arts du spectacle et de l’audiovisuel, notamment avec l’orchestre national et le ballet national.

Nos missions sont essentiellement la promotion de la culture nationale aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. Dans cette optique, nous disposons, entre autres, d’une salle de spectacle polyvalente et entièrement rénovée d’une capacité de près de 725 places.

Nous intervenons aussi en matière de sonorisation, de régie lumière, mais également sur toutes les questions liées à la production aussi bien des œuvres musicales que des clips et spots publicitaires et de tout ce qui est lié à l’audiovisuel.

Vous êtes en train de procéder au toilettage de votre salle de spectacles. Comment avancent les travaux et en quoi consiste ce lifting ?

Dans l’ensemble, les travaux se déroulent bien quoiqu’on aurait aimé que tout se passât plus vite. Mais je conviens qu’il vaut mieux adopter un bon rythme de sorte qu’à la réception, nous disposions d’une infrastructure à la hauteur de nos attentes et de nos ambitions. Cela dit, le toilettage a consisté à donner à la salle sa dimension réelle de polyvalence et surtout à la couvrir de sorte qu’elle soit opérationnelle à toutes les périodes de l’année.

Quels sont les partenaires qui vous ont permis la réalisation de l’ouvrage ?

Les partenaires de l’ouvrage, outre l’Etat qui est l’exécutant principal, sont essentiellement la Coopération taïwanaise et les Engagements nationaux.

L’œuvre n’est pas totalement achevée. Qu’est-ce qui freine cette dernière étape ?

Vous avez raison de constater avec nous que les finitions traînent encore le pas. Cela est dû essentiellement aux questions d’équipement de son, de lumière et de projection. Mais tout sera prêt pour la fin de l’année.

Vous souhaitez ardemment faire du CENASA un véritable centre culturel national. Quel sera, après ces retouches, son impact sur la vie culturelle et artistique du Burkina ?

Il est indéniable que le Burkina Faso est, avant tout, riche de sa culture et de ses hommes. Cet état de fait est visible à travers un véritable bouillonnement des différentes expressions culturelles. Des efforts sont faits par le gouvernement, notamment à travers le ministère en charge de la Culture, pour accompagner ces nombreux et talentueux artistes. Mais il manquait encore un cadre adéquat qui puisse permettre à ces hommes et femmes qui font notre fierté de pouvoir véritablement s’exprimer.

Il s’agit pour le CENASA d’être l’espace idéal d’expression et de promotion des différents groupes artistiques de nos terroirs et cela dans une dimension de synergie en vue de traduire au quotidien l’unité culturelle nationale, cela, aussi bien dans une perspective de développement de nos expressions culturelles que d’ouverture sur d’autres horizons.

Vous travaillez beaucoup avec des pays comme la République de Chine, l’Allemagne, les Etats-Unis et le Canada. Est-ce un choix motivé ?

Ces pays ont bien voulu nous accompagner dans la réalisation des objectifs que nous nous sommes fixés dans les domaines qui sont les nôtres. Ce n’est pas un choix particulier ou sectaire ; il faut également souligner que d’autres pays amis du Burkina Faso comme la France, la Belgique ou le Sénégal, pour ne citer que ceux-là, entretiennent des liens étroits de collaboration avec nous au bonheur du monde des arts.

Quel rapport entretenez-vous avec les centres culturels français de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso ? Serait-ce vrai qu’entre vous et monsieur Yves Olivier du CCF Ouagadougou, ce n’était pas l’accord parfait ?

Nous entretenons des rapports de partenariat avec les centres culturels de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso. C’est vrai, avec monsieur Yves Olivier du CCF, nous avons parfois eu des divergences d’approche, mais cela est peut-être dû à nos tempéraments personnels propres et je puis vous assurer que nos propres identités individuelles ne sont rien à côté de l’excellence des relations multiséculaires entre la France et le Burkina Faso.

Rien ne saurait empêcher la souveraineté du Burkina Faso quant au choix de ses hommes qui défendent notre culture. De même que nous n’intervenons pas dans la politique culturelle du CCF, de même celui-ci ne devra en aucun cas nous dicter ce que nous devons faire, encore moins, nous imposer les hommes qu’il faut. Ce qui est sûr, c’est que personne ne viendra au Faso nous donner une leçon de culture.

Ces 3 dernières années, le CENASA vole de succès en succès. Et cela vous a valu des félicitations lors des Assemblées générales des sociétés d’Etat. Quel est votre secret ?

Quand nous avons reçu les félicitations de l’Assemblée générale des sociétés d’Etat (AGSE), nous avons pensé à l’ensemble des collaborateurs qui, d’une manière ou d’une autre, jouent leur partition pour la visibilité et la lisibilité du CENASA.

En tant que tel, il n’y a pas de secret. Si secret il y avait, ce serait plutôt la conviction forte qui nous anime, que ce n’est que dans une dynamique concertée et consensuelle que l’on peut arriver à quelque chose d’appréciable aussi bien pour soi-même que pour les autres.

Vous avez reçu le Gambré d’or du meilleur site internet catégorie Culture et Artisanat lors de la Semaine nationale de l’internet. Un motif de satisfaction ?

J’en tire une légitime fierté. Je suis également comblé de savoir que ce que nous faisons, mes collaborateurs et moi, est reconnu et apprécié à sa juste valeur. Notre culture doit aller plus loin et cela avec l’apport des nouvelles technologies de l’information et de la communication. En cette nouvelle ère, il serait bien dommage de ne pas s’inscrire dans cette dynamique. Nous sommes, par ailleurs, heureux de savoir que beaucoup d’internautes et d’associations visitent quotidiennement notre site.

Vous êtes reputé très proche de l’ancien ministre Mahamoudou Ouédraogo. Comment se passe la collaboration avec les nouveaux responsables du ministère de la Culture ?

Depuis que nous avons été porté à la tête du CENASA, notre philosophie initiale est restée la même et inchangée : donner le meilleur de nous-même pour être à la hauteur de la confiance qui a été placée en nous. Je puis vous affirmer que nous sommes toujours dans cette constance, celle de servir avec loyauté et vérité.

Le CENASA est une composante essentielle dans le dispositif des Engagements nationaux à travers l’Orchestre national et le Ballet national. Quelle est la nature exacte de vos rapports avec le Secrétariat permanent ?

Nous entretenons d’excellences relations avec le Secrétariat permanent des Engagements nationaux. C’est une institution qui est dirigée par un homme doté de nombreuses qualités humaines, passionné de culture et qui nous soutient beaucoup dans la réalisation des nobles objectifs du Président du Faso en matière de promotion des expressions culturelles burkinabè.

En 2000, vous avez mis en place l’INAFAC. Que devient cet Institut qui a formé des centaines de personnes dans les différents arts de la scène ?

Depuis ces dix dernières années, notre pays connaît une grande effervescence dans les domaines artistiques et culturels. Beaucoup de jeunes se lancent dans ce créneau, avec certes des talents, mais sans toujours disposer du b.a.-ba nécessaire pour entreprendre une bonne carrière. L’Institut national de formation artistique et culturelle a été créé pour servir de cadre d’initiation et de formation en solfège, en maniement d’instruments musicaux et en différents arts de la scène et graphiques.

Depuis 2000, l’INAFAC continue de mettre à la disposition du Burkina, des artistes (amateurs ou professionnels) dans différents domaines de la promotion culturelle. Les vacances artistiques que nous organisons annuellement sont très prisées et gagnent en notoriété d’édition en édition. Vous comprendrez aisément pourquoi j’en tire une légitime fierté.

Vous êtes le géniteur de l’Ensemble musical des Amis. Que devient cette chorale internationale de Ouagadougou ?

En plus de ma formation littéraire, j’ai poursuivi dans un autre domaine que j’affectionne beaucoup depuis mon passage au Petit séminaire de Koudougou. Il s’agit de la culture et singulièrement de la musique. Je me suis donc spécialisé dans la direction d’orchestre et de chœur à l’Académie internationale de musique de Guérande et des pays de la Loire en France. La création de l’Ensemble musical des amis en est une parfaite illustration après les chorales de Saint-Camille, du Scholasticat et de Sainte-Marie Immaculée que j’ai eu à diriger.

L’Ensemble musical des Amis continue son bonhomme de chemin, toujours animé par des femmes et des hommes de conviction, engagés dans ce domaine fort passionnant du chant choral au service de l’Eglise et de leur pays. Cette chorale, qui représentera notre pays au Festival international du chant choral de Lomé au Togo en mars 2007, fêtera également son 15e anniversaire en avril de la même année.

On sait que vous avez énormément contribué à la composition de l’Hymne du CDP. Depuis quand avez-vous pris la carte du parti de la daba ?

Je peux dire que ma modeste contribution a été faite dans une dynamique exaltante. Et de façon globale, il convient de positionner la création de cette œuvre de l’esprit sous l’angle de la collégialité et du travail en équipe. Encore une fois, ce n’est qu’ensemble qu’on peut arriver à quelque chose, surtout en matière d’œuvre de l’esprit.

Ma modeste contribution à cette œuvre est celle d’un militant soumis à la discipline du parti. Je crois aussi que ma carte de militant dont je suis fier ne remplacera pas mes œuvres, aussi modestes soient-elles, qui rendent mieux service au parti et qui témoignent de facto de mon soutien aux mandats sans exception du chef de l’Etat.

Quelles sont vos perspectives pour une plus grande promotion de notre culture ?

Les perspectives sont de toujours donner le meilleur de nous-même en comptant sur la grâce de Dieu, et sur le soutien de mes supérieurs et de mes collaborateurs. Imaginez bientôt le CENASA en pleine activité avec un Théâtre national aux normes internationales des opéras, des philharmoniques et autres auditoriums, comme il n’en a jamais existé au Burkina. Rien de beau et de grand en matière d’arts du spectacle ne pourra se faire sans une expertise reconnue, sans un appui technique, logistique et humain du CENASA.

Il n’ y a rien de plus beau qu’un peuple fier de sa culture. Savoir d’où l’on vient pour tracer le chemin qui nous reste à parcourir, c’est emprunter résolument la meilleure voie pour un développement harmonieux et un plein épanouissement. Nous avons la faiblesse de penser que la culture est le ferment de l’unité nationale, de la cohésion sociale et une voie idoine pour hisser le Burkina Faso au rang des pays émergents.

A travers la culture et les arts, nous ensemencerons les graines de la tolérance et de la cohésion sociale. Par la polyvalence de la salle, nous tendrons vers l’autofinancement total. Le CENASA sera en somme le fleuron de notre identité culturelle et une ouverture vers les autres cultures.

Un dernier mot vous est-il resté sur le cœur ?

Je voudrais en guise de conclusion remercier tout d’abord le Seigneur Tout-Puissant qui nous donne quotidiennement la force et le discernement dans notre action. Qu’il me soit permis de remercier madame la ministre de la Culture, des Arts et du Tourisme pour la confiance placée en nous. Je m’en voudrais de ne pas saluer toutes les personnalités avec qui nous avons fait le chemin au ministère afin de donner un cachet particulier à la culture ces dix dernières années. Je voudrais enfin exhorter mes collaborateurs et tous les hommes et femmes de bonne volonté à nous donner la main afin que nous puissions relever les défis auxquels notre culture est confrontée.

Propos recueillis par Ousseni Ilboudo

L’Observateur Paalga

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