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Me Bénéwendé Stanislas Sankara : "Les Burkinabè ont perdu leur âme devant la nourriture"

Publié le jeudi 26 octobre 2006 à 08h59min

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Me Bénéwendé Stanislas Sankara

Après les dernières élections présidentielle et municipales, l’heure est maintenant au bilan dans les différents partis qui y ont pris part. A l’Union pour la renaissance / Mouvement sankariste (UNIR/MS) la moisson a été bonne, confie Me Sankara dans cet entretien. Dans la même lancée, le président de l’UNIR/MS s’exprime sur les supposés malaises au sein de son parti, la situation du sankarisme de nos jours, son départ de l’Assemblée nationale, ses rapports avec le Trésor publc, etc.

"Le Pays" : Qu’est-ce qui justifie votre départ de l’Assemblée nationale et votre retour au prétoire ? Est-ce une stratégie ?

Me Bénéwendé Sankara : Je ne comprends pas votre question parce que je suis avocat. Où voulez-vous que je sois ? La fonction du député à laquelle vous faites allusion n’est pas éternelle. Je ne conçois pas les choses ainsi.

Pourquoi avez-vous décidé de vous retirer de l’Assemblée nationale ?

Je n’ai pas abandonné l’Assemblée nationale. J’y ai un suppléant. Il y a également un autre député de l’UNIR/MS qui m’a remplacé au niveau du Parlement africain. C’est ma vision des choses. Je crois qu’en politique, un seul homme ne peut pas occuper toutes les fonctions. Avant d’aller à l’Assemblée nationale, j’étais au barreau. Au Burkina, le Code électoral mentionne une incompatibilité, et c’est de façon exceptionnelle : quand on est élu, on ne peut plus plaider. Dans les autres pays, ce n’est pas le cas. Quand on est élu, on peut toujours continuer d’exercer son métier d’avocat. Et comme ce n’est pas le cas ici, j’ai fait mon choix. Je suis reparti au prétoire.

Etes-vous satisfait du parcours de votre parti après les deux échéances passées ?

Très satisfait parce qu’avant d’aller aux élections municipales, le parti a tenu un conseil national. Au cours de cette rencontre, nous avons été suffisamment clair en disant que l’UNIR/MS est un parti qui doit évaluer ses forces et ses faiblesses à travers les différents scrutins, à savoir la présidentielle et les municipales. Les élections municipales sont des élections de proximité.

Nous avons pris une directive pour demander à nos militants de se battre dans tous les lieux où ils sont pour prouver que le parti est bien implanté et que le militant à la base sait se battre, s’organiser avec conviction et sans moyen. Nous sommes sortis des élections avec plus de 160 conseillers. Aujourd’hui, il y a des conseillers qui ont quitté d’autres formations politiques pour rejoindre l’UNIR/MS. Je peux dire, sans risque de me tromper, que nous avons presque deux cents conseillers. C’est donc satisfaisant pour un parti qui va pour la première fois à des scrutins.

Cela nous a permis de voir le degré de militantisme de nos camarades à la base, de voir la fiabilité des structures, et aussi de voir les lieux où nous ne sommes pas suffisamment structurés et implantés. Cette expérience nous a permis de découvrir la face des citoyens. Il y en a qui, effectivement aujourd’hui, viennent en politique sans idéal, sans conviction. A l’UNIR/MS, le congrès prévu pour les 4 et 5 novembre 2006, nous permettra de faire un diagnostic sans complaisance et d’évaluer les forces et faiblesses du parti. Ce sera également l’occasion pour nous de dégager des perspectives.

Confirmez-vous des malaises dans votre parti ?

Malaises... Je n’en ai véritablement pas connaissance. Je sais que l’UNIR/MS prépare un congrès. Et aujourd’hui, nous y travaillons de façon assidue à travers les organes du parti. Je crois que l’essentiel pour moi, dans un grand parti comme l’UNIR/MS, c’est la vie démocratique dans les organes dirigeants. C’est vrai qu’on ne peut pas faire que des heureux dans un parti. Ce qui nous intéresse, c’est la ligne du parti, les principes organisationnels du parti, la vie démocratique au sein de l’UNIR/MS.

Vous n’êtes donc pas au courant d’éventuels départs ?

Présentement, il n’y a pas de départs. Le jour où il y aura des départs, on le saura. Sinon, celui qui ne trouve pas son compte à l’UNIR/MS peut aller voir ailleurs. Les colonnes de journaux sont actuellement remplies de lettres de démission. C’est la transhumance politique. Il y en a qui sont venus à l’UNIR/MS dans l’intention de trouver quelque chose, s’ils ne le trouvent pas, ils iront au CDP par exemple. Je pense que ce serait une bonne chose pour notre parti parce que la clarification politique a une forte importance.

On peut donc dire que tout va bien !

Bien sûr, nous sommes sortis de ces municipales avec environ 160 conseillers. A ce jour, nous n’avons pas encore enregistré une seule défection parmi nos élus. Par contre, des élus d’autres formations politiques nous ont rejoints. Nous sommes donc sortis plus renforcés. Si vous parlez d’affaiblissement, cela peut s’expliquer du fait même de l’endurance des hommes. Nous avons été simultanément à deux scrutins sans moyens financiers. On peut donc être fatigués ou épuisés.

Mais ce qui fait la noblesse de cette lutte, c’est la persévérance à des moments donnés où on se sent essoufflés, on a le réconfort moral, et quelque part, on a les ressources humaines pour aller de l’avant. Il faut noter qu’il n’y a pas d’argent et de moyens financiers à l’UNIR/MS et ceux qui pensent qu’on peut y trouver de l’argent se trompent. Je crois qu’ils ont tapé à la mauvaise porte.

Qu’en est-il des ententes entre votre parti et le CDP afin de permettre au méga parti d’obtenir des mairies dans certaines zones du pays ?

(Rires) Je n’ai pas véritablement connaissance de cela parce que l’UNIR/MS est un parti où le débat doit être transparent. Après les municipales, l’UNIR/MS a sorti une directive pour montrer les différentes conduites à tenir aux nouveaux conseillers. Les votes au niveau des conseils municipaux ont été menés de façon souveraine et ce sont les conseillers qui, séance tenante, apprécient les situations. Ce n’est donc pas des rapports entre l’UNIR/MS et le CDP. Je suis désolé de relever cela. L’UNIR/MS ne peut en aucun cas s’entendre ou avoir la moindre accointance avec le CDP. Je crois que nous sommes un parti d’opposition, on nous taxe même de parti radical, ce qui amène certains à penser que l’UNIR/MS est toujours opposé au CDP.

Ce n’est pas une vision dialectique de la politique. A l’Assemblée nationale, on a des députés de différentes formations politiques. Je crois qu’il en est de même pour le conseil municipal. A moins d’être étriqué en politique, on ne peut pas aujourd’hui s’en prendre à un conseiller de l’UNIR/MS pour avoir porté son suffrage sur quelqu’un qui a été élu sur la liste d’une autre formation politique.

Ce qui est fondamentalement grave, c’est de dire que le parti défend le programme qui est celui du progrès continu, celui du CDP. Nous avons notre propre programme, nos ambitions et nos conseillers sont organisés au sein du parti pour défendre son idéal et son programme. Il est donc impensable qu’on parle d’accointances aujourd’hui. A moins que ce ne soit des gens qui cherchent noise à l’UNIR/MS et ces personnes existent partout.

Vous reconnaissez que physiquement, le parti est fatigué...

Oui, et le peuple burkinabè est lui-même fatigué.

A cette allure pourrez-vous affronter les législatives comme vous l’auriez voulu ?

(Rires) Je ne peux pas dévoiler mes stratégies, mais on ne peut rien cacher en politique. Je veux simplement dire que la fatigue se ressent sur le peuple burkinabè. Ce ne sont donc pas les militants de l’UNIR/MS qui feront la différence. Analysons le comportement des citoyens burkinabè de nos jours. Au-delà de la lassitude, on peut même parler de fatalisme. C’est comme si les gens n’ont plus de raison d’espérer. Parler d’élection énerve souvent les gens. On se demande si la démocratie apporte quelque chose au pays, a fortiori les partis politiques. Quand on regarde la politique au Burkina, on voit que les gens sont écoeurés, outrés.

C’est pour cela qu’au niveau de notre parti, un parti sankariste, nous disons qu’il faut créer une autre façon de voir la politique. Il faut créer une autre façon de vivre la démocratie. Et cette façon ne se retrouve pas dans l’argent ou dans le gain matériel. Elle se retrouve dans la conviction qu’on peut avoir du Burkina avec un certain nombre d’éléments à savoir que la solidarité soit effective, que la justice soit sacrée.

Quand on est dans un pays où on peut emprisonner une personne parce que tout simplement, elle est faible, dans son bon droit, et que personne ne peut lever le petit doigt. Voyez-vous ce que cela peut faire quand on est dans un pays où on vous nargue ? Certaines personnes qui ont utilisé l’argent du chef de l’Etat à des fins de corruption, mais ne sont pas inquiétées. C’est cela qui est très grave.

Notre combat est dirigé contre cette injustice. On ne peut pas le faire avec un peuple fatigué qui n’y croit pas. Notre mission, en tant que parti politique, est d’abord de créer un déclic, de faire en sorte que le citoyen burkinabè prenne conscience de ses propres responsabilités. C’est sur cela que notre politique est fondée. Nous allons bâtir sur nos propres ressources, nos propres moyens, avoir en commun le même destin.

La Constitution dit que les partis politiques doivent conscientiser, éduquer. Pour y arriver, il faut que le parti soit bien implanté, il faut qu’il y ait des structures, des dirigeants, des leaders. Amis aujourd’hui, les leaders sont prêts à faire leurs valises pour sauter d’un parti à un autre en fonction de leurs intérêts. Il y en a qui étaient des sankaristes mais qui ont renié leur sankarisme avant le chant du coq.

Comment voulez-vous que le militant à la base ait encore confiance aux hommes politiques ? Nous voulons faire la différence au niveau de notre parti. Faire en sorte que les gens puissent avoir confiance en eux-mêmes, et en ce que nous faisons. C’est d’abord la ligne que nous défendons, c’est également notre conduite. Quelle appréciation le peuple burkinabè a de nous aujourd’hui ?

C’est pourquoi nous ne pouvons pas tolérer une certaine façon de faire à l’UNIR/MS. Thomas Sankara c’est notre idole. Nous ne sommes pas Thomas Sankara, nous tendons vers lui. Nous devons donc nous remettre en cause de façon perpétuelle pour créer des conditions d’exemplarité et faire en sorte que cette confiance puisse s’instaurer entre mon parti et le peuple burkinabè. Il n’y a pas de lassitude dans ce combat. C’est un combat permanent.

A ceux qui pensent, et je le répète, qu’on ne vient en politique que pour avoir des strapontins, pour avoir une place au soleil, pour ses intérêts personnels, nous disons que le premier intérêt à l’UNIR/MS, c’est le peuple burkinabè. Notre devise est "Pas un pas sans le peuple". C’est facile justement de mener une telle politique. Nous évoluons dans un contexte international, mondial très difficile. On peut nous taxer de tous les noms d’oiseaux, mais le sankarisme est aujourd’hui la seule politique qui puisse sortir les pays africains de leur misère.

J’en suis convaincu. Et le programme alternatif du sankarisme que nous avons conçu à l’UNIR/MS s’est inspiré de comment lutter contre la pauvreté entre 1983 et 1987. Les statistiques sont là également pour le prouver. La question qui est posée maintenant est la suivante : est-ce que en démocratie - le CNR n’avait pas les mêmes méthodes - on peut mener une politique aussi pragmatique pour que la croissance soit réelle, pour que la pauvreté soit réduite, pour que les secteurs sociaux comme l’éducation, la santé, puissent connaître un bond qualitatif à même de réduire la paupérisation ? Nous disons à l’UNIR/MS que c’est possible.

Et c’est l’ensemble de ces éléments qui nous amène à dire qu’on ne peut pas avoir de la lassitude parce que nous luttons, non pas seulement pour nous, mais aussi pour les enfants que nous sommes en train de mettre au monde. Combien de personnes s’alignent de 4h du matin jusqu’à 18h pour espérer s’inscrire sur la liste d’un concours et qui n’y arriveront même pas ? Tout cela nous interpelle et nous amène à dire que nous refusons la fatalité, nous refusons de dire qu’on est fatigué.

Selon vous, qu’est-ce qui justifie les deux grandes victoires du parti au pouvoir lors de la présidentielle et des municipales ? Est-ce la fatigue des populations ou le manque de confiance aux hommes politiques ?

C’est le corollaire de la corruption, de la misère. C’est le corollaire de la fatalité. C’est le corollaire du fait que les citoyens burkinabè ont perdu leur âme devant la nourriture, le besoin minimum vital. Pour 200 F CFA, 100 F CFA, ou moins, ils votent pour le CDP. Sinon on paie les frais. Les fonctionnaires en savent quelque chose. Pour les besoins de la cause, on a ressuscité, je ne dirai pas les "CDR de service", mais plutôt les "CDP de service".

Même dans l’Armée on fait des paquetages de gadgets CDP pour les éléments. Est-ce qu’on peut parler véritablement d’une liberté au Burkina ? Est-ce qu’on peut parler de démocratie dans ces conditions ? C’est dans cet Etat de droit que Blaise Compaoré a été réélu. Il pouvait même être élu à 200%. Cela ne m’inquiète pas et ne m’étonne pas.

Quel est l’état des lieux du sankarisme aujourd’hui ?

Le sankarisme se porte mieux.

Peut-on dire cela pendant que des leaders sankaristes s’alignent derrière le parti au pouvoir ?

Oui. C’est cela la décantation. Comme je l’ai dit, ne vient pas au sankarisme qui veut. Un parti organisé a une discipline. Le sankarisme en tant que philosophie politique doit se fonder aujourd’hui sur des postulats et sur une orientation suffisamment claire pour dégager un certain nombre de principes et de voies à suivre. Nous l’avons toujours dit au niveau de l’UNIR/MS, notre préoccupation, ce n’est pas de taper la poitrine et dire nous sommes des sankaristes parce qu’on peut arborer des tee-shirts avec l’effigie de Thomas Sankara. Notre vraie préoccupation, c’est de savoir ce qu’on peut concevoir qui puisse, en termes de programme, intéresser à l’instant "t" le peuple burkinabè de 2006 à 2021. Nous disons que le rôle d’un organe politique, c’est les idées contemporaines, qui, à un moment donné, peuvent susciter un espoir pour le peuple.

Le sankarisme aujourd’hui, ce ne sont pas des slogans, des discours. Ce n’est pas aussi la violence. C’est la persuasion. Il faut convaincre. Convaincre sur la base d’un projet de société qu’on présente et qui peut être apprécié par les autres. Cela fera en sorte que, si vous êtes convaincants, des gens quitteront le CDP et d’autres partis pour venir renforcer la lutte menée. Mais si on pense que le sankarisme se résume au seul poster, à la seule photo du président Thomas Sankara, on se leurre. Malheureusement, on a vu ce que certains ont appelé le sankarisme imagé. Ce sankarisme n’intéresse pas notre peuple qui est confronté véritablement à de dures réalités et qui souhaiterait qu’on puisse, à travers un programme politique, lui apporter plus d’écoles, d’infrastructures sanitaires, de routes et un progrès dans la paix et la démocratie.

Ne craignez-vous pas que tous les sankaristes finissent leur course de l’autre côté du fait que le rouleau compresseur du parti au pouvoir ne leur a pas laissé le choix ?

(Rires) Ce n’est pas une démarcation.

Mais à la longue, ne croyez-vous pas que le pouvoir arrivera à bout du sankarisme ?

Non. Il faut qu’on s’entende là-dessus. Ce n’est pas une démarcation et non plus une taxation. C’est une affaire de principes. C’est une question d’idéal. Qu’est-ce que je défends que l’autre ne défend pas ?

C’est normal que si les sankaristes se laissent prendre dans ce jeu, ils disparaîtront au grand soulagement du pouvoir. Ce n’est pas pour rien qu’on se trouve dans l’opposition. Ce sont des forces en perpétuels combats. Le système en place a intérêt à ce que les sankaristes disparaissent parce que nous le combattons. Mais si les sankaristes accèdent au pouvoir, ce système disparaîtra. ce combat est multiforme. Il y a par exemple le cas de ces enseignants qu’on a affectés tout simplement parce qu’ils sont dans l’opposition et particulièrement à l’UNIR/MS.

On leur a spécifié que cela n’est pas lié à leur rendement. Nous vivons cela tous les jours. Si nous laissons tomber ce combat, le système grandira davantage. Mais à terme, que créera ce système pour notre pays ? L’injustice crée toujours les conditions d’une grande révolte et d’une remise en cause de la paix. On défend un idéal à ses risques et périls. Si aujourd’hui, je refuse la corruption, parce que je veux rester moi-même, ce n’est pas donné à n’importe qui de le faire.

L’être humain a une dignité. On dit que l’opposition a une crise de ressources humaines parce que tous les cadres et technocrates sont au niveau du parti au pouvoir par opportunisme. On se décarcasse peu. Salif Diallo a dit à la télé que "Quand vous êtes au pouvoir, tout le monde court après vous. Mais le jour que vous n’y serez pas, vous connaîtrez vos vrais militants." Ce sont des faits palpables.

Tous ceux qui amassent les milliards de F de l’Etat burkinabè pour se construire des bunkers ont-ils pensé une fois aux enfants qui naissent et qui iront à l’école et qui aspirent à être les dirigeants de ce pays dans 50 ans ? Il faut qu’on accepte l’autre et qu’on essaie de le convaincre, non par la baïonnette, mais par les idées.

Où en est-on aujourd’hui avec l’affaire X9 ?

Cette affaire est actuellement au niveau de la Cour de cassation. C’est ce que je peux dire d’un point de vue procédure. Elle a fait l’objet d’un pourvoi en cassation. Nous avons écrit à la Cour de cassation pour demander d’en finir avec ce dossier.

Est-il vrai que vos fonds ont été gelés par le Trésor public ?

Gelés, pourquoi ? Je ne dois pas à quelqu’un. J’ai effectivement fait l’objet d’une procédure d’avis à tiers détenteur émis par le Trésor dans le cadre des procédures du dossier individuel de Faso Fani. Ce n’est pas la première fois qu’on saisit mes biens. Au moment où je vous parle (Ndlr, mercredi 18 octobre 2006), mes biens sont sous saisie. J’en fait l’objet tous les jours. Comme je le dis souvent, je suis comme le roseau, je plie mais je ne romps pas. J’ai de la foi et de la conviction dans ce que je fais. Et l’essentiel pour moi, c’est de rester moi-même au-delà de l’intégrité. L’Etat a payé un certain nombre de dossiers individuels qui sont des reconstitutions de carrière, c’est- à- dire des créances de salaires d’un montant de 140 millions de F CFA.

Dans un journal de la place, il a été dit que pour l’exercice 2006, l’Etat allait payer cette partie plus également un protocole où l’Etat doit 850 millions de F CFA aux mêmes travailleurs. L’Etat s’est ravisé en disant que : "Les jugements qu’on a eu à produire ne sont pas des jugements définitifs mais des arrêts revêtus de la formule exécutoire, donc je rétracte mon paiement". Mais avant cela, c’est Me Sankara qui prend les coups. C’est moi qu’on saisit. Les saisies et autres tracasseries sont mon lot quotidien.

Peut-on lier cela au fait que vous soyez Me Sankara, président de l’UNIR/MS ?

Je ne sais pas. Ce sont des choses qui ne m’empêchent pas d’évoluer à l’UNIR/MS. Je ne fais donc pas de lien. Je continue à faire mon travail et la politique comme je le ressens et avec conviction. Ce sont les autres qui font des liens, mais pas moi. Si je devais en faire, aujourd’hui je n’allais plus faire de la politique. Et cela allait m’empêcher de continuer de gérer le parti.

Que représente le 15 octobre pour vous ?

Le 15 octobre est une grande déception pour moi. Voir s’arrêter de façon aussi brutale et tragique un processus de transformation économique et social qui donnait espoir à toute l’Afrique. Au-delà de cette déception, je crois que le massacre d’hommes et de femmes pour leur conviction politique, c’est un crime abominable qu’il faut condamner et proscrire. La violence en politique n’a que des conséquences néfastes.

Pour moi, le 15 octobre c’est un souvenir qui nous amène à nous poser de façon intrinsèque la question de l’unité des sankaristes. Tous les 15 octobre, on se retrouve pour déposer des gerbes de fleurs et dès le 16 on se regarde en chiens de faïence. Je trouve cela ridicule. Le peuple n’est pas divisé. Il n’y a pas plusieurs types de peuples. Il est uni. Il a un seul problème : Blaise Compaoré et son pouvoir. Le 15 octobre dernier nous a donné l’occasion de voir que de plus en plus, on prend conscience du fait qu’il faut aller vers l’unité.

J’espère que l’année 2007 qui a été déclaré "année Thomas Sankara" verra enfin une unité combattante, une unité véritable se faire autour de l’idéal du président Thomas Sankara.

Où en est-on avec l’affaire Thomas Sankara ?

Après les constatations du Comité des droits de l’homme de l’ONU, le chef de l’Etat a signé un décret. Nous avons rejeté de façon catégorique cette insulte. L’Etat a dit que le certificat de décès de Thomas Sankara pouvait être rectifié par le maire de Baskuy. On banalise les choses dans cette République- là. Nous avons encore saisi le Comité des droits de l’homme de l’ONU pour faire part de nos observations. On attend que ce comité nous départage. Mais la lutte est pérenne. Ce ne sont pas ces décisions qui vont véritablement réhabiliter le président Thomas Sankara. Je ne rejette pas l’idée qu’on lui dédie une rue, un mausolée, ou qu’on dise que c’est un héros national. Mais il faut qu’on dise qui a fait quoi et pourquoi. Le peuple veut savoir. C’est ce combat qui nous intéresse.

Propos recueillis par Alain DABILOUGOU

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 26 octobre 2006 à 13:03, par citoyen En réponse à : N’insultons pas notre peuple

    Il faudrait que nos politiciens apprennent à respecter notre peuple. Dire que les burkinebés ont perdu leur âme devant la nourriture est une véritable injure à l’égard de notre vaillant peuple qui n’ a à aucun moment, cessé de se battre pour survivre malgré les difficiles conditions d’existence et à la défaveur de la nature qui ne nous fait pas de cadeau. Arrêtons de ridiculiser notre peuple aux yeux du monde. A tout ceux qui pensent pouvoir contribuer au renforcement de la démocratie, le peuple burkinabé n’attend d’eux que la loyauté, le respect et le travail qui sauve de la pauvreté. Il est très facile d’insulter le peuple parce qu’il est impersonnel mais chacun de nous constitue un maillon de ce peuple. Quand on se bat pour le peuple, on lui voue sa fidélité, et nul n’ignore que la fidélité est conditionnée par le respect mutuel. Porte parole d’un parti sankariste, vous devez penser à ces millions de citoyens qui sont encore dans leurs champs en train de lutter avec la nature pour survivre et qui ignorent de quelle nourriture vous les accusez d’avoir troqué leur âme. Le peuple burkinabé a du mérite et n’est victime que des turbulences politico-politiciennes de notre époque. Ce qui compte surtout, ce sont les grandes valeurs humaines qui habitent chacun de nous et qui font de notre pays un havre de paix. Reconnaissons aussi que gouverner un pays comme le notre, qui, à une époque de l’histoire avait été déclaré économiquement non viable n’est pas chose facile et nul n’est parfait sur cette terre. Le plus important est pour chacun de nous, tant ceux qui sont au pouvoir que ceux qui sont à sa conquête, de savoir s’arrêter un court instant pour se demander : Est-ce que mon peuple va au mieux de ce qu’il peut attendre de moi ? Qu’est-ce qui, à l’instant peut permettre aux burkinabés de ne pas connaître le sort de certains pays africains mieux nantis que nous mais qui ne connaissent pas la paix ? Merci d’y penser.

    • Le 27 octobre 2006 à 21:48 En réponse à : > Citoyen, vous êtes véritablement le vrai citoyen.

      Citoyen, votre réponse a le mérite de la clarté, de la plénitude doublée de tous les attributs d’un homme politique honnête que l’on aimerait voir gouverner le Burkina. Par conséquent, je vous propose de créer un parti politique car vos idées sont loin d’être minoritaires. Qu’en pensez-vous. Je vous transmettrai ultérieurement mes coordonnées. Ange Tampsoba, France.

      • Le 30 octobre 2006 à 12:39, par Citoyen En réponse à : > Citoyen, vous êtes véritablement le vrai citoyen.

        Merci pour les compliments, très cher compatriote. Il est un devoir pour nous, observateurs de la scène politique, de donner notre opinion, surtout quand on sait que nous sommes une jeune démocratie qui a le plus besoin que les animateurs de la vie politique de notre pays soient de plus en plus honnêtes et de moins en moins hypocrites. Je suis très sensible à ce qu’on dit de notre peuple. Chaque politicien fait des propositions et doit démontrer la pertinence de ses propositions ; et lorsqu’on perd il ne faut surtout pas insulter le peuple pour se vanger, il faut le reconnaître et chercher à se remettre en cause. Chacun de nous est né trouver le peuple dont il en fait partie, et partira également le laisser. Il faut peser les mots que l’on prononce avant de les laisser échapper. Le peuple n’est pas à confondre avec des personnes que Me Sankara aurait identifié ou aurait vu dans les circonstances où lui seul est témoin. Le jeu politique demande beaucoup de maturité et en Afrique nous avons beaucoup d’opposants mais peu de démocrates parmi eux. Merci surtout de partager mon opinion et surtout continuons à défendre la cause de notre nation autant que possible.

  • Le 26 octobre 2006 à 13:39 En réponse à : > Me Bénéwendé Stanislas Sankara : "Les Burkinabè ont perdu leur âme devant la nourriture"

    Devant la nourriture ? Ca je savais pas. je croyais que c’etait devant l’argent et le pouvoir (le naam) pour etre plus precis..

  • Le 26 octobre 2006 à 13:50 En réponse à : > Me Bénéwendé Stanislas Sankara : "Les Burkinabè ont perdu leur âme devant la nourriture"

    Ce Monsieur (Me Sankara) merite respect. Ils sont rares aujourd’hui au Burkina des gens qui pensent comme lui. Que Dieu te donne la force et surtout une bone santé et une longue vie pour NOTRE luttte. Fait attention á toi car aujourd’hui "ils" sont passés de la "Kalach" aux "petits produits noires" pour eliminer ceux qui ne pensent pas comme "eux".
    Un du peuple pour lequel tu te sacrifies.

  • Le 26 octobre 2006 à 13:52, par Un passant En réponse à : > Me Bénéwendé Stanislas Sankara : "Les Burkinabè ont perdu leur âme devant la nourriture"

    "les citoyens burkinabè ont perdu leur âme devant la nourriture, le besoin minimum vital. Pour 200 F CFA, 100 F CFA, ou moins, ils votent pour le CDP"

    "Certains citoyens burkinabé"........... au lieu de ce que vous dite , aurait été, bien compris et accepté, n’est ce pas maître ?
    En "homme politique averti" comme vous le pretendez, je crois qu’il faut eviter de vexer les honnetes citoyens burkinabé qui en majorité ont peut etre ( et j’en suis sure) de l’estime pour vous. Ne mettez pas tous les citoyens dans le meme sac. Et si c’est le cas vous en faite parie.

    Merci

  • Le 27 octobre 2006 à 18:35 En réponse à : > Me Bénéwendé Stanislas Sankara : "Les Burkinabè ont perdu leur âme devant la nourriture"

    Il faut être réaliste et dire les jours par leurs noms. Monsieur Bénéwendé Sankara au moins a le courage de dire les choses par leurs vrais noms.
    Ceux qui refusent de voir la vérité en face diront que c’est une injure au peuple. Mais les faits et actes de nos politiciens et autres montrent réellement que le Burkinabé est adepte de la "politique du ventre". Ce qui est vraiment dommage !!!j espère bien que les Burkinabé finiront par prendre connaissance que dépuis le 15 octobre leur situation économique et sociale ne fait que s’empirer et que les gourous du CDP continueront à jamais de piller les caisses de l’état.
    Nous nous ridiculisons davantage au yeux du monde en acceptant la tyrannie de Blaise compaoré et du CDP dépuis 19 ans.

    Alors je lance un appel à la jeunesse Burkinabé : Soyez vigilants et battez - vous pour vos droits !!!

    Merci Me Bénéwendé pour votre motivation à ramener un peu d’espoir dans ce pay !!!!

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