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Candidatures indépendantes : Le "Oui, mais..." du député Mahama Sawadogo

Publié le mardi 10 octobre 2006 à 09h15min

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Mahama Sawadogo

Si les candidatures indépendantes sont autorisées à l’élection présidentielle au Burkina, il n’y a pas de raison qu’elles ne soient pas permises aux municipales. Toutefois, leur autorisation ne doit pas se faire n’importe comment.

C’est ce que fait savoir, dans les lignes qui suivent, le député Mahama Sawadogo, pour qui le législateur, si jamais il doit autoriser cela, doit également énoncer des conditions précises à remplir.

Au Burkina Faso, la législation relative aux élections prévoit la possibilité de candidatures indépendantes uniquement dans le cas de l’élection présidentielle. Cette situation ne satisfait pas tous les acteurs politiques. En effet, si certains la trouvent bien fondée, d’autres, en revanche, pensent qu’elle ne se justifie pas et qu’en conséquence elle est inacceptable. Ces derniers souhaitent donc que la loi soit relue dans le sens d’autoriser les candidatures indépendantes aux élections législatives et locales.

Pour les partisans de cette autorisation, les candidatures indépendantes permettront le plein respect du droit de chaque citoyen, sous réserve des discriminations prévues par la loi, d’être électeur et éligible (être candidat). Par ailleurs, ces candidatures affranchiraient les citoyens militants de la dictature de leur parti. Cet argument apparaît comme le principal, car le premier est relatif à une discrimination légalement permise, et qui ne constitue pas une entrave absolue à l’exercice du droit d’être candidat.

Quant aux adversaires de l’autorisation de candidatures indépendantes, ils estiment que la Constitution, en son article 13, confère uniquement aux partis et formations politiques, le rôle de concourir à l’animation de la vie politique à l’information et à l’éducation du peuple, ainsi qu’à l’expression du suffrage. Ils avancent, par ailleurs que les candidatures indépendantes sont de nature à compliquer davantage la gestion des élections qui l’est déjà du fait du nombre important de partis politiques. Cet argument apparaît comme le principal dans la mesure où, si l’interprétation de la Constitution a permis les candidatures indépendantes à la présidentielle, cette même interprétation devrait pouvoir permettre ces candidatures aux élections législatives et locales.

Le fonctionnement des assemblées élues occulté

Après le rappel des arguments respectifs des partisans et des adversaires des candidatures indépendantes aux élections législatives et locales, et afin de pouvoir prendre position, les observations suivantes peuvent être faites :

- l’argumentaire des partisans a comme élément de référence le parti (mode d’organisation, fonctionnement) ;

- l’argumentaire des adversaires prend comme référentiel le processus électoral (organisation, gestion des élections) ;

- on remarquera qu’aucun des deux argumentaires ne se préoccupe du fonctionnement des assemblées élues.

Si l’on s’en tient à ces observations, on est tenté de conclure, comme l’autre, que les deux camps ont à la fois raison et tort du point de vue du fonctionnement des organes élus. Ce qui revient à dire que l’on pourrait passer de l’interdiction de candidatures indépendantes à leur autorisation sans conséquence notable. En réalité, les choses se présenteront autrement. En effet, le fonctionnement des assemblées élues, leur mode de prise de décision (en général le vote), le processus de prise de décisions (décisions partisanes transformées par le vote majoritaire en décisions de l’institution) sont tels qu’un élu indépendant est manifestement incapable de peser sur les décisions de ces assemblées.

Ainsi, si du point de vue du principe les candidatures indépendantes peuvent se justifier, du point de vue du mode de prise de décisions des assemblées élues, ces candidatures ne sont pas efficaces.

Choisir entre le principe et l’efficacité

Dès lors, le choix entre l’interdiction et l’autorisation de candidatures indépendantes pose une question de fond, à savoir lequel du principe ou de l’efficacité il faut choisir. Un tel choix, pour être objectif, ne peut être fondé que sur le rôle dévolu aux assemblées élues. Ce rôle étant la prise de décisions, le choix de l’efficacité s’impose. Le choix du principe a certes un avantage qui est l’intérêt personnel de l’élu indépendant, mais peut-on raisonnablement mettre cet intérêt et le rôle des assemblées de part et d’autre des plateaux de la même balance ?

Toutefois, si d’aventure le législateur devait, à l’occasion d’une relecture de la loi électorale, autoriser les candidatures indépendantes, il serait alors souhaitable qu’il les assortît de conditions, comme, par exemple, le parrainage de chaque candidature par un certain nombre de citoyens. Ce parrainage, utilisé dans certains systèmes électoraux, peut permettre de limiter les candidatures fantaisistes "pmub". Dans le même ordre d’idées, le législateur pourrait édicter des conditions comme la fixation d’un pourcentage de voix obtenues pour qu’un parti soit habilité à participer à la répartition des sièges dans une circonscription donnée. Cela contribuerait, sans nul doute, à limiter le nombre de partis de moindre envergure.

Mahama Sawadogo Député

Le Pays

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