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Vie chère au Burkina : On va souffler un peu

Publié le mardi 3 octobre 2006 à 08h02min

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Depuis le 1er octobre 2006, les Burkinabè commencent à retrouver le sourire. Ils peuvent même tourner en ville un bon moment sans courir le risque de voir leur char ou leur véhicule manquer de jus au détour d’une rue.

En effet, la baisse considérable des prix des hydrocarbures à la pompe, qui a coïncidé avec la rentrée scolaire 2006-2007, est une véritable bouffée d’oxygène. Cela faisait partie des revendications majeures des centrales syndicales, et il a fallu battre le pavé à maintes reprises pour que le gouvernement prenne conscience de la situation. C’est sans aucun doute la preuve que « seule la lutte paie » pour reprendre le cri de ralliement des syndicalistes.

Désormais, à la pompe, le coût du mélange baisse ainsi de 105 FCFA, celui du super 91 de 87 FCFA, celui du pétrole lampant de 45 CFA et celui du gasoil de 16 FCFA. Avant cette baisse, il n’était pas donné à tout le monde de rentrer à midi pour se reposer et être d’attaque à 15h. La plupart des travailleurs, qui n’arrivaient pas à s’en sortir, préféraient rester au service pour lire des journaux ou s’occuper de mille façons pour tuer le temps. On n’avait pas le choix. Maintenant qu’il y a eu la baisse des prix du carburant, on peut aller d’un secteur à l’autre selon ses intérêts du moment.

C’est à la faveur de la reprise des négociations avec le gouvernement, les 28 et 29 septembre 2006, que celui-ci a lâché du lest. Depuis le 5 mai 2006, c’était la rupture parce que le gouvernement avait fait dans la surenchère en augmentant les prix des hydrocarbures au cours même de négociation, dont un des points portait justement sur la baisse des prix des produits pétroliers. Le dialogue a été renoué grâce au Conseil économique et social (CES) et on a pu prendre connaissance de la réponse du gouvernement aux préoccupations des organisations syndicales. La vie chère, dit-on, n’est pas propre au Burkina Faso.

Nul ne peut nier cela, mais quand on regarde tout autour de nous, on n’a pas l’impression de vivre tous dans le même pays. A dire vrai, nous ne sommes pas tous logés à la même enseigne et cela est la résultante de deux forces. Pendant que nous y sommes, pourquoi ne pas réduire le train de vie de l’Etat pour colmater les brèches ? La hausse du SMIG de l’ordre de 6,5% en faveur des travailleurs les plus démunis aurait dû être faite depuis longtemps. Fallait-il attendre que le CES entre en jeu pour que le gouvernement revoie sa copie ?

Concernant le neuvième point, le gouvernement estime qu’il ne peut, en l’état actuel des ressources du pays, y donner satisfaction pour l’exercice budgétaire 2006. Est-ce à dire qu’on doit attendre qu’on découvre du pétrole à Ziniaré ou quelque part au Burkina pour commencer à espérer alors même que certains de ses thuriféraires disaient à qui ne voulaient pas les entendre que même si nous n’avons pas l’or noir, nous avons Blaise Compaoré ?

Franchement, c’est désespérant et le bout du tunnel n’est pas pour demain. Il faut le dire, la baisse des coûts du carburant relève d’un calcul politique avec la rentrée scolaire qui vient d’avoir lieu, celle universitaire qui se prépare et surtout, les législatives qui se profilent à l’horizon. On sait que le moment est venu de faire des concessions parce qu’on ne se rend pas massivement aux urnes, quand on est en proie au désespoir. Depuis que les syndicats ne cessent de prendre la rue pour réclamer du pain, avez-vous vu une fois ces honorables députés quitter leurs voitures luxueuses pour faire entendre leurs voix ?

Chez eux, au moins, ça va... comme d’ailleurs chez tous les membres du complexe politico-économique.

Dans Les échos du Tocsin du mois de juillet-août-septembre 2006, Jonas Hien, bien connu de nos lecteurs, n’a pas manqué de dire que le Burkina est en retard à cause de ces gros diplômés qui participent à la souffrance des populations en proposant de fausses solutions aux questions de développement. Ceux qui mentent le plus, a-t-il précisé, sont aussi les intellectuels de haut niveau. C’est ceux qui ont le diplôme du BEPC ou du BAC simple qui se battent le plus. Le reste, et dans plusieurs cas, on se cache derrière les diplômes et on ne sait rien faire. A chacun de méditer dessus.

La vie chère au Faso doit être une lutte permanente de tous les jours, comme ce fut le cas en France en 1793, quand le peuple allait réclamer du pain à Louis XVI à Versailles.

Le gouvernement, à travers ce qu’il vient de faire, a certes fait des efforts, mais d’autres points des revendications peuvent trouver des solutions. Les syndicats savent qu’ils ne peuvent pas tout avoir et même s’ils sont partiellement satisfaits des conclusions de la rencontre, ils se feront entendre dans les mois à venir. Le gouvernement de Yonli va respirer un peu et continuer son sport de masse en s’occupant d’autres choses.

Tant que le peuple ne crie pas famine, il croit que tout va bien. On n’est pas contre ceux qui érigent des bunkers à Ouaga 2000, mais il faut qu’ils comprennent que de l’autre coté, on a besoin du minimum pour survivre.

La paix sociale passe aussi par là, même si on traîne avec des dossiers pendants. Blaise a donc choisi de mettre balle à terre à la fois pour se donner un peu d’air et pour ne pas se parjurer sitôt la présidentielle passée. Il faut être juste un tant soit peu car calcul politique pour calcul politique, on ne peut pas reprocher à un gouvernement d’en faire car gérer les affaires de la cité c’est aussi s’exercer dans l’art du compromis et aussi le sens de l’opportunité.

Bien sûr, rien n’est jamais acquis éternellement, surtout pas la bouffée d’oxygène à la pompe car il ne faut se faire aucune illusion : ce n’est pas parce qu’on a baissé les prix aujourd’hui qu’ils ne peuvent pas à nouveau s’envoler à la faveur d’une poussée de fièvre à l’échelle internationale. Mais si on peut diminuer de 100 FCFA d’un coup, on ne peut raisonnablement pas augmenter dans les mêmes proportions en une seule fois, sauf à vouloir se suicider. Mais en attendant, il serait indécent de cracher dans la soupe qu’on vient de nous mitonner.

Justin Daboné

L’Observateur

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Vos commentaires

  • Le 3 octobre 2006 à 10:34 En réponse à : > Vie chère au Burkina : On va souffler un peu

    Ouf, on a failli étouffer. C’est bon mais... Maintenant, il faut que la question des avancements soit résolue.

  • Le 4 octobre 2006 à 02:33, par Théophile En réponse à : > Vie chère au Burkina : On va souffler un peu

    Mes chers frères et soeurs,
    Le gouvernement Burkinabé n’y est pour rien dans la baisse des prix du carburant. Pour ceux et celles qui comprennent un peu la dynamique des marchés mondiaux, ce sont les cours du brut qui ont accusé une baisse dans la semaine passée. D’où une baisse à la pompe dans presque tous les pays ’démocratiques’ du monde. Alors, ouvrez bien vos yeux et regardez autour de vous.

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