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FASOTEX Koudougou : mythe ou réalité ?

Publié le lundi 18 septembre 2006 à 07h38min

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Le site de VOLTEX devenu FASO FANI puis finalement FASOTEX fait partie de ces vestiges des grandeurs passées du pays que nous souhaitions visiter depuis pas mal de temps. Ce 12 septembre 2006, le projet a pu voir le jour.

Arrivés en effet à Koudougou, nous n’avons pas eu de mal à nous faire accompagner sur les lieux. Le simple fait de parler de cette usine aux pérégrinations proverbiales a délié les langues.

« Vous savez, nous dit T. Ouédraogo, cette usine a vu le jour grâce au premier Président du pays, Maurice Yaméogo, qui s’est battu pour son implantation après des négociations serrées avec des européens ». VOLTEX, négocié par le premier président et mis en place effectivement par le président Sangoulé Lamizana, fera les beaux jours non seulement des ressortissants de Koudougou et alentour mais aussi de bon nombre de Voltaïques devenus Burkinabé venus des autres régions du pays.

Dans les années 70, 80, il paraît que c’étaient des périodes de gloire. FASO FANI permettait à beaucoup de gens de vivre et de faire vivre leurs familles, à des commerçants de prospérer et à des métiers annexes de se développer.

Et puis, les produits étaient très enviés. Mais, dira G.Yaméogo, « la politique est venue tout gâter ». Et d’expliquer que les gouvernants ont fait le malheur de VOLTEX sous la IIIème République et sous la Révolution, lorsque l’usine a été rebaptisée FASO FANI. Elle sera utilisée encore plus comme une vache à lait. Ils ont trait l’usine, trait et retrait encore. Ses mamelles se sont asséchées, mettant les travailleurs à la rue et entraînant le déclin de Koudougou.

Ce triste sort aurait pu être évité, nous dira A. Ouédraogo, alors que chemin faisant, nous allions vers le site. « Si seulement, souligne à nouveau G. Yaméogo, les promesses faites durant les campagnes électorales avaient vu le jour, nous n’en serions pas là. Plus d’une fois, on a en effet promis de réveiller l’usine mais une fois les campagnes passées, on a oublié les promesses ». Et de concert, ils égrènent les paroles du chef de l’Etat en campagne en novembre 2006 : « On ouvrira Faso Fani incessamment, l’usine recrutera 400 employés par an !! Il faut que Koudougou renaisse ».

C’est vrai, reprend T. Ouédraogo, mais on aurait pu aussi, si nos relations étaient bonnes avec les pays voisins, et si nos dirigeants voulaient vraiment l’intégration, on aurait pu créer avec eux une chaîne de production en spécialisant chaque pays dans une filière spécifique. Mais voilà, nous sommes trop jaloux les uns des autres, et là non plus, le changement n’est pas pour demain.

C’est comme cela que nous sommes arrivés sur les lieux, dans ce climat pessimiste. Et nous n’avons rien trouvé sur place pour nous remonter le moral.

LE COUP DE MASSUE DEVANT LE SITE

Nous nous attendions en effet à voir, puisque le bruit courait que tout avait repris (les médias l’ayant même annoncé), une usine en pleine activité. Quelle ne fut pas notre surprise quand nous nous sommes retrouvés, à midi moins vingt minutes, sur le site de l’usine au secteur 6.

A 30 mètres de l’entrée, alors que nous prenons des photos, des vigiles (pas en tenue comme on en voit partout de nos jours devant les sociétés mais en civil) nous interpellent « eh eh, psst, psst.. ». On leur demande ce que nous voulons. Nous leur répondons : avoir accès à l’administration pour nous entretenir avec des responsables susceptibles de répondre à nos questions. Réponse : « Il n’y a personne, tout le monde est à Ouaga. Il n’y a que les nettoyeurs de machine ».
Notre question sort spontanément : « Donc, on ne travaille pas ici ? ». Les vigiles, visiblement gênés, nous disent : « Actuellement, il n’y a pas de commande. C’est pour cette raison qu’il n’y a personne. Sinon le Directeur du personnel et celui de l’exploitation sont à Koudougou mais ils sont déjà descendus ». L’après-midi, nous ne les retrouverons toujours pas.

Un employé, assez connu de Koudougou, qui désire rester dans l’anonymat, nous rejoint devant l’usine. On lui explique qu’on veut poser des questions sur les activités de l’usine. « tu vois, ce n’est ni le lieu ni le moment pour parler de cette affaire ».

Au même moment, un Blanc, marocain semble-t-il, sort des locaux : on décide de lui demander s’il fait partie de Fasotex : « Je ne suis pas de Fasotex », nous répond-il, visiblement agacé.

Notre interlocuteur anonyme nous fait savoir qu’il y a bien eu une commande d’impression de la part de la Semaine nationale de la culture et qu’elle a été satisfaite. Il ajoute : « Tu vois, on peut faire 3 à 4 jours sans commande, et sans commande, il n’y a pas véritablement de travail ».

Mais vous paye-t-on si vous ne travaillez pas à temps plein ? Notre interlocuteur sourit en disant : « bien sûr qu’on nous paye ».

Après renseignements, nous saurons qu’en fait, des anciens travailleurs de FASO FANI ont été pris par contrat pour former de nouvelles recrues qui sont d’ailleurs, pour la plupart, inconnues des Koudougoulais.

UN COMA QUI NE DIT PAS SON NOM ?

Oumar T. Ouédraogo, qui nous a accordé un petit entretien, nous dira : « Tournez, passez partout, vous ne verrez part les formateurs, aucun natif de Koudougou ».

Les contrats de formation ont expiré le mois passé et aucun renouvellement n’est en vue.

En tout cas, pas immédiatement, nous dit-on, dans la mesure où la société ne fonctionne que sur commande.

Sur le nombre d’employés, on nous dira : « Actuellement, il y a une équipe de moins de 40 personnes, chargée du nettoyage des machines ».

Sur les noms des clients passés ou futurs, on entend citer entre autres le SIAO, le FESPACO, la BAD, des groupements religieux...

Qu’en est-il des villas construites pendant les glorieuses années de Faso Fani, que les techniciens blancs ont occupées avant de les céder aux cadres voltaïques devenus burkinabé ? Une visite sur les lieux nous permet de constater qu’il n’y a plus que 3 ou 4 villas occupées ; le reste est à la merci des bandits.

Pour finir, nous décidâmes de rencontrer un ex-travailleur de Faso Fani pour savoir ce qu’il pense de Fasotex. C’est ainsi que Mahamady Ouédraogo, SG de F/CNTB nous accordera un entretien dans lequel le syndicat qu’il représente, refusera « de parler de ce qu’il ne connaît pas » autrement dit de Fasotex. « Franchement, je ne sais ce que c’est. Je pourrais parler avec vous de Voltex 1 et 2, de Faso Fani mais Fasotex, ce n’est qu’à la télé qu’on voit comme tout le monde ».

Mr Ouédraogo expliquera que les principes de base du droit ont été bafoués par l’autorité. Les travailleurs ont été mis à l’écart de la reconstitution de la société. La norme aurait voulu qu’ils participent à la réouverture de la boîte. « Mais nous sommes d’abord dans un premier temps, victime d’un déni de justice. La décision exécutoire en 8 jours de l’arbitre Pitroipa Emmanuel, dure depuis 5 ans, laissant environ 430 travailleurs ou leurs ayant droits dans les difficultés ». Et il ajoute : « que si l’Etat s’intéressait au sort des travailleurs, il allait rouvrir dans les 2 ans suivant la fermeture dans la mesure où, passé ce délai, les ex travailleurs n’ont plus un mot à dire sur la nouvelle société ».

A la question de savoir si Fasotex peut avoir le même succès que Faso Fani, il dira : « Ca va être difficile même avec des exonérations au niveau de la Sonabel, de la Douane.. , tant qu’une politique de production sérieuse n’est pas mise en place ».

Et cette politique serait d’abord de recruter beaucoup pour produire beaucoup, ensuite il s’agira de mettre en confiance les consommateurs nationaux sur la qualité des produits.

En tout cas, on se rendra compte, en interrogeant les uns et les autres au centre ville, que personne ne sait véritablement ce que devient Fasotex.

Revenus à Ouagadougou, nous sommes allés à la Direction mais nous n’avons pu rencontrer le Directeur Général qui était très occupé. C’est Mr Bazié, chargé de communication, qui nous recevra et n’estimera pas opportun de répondre au pied levé à nos questions. Il nous conseillera de rédiger une demande en bonne et due forme, ce que nous avons fait. Nous espérons que la semaine prochaine, nous pourrons vous communiquer les réponses à ces questions et vous donner le point de vue de la Direction de l’usine, pour l’équilibre de l’information.

C.Y
S.K

San Finna

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