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Les 10 maux de la démocratie burkinabè selon Clément Dakio

Publié le jeudi 14 septembre 2006 à 08h10min

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Les monstres de la démocratie sont légions dans les pays sous-développés. Au Burkina Faso on en compte malheureusement pas mal. Telle est la conviction solidement établie du président de l’Union pour la démocratie et le développement Toubé Clément Dakio qui, à travers la déclaration dont la teneur suit,égraine les dix maux de notre démocratie tout en proposant un forum national pour y remédier.

Déficit démocratique

Des conversations avec la plupart des responsables de partis et formations politiques burkinabé, il ressort que le processus démocratique burkinabé présente de graves insuffisances. Sur ce point, personne n’a eu à redire.

Nous, nous disons, sans ambages, que la démocratie sans « agoniser » au Burkina Faso, y est sérieusement malade. Cette affirmation n’est pas gratuite car justifiée par les faits suivants :

- le parti majoritaire a une telle prédominance sur l’opposition que ce parti peut agir comme un parti unique de fait. Or, naguère, le système de parti unique adopté par la quasi totalité des Etats africains a été beaucoup décrié, puis rejeté au profit du multipartisme démocratique à la suite du discours de la Baule ;

- la loi électorale ne garantit pas des élections libres et justes ;

- le processus électoral est peu fiable ;

- l’état de droit n’est pas opérationnel dans tout le Burkina. Tous les fonctionnaires et les gouvernants ne sont pas soumis à l’état de droit et à des règles transparentes dans l’exécution de leurs fonctions ;

- les droits civils, politiques, économiques et sociaux ne sont pas garantis pour tous de façon égale ;

- les élections ne sont pas libres et justes. Les procédures d’enregistrement et de vote ne sont pas accessibles et inclusives pour tous les citoyens. C’est une faible proportion de l’électoral qui vote ;

- le financement public des partis politiques est faible. Il n’est pas efficace pour permettre aux partis de jouer efficacement leur rôle constitutionnel qui est de concourir à l’animation de la vie politique, à l’information et à l’éducation du peuple ainsi qu’à l’expression du suffrage ;

- les règles et procédures de financement des élections ne sont pas toujours respectées ;

- iI n’y a pas une pleine participation des citoyens à la gestion des affaires publiques ;

- bien que les femmes représentent plus de 50% de la population burkinabè, elles continuent d’être sous- représentées tant au niveau des dirigeants politiques qu’à celui des représentants élus. Il est donc nécessaires de promouvoir une participation accrue des femmes à la gestion politique et civique.

Nécessité d’un Forum national des partis politiques

La quasi totalité des acteurs de la scène politique burkinabè trouvent nécessaires des reformes touchant au processus démocratique. C’est, justement pour proposer des solutions aux écueils à la démocratie burkinabé en vue de son renforcement que le forum national des partis et formations politiques est souhaité par le Front démocratique républicain (FDR), appuyé par plusieurs partis politiques dont l’UDD. Ce forum devrait donc avoir droit de cité.

La rencontre des partis politiques organisée dans le cadre de cette initiative le 2 septembre 2006, a enregistré l’adhésion de plusieurs partis, ce qui doit inciter les bonnes volontés à la soutenir fermement. Car, il ne faudrait pas que d’éventuels fossoyeurs de tout acabit, tapis dans l’ombre, aient raison des défenseurs de la « bonne idée » du FDR ou qu’ils aient raison de la raison. Ce forum serait pour les partis et formations politiques à travers leurs représentants :

- une occasion d’établir le dialogue, d’échanger leurs expériences électorales passées ;

- une tribune pour faire le diagnostic du processus démocratique burkinabé, puis proposer des thérapeutiques pour un renforcement de la démocratie au Faso.

C’est à croire que c’est actuellement la tribune la plus appropriée pour débattre objectivement des problèmes touchant au processus démocratique burkinabè. A mon avis, tant que les écueils à la démocratie ne seront pas levés, il n’y aura pas de renforcement de la démocratie au pays des hommes intègres.

Or, pour l’UDD, la démocratie est un préalable pour susciter et canalyser le maximum de bonnes volontés et d’efforts utiles à l’oeuvre de construction nationale. Le renforcement de la démocratie au Faso peut entraîner non seulement l’accélération de la croissance et du développement économiques, mais aussi jouer un rôle essentiel dans la répartition du revenu national entre les individus et entre les groupes sociaux. En d’autres termes, l’amélioration de la démocratie influe non seulement sur la taille du gâteau social, mais aussi sur son partage.

La plupart du temps pour tout changement majeur dans une société, il y a des gagnants et des perdants, ces derniers ayant la possibilité de bloquer le changement. Mais, au Burkina, pour le renforcement de la démocratie il n’y aura pas de perdants. Tout le monde gagnera :

- les autorités au pouvoir, car elles éviteront ainsi les inconvénients d’un régime anti-démocratique ;

- les autres groupes sociaux, car ils bénéficieront d’une nouvelle répartition plus favorable du revenu national.

Regroupements de partis et formations politiques

Certains responsables de partis ou de formations politiques préconisent des regroupements de partis politiques pour participer avec sérénité à la vie politique. Mais cela, a mon avis, ne suffira pas pour résoudre le problème du déficit démocratique.

Pour résorber le déficit démocratique, il faut d’abord reformer la loi électorale et le processus électoral. Les regroupements des partis et formations politiques ne pouvant être efficaces qu’en tant que mesures d’accompagnement de ces réformes. Les partis et formations politiques qui croient que les seuls regroupements suffiront à leur assurer un succès significatif se font des illusions et déchanteront après la prochaine échéance électorale.

Nous pensons qu’il faut, en bonne démocratie, respecter le principe constitutionnel de la liberté de création et de fonctionnement des partis.

Toute contrainte de nature à entraver ce principe est anti-constitutionnel, arbitraire et donc anti-démocratique. Les regroupements possibles de partis et formations politiques ne doivent se faire sous aucune contrainte de quelque nature que ce soit contrairement à la volonté des fossoyeurs de la démocratie.

Construisons progressivement et sérieusement la démocratie burkinabè, sans imiter servilement les autres. Les regroupements de partis politiques se font généralement sur la base de considérations électoralistes. Or, les partis politiques doivent aussi assurer un rôle constitutionnel de formation et d’éducation du peuple burkinabè.

C’est là une tâche importante et considérable, à peine entamée que l’action publique semble reléguer au second plan puisque les financements publics déjà faibles, accordés aux partis politiques et répartis entre eux bénéficient surtout aux grandes formations politiques, lesquelles ont essentiellement des visées électoralistes. Or, ce rôle de formation et d’éducation du peuple Burkinabé est, à mon sens, une priorité.

Des financements publics conséquents des partis politiques permettraient à la majorité des partis de procéder à la formation et à l’éducation du peuple burkinabè et, en même temps, de renforcer leur capacité d’organisation pour encourager la participation populaire. Chaque parti politique devrait alors concevoir des stratégies efficaces pour étendre son action non seulement dans nos villes, mais aussi dans nos compagnes c’est à dire dans le « pays réel », dans le « Burkina profond ».

Une véritable volonté politique viendrait à bout de ceux qui ne manqueraient pas d’opposer la contrainte financière. Tout cela pourrait être opportunément discuté dans le cadre du forum national souhaité par le FDR. L’UDD entend donc renforcer sa capacité d’organisation pour encourager la participation populaire.

Toutefois, dans un éventuel regroupement avec un ou plusieurs partis ou formations politiques, l’UDD devrait tenir compte de son projet de société fondé sur l’attachement de ce parti aux valeurs de justice, d’égalité, de liberté, de démocratie, car elles sont le fondement de la paix et du développement.

Une bonne démocratie devant rendre le Burkina prospère et le Burkinabé comme un poisson dans l’eau, c’est à dire tout à fait heureux, l’UDD invite tous les démocrates à travailler au renforcement de la démocratie en tant que forme de gouvernement où tous les citoyens naissent libres et égaux en droit et dans laquelle la souveraineté émane du peuple et non d’un individu ou d’un groupe d’individus quelles que soient leurs qualités.

Malheureusement, il y a à travers le monde des partis ou des régimes politiques qui, pour des raisons d’égoïsme ou de dogmatisme, vident la démocratie de son contenu réel. Les monstres de la démocratie sont légion dans les pays sous-développés à cause du faible niveau socioculturel de leurs populations. L’UDD condamne pareille imposture, car elle est fortement attachée à l’alternance démocratique au pouvoir.

Bien qu’il ait été constaté que la démocratie est déterminante pour la prospérité économique des pays à régime démocratique, les sociétés ne sont pas naturellement attirées par la bonne démocratie. C’est pourquoi nous invitons tous les démocrates et toutes les bonnes volontés à ne pas baisser les bras quant à la lutte pour le renforcement de la démocratie au Burkina Faso.

En effet, c’est la condition sine qua non de la paix et de la prospérité de chaque Burkinabè.

Toubé Clément Dakio
Président de l’UDD

Observateur Paalga

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