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Grand écran burkinabè : La solution de relance

Publié le mardi 5 septembre 2006 à 07h56min

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Les cinéphiles sont privés du grand écran parce que la quasi totalité des salles de cinéma est fermée. Des hommes du milieu, loin de croire que le cinéma paye le lourd tribut du boom des télécommunications (télévision, Internet, DVD, VCD, vidéo clubs) proposent plutôt des solutions de relance des salles de cinéma en tenant compte des nouvelles réalités.

Les portes du ciné Burkina, du ciné Kadiogo ou encore du ciné Sagnon sont toujours fermées, à l’instar de bien d’autres cinés de renom qui ont fait le bonheur de millions de cinéphiles à travers le pays. La Société nationale du cinéma burkinabè (SONACIB) chargée de la gestion desdites salles a été liquidée par l’Etat.

L’Association des auteurs, réalisateurs et producteurs africains (ARPA) venue à la rescousse en 2004, a mis la clé sous le paillasson en 2006. M. René Bakala, un ex-opérateur de la SONACIB, après 20 ans de service, affirme que le cinéma burkinabè ne sait jamais mal porté, avant de lancer : « Lors de la liquidation de la SONACIB, l’Etat a discuté avec les gens d’en haut (NDLR : les patrons.). Il n’a pas été suffisamment éclairé pour savoir que la vraie information se trouve en bas avec les agents ». Selon lui, les salles de cinéma auraient pu bien être gérées par les ex-agents de la SONACIB parce qu’ils ont les solutions de relance du cinéma burkinabè. L’Etat doit, confit-il, tout simplement revoir sa politique de gestion des salles.

M. Yacouba Kabré, lui aussi, un ex-opérateur de la SONACIB aujourd’hui gérant d’une salle de ciné à Koudougou embouche la même trompette. Les cinéphiles veulent voir des films à leur goût. Il déplore le fait que l’Etat continue d’empêcher le grand écran de projeter des films « supposés » violents et pornographiques au détriment de vidéo clubs non réglementaires. Selon lui, la commission de censure doit mettre une règlementation en vigueur. « Il suffit d’interdire l’accès aux salles au moins de 18 ans » , propose-t-il.

M. Bakala, quant à lui, ne manque pas d’image pour interpeller ladite commission de censure. « Le cinéma, c’est comme un bar où on interdit la vente de l’alcool. La fermeture de ce bar est inévitable », martèle-t-il. Les deux ex-agents de la SONACIB soutiennent que ce sont les salles de ciné qui payent les taxes, révèlent les films au grand public et font vivre les réalisateurs. Pour eux, cette mission est propre au grand écran et rien d’autre ne peut arracher au cinéma cette fonction. »A Hollywood ou au Festival de Cannes, on parle de films 35 mm et l’Etalon de Yennenga se gagne avec ce type de bande propre au cinéma », rappelle M . Bakala. Contrairement à ceux que beaucoup de gens pensent, les deux opérateurs restent convaincus que la prolifération des chaînes de télévision, des DVD, VCD et des salles de vidéo ne constituent en rien, une menace pour le grand écran.

Ils estiment plutôt que le cinéma et la télévision sont complémentaires. « Ceux qui viennent au ciné ont des télévisions et certains ont des antennes paraboliques à la maison, expliquent-ils. M. Kabré déclare le sourire aux lèvres, qu’il se réjouit de savoir que le ciné Burkina à Ouagadougou et le ciné Sagnon à Bobo-Dioulasso aient été confiés à la Caisse nationale de sécurité sociale avec, pour mission, d’être opérationnels, avant le FESPACO prochain. Toutefois, il a une inquiétude. Il se demande jusqu’à quand va durer cette donnée, juste peut-être le temps du FESPACO ? s’interroge t-il.

M. Bakala prévient :» La fermeture des salles de cinéma finira par pertuber le FESPACO ». Pour lui, il faut une enquête sérieuse de la part de l’Etat qui tienne compte de leurs besoins pour relancer le secteur, sinon les cinéphiles vont perdre la culture du cinéma. « Ils se décideront de retourner dans les salles de cinéma quand le FESPACO aura déjà pris fin. Un festival sans cinéphiles dans les salles sera une catastrophe pour l’image du pays organisateur du FESPACO », craint-il.

Aboubakar Zida dit Sidnaba, révélé au grand public grâce au cinéma burkinabè et qui vient de sortir un nouveau film ( Matty, la tueuse) est de cet avis. Pour lui, à défaut d’ouvrir d’autres salles de ciné, il faut conserver celles qui sont là. « Imaginez qu’en février ,il n’y ait pas suffisamment de salles pour le FESPACO, ce sera honteux «  ! Par ailleurs, il pense que dorénavant, le Bureau burkinabè des droits d’auteur doit être à même de contrôler le milieu des vidéo clubs.

Les films burkinabè, une solution

Pour bon nombre du milieu cinématographique, les films du cinéma ne répondent plus aux aspirations du public et la meilleure façon de sauver l’exploitation et la distribution est de produire des films burkinabè qui ne manquent pas de succès. Les ex-opérateurs de la SONACIB partagent entièrement cette vision. Pour eux, des films comme Ouaga Zoodo, Tassouma ou encore l’Or des Younga ont fait à chaque fois, salle comble. Cette situation démontre clairement qu’à l’image des anciens réalisateurs, les nouveaux ont aussi du talent.

Sidnaba abonde également dans le même sens mais pour lui, c’est l’argent qui fait défaut. « Si nous avons des fonds d’appui, nous serons plus productifs. Il suffit d’une année d’expérience et on verra les résultats ». Selon lui, si l’Etat subventionne des organisations comme les partis politiques, il est possible d’en faire autant pour les réalisateurs. Parce que « les hommes de culture contribuent aussi à l’éveil des consciences », indique-t-il .

Pour l’heure, les ex-opérateurs espèrent qu’un diagnostic sérieux tenant compte de leurs préoccupations permettra de relancer les salles de ciné, de sortir les travailleurs du chômage et d’offrir une tribune de confirmation ou de révélations aux réalisateurs. En attendant, « des accrocs du cinéma continuent d’aller s’asseoir devant les salles de ciné fermées. Ils tournent en rond. Le ciné, les films projetés sur grand écran, c’est leur choix.. Mais de nos jours il manque... », martèle Yacouba Kabré.

Hamadou TOURE (hatoure@yahoo.fr)


Les salles de cinéma n’ont pas évolué

Aujourd’hui beaucoup d’entre elles doivent être rénovées afin d’assurer un minimum de confort et de sécurité aux cinéphiles. Certaines salles sont des lieux où l’on déverse les ordures.

Certaines n’ont pas de toilettes extérieures et les clients se soulagent à même le mur à telle enseigne qu’on se sent mal à l’aise une fois aux abords du cinéma, à cause de l’odeur repoussante des urines. D’autres sont complètement délabrés et les sièges en mauvais état. Il faut aussi que des mesures soient prises pour que lesdites salles ne ressemblent pas aux vidéo clubs où l’ambiance est connue. Chacun grouille pour se faire une place lorsqu’il y a un film qui a du succès. Après, il faudra s’arranger pour ne pas perdre son portefeuille, son portable...

Si ce minimum n’existe pas, l’envie d’aller au cinéma disparaît et au détriment du grand écran, on préfère payer 50 F (au lieu de 200 F ou 300 F voire 1 000 F au cinéma) dans le vidéo club d’à-côté.

H. T.

Sidwaya

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