Il y a 12 ans, l’Observateur rencontrait Paul Nikièma dans le cadre de son ex-rubrique Médiascopie : c’était en août 1994. Sous la conduite de notre redacteur en chef d’aujourd’hui, alors jeune journaliste frais émolu.

Grand commis de l’Etat, Paul Nikièma l’a été assurément. Magistrat de formation, il a bien connu le premier président, Maurice Yaméogo.

En effet, dans le premier gouvernement de Ouezzin Coulbaly que présidait Yvon Bourges, Paul Nikièma occupait déjà le portefeuille de ministre de la Jeunesse, des Sports, de la Formation technique et professionnelle.

Ensuite, il eut à gérer successivement le portefeuille de l’Enseignement primaire et secondaire, des Finances avant de se retrouver au département de la Santé publique et, enfin, à l’Information et au Tourisme dans le gouvernement du 8 décembre 1965, le dernier de Maurice Yaméogo et de la 1re République.

De 1981 à 1983, date de son admission à la retraite, Paul Nikièma a été président de la Cour suprême. C’est donc dire qu’en termes de grand commis de l’Etat, on aurait pu difficilement trouver mieux que celui que nous pleurons aujourd’hui.

Pour la petite histoire, disons que Paul Nikièma peut être considéré comme un miraculé. Et pour cause : prématuré (il est venu au monde à 7 mois), il eut droit à la vie sur intervention d’une sage-femme, nouvellement affectée à Ouagadougou (fait rare à l’époque) et dont la maman de Paul fut la première parturiente.

Evidemment, la couveuse était méconnue à cette période-là et c’est dans du coton que le nouveau-né dût séjourner deux mois durant pour retrouver un état assez satisfaisant. C’est donc peu dire que d’affirmer que le petit Paul eut la vie sauve grâce à cette sage-femme. C’était exactement le 16 mars 1924, à 3 heures du matin.

Battant, Paul Nikièma l’a été assurément. D’abord instituteur, puis agent de l’Administration générale, greffier, il fut enfin magistrat de son état. Mieux, pendant trois ans, il fit partie de la sous-commission de l’ONU contre le racisme et la discrimination raciale et pour la protection des minorités.

Clamant toujours à haute et intelligible voix le fond de sa pensée, ce patriarche qui a rejoint les ancêtres estimait que si les Voltaïques ont été mesquins, les Burkinabè le sont encore davantage.

Et, pour lui, le contraire eût été à l’encontre des lois de l’évolution. Et à entendre ceux qui l’ont côtoyé et connu, Paul Nikièma fut un exemple d’intégrité. Ce n’était pas un politique. Ce n’était qu’un homme au sens plein du terme. Et ce n’est peut-être pas pour rien et sans qu’il sache exactement pourquoi et comment, qu’il avait été appelé au premier gouvernement de Ouezzin Coulbaly.

Voilà ainsi peint, et ce, à grands traits, le grand serviteur de l’Etat que la famille Nikièma et le Burkina pleurent aujourd’hui. Ainsi s’en est allé un grand serviteur de l’Etat. Un Burkinabè.

Pour la petite anecdote, le regretté a eu la chance ultime, alors qu’il était gravement malade, de voir le mariage du dernier des ses enfants, Wilfrid, célébré le 12 août , et de sa nièce, Angélique Kyelem, intervenu le samedi 26 dernier seulement.

Boureima Diallo
L’Observateur Paalga