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Corruption et fraude douanière : Le REN-LAC interpelle le ministère des Finances et du Budget

Publié le jeudi 17 août 2006 à 07h59min

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Suite aux dénonciations qu’il a publiées en juin dernier sur le phénomène de la corruption dans et autour des bureaux de douanes de Cinkassé et de Bittou à la frontière Burkina-Togo, le Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC) a reçu de nouvelles plaintes de transporteurs routiers et d’opérateurs économiques qui dénoncent la persistance de la fraude douanière.

Des observations répétées et des enquêtes sur le terrain ont permis, en effet, de constater que plusieurs camions lourdement chargés de marchandises diverses, en provenance du Togo ou du Ghana, échappent au cordon douanier, entrent dans la ville de Ouagadougou et déchargent sans être inquiétés par le dispositif de contrôle des douanes. Les informations contenues dans cet article ont fait l’objet d’une saisine administrative adressée le 11 juillet 2006 au ministre des Finances et du Budget. En attendant qu’une suite soit donnée à cette saisine, le REN-LAC rend publics les résultats de ses enquêtes.

Samedi 17 juin 2006. Il était 23 heures lorsque notre informateur a joint un de nos agents au téléphone. « Les camions dont je vous avais parlé ont commencé à rentrer dans la ville », a-t-il indiqué avant de lui donner rendez-vous au croisement de l’Avenue Houari Boumédienne (devenue Avenue de la Cathédrale) et de l’Avenue du Dr Kwamé N’Krumah.

Entrés dans la ville par la route de Koupèla, ils prennent un bout de la Circulaire (l’Avenue Teng-Soaba), se déportent sur l’Avenue Charles-de-Gaulle, empruntent l’Avenue Babanguida, rejoignent l’Avenue de la paix (via Boinsyaaré) pour se retrouver sur l’Avenue de la Cathédrale. Selon le dispositif douanier, ces camions sont censés être escortés par la douane depuis la frontière jusqu’au bureau des douanes de Ouaga-Gare-Internationale (Ouagarinter). Or, en bifurquant avant le point normal d’arrivée, les camionneurs violent délibérément le cordon douanier, sans doute avec la complicité de contrôleurs qui feignent d’ignorer la manigance. La violation des dispositions douanières était si flagrante que c’est en pleine nuit, de minuit à 5 heures du matin, que les camions déchargent sans la moindre présence d’un contrôleur de la douane. Et pourtant le règlement douanier est ferme. Il stipule en substance qu’aucune opération de déchargement ne doit se faire en dehors des heures de travail qui sont comprises entre 7h 30 et 18 heures ; sauf pour un cas spécial. Mais dans tous les cas de figure, un douanier doit obligatoirement assister à l’opération.

Parmi les camions repérés dans la nuit du samedi 17 au dimanche 18 juin, nos enquêteurs ont relevé :

- le camion immatriculé 11 JJ 0608 BF qui a déchargé devant la boutique dénommée Etablissement Ouédraogo Issa et frères, commerce général située sur l’Avenue Patrice Lumumba porte n° 392 côté sud du marché Rood woko ;

- le camion immatriculé 11 LL 3130 BF contenant des bidons d’huile de 20 litres dans une cour située sur l’Avenue de la grande Mosquée, rue 1.24, porte n° 263 ;

- le camion immatriculé 11 JJ 0868 BF contenant des sacs de farine de blé devant une boutique située sur l’Avenue de la grande Mosquée avant la porte n°128 ;

- le camion immatriculé 11 LL 1574 BF devant la cour située sur l’Avenue de la grande Mosquée porte n°128.

Dans la nuit du dimanche 2 au 3 juillet, soit deux semaines après le premier constat, il nous a été donné de voir un nouveau déferlement de camions remorques violant impunément le cordon douanier. En provenance de la frontière togolo-burkinabè comme les premiers, ils sont passés devant tous les postes de contrôle sans être inquiétés. Probablement surpris par la levée du jour, les camions suivants rôdaient dans les alentours du marché de cola jusqu’à 5 heures du matin. Il s’agit :

- du camion de couleur jaune immatriculé 11 LL 7170 BF ;

- du camion de couleur bleu immatriculé 11 KK 1283 BF ;

- du camion togolais immatriculé RT 7038 K.

Comme on peut le constater, il s’agit bel et bien d’une fraude douanière bien ficelée qui bénéficie incontestablement de complicité dans le système douanier. Sinon comment comprendre que tous ces camions puissent échapper au contrôle sur toute la ligne. Du bureau frontalier de Bittou jusqu’à l’entrée de Ouagadougou, on compte plusieurs postes réputés qui ne manquent pas de moyens de mettre les fraudeurs hors d’état de nuire à l’économie nationale. Hélas, les délinquants économiques semblent bénéficier d’une impunité difficile à justifier. Ce que dévoile ici l’enquête du REN-LAC (ont) n’est certainement que la partie visible de l’iceberg. Il est tout à fait inadmissible que ces camions, qui transportent des produits dont l’importation de certains est prohibée ou soumise à une réglementation, puissent continuer à truquer le jeu économique. Dans les chargements que les enquêteurs ont pu observer, se trouvaient en effet de l’huile, de la farine de blé, du sucre, des piles,..., des denrées de première nécessité dont l’introduction devrait respecter quelques règles de la République visant à protéger les unités industrielles nationales.

Pour toutes ces raisons, le REN-LAC a décidé de faire une saisine administrative adressée au ministre des Finances et du Budget, premier responsable de la douane, au lieu d’une simple dénonciation par voie de presse. Au terme du délai réglementaire de deux semaines à observer après le dépôt de la saisine effective depuis le 17 juillet 2006, le REN-LAC est en droit de rendre publics les résultats de ses investigations. Il ose croire que la saisine administrative entreprise sera suivie d’effet et connaîtra un aboutissement allant dans le sens de l’intérêt du Trésor public et celui de l’économie nationale. Toutefois, il reste vigilant et s’engage à tenir l’opinion publique informée sur les suites qui seront données à cette saisine administrative et à toutes les autres en cours et à venir.

Au-delà de l’autorité exécutive, il est également important d’interpeller la conscience des citoyens en général et des opérateurs économiques en particulier sur la nécessité de dénoncer ces dérives qui compromettent le jeu normal du commerce et de l’économie. Laisser-faire comme semblent se complaire certains agents de la douane serait considérer la gangrène de la corruption qui nourrit la fraude comme une fatalité. Le REN-LAC rappelle une fois encore que seule une volonté commune de barrer la route à ces pratiques inacceptables peut permettre de garantir une économie saine et donc un développement viable et profitable à tous.

Le REN-LAC se propose de publier vos réactions, vos suggestions, vos dénonciations, si cela est conforme à la déontologie et à l’éthique professionnelle. Vos critiques et suggestions sont les bienvenues. Pour toutes informations et suggestions, contactez-nous à l’adresse suivante : Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC) 01 BP : 2056 Ouagadougou 01, Tél. : 50 -33- 04- 73, Email : info@renlac.org, site : http: //www.renlac.org. Tél. vert : 80-00-11-22 (gratuitement).

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 17 août 2006 à 15:01, par Larba En réponse à : > Corruption et fraude douanière : Le REN-LAC interpelle le ministère des Finances et du Budget

    Je suis personnellement tres content de la demarche du REN-LAC et l’encourage a poursuivre ses efforts de transparence dans ses actions. J’espere vivement que les autorites competentes saisiront l’opportunite du travail a moitie fait par le REN-LAC pour jouer sa partition. Ceci participe de la Bonne Gouvernance plus que tous les discours savants que l’on entend...

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