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Renouvellement des membres de la CENI : Pour l’UNIS, il faut reporter la réunion d’aujourd’hui

Publié le mercredi 16 août 2006 à 08h04min

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C’est, en principe, ce mercredi 16 août 2006 que les partis politiques doivent se retrouver pour désigner leurs représentants à la Commission électorale nationale indépendante (CENI).

En attendant, l’Union nationale pour l’indépendance et la solidarité (UNIS), qui se dit oubliée élève la voix pour, non seulement réclamer sa place, mais aussi proposer de surseoir à ladite réunion afin qu’ensemble les partis puissent trouver des solutions consensuelles pour l’installation de la CENI.

D’où cette lettre ouverte au ministre délégué, chargé des collectivités territoriales, dont copie nous est parvenue.

Lettre ouverte à Monsieur le Ministre délégué, chargé des collectivités territoriales

A l’occasion du renouvellement des membres de la CENI dont le mandat expire le 27 septembre prochain, le ministre délégué, chargé des collectivités territoriales, a échangé avec les responsables des partis politiques le mercredi 9 août dernier dans la salle de conférences du ministère des Affaires étrangères, dans le but de les informer sur les modalités de ce renouvellement. Au cours de ces échanges, il est apparu des clivages dans la détermination des partis et formations politiques de l’opposition et de ceux de la majorité.

Une autre préoccupation et pas des moindres a été soulignée par le représentant de l’Union Nationale pour l’Indépendance et la solidarité (UNIS), à savoir l’iniquité de l’article 5 de la loi qui dispose que la CENI est composée de « cinq personnalités désignées par les partis et formations politiques de la majorité ; cinq personnalités désignées par les partis et formations politiques de l’opposition ; cinq représentants des organisations de la société civile... ».

Le représentant de l’UNIS a demandé au Ministre, dans le cadre d’une bonne administration des élections, de relire cet article pour prendre en considération la représentation des partis et formations politiques qui ne se réclament ni de l’opposition ni de la majorité présidentielle, comme l’est son parti. Le Ministre, s’il a admis la pertinence de la requête du représentant de l’UNIS, a argué des délais devenus trop courts pour aborder la question actuellement. Nous pensons que pour plusieurs raisons, c’est à tort que le Ministre n’a pas voulu prendre en compte immédiatement la proposition du représentant de l’UNIS.

La première raison tient au fait qu’il n’appartient pas à la loi de déterminer les positionnements politiques des formations et partis politiques dans un pays. Les partis et formations politiques font des alliances en fonction de leurs intérêts. Ces intérêts peuvent être conjoncturels, et là les alliances le sont aussi, ou structurels et dans ce cas il se crée des collectifs, des fronts, groupes, etc. qui durent plus ou moins longtemps. Mais ces alliances ne sont nullement figées au risque d’être immuables. La mission d’une bonne loi n’est pas de « formater » les opinions politiques, mais plutôt de favoriser leur meilleure expression.

L’ADF/RDA veut le beurre et l’argent du beurre

L’histoire politique de notre pays est si riche en alliances que nous ne reviendrons pas sur cette question. Nous voulons souligner seulement que presque tous les partis et formations politiques qui se réclament de l’opposition d’aujourd’hui ont eu à fricoter un jour avec le pouvoir de Blaise Compaoré, depuis le Front populaire à nos jours.

De ce point de vue, il nous semble imprudent pour certains partis de « chercher bagarre » à l’ADF/RDA. Là où ils sont le plus fondés à le faire, c’est la prétention du parti de l’éléphant, participant au gouvernement du Président Blaise Compaoré avec deux ministres dont son président avec ce que cela comporte comme conséquences politiques de vouloir se réclamer de l’opposition au pouvoir de ce dernier. C’est vouloir tout simplement le beurre et l’argent du beurre.

En déclarant que « c’est aux partis politiques de se déterminer, de dire leur appartenance, ce n’est pas à l’AAdministration de le faire », le Ministre délégué a parfaitement raison, si, et seulement si il était loisible pour n’importe quel parti ou formation politique de se réclamer de la majorité présidentielle ! En effet, le rattachement à l’opposition est gratuit, sans frais, mais l’inverse n’est pas vrai. Si monsieur le Ministre ne le sait pas, l’appartenance à la majorité présidentielle obéit à des règles et procédures connues par les seuls responsables de cette famille politique. On n’y entre pas comme dans un marché ou un moulin ou par une simple proclamation à l’issue d’une délibération de l’organe dirigeant d’un quelconque parti ou formation politique.

L’appartenance à l’opposition ne demande pas en fait une procédure quelconque au delà de la proclamation d’appartenance des dirigeants des organes des formations et partis politiques. D’ailleurs, l’appartenance à l’opposition, contrairement aux propos de notre bon Ministre, n’est pas toujours laissée à l’initiative des partis et formations politiques, mais résulte souvent non pas d’une décision volontaire, mais d’une sanction politique à l’égard de ceux qui ne se comporteraient pas bien au sein de la majorité.

Les partis politiques ne cessent de naviguer d’un bord à l’autre

Ainsi, pour la plupart des partis et formations politiques, l’appartenance à l’opposition ou à la majorité ne tient qu’à un fil qui peut se rompre du jour au lendemain sans crier gare. Aussi, les partis et formations politiques ne cessent de naviguer d’un bord à l’autre de ces deux pôles que constituent l’opposition et la majorité au gré de leurs intérêts du moment. L’on pourrait comprendre votre propos ci-dessus, monsieur le Ministre, si les partis politiques burkinabé s’alliaient ou s’opposaient sur des bases idéologiques ou programmatiques.

Mais, il n’en est rien dans la mesure où dans ce que l’on appelle « majorité présidentielle », vous trouverez aussi bien des partis se réclamant du libéralisme, de la social-démocratie que du socialisme !Il en est de même de l’autre côté de la barrière, chez ceux se réclamant de l’opposition. Nous, les Indépendants, pensons que la ligne de démarcation politique dans notre pays ne passe pas par l’appartenance idéologique, comme vous le constatez vous-même à partir du développement qui précède. Pour nous, cette ligne est imaginaire et ne traduit pas forcément l’opinion de la grande masse des burkinabé qui n’aspirent qu’à vivre dans la paix, l’union et la justice sociale auxquelles ils n’ont pas encore droit.

L’UNIS a été créée pour porter les aspirations de ces hommes et femmes qui ne se reconnaissent ni dans la majorité ni dans l’opposition et qui se doivent d’être représentés dans les instances de la CENI. En effet, cette frange des Burkinabé pense que dans ce pays on a besoin du concours de tous pour la construction du pays (opposition tout comme la majorité). Ces deux tendances politiques proposent ou appliquent des programmes qui présentent des aspects positifs et moins positifs. Aucun des programmes ne peut être rejeté en bloc ou approuvé intégralement. La politique menée par la majorité comporte des éléments positifs et des éléments moins satisfaisants.

L’UNIS par exemple, se satisfait de la conduite de la politique étrangère de notre pays par le Président Blaise Compaoré. burkinabè, car cette politique a permis le respect au dehors de notre pays et rendu incontournable la place de Ouagadougou dans le solutionnement de bon nombre de problèmes africains. L’UNIS ne peut que saluer et encourager nos dirigeants à persévérer dans cette voie de l’honneur et de la dignité.

L’opposition manque d’organisation, de lucidité et de programme alternatif

Parallèlement à ces éléments de satisfaction au plan de la politique extérieure, au plan interne des éléments d’insatisfaction peuvent être également relevés quand on observe le déficit de bonne gouvernance constitué par la corruption ambiante et impunie, la non-satisfaction des requêtes récurrentes de l’opposition républicaine notamment la liquidation des affaires pendantes, la relecture consensuelle du code électoral, etc.

A l’aune des insuffisances de l’opposition, on peut noter son manque d’organisation et de lucidité et l’absence de programme alternatif à celui de la majorité présidentielle. Nous n’allons pas nous appesantir sur des critiques devenues communes sur cette opposition, mais nous soulignons aussi que le pouvoir n’est pas étranger à la faiblesse de celle-ci en orchestrant quotidiennement la tambouille dans ses rangs. Il faut reconnaître du reste que l’opposition a du mérite quand on sait qu’elle se bat sans moyens (je puis l’affirmer puisque j’en viens) dans un pays où le combat politique est basé sur l’achat des votes et des consciences. Cette opposition, malgré ses faiblesses, a été à l’origine des quelques avancées démocratiques obtenues dans le pays.

L’UNIS vous propose, monsieur le Ministre, de surseoir à la convocation de la réunion du mercredi 16 août afin qu’ensemble avec les partis, nous puissions trouver des solutions consensuelles pour l’installation de la CENI. L’argument tiré des délais trop courts n’est pas à nos yeux recevable dans la mesure où, à plusieurs reprises, des lois ont été modifiées dans ce pays pour faire face à l’urgence des événements (nous ne citerons que les faits récents de la prolongation du mandat des conseils municipaux pour rattraper le retard pris dans l’organisation des élections municipales). C e report permettra de réviser l’article 5 du code électoral par la convocation d’une session extraordinaire de l’Assemblée nationale, en prenant en compte la représentation des partis et formations politiques indépendants. Vous comprendrez la non-participation de l’UNIS à la rencontre du 16 août prochain si la situation restait en l’état, car cette rencontre serait pour nous sans objet, car nous ne nous reconnaissons ni dans la majorité, ni dans l’opposition actuelles.

Dans ce cas de figure, nous saisirons la Cour constitutionnelle afin qu’elle déclare contraire à la constitution l’article 5 du code électoral qui viole manifestement l’article 13 al.3 de la constitution qui garantit l’égalité des partis et formations politiques. Telle est, monsieur le ministre délégué, chargé des collectivités territoriales, la requête de l’UNIS qui profite pour vous transmettre ses salutations distinguées et vous souhaite de très bonnes vacances.

Pour le Comité directeur de l’UNIS, Le Président Boubacar Ouédraogo,

Observateur Paalga

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