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Assassinats de jeunes filles : Saül Traoré encourt la peine de mort

Publié le vendredi 19 mars 2004 à 06h58min

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Les assassinats des jeunes filles à Ouagadougou, les
meurtres des policiers dans la province du Kourittenga et ceux
d’un élève et du directeur de Tounouma dans le Houet. Tels
étaient les sujets essentiels abordés par Adama Sagnon,
Procureur du Faso et Abdoulaye Barry, Procureur général, lors
d’une rencontre qu’ils ont eue avec la presse hier jeudi 18 mars
2004.

Crimes odieux. Assassinats en série. Attaques à mains
armées. Vols de toutes sortes, etc. Le chapelet pourrait être
égrené à satiété, et parvenir au dernier grain, ce serait comme
attendre Godot. L’histoire du roman "En attendant Godot" de
Samuel Beckett a prouvé que Godot était un personnage
mystérieux qui n’est jamais venu à son rendez-vous. Par contre
dans le récit de la vie courte qui fût la leur, Adissa Kouanda et
Marie Jeanne Salama Dadaba Lingani, n’ont pas longtemps
attendu la mort. Celle-ci les a fauchées à la fleur de l’âge en
prenant l’aspect physique d’un jeune homme de 23 ans au nom
prédestiné de Saül De Tarse, cet homme qui persécutait le
peuple de Dieu, avant d’être converti. Saül Traoré, lui aura-t-il le
temps de se convertir dans la voie du Seigneur qui exige de
nous l’amour du prochain ? Les deux crimes dont il est accusé
sur les personnes de Adissa et Salama et la tentative de
parricide sur son père, sont passibles tous de peine de mort. En
attendant, de connaître le sort qui lui sera réservé par le jury,
dans 3 mois tout au plus, car Adama Sagnon le Procureur du
Faso a promis d’aller très vite dans cette affaire, Saül est
toujours à l’ombre.

Qu’est-ce qui a bien pu pousser ce garçon,
qui a normalement tout son avenir devant lui, à s’empêtrer dans
ce qui prenait les allures d’un "serial killing" ? "Ce sont les
problèmes", aurait répondu de façon simpliste le commun des
mortels. Pour Abdoulaye Barry le Procureur général, ce sont des
"raisons d’ordre pécuniaire". Les faits semblent lui donner
raison.

Papa, marabout et maîtresse

En effet, lorsque Saül était allé voir un marabout à Diapaga pour
que celui-ci arrange les choses entre lui et son père qui ne
voulait plus le voir, "à cause de sa maîtresse de nationalité
togolaise", il ne savait plus où donner de la tête.
Malheureusement, le marabout lui a appris qu’il ne pouvait rien
faire dans se sens, surtout qu’à son retour du village au Togo, la
dame a dit diriger désormais tout dans le ranch dont le père de
Saül est propriétaire et où Saül lui même était employé.

Tout
était-il donc "foutu" pour Saül qui avait lui aussi auparavant
"dragué" la Togolaise de son père ? Non car Sanda Diallo
marabout très connu dans la région de Diapaga pouvait le
rendre "fortuné pour lui-même, au lieu de compter sur son père".
Pour ce faire, il lui a fait boire un produit, certainement une de
ces mixtures dont ces hommes qui "sont en contact permanent
avec Dieu" et "connaissent votre passé, votre présent et votre
avenir", ont seuls le secret.

Le produit a été mélangé dans une
bouillie préparée par la femme de Sanda Diallo qui fit ingurgiter
un autre produit à Saül avant de lui signifier qu’il avait besoin de
sang de femme "dans son travail". Sanda a également remis
une amulette que Saül est allé enterrer dans un cimetière,
toujours en compagnie de Madou, un employé du ranch à qui il
s’est confié et qui est devenu son complice dans son entreprise
macabre. La consultation chez le "grand marabout" qui officiait à
55 km du ranch a coûté 10 000 F CFA. Saül est à Ouaga.

Après
être passé à son domicile au secteur 28, il s’est rendu chez sa
grand-mère. Il était comme "devenu un autre homme", selon
ses propres expressions relayées par le procureur du Faso.
Il pense que ce sont les effets des produits absorbés. Est-ce
toujours un phénomène surnaturel qui le faisait se promener ce
jour-là, 11 février 2004, avec deux poignards dans son blouson
quand Adissa Kouanda "qui était sa copine" l’a rejoint dans un
endroit où il était allé s’amuser avec un de ses amis ?

En tout
cas, vers deux heures du matin Saül, qui "n’avait plus sa tête", a
demandé à Adissa de le déposer à la maison. Pour ce faire, ils
ont pris la route de Ouagarinther. C’est dans la pénombre, non
loin d’une station Shell, que Saül a poignardé Adissa à la
poitrine, avant de l’égorger pour recueillir son sang dans un
bocal. Il a nettoyé son couteau, et est reparti chez sa
grand-mère, juché sur la moto de sa victime. Triste fin pour la
pauvre Adissa qui croyait en cette soirée du 11 février faire la
fête. Ce fut sa fête à elle.

Dès le lendemain de sa forfaiture, Saül
a pris le car pour retourner à Diapaga, certainement muni de
sang de jeune fille, qui lui ouvrira, selon les prédictions de
Sanda Diallo, la route d’une existence dorée.
Avant de repartir à Diapaga, Saül De Tarse s’est confié à un
autre marabout qui se trouve vers la Cité An III. Boureima
Balima, c’est son nom, lui a fait boire lui aussi un autre produit et
a promis de confier le cyclomoteur de la défunte à un autre
homme au niveau du Théâtre Populaire, car lui-même Balima,
est handicapé-moteur et ne peut donc conduire une moto.
Encore une moto à l’histoire douteuse dans la nature.

Le sang appelle le sang

Quand Saül est retourné à Diapaga, il a rencontré le marabout
Sanda Diallo qui lui a fait comprendre que le sang qu’il a
ramené dans un flacon est insuffisant. Il en faut donc plus et
c’est pour cela que Saül est revenu à Ouagadougou. Il prend
contact, par l’intermédiaire d’un de ses amis avec Salama
Marie-Jeanne Lingani. Le téléphone cellulaire de celle-ci ne
répondant pas, il a appelé sur le fixe de la maison familiale et a
donné rendez-vous à celle-ci à la station-service.

Salama a dit à
ses parents qu’elle partait acheter du carburant, ignorant qu’elle
venait en fait de prendre rendez-vous avec la mort au téléphone,
ce 23 février 2004. Elle a retrouvé son "copain". Ils se sont
retrouvés à Saaba dans leur balade. Même scénario et même
résultat. Mais, cette fois-ci, Saül n’a pas eu le temps nécessaire
pour récupérer le sang. Des phares d’un véhicule qui arrivait lui
ont fait peur et il a abandonné le corps inanimé de Salama, en
prenant le soin de fuir avec la moto.

Une fois de plus, il est allé
se confier au marabout handicapé-moteur et une fois de plus,
ils sont encore allés confier la moto à des gens.
Ainsi parla Saül Traoré à son confesseur qui avait plutôt le
manteau de procureur du Faso, à propos des meurtres de
mesdemoiselles Adissa Kouanda et Salama Dadaba
Marie-Jeanne Lingani. Les victimes de Saül auraient pu
atteindre les doigts d’une main amputée d’un doigt, si celui-ci
avait réussi, avec ses deux complices qu’il a recrutés au ranch,
à tuer Benjamin Traoré son père et Irène la maîtresse togolaise
de ce dernier. C’était le parricide parfait.

Heureusement que Zouma Sagnon et Amadou Adamou n’ont
pas réussi leur coup. Ils seront tout de même poursuivis pour
tentative d’assassinat sur les personnes de Benjamin Traoré et
de Irène. "Ce qui mérite d’être souligné, a conclu le procureur du
Faso, c’est que la plupart des infractions retenues contre Saül
Traoré ont pour sanction la peine de mort". Le code pénal, en
son article 324 confirme les dires de l’homme, stipulant"qu’est
puni de mort tout coupable d’assassinat, de parricide", de
même que l’article 62 dudit code signifie que la tentative de
parricide est considérée comme le parricide accompli. Si c’était
au football le chroniqueur sportif dirait que "l’intention vaut
l’acte".

C’est dans la même logique que les vols aggravés,
comme dans le cas de Saül sont punis de mort. Certes, même
si le jury qui sera constitué le décide, Saül ne pourra pas être
tué trois fois, car "on ne meurt qu’une seule fois", même si c’est
pour trois fautes.
Dès le lundi 22 mars, le cabinet d’instruction n°2 sera saisi et
"nous boucleront le dossier de l’assassinat des jeunes filles",
dans un délai de 3 mois, a précisé le procureur du Faso.
"L’enquête préliminaire a été bien menée, les faits sont établis,
on connaît les auteurs" a poursuivi Adama Sagnon.

Les policiers tués

Quid des assassins des policiers abattus dans la zone de
Zaogho par des bandits ? C’est au tour du Procureur général
Abdoulaye Barry de prendre la parole. "En réalité il n’y a pas eu
de trafic d’organes, du moins jusqu’à cette étape de l’enquête", a
tout de même révélé Abdoulaye Barry sur l’affaire des filles
assassinées. "Les corps des victimes n’ont pas été mutilés et
les informations selon lesquelles on aurait crevé les yeux,
notamment de mademoiselle Lingani, ne sont pas vérifiées". De plus, ni sur le corps de celle-ci, ni sur le corps de la
première victime on n’a prélevé des organes", a ajouté le
procureur général. "Dans notre jargon juridique, on ne parle pas,
à cette étape, de trafic d’organes".

Voilà qui est dit, mais
comment qualifie-t-on cet acte ? "C’est un monsieur qui a
recueilli du sang à des fins de maraboutage". Le Procureur est
catégorique : "il ne s’agit pas en réalité de trafic d’organes, tel
qu’on pourrait le définir juridiquement".

En ce qui concerne l’assassinat des policiers, Issa Ouédraogo,
(assistant de police) Cyprien Yamtarba Ouédraogo (brigadier) et
Dramane Coulibaly (commissaire), le 18 février 2004, beaucoup
de choses ont été dites. Voici la version du procureur
Abdoulaye Barry. "Cet assassinat a été perpétré par les sieurs
Pitroipa Yemdaogo dit "Issiaka" et Issa ou Kouka qui se fait
également appeler Baloum Naaba. Le jour du crime, ils ont
quitté la ville frontalière de Baokou au Ghana, remorqués par
Karim Bikienga, Burkinabè d’origine, mais Ghanéen de
nationalité. Celui-ci les aurait déposés avec sa moto DT 125 à
Bitou.

Avec Bikienga qui est un grand receleur, les deux
individus composaient un trio de délinquants notoirement bien
connus dans la région et Pitroipa et Issa venaient au Burkina
Faso, pour opérer, munis de Kalachnikov et d’une autre arme.
Dans les environs de Bitou les deux délinquants ont dépossédé
deux cyclistes de leurs bicyclettes et ont pédalé jusqu’à Boakin.

Là, ils ont agressé deux individus et se sont emparé d’une moto
Yamaha V80.
Après cela, ils rançonnaient toutes les personnes qu’ils
rencontraient et crevaient les pneus de leurs engins, afin de les
empêcher de donner l’alerte. Même à un curé ils ont arraché ses
appareils photos et cellulaire - Comme quoi les malfrats n’ont
pas peur de Dieu - C’est un paysan qui a alerté la police de
Koupèla qui s’est déplacée avec un véhicule de service bâché.

C’est à Zaogho que les policiers ont croisé les délinquants sur
la moto volée. Ceux-ci ont fait une chute. Dans les échanges de
coups de feu, les attaques et rispostes, les policiers ont été
blessés et les voleurs les ont rejoints dans la bâchée pour les
achever. Les bandits ont allégé leurs victimes de leurs armes,
notamment une Kalachnikov, un pistolet automatique, une autre
arme non encore identifiée et deux cellulaires. Les bandits sont
repartis sur leur moto, la V80.

400 m plus loin, ils ont ouvert le feu sur des individus sous un
arbre. L’un d’eux est mort et les autres ont pris la fuite. Ils ont
continué leur chemin, tout en dépouillant tous ceux qu’ils
rencontraient sur leur chemin. Ils ont retiré, chemin faisant,
l’argent (113 000 F CFA) et la moto d’un Peulh. On croyait que
les bandits partaient vers la Gnagna, maintenant avec deux
motos, mais ils sont revenus vers Zorgho et sont retournés à
Baokou au Ghana. Ils auraient vendu les motos et les armes
volées chez les policiers, au nommé Bikienga qui est
actuellement dans le colimateur des polices du Ghana et du
Burkina Faso.

Le nommé Pitroipa avant son interpellation avait
été reconnu par l’une des personnes agressées et finalement il
a été pris par la police ghanéenne qui l’a remis à la police
burkinabè.

A Bobo aussi

Quant à Issa dit Baloum Naba, il a été abattu par la
gendarmerie le 16 mars 2004 lors d’un affrontement avec les
gendarmes. Il faut noter que Pitroipa et Issa faisaient partie
d’une bande composée entre autres, de Yacouba Sondé et de
Seydou. Yacouba Sondé n’était pas sur les lieux de l’attaque,
contrairement à ce qui a été dit.

Au cours de son interrogatoire,
Pitroipa a reconnu d’autres faits, notamment le meurtre d’un
commerçant de Zorgho qui se rendait à Ouagadougou. Selon
les informations que nous avons, toute cette bande se réfugie à
Baokou, à Bolgatanga (au Ghana, ndlr) et à Cinkansé au Togo.
C’est à partir de ces trois villes qu’ils opèrent. Nous gardons
l’espoir de pouvoir mettre la main sur les complices de Pitroipa
et autres".

Avant le dénouement de cette affaire que les populations
espèrent pour bientôt, Bobo Dioulasso l’autre grande ville du
Burkina Faso connaît aussi son lot de crimes.
Ayant été "autorisé" par le Procureur de Bobo, Abdoulaye Barry
s’est donc permis d’aborder un des crimes commis récemment
dans la ville de Sya.

"A Bobo, un élève du collège de Tounouma, du nom de
Bouréima Yagaté a été assassiné le 6 mars vers 19 heures.
Quelque temps après, un autre élève du même établissement
et du nom de Aimé Louis Sanou s’est présenté à des
mécaniciens pour demander que sa moto soit repeinte. Comme
ils avaient déjà été alertés sur l’affaire, les mécaniciens ont
prévenu la police qui a cueilli le suspect. Les caractéritiques de
la moto étaient les mêmes que celles qui appartenaient à la
victime.

Aimé Louis Sanou appréhendé, a reconnu que c’était lui
qui avait tué son copain de classe avec qui il avait étudié le
même jour jusqu’à 17 heures. Ils se sont donné rendez-vous
plus tard à 20h. Quand ils se sont retrouvés, et remorqués Aimé
Louis Sanou a dû assommer la victime dans un lieu désert,
avec un marteau qu’il avait en poche, et l’a ensuite poignardé.

Il y
avait une similitude entre le meutre de Yagaté et celui du
directeur de Tounouma. Les deux ont en effet été tués avec des
armes blanches. Ceci a attiré la curiosité de la police judiciaire
et c’est ainsi qu’interrogé, Aimé Louis Sanou a reconnu le
deuxième meutre, celui du Frère Garcia le directeur du collège
de Tounouma qu’il aurait surpris dans son bureau. Le meurtrier
aurait assené des coups de machette à sa victime qui en est
décédée.

Voilà comment un jeune de moins de 20 ans a
commis deux meutres dans un intervalle assez réduit. Il a fait
des aveux et lors d’une perquisition à son domicile, on y a
retrouvé les vêtements qu’il portait lors des meurtres. Pourtant
Aimé Louis Sanou était un élève pensionnaire du Collège de
Tounouma. Il était à l’internat et bénéficiait de l’aide d’une soeur
religieuse qui se trouve en France. Il a été déféré au parquet de
Bobo Dioulasso et sur l’affaire, une information judicaire sera
ouverte."

Quelques réflexions

Mais comment Saül Traoré a-t-il été arrêté ? Réponse du
procureur général : "Saül Traoré a été aperçu avec
Mademoiselle Lingani au lieu de leur rendez-vous. Il y avait
aussi les traces de l’appel téléphonique car c’est après le coup
de fil de Saül que celle-ci est sortie. Du reste, le rendez-vous
n’était pas loin du domicile de la fille et certaines personnes ont
vu Saül et au lieu du rendez-vous, et sur la moto de la fille.

Au
début des enquêtes, il semble que c’est lui-même qui s’est
rendu à la gendarmerie pour répondre à quelques questions.
Dans un premier temps, il n’a pas reconnu les faits. Il a raconté
une autre histoire avant de reconnaître après les faits qui lui
sont reprochés. Ce qui a été confirmé aussi par les enquêtes".

Avec toutes ces affaires et les autres qui existaient déjà, ou
viennent d’être révélées, la justice est bien servie. De sa
diligence dans le dénouement et surtout de son équité dans la
décision des peines prévues par la loi, dépend sans doute la fin
de la psychose générale qui s’est emparée de la population
burkinabè.

En dehors des accidents , les citoyens ne se sentent
plus en sécurité sur les routes, dans leurs champs, encore
moins dans leurs propres maisons.
Les bandits de grand chemin ont-ils fait le serment de tuer au
Burkina Faso, autant que le paludisme, la méningite et le Sida ?

Tout porte à le croire et l’on espère que les hommes de Djibril
Bassolet, cela dans le respect des droits humains, sauront
mettre fin aux desseins noirs des hors-la-loi.

Par Morin YAMONGBE


Infractions et peines encourues

Saul De Tarse Traoré

Présomptions graves d’assassinats, de tentative de parricide,
de vols aggravés d’où la peine de mort dans les 3 cas, selon le
code pénal.

Boureima Balima :

- Complicité

- Recel de cyclomoteur

Oumarou Compaoré :- Recel de cyclomoteur

Mamadou Bilakoro :- Complicité

Abdoulaye Nignan : Recel de cyclomoteur

Zouma Sagnan : Tentative d’assassinat

Amadou Adamou : Tentative d’assassinat

Sanda Diallo : Complicité d’assassinat

Le Pays

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