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Affaire Norbert Zongo : L’enquête Alibi

Publié le vendredi 11 août 2006 à 07h35min

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Comme chacun le sait, le « truc » qui a été trouvé par Halidou OUEDRAOGO et ses amis pour expliquer l’assassinat de Norbert ZONGO et « piéger » ainsi l’enquête s’y rapportant, ce fut de clamer tout de suite que c’est parce que notre malheureux confrère « enquêtait sur l’affaire David OUEDRAOGO, chauffeur de François COMPAORE petit frère du chef de l’Etat ».

On aura remarqué d’ailleurs que c’est toujours présenté comme cela et on comprend pourquoi. Un confrère étranger de passage nous assurait qu’une telle précipitation sur cette version (la seule qui semble avoir miraculeusement survécue de tous les possibles) devait faire tiquer plus d’un et entraîner d’autres interrogations.
- Norbert ZONGO en était-il à ses premières piques en direction du pouvoir ?

- Norbert ZONGO n’avait-il pas d’autres activités que le journalisme qui pouvait lui attirer les foudres d’autres personnes ou d’intérêts de tous ordres ?
- L’assassinat de Norbert ZONGO ne peut-il pas être un moyen pour faire sauter le régime ?

Et puis encore d’autres questions sur le moment durant lequel s’est produit l’assassinat, sur certains antécédents comme l’alerte de Kaya, etc. Autant d’éléments qui, mis bout à bout donnent l’impression d’un sale coup parfaitement bien monté dans un objectif non moins précis.
Mais le point sur lequel le confrère en question s’est davantage appesanti, c’est sur l’argument de l’enquête que notre confrère effectuait. Comme effectivement nous avions eu à le démontrer dans une de nos éditions précédentes, et qui a été confirmé par ce journaliste chevronné, c’est que ce qui est arrivé à Norbert ZONGO est rarissime dans ce domaine du journalisme d’investigation.

En effet, la plupart de ces journalistes font l’objet de menaces ou alors d’attentat à leur vie parce que justement on ne veut pas qu’ils divulguent le résultat de leurs investigations, qu’ils les rendent publiques. Cela veut dire donc que l’enquête est en cours et qu’il faut faire taire « l’empoisonneur » dans l’espoir de tuer l’affaire dans l’œuf. Concernant l’enquête sur l’affaire David OUEDRAOGO, comme chacun le sait, notre regretté confrère l’a divulguée dès le mardi 13 janvier 1998 dans le numéro 229 de l’Indépendant. Le titre de l’article : « Justice au Conseil », et son contenu en page 12 sont assez éloquents.

On y constate en effet que notre confrère ne dispose encore que d’une information brute et nulle part du reste, il ne cite de noms. Il se contente de ce qu’il détient comme information sûre : Vol chez François COMPAORE, trois des employés mis en cause, détention au Conseil. Point. Dès lors, certainement l’enquête pour lui peut commencer , histoire de connaître les tenants et les aboutissements de l’affaire. Admettons que s’il y avait une réelle menace et qu’il fallait absolument étouffer quoi que ce soit, en principe c’est en ce moment là qu’il fallait agir, et liquider proprement l’empêcheur de tourner en rond.

Pourtant ce dernier aura encore l’occasion à plusieurs reprises de distiller ses informations : « Prisonniers du Conseil » n° 232 du 27-01-1998 au 3-2-1998 ; « Prisonniers du Conseil » n° 233 du 17-2-1998 ; « Conseil : David OUEDRAOGO a été tué. Pourquoi ?, n° 236 ; « Justice pour OUEDRAOGO David » n°238 ; « l’interview de François COMPAORE : Faux », n° 240 ; « Le mort du Conseil » ; n° 245 ; « le mort du Conseil », n° 249 ; « Meurtre du Conseil » n° 254, « Le mort du Conseil », , n° 261 ; « François COMPAORE inculpé » n° 265 « un ennemi de François COMPAORE » n° 266, « les craintes de François COMPOARE », n° 267, « Meurtre au Conseil » n° 272, « Meurtre du Conseil », n° 274 : comme on peut le constater de janvier à décembre 1998, Norbert ZONGO a parlé librement de cette affaire, sans être inquiété.

Au passage dans le numéro 230 du 20 janvier 1998, il a même égratigné la sécurité présidentielle elle-même. Voudrait-on l’assassiner, qu’on aurait vraiment pu le faire bien avant décembre 1998.

Enfin pourquoi attendre que tout soit fini, au moment où les esprits sont tournés vers le mini sommet Ethiopie-Erytrée et l’investiture du président, deux évènements qui devaient drainer beaucoup de monde (donc autant de témoins) pour perpétrer un acte aussi ignoble et dont la médiatisation était garantie d’avance. C’est trop gros. Mais quand on y regarde de plus près, c’est dans la même logique des arguments qui ont tôt fait d’établir un lien entre l’enquête sur l’affaire David OUEDRAOGO et l’assassinat de Norbert ZONGO.

Voilà une affaire (David OUEDRAOGO), traitée sous toutes les coutures de janvier à décembre 1998 sans que nul ne s’en émeuve outre mesure, durant laquelle notre confrère a même proposé un arrangement à l’amiable sans plus de succès, et qui se révèle au bout du compte aussi meurtrière ! Il n’y a pas à dire : cela sent le coup fourré.

Norbert ZONGO pouvait intéresser quelqu’un compromis dans l’affaire David OUEDRAOGO, avant son grand déballage, ce ne fut pas le cas. Pourquoi alors après ?
A moins que d’autres opportunistes n’aient sauté sur une aussi bonne occasion pour l’imputer au pouvoir. Nama (encore lui) en grand connaisseur n’a t-il pas évoqué une telle hypothèse ?

Ou de manière plus prosaïque, voulait-il lancer les gens sur une fausse piste et faire l’impasse sur la vraie celle-là, mais qui risque de lui péter au visage ?.o

In L’OPINION n° 176 du 14au 20 février 2001

Par N.S. Fadel

L’Opinion

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