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Accès des femmes aux sphères de décision : Des « Johnson Sirleaf », le Burkina en recherche

Publié le jeudi 3 août 2006 à 07h22min

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Le village de Poa dans le Boulkiemdé a accueilli les 30 et 31 juillet 2006 les activités commémoratives de la Journée panafricaine de la femme. Placées sous le thème « Les obstacles à l’accès des femmes aux sphères de décision et la nature des défis à relever », lesdites activités ont été parrainées par Mme Adèle Bouda, épouse du ministre de l’Economie et du Développement.

31 juillet 2006. Cela fait quarante quatre (44) ans jour pour jour que les femmes d’Afrique, unies par un même élan, ont décidé de lutter aux côtés des hommes pour libérer l’Afrique du joug des colonisateurs. Ainsi naquit l’Organisation panafricaine des femmes (OPF) le 31 juillet 1962 à Dar es Salam en Tanzanie où l’on décida d’orienter la bataille dans le sens de la libération de la femme sur le plan social, économique et politique. La naissance de l’OPF avec des femmes de caractère comme Aoua Keita (Mali) et Jacqueline Ki-Zerbo (Burkina Faso) a permis aux femmes de perpétuer le combat et de conjuguer leurs efforts pour l’émancipation de la femme africaine en vue de son intégration efficace dans le devenir africain. En 2006, le même combat demeure mais sous une autre forme.

Au Burkina Faso, le 31 juillet 2006 a été commémoré en pleine campagne, dans le village de Poa au Centre - Ouest. On n’a pas vu des Jacqueline Ki-Zerbo ni des Aoua Keita. Par contre, il y avait une Gisèle Guigma, ministre de la Promotion de la femme, une Pascaline Tamini, ministre de l’Action sociale, une Jocelyne Vokouma, secrétaire générale, une Kadjatou Korsaga, directrice de l’éducation des filles et représentante de l’OPF - Burkina.

Ces femmes-là ont su défendre leurs droits et tenir la dragée haute aux hommes jusqu’à commettre le crime de lèse-majesté, (pourrait-on dire) : occuper des postes de responsabilité et de décision. Et ce, parce qu’au 21e siècle, dira Mme Gisèle Guigma, la différence entre l’homme et la femme n’apparaît plus en terme de capacité, ni de pouvoir encore moins de pouvoir être.

L’analphabétisme des femmes, l’obstacle majeur

Cela ne l’a pas cependant empêché de constater que dans ce même 21e siècle, les femmes d’Afrique et en particulier du Burkina, sont sous-représentées dans les sphères de décisions. En 2006 par exemple, le pourcentage de femme-présidente au Burkina Faso est de 0%, 16,66% pour les ministres, 12,62% pour les députés, 5,11% pour les maires, 11,11% pour les hauts-commissaires, 20,87% pour les conseillers municipaux, enfin de 12% pour les chefs de partis politiques.

C’est la raison pour laquelle les femmes du Burkina ont décidé cette année d’axer la réflexion sur « les obstacles à l’accès des femmes aux sphères de décision et la nature des défis à relever » en lieu et place du thème africain qui est « paix, sécurité et stabilité économique en Afrique ». « Très souvent, la femme n’est ni acceptée, ni considérée comme apte à participer aux réflexions et même à la direction des affaires publiques.

La superstructure de la société africaine burkinabè en particulier l’ayant enrôlée de force, reconnue et valorisée par et dans une fonction de procréation et de garante de la stabilité familiale », a fait remarquer le ministre Gisèle Guigma. Cette situation, Zénabou Kaboré, une paysanne de Poa la connaît très bien, elle, comme nombre d’autres femmes de Poa, n’a jamais eu la chance d’aller à l’école et très vite mariée à un homme.

Elle croit cependant dur comme fer que sa fille de trois (3) ans qu’elle tient dans les bras ne sera pas comme elle et pourra un jour grâce à l’école, décider comme des Johnson Sirleaf, Angella Merkel ou Michelle Bachelet. Ses autres sœurs du Burkina Faso qui ont eu les conditions nécessaires pour faire de longues études et parvenir à des postes de décision lui permettent ce rêve. Outre le défi de l’analphabétisme et de l’ignorance que sa fille devra relever, il y en a bien d’autres.

Trois défis majeurs à relever

Sont de ceux-là, la scolarisation des filles d’abord. Pour Mme Kadjatou Korsaga, il serait difficile de parler d’autonomie d’un Etat si des milliers de filles dans cet Etat ignorent le chemin de l’école. L’instruction est donc le premier défi à relever et au Burkina Faso, les indicateurs actuels semblent dire que tous les acteurs sont sur la bonne voie. Le second défi est celui de l’amélioration des conditions économiques des femmes à travers des activités rémunératrices et des facilités d’accès aux micro-crédits.

Dans ce sens, la marraine de la journée, Mme Adèle Bouda a appelé tous les partenaires à la mise en œuvre de stratégies multisectorielles pour un combat plus offensive pour le bien - être de la femme. La mise en place de la plate-forme multifonctionnelle de Poa et le Centre de promotion féminin dont la pierre a été posée ce jour 31 juillet 2006 donnent espoir. Le troisième défi est celui de l’instauration d’une complémentarité des genres, un moyen sûr et équitable d’accès aux instances décisionnelles.

Selon le ministre Gisèle Guigma, au rendez-vous du concert des Nations, l’Afrique ne peut pas se présenter sans la femme : « Ne serait-ce pas comme se présenter à une soirée de gala en tenue de bain » ? Pour elle, il y a lieu que les femmes se décident à briser les barrières et résistances qui s’opposent à la complémentarité hommes-femmes. Dans ce sens, elle a rendu hommage aux hommes qui ont œuvré et continuent de le faire pour l’émancipation de la femme.

Les veuves de Poa à l’honneur

A Poa, ce 31 juillet 2006, il y a eu un beau monde. Pour les organisateurs de cette journée, jamais une telle affluence n’a été constatée nulle part. Revêtues dans leurs beaux atous, les femmes de Poa et des villages environnants sont venues nombreuses manifester leur attachement au plaidoyer que mènent leurs « sœurs décideurs ». Les femmes ont tout simplement été à l’honneur aussi bien dans les discours que les actes. C’est ainsi que les veuves de Poa ont reçu de la part de la marraine, Mme Adèle Bouda et quatre autres femmes de ministres une enveloppe de deux cent mille francs CFA.

La marraine seule a pour sa part remis des vivres d’une valeur de 4 tonnes. Son geste a été appuyé par le ministre de l’Action sociale, Mme Pascaline Tamini qui elle, a remis trois tonnes de vivre au nom de son institution.

Ismaël BICABA (bicabai@yahoo.fr)

Sidwaya

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