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Chômage des jeunes à Bobo-Dioulasso : Un casse-tête chinois

Publié le vendredi 28 juillet 2006 à 08h08min

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« Les jeunes Bobolais et le thé, c’est comme une mobylette et le carburant qui la fait rouler », a lancé un téméraire, l’un de ces quatre matins. Et certains de renchérir que c’est parce qu’ils sont trop paresseux qu’ils sont tout le temps rassemblés autour de quelques théières au lieu de chercher du travail. « Constat » leur donne la parole pour en savoir davantage.

A l’évidence, ce n’est pas toujours une partie de plaisir pour ceux-ci d’être obligés de « tuer » le temps autour du thé, du moins pour ceux qui ont un certain niveau d’instruction.

Il est 16 h 30, ce samedi 22 juillet 2006. Sur la rue Souro Sanou au secteur n°4 (Koko) de l’arrondissement de Dafra, une demi-douzaine de jeunes sont assis sous un arbre autour du thé. Parmi eux, Drissa Ouattara. Il a dû quitter l’école en classe de troisième, après « des problèmes pendant l’examen du BEPC et le manque de moyens pour poursuivre les études ». Boire du thé avec ses amis est devenu sa distraction favorite. Pourquoi n’est-il pas en train de chercher du travail au lieu de rester à boire du thé à cette heure de la journée ? « On cherche du travail, mais on n’en trouve pas.

En zone industrielle par exemple, on décroche souvent de petits boulots de quelques semaines pour gérer le quotidien, mais ce n’est pas suffisant », répond-il. Il révèle cependant qu’il ne peut accéder aux meilleurs boulots du fait que « lorsqu’il y a des projets qui s’installent à Bobo-Dioulasso, ceux qui occupent les meilleurs postes viennent d’ailleurs ». Souvent amer dans ses propos, l’homme ne baisse pas sa garde lorsqu’il s’agit de qualifier le travail qu’il fait ou peut faire : « On nous propose le sale boulot comme curer les caniveaux. Une fois en passant, c’est possible, mais pas tout le temps ». C’est peut-être pour cela que le dernier boulot de Drissa Ouattara remonte à 2003. C’était à la SN-CITEC, une société industrielle implantée à Bobo-Dioulasso.

Valérie Sanou est assise juste à côté de Drissa Ouattara. Elle vient d’achever un contrat de quatre mois dans une unité spécialisée dans le séchage de mangues au secteur n°20 (Lafiabougou) de Bobo-Dioulasso. A tort ou à raison, l’on pourrait assimiler le quotidien de cette titulaire du Certificat d’études primaires à une gymnastique où le nœud gordien est la fainéantise. Pourtant, c’est sa conviction qui guide sa pensée, son état d’esprit et partant sa « défaite » face à une société où le matériel « zappe » le moral. « Si on est pauvre et sans bras longs, on ne peut avoir de travail décent. De ce fait, nous sommes obligés de boire du thé », explique Valérie. L’état d’esprit de Valérie s’imbrique dans le fait qu’elle partage la frustration des jeunes Bobolais.

Sentiments mitigés

Frustration fondée sur l’opinion selon laquelle « les meilleurs postes » dans l’administration où les industries sont confiés à des gens venus d’ailleurs. D’où sa révolte conjuguée au découragement. En tout état de cause, Valérie ne lance pas des fleurs à tous les jeunes Bobolais. Car, elle reconnaît qu’il y a des paresseux, n’empêche que certains veulent réellement travailler. Mais sans opportunités de travail, ils se sentent « comme obligés » de devenir des buveurs invétérés de thé.

Secteur n°10 Accart-ville, non loin du plateau omnisports dans l’arrondissement de Dô. Gildas Somda est depuis trois ans agent technique d’agriculture spécialisé, après des études faites au centre agricole polyvalent de Matourkou. Mardi 25 juillet, Gildas est assis dans son « grin » en compagnie de trois autres jeunes au coin de la rue 10.24. Passe-temps du moment ? Le thé et le ludo.

« J’ai tenté de trouver du travail. J’ai fait plusieurs enquêtes, suivies de plusieurs formations, mais jusqu’à présent je n’ai pas eu d’emploi stable », confie-t-il. Il dit avoir cherché du travail à la SOFITEX, mais partout, il a fait chou blanc. « Quand tu approches ces entreprises, on te dit qu’il y a trop de demandes, que c’est saturé, qu’il faut attendre la prochaine budgétisation. Il y a plusieurs arguments qui sont avancés pour ne pas vous donner du boulot », lâche-t-il. Rester autour du thé est devenu un pis-aller pour Gildas Somda. Comme par enchantement, il s’aligne sur l’opinion de Valérie « sans relations, on ne peut avoir du travail », lance laconiquement le jeune homme.

Contrairement à d’autres jeunes, il est prêt à faire de petits boulots, mais soutient qu’il n’y en a même pas. Lorsqu’il y en a, on préfère ceux d’ailleurs.

Pour ce qui est des concours de la Fonction publique, il constate : « Sur 100 admis, il y a au maximum deux Bobolais. Tout est une question de deals et les deals se traitent à Ouagadougou ». Plus amer, il lance : « Dans la ville de Bobo-Dioulasso, aucune autorité n’a depuis plus de 10 ans fait quelque chose de concret pour la jeunesse bobolaise ». « Ce sont les Bobolais- mêmes qui ternissent l’image des Bobolais à Ouagadougou », conclut-il.

Son compagnon Hamed Barro embouche la même trompette que lui. « Les Ouagalais ne nous aiment pas et entre nous Bobolais, on ne se soutient pas », affirme-t-il.

Avec un niveau de la classe de terminale G2 et nanti de quelques attestations de formation en informatique, Hamed n’est pas encore sorti de sa galère. Et pourtant, l’emploi qu’il avait à la LONAB en 2004 lui avait donné beaucoup d’espoir. En fin août 2005, à la suite de reformes intervenues dans cette société, il a été libéré comme de nombreux Bobolais et depuis plus rien. Lui également se dit disposé à faire des boulots jugés difficiles. « On nous prend pour des inconscients quand on dit que les jeunes Bobolais n’aiment pas travailler. Sans travail, on ne peut rien faire aujourd’hui », soutient-il. « Quand on boit du thé, ce n’est pas par plaisir, mais à contre cœur », dit-il

Autres lieux, même constat

Accart-ville. Secteur n°9, côté Est de l’autogare dans la rue 9.23 de l’arrondissement de Konsa. Une dizaine de jeunes devisent autour d’une théière. Plusieurs ont déjà passé des concours (douane, gendarmerie, santé, ENAREF, ENEP) sans succès. La zone industrielle et les divers chantiers en cours à Bobo-Dioulasso n’ont pas de secret pour eux. Ils y ont cherché du boulot en vain selon leurs explications. Ainsi, à force d’avoir roulé leur bosse à la recherche « du travail précieux », ils sont parvenus à la conclusion de Valérie, « sans quelqu’un pour te soutenir, inutile de chercher du travail ».

Tahirou Ouédraogo et Seydou Traoré le pensent avec force, eux qui ont dit « adieu » à l’école respectivement en classe de cinquième et après l’obtention du Brevet d’études.

Le chômage des jeunes Bobolais est une réalité à la lumière de ces témoignages. Et les autorités politiques, administratives, les opérateurs économiques sont interpellés.

Qu’est-ce qui est fait pour promouvoir l’emploi des jeunes dans la ville ? Est-il avéré que sans « bras longs » on ne peut avoir du travail dans la ville de Sya ? Quelles solutions proposent l’Agence nationale pour l’emploi, la municipalité, la Chambre de commerce régionale de Bobo-Dioulasso pour résoudre l’épineuse problématique du chômage dans la ville de Sya. Ce sont autant de questions qui trouveront peut-être réponses dans le prochain numéro de Constat.

Urbain KABORE

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 30 juillet 2006 à 13:00, par Salia KONATE En réponse à : > Chômage des jeunes à Bobo-Dioulasso : Un casse-tête chinois

    C’est vrais qu’avoir du travail « décent » de nos jours est en général difficile (que ce soit á Bobo, Ouaga, ou ailleurs dans le monde) mais il faut aussi dire que la grande majorité des jeunes Bobolais (je ne dis pas tous les jeunes Bobolais) sont de veritables fainéants, á la limite des parasites. Je suis de Bobo et j’ai fais une grande partie de ma jeunesse á Bobo ; je sais donc de quoi je parle. Pour "monter en haut" il y a rarement un accesseur, la grande majorité des gens doit passer aussi par les escaliers. Les "sales boulots" comme ils les appellent (vider des caniveaux, creuser des fausses), je les ai fait et á Bobo et á Ouaga et ce de ma 6eme á ma 1ere année d’université. C’est de ces « sales boulots » que j’ai financé en grande partie mes études. Même en Europe je les ai fait pour continuer de financer mes études ici. Donc s’assoir toute la journée devant des théières et prétendre ne pas avoir de "bras long" est parole de fainéant. Ce n’est pas pour rien que les chinois disent que "celui qui veut trouve les moyens et celui qui ne veut pas trouve les raisons". Je vis aujourd’hui en Europe et je n’ai pas eu de "bras longs" pour y arriver. Et pour terminer un exemple vécu au Burkina Faso : En 2001 je suis rentré au Pays pour un séjour. A Bobo Dioulasso ma voiture est tombée en panne (le disque d’embrayage était grillé). Une connaissance ma aidé á trouver un "bon garagiste" qui devait me descendre le moteur afin changer le disque. Le marché fut conclut á 75.000F CFA (seuelemt la main d’oeuvre, le cous des pièces de rechange etant calculé extra) avec comme condition de finir le travail dans trois jours car je devais retourner urgemment á Ouaga chercher ma femme et mes enfants qui venaient en Afrique pour la première fois. Deux jours après je retourne m’assurer que le délais de livraison sera respecté. On me raconta mile et une raisons qui risquaient de faire qu’ils ne puissent pas respecter le délais. Ils m’ont cependant assuré qu’avec 50.000F de plus comme frais des heures supplémentaires (soit au total 125.000F pour changer un simple disque d’embrayage -je suis ingénieur et je sais de quoi je parle) la voiture serait prête demain au plus tard á 10h ». Je leur ai alors remis 30.000F en plus de 50.000F que je leurs avais déjà donné) avec pour condition de travailler toute la nuit (heure supplémentaires facturées comme telles) afin que la voiture soit terminé le lendemain (date conclu au début du contrat). La nuit vers les 22 je reviens voir s’ils étaient au boulot. A ma grande surprise il n’y avait que le gardien devant la porte du garage. Le lendemain je retourne sur les lieux á 6 heure du matin et il n’y avait tjrs personne. Le "bon garagiste" (le "BOSS") n’est apparu que vers les 9 heures pour me dire que "ces techniciens étaient très fatigués le nuit et ils ont décidé d’interrompre le travail" (bien qu’ils avaient déjà empoché plus de la moitié de l’argent des heures supplémentaires). J’ai dû renoncer á cette voiture pour rentrer á Ouaga en car afin d’aller chercher ma femme á temps á l’aéroport de Ouaga. A mon retour une semaine après á Bobo la voiture n’était pas toujour prète car "il y avait quelques petits problèmes avec la direction". Ce que le "bon garagiste » appelait "petits problèmes" n’était autre que la direction qui se bloquait pendant la circulation. Il a fallut chercher un autre garagiste qui á réparer la pane á 3.000F s’il vous plait mais qui travaillait très bravement avec des moyens beaucoup plus rudimentaires que le premier. A Ouaga j’ai vécu des pannes de voitures mais souvent ce sont les mécanos eux-mêmes qui courraient chercher la voiture (sans se laisser prier comme á Bobo) pour la réparer en temps record. Donc je soutiens que la grande majorité des jeunes Ouagalais se bâtent comme ils peuvent par contre la grande majorité des jeunes Bobolais sont de veritables fainéants, comptant tjrs sur le salaire du (seule) frère ou de la (seule) sœur de ela famille ou pire sur la pension du "vieux" pour vivre et boire leur thé. Même si moi je devais être entrepreneur á Bobo, je ne prendrait pas des gens de ce genre dans ma firme. Je prendrais aussi des gens "venus d’ailleurs" qui ont fait leurs preuves dans les "sales boulots" que de prendre un fainéant qui lui fait ses preuves dans le thé, la critique et les lamentations. J’ai vécu d’autres expériences aussi négatives les unes que les autres á Bobo où l’argent est payé mais le travail n’est pas fait. Que Dieu nous aide tous. Personne ne viendra développer Bobo pour les Bobolais et il n’ y a pas de place pour les fainéants dans le monde de l’emplois d’aujourd’hui. A bon entendeur salut.

    • Le 31 juillet 2006 à 11:45 En réponse à : > Chômage des jeunes à Bobo-Dioulasso : Un casse-tête chinois

      Je suis entièrement d’accord avec vous. Moi aussi j’ai fais toutes mes études à Bobo (Primaire, secondaire et universitaire)
      et je peux vous assurer qu’il n y a pas plus fainénants que le Bobolais.
      Ils ne foutent rien ; passent le temps à boire du thé et à critiquer les gens.
      C’est vraiment décévants. Quand on voit les jeunes se batttre à Ouaga pour avoir leur pitence quotidienne
      alors qu’à Bobo ils ne savent que tendre la main, on est écoeuré.
      Ce qu’il me choque le plus, c’est que ces jeunes qui ne foutent rien (à part boire le thé à longueur de journée)
      font des enfants et c’est leur père qui s’occupe de la fille et de l’enfant.Ils ne sont même pas à mesure de payer un caleçon pour leur enfant.
      c’est à leur père de le faire à leur place ; lui qui a déjà assumer son rôle de père, il se retrouve grand père et
      doublement père ( puisse qu’il doit s’occuper de son fils et de son petit fils).
      On a l’impression que tous les vices ce sont donnés rendez vous à Bobo, car en plus d’être fainéants
      ils ont des moeurs très légers à Bobo (surtout les filles).
      Comment comprendre cela ?
      C’est écoeurant, mais c’est ça la mentalité du Bobolais ; un vrai parasite pour la société. Mais que voulez vous ?
      C’est dommage, c’est triste mais c’est ca aussi la réalité de Bobo.
      Je ne sais pas si Bobo pourra changer un jour et je vous assure que je n’y crois pas. Même si Simon est nommé
      maire de Bobo, le problème demeurera toujours.
      Que Dieu sauve Bobo.

      • Le 1er août 2006 à 22:26 En réponse à : > Chômage des jeunes à Bobo-Dioulasso : Un casse-tête chinois

        L’emploi des jeunes

        Cela necessite plus que ces gorgées chaudes. Tout un projet d’information, de formation des jeunes est à mettre en place pour aider les buveurs de thé sur l’étendue du territoire . Si ces structures existent , les revisiter et les renforcer pour les rendre plus attrayants pour les jeunes. Bobo a un style qui lui est particulier mais elle ne détient pas la palme d’or de la légèreté pour ce qui est des filles . Là n’est pas la question : rehaussons le niveau scolaire de ceux qui peuvent le faire , donnons une formation payante qui débouche sur un emploi . Collectons les idées d’affaires des jeunes et aidons les à les faire aboutir. Le monde évolue , préparons nos enfants à mieux affronter la vie. Ne caricaturez surtout pas le drame des autres, s’il vous plaît .

        Mahaoua Konaté,journaliste
        Canada

        • Le 2 août 2006 à 18:01 En réponse à : > Chômage des jeunes à Bobo-Dioulasso : Un casse-tête chinois

          je ne suis pas du tout d’accord sur certain point je suis un vrai bobolais et trés fière de l’etre aussi vous savez chaque ville a ces fénéants et ces couragés je pense que c’est un gros problème de volonté politique les possibilitées sont plus enormes à Ouaga qu’à Bobo en matière du travail tout est concentré dans la capitale ceux qui font du blàblà ont du fure Bobo par manque d’emploi pour se réfugié a Ouaga maintenenant il se prennent pour des donneurs de leçon, nous connaissons la chansson , non non je dis non on ne va pas tous fure la ville de Sya BOBBO, meme la route bobo ouaga à étée négligée du coté bobo alors unitule de vous rappeler la pratique du fovoritisme politique au détruiment. ARRETER DE DIRE NIMPORTE QUOI SUR LA QUESTIONS DE L’EMPLOI DANS LA REGIONS JE VOUS INVITES A ADRESSEZ VOS COURRIES AUX AUTORITES DU PAYS PLUTOT QUE DE VOUS FOCALISES SUR LES JEUNES DE BOBO COMME SI C’EST VOUS QUI LES NOURRISSEZ VIVE BOBO ?

    • Le 4 août 2006 à 18:08, par seyss En réponse à : > Chômage des jeunes à Bobo-Dioulasso : Un casse-tête chinois

      attention aux derives. Il est trop facile de raconter des inepties sur une situation dont on ignore totalement les contours. c’est de l’inconscience de vouloir stigmatiser les jeunes d’une region donnée.en plus, quelle est le lien entre la voiture et le problème de chomage des jeunes ?.Proposons des solutions au lieu de polemiquer sur ce fléau (chomage) qui est à l’echelle de tout notre pays.En realité le problème de chomage au Burkina en general est dû à l’incompetence et au manque d’initiative de l’Etat.Il faut donc qu’il elabore et mette en route des projets consequents pour venir à bout de ce problème de qui nous inquiète serieusement. l’un des objectifs premiers d’un Etat doit etre d’ameliorer les conditions de vie des citoyens.

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