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Fonctionnement des conseils municipaux : savoir raison garder

Publié le vendredi 14 juillet 2006 à 08h51min

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A peine en place, les conseils de Pô et de Pensa sont confrontés à des difficultés de fonctionnement liées à la pratique de la chaise vide et à des démissions de conseillers. Si l’on n’y prend garde ces cas bien que encore peu nombreux risquent de gangrener le processus de la communalisation intégrale qui vient de prendre corps.

Les élections complémentaires du 9 juillet dernier contrairement à ce qu’on pouvait s’attendre, ne consacreront pas de facto le démarrage total de l’ensemble des communes. Déjà, les conseils de Pô au Nahouri et de Pensa dans la province du Sanmatenga sont en peine pour emboîter le pas des autres.

En ce qui concerne la commune urbaine de Pô, la politique de la chaise vide menée par les conseillers du CDP n’a pas encore permis au maire de convoquer la première session. Le conseil municipal comprend 63 membres dont 35 du CDP et 28 d’une coalition des partis de l’opposition. Alors que l’on s’attendait à un maire du CDP, c’est un conseiller du PAI membre de la coalition qui a été élu. Ce qui sous-tend qu’il a même pu bénéficier de voix du CDP. N’admettant pas cet état de fait, le CDP a opté pour la politique de la chaise vide afin d’empêcher le fonctionnement normal du conseil municipal.

La loi portant code général des collectivités territoriales stipulent en son article 238 qu’après un premier report à défaut de pouvoir réunir les 2/3 des membres du conseil pour la tenue de la session, la séance devrait requérir la majorité absolue et si ce n’est le cas, le maire devra adresser un rapport à l’autorité de tutelle qui dispose d’un délai de 30 jours pour réagir et l’article 251 précise que « lorsque le fonctionnement d’un conseil se révèle impossible, sa dissolution peut être prononcée par décret pris en conseil des ministres ... » il faut donc dire que la dissolution du conseil municipal de la capitale du Nahouri est imminente. En effet, le maire Henri KOUBIZARA a épuisé les deux possibilités de convocation de sessions, sans succès.

Quant à la commune rurale de Pensa dans le Sanmatenga, ce sont les élus du PDP/PS qui au nombre de 13 ont rendu le tablier pour ainsi empêcher le fonctionnement du conseil municipal fort de 29 membres. Dans le cas d’espèce, le maire pourrait certes tenir les sessions sur la base de la majorité absolue à défaut des 2/3 comme indiqué à l’alinéa 2 de l’article 238 du code général des collectivités territoriales. A quelques exemples près , les maires des communes de Banfora, de Dori, et de Gourcy, etc.. n’hésiteraient pas à emprunter les mêmes procédés.

L’un dans l’autre, c’est la crédibilité du processus de la communalisation intégrale qui risque d’en souffrir. Qu’il s’agisse de Pô, de Pensa, de Banfora, de Gourcy ou de Dori, les pratiques de la chaise vide ou les démissions des conseillers dont le parti n’a pu accéder à la mairie sont préjudiciables à ce début d’expérimentation de la décentralisation totale. Soit dit en passant, c’est le contribuable qui payera les pots cassés.

La décentralisation intégrale ne fait que commencer. Les populations se sont beaucoup intéressées aux élections locales et il ne faudrait pas que l’engouement qu’il y a eu autour de ces scrutins s’estompe. La morale politique devrait amener à éviter des situations alambiquées telles celles que vivent Pô et Pensa.

Certes les formations politiques ont le choix de leurs actions notamment la politique de la chaise vide ou la démission des élus pour rentrer dans leurs droits mais il faut tout de même mettre en avant l’intérêt général des administrés de peur de jeter l’enfant avec l’eau du bain. On ne le dira jamais assez, ce sont les partis politiques dans leurs querelles de leadership parfois injustifiées qui désintéressent les populations de leurs activités.

Le récent sondage du CGD n’indique-t-il pas qu’il n’y a que 30, 26% des populations qui approuvent les actions des élus locaux ? Les partis politiques devraient donc proscrire certaines pratiques qui pourraient instaurer une méfiance totale. Tout laisse à penser qu’il faudra davantage éduquer la classe politique à des attitudes plus citoyennes, à accepter la cohabitation .

La gestion communale devrait transcender les bisbilles politiciennes. En plus, elle ne fait pas bon ménage avec la délation politicienne. Ce sont peut-être des préceptes de la morale politique que doivent s’approprier les élus municipaux de l’UNIR/MS, dans la commune de Ouagadougou. Eux qui posent comme préalable, un audit financier de la mairie avant l’entrée en fonction du nouveau conseil municipal. Cette exigence, comme on peut le constater, en plus du fait qu’elle n’a aucun intérêt public est sans fondement légal.

La loi prévoit déjà qu’au cours du premier trimestre de chaque année, le maire rend compte au conseil municipal par un rapport spécial de : la situation de la commun sur les matières transférées, l’activité et le fonctionnement des différents services de la commune et des organismes relevant de celle-ci, l’état d’exécution des délibérations du Conseil, la situation financière de la commune urbaine (extrait de l’article 250 du code général des collectivités territoriales. Souligné par nous).

Ce rapport donne lieu à débats mais n’est pas suivi de vote. La séance est publique et le rapport est transmis à l’autorité administrative territorialement compétente pour information. Il est donc incompréhensible que les conseillers municipaux de l’UNIR/MS, à moins que ce ne soit par méconnaissance des textes, demandent un audit financier avant de siéger. Dans un tel cas on peut penser qu’ils mettent les charrues avant les bœufs et risquent fort de passer tout leur temps à brasser du vent au lieu de s’occuper des intérêts des populations. Il ne faut donc pas aller trop vite en besogne.

Dans un cas comme dans l’autre les politiques devraient faire attention à ne pas nuire gravement au processus alors qu’il commence à peine. Chacun devrait accepter de donner du temps au temps. C’est au cours des sessions qu’ils seraient plus prompts à demander à voir clair dans l’exécution du budget communal.

Par Drissa TRAORE

L’Opinion

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