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Alphonse Arzouma Ouédraogo, secrétaire permanent des Engagements nationaux : « Nous ne gérons pas des milliards ... »

Publié le samedi 10 juin 2006 à 08h31min

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Alphonse Arzouma Ouédraogo

Les Engagements nationaux fêtent leurs douze ans d’existence. Pour commémorer cet anniversaire, beaucoup d’activités sont organisées sur toute l’étendue du territoire national à travers les services décentralisés. En marge de cette commémoration, Sidwaya Plus a rencontré M. Alphonse Arzouma Ouédraogo, secrétaire permanent de ces Engagements nationaux.

Du fonctionnement de cette institution, de ses réalisations et surtout de l’organisation de cet anniversaire, M. Ouédraogo en parle sans détour.

Sidwaya Plus (S. P.) : Parlez-nous un peu de votre parcours professionnel.

Alphonse Arzouma Ouédraogo (A. A. O.) : Je suis juriste de formation, j’ai un DESS en droit international public. J’ai commencé à travailler au ministère du Commerce en tant que conseiller économique en 1984. J’ai été chef de service de la réglementation du commerce extérieur. En 1987, j’ai été nommé haut-commissaire du Yatenga, en 1989, secrétaire général du ministère chargé de la Coordination du Front populaire, en 1990, inspecteur général d’Etat, en 1994 ministre de l’Emploi, et depuis 1997, secrétaire permanent des Engagements nationaux.

S. P. : Les Engagements fêtent leur 12e anniversaire, quel bilan faites-vous plus d’une décennie après la prise de ces engagements par le chef de l’Etat ?

A. A. O. : C’est une question assez difficile ; je crois que chaque année, nous faisons un bilan, mais faire un bilan depuis douze ans, ce n’est pas chose facile. Toutefois, comme nous le disons à chaque bilan, l’œuvre humaine n’est jamais parfaite mais est perfectible. Nous devons être satisfait de l’exécution des différents projets. Il y a des insuffisances certes, il y a des lacunes, mais je crois que les avantages, les acquis sont visibles.

Peut-être que pour ceux qui sont dans les grandes villes, ils ne perçoivent pas très bien l’impact réel des Engagements nationaux, mais j’avoue que lorsqu’on fait un tour dans les villages, les provinces, c’est là que l’on peut vraiment se rendre compte de l’œuvre des Engagements nationaux. A ce niveau là justement, ne serait-ce qu’aux niveaux des crédits du FAARF, du FASI, de la construction des maisons des jeunes, des infrastructures sportives, des CSPS, de notre contribution au développement de la culture et du sport, on peut mieux apprécier les réalisations des Engagements nationaux. Et là, c’est surtout les populations qui en bénéficient savent mieux les apprécier à leur juste valeur.

S. P. : Par rapport à ce 12e anniversaire, quelles ont été les principales activités ayant marqué cette commémoration ?

A. A. O. : Il faut dire que depuis trois ans, nous avons commencé un travail pour décentraliser nos activités. Ainsi, cet anniversaire sera beaucoup plus vu au niveau des différentes régions qu’au niveau de Ouagadougou. Toutefois, pour donner le coup d’envoi, nous avons réalisé quatre activités : le lancement de la Coupe des Engagements nationaux dans les petites catégories en football, la course cycliste, la nuit culturelle, où nous avons voulu que les lauréats de la SNC 2006 reviennent sur le plateau pour que les gens les connaissent davantage à Ouagadougou, les lauréats du 10e anniversaire, l’Orchestre national, le Ballet national, enfin, il y a la cérémonie de restitution des audits. Voilà les activités que nous avons menées à Ouagadougou. Cependant, nous avons envoyé des correspondances à tous les gouverneurs de région, leur donnant la latitude d’organiser leurs activités comme ils l’entendent.

Puisqu’il y a des maisons de jeunes un peu partout, des CSPS en construction ou déjà construits partout, il faut les inaugurer, visiter des chantiers, etc. Toutefois, nous avons insisté pour qu’à tous les niveaux, l’on puisse rencontrer les comités de gestion de ces différentes infrastructures, rencontrer les jeunes filles formées au Sourou, rencontrer toutes les bénéficiaires des activités du FAARF, discuter des difficultés, de l’impact et nous faire des propositions et des suggestions.

Cela nous permettra de voir comment procéder à des réajustements là où cela est nécessaire pour l’amélioration de toutes ces activités.

S. P. : On sait que les Engagements nationaux ont été pris par le chef de l’Etat dans un contexte précis. Aujourd’hui, le temps a passé, le contexte aussi a évolué avec l’avènement d’autres programmes tels le CSLP et bien d’autres. Est-ce qu’il n’y a pas des interférences dans tout cela ?

A. A. O. : Lorsque vous prenez le Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté, les Engagements nationaux ne sont qu’un élément de ce cadre stratégique, c’est dire que les Engagements nationaux ne vont pas à l’encontre de tous les programmes qui existent. Si nous prenons par exemple la construction des CSPS au niveau du ministère de la Santé, au-delà de la construction de CSPS, ce ministère a bien d’autres programmes. Donc, nous ne venons que pour mettre l’accent sur un élément précis et cet élément aussi est pris en compte dans le cadre stratégique. Nous ne venons qu’en appui, il ne peut donc pas avoir ni dysfonctionnement, ni un problème quelconque dans le fonctionnement de ces programmes, bien au contraire, c’est un rapport de complémentarité qui les lie.

« On ne fait pas le bonheur de quelqu’un malgré lui »

S. P. : Pourtant en milieu rural, les paysans sont souvent contrariés par la multitude d’intervenants qui n’ont pas toujours les mêmes approches.

A. A. O. : Ce n’est pas à moi de répondre à cette question. Je crois que c’est un problème de coordination. Au niveau des Engagements nationaux, il faut dire que tout ce que nous faisons, c’est à la demande des populations. On ne s’asseoit pas ici pour décider de la construction par exemple, d’un CSPS dans telle ou telle localité. C’est toujours sur la base d’une demande suite à laquelle nous effectuons des missions avec le ministère concerné et discutons avec les populations et le plus souvent pour les responsabiliser, nous leur demandons quelle sera leur contribution dans les réalisations qu’elles demandent.

De cette façon-là, il ne peuvent pas dire après qu’il ne sont pas impliquées ou concernées dans la mise en œuvre de celles-ci. Maintenant, ce qu’il y a à faire peut-être, c’est de lancer un appel pour que dans le cadre stratégique, il y ait plus de coordination au niveau des divers intervenants, pour éviter que dans un village, on se retrouve par exemple avec 3 écoles alors que le village avait plus besoin d’une seule et peut-être d’une maternité, d’un centre d’alphabétisation.

Le plus important c’est surtout de ne pas exécuter des choses sans la volonté des populations, parce que j’ai toujours dit qu’on ne peut faire le bonheur de quelqu’un malgré lui. Il suffit que les services décentralisés, déconcentrés fassent leur travail et tout ira pour le mieux.

S. P. : Qui peut bénéficier des financements des Engagements nationaux et à quelles conditions ?

A. A. O. : J’ai déjà dit que nous travaillons sur la base des demandes des populations. Et ces demandes, chaque jour que Dieu fait, nous en recevons. Il n’y a pour cela aucune condition, il suffit d’adresser une demande en tant qu’association ou groupement et dès que nous la recevons, nous l’affectons aux structures concernées qui s’en chargent.

S. P. : En ce début du nouveau quinquennat du président, y a-t-il des réorientations envisagées au niveau des Engagements nationaux en vue de les adapter au nouveau programme de gouvernement ?

A. A. O. : Oui, je crois que si vous avez suivi le dixième anniversaire, il y a eu donc un nouveau programme pour la nouvelle décennie des Engagements nationaux.

Cette nouvelle décennie, en fait, n’envoie pas de très nouveaux programmes, mais donne un signal par rapport au renforcement des programmes déjà existants. Il y a 6 nouveaux axes que le président a édictés : l’éducation, mettre l’accent beaucoup plus sur l’alphabétisation, l’environnement, l’agriculture, la petite irrigation, l’emploi des jeunes, la promotion des droits humains.

S. P. : Avec la communalisation intégrale qui est en cours, comment les Engagements nationaux intègrent-ils cette nouvelle donne dans leur fonctionnement ?

A. A. O. : Si l’on voit les résultats de la 6e Commission mixte avec la République de Chine, il y a un projet appui à la décentralisation. Après l’appel du président du Faso au dixième anniversaire, tous les ministères ont réagi en nous proposant des projets. Des projets qui peuvent leur permettre effectivement d’entrer dans les nouveaux axes édictés par le président du Faso. C’est ainsi que nous avons reçu du ministère de l’Administration territoriale, un projet d’appui aux communes, avec un financement de 250 000 000 F CFA reçu par ce ministère pour sa mise en œuvre. A travers ce projet-là, nous espérons pouvoir appuyer cette communalisation.

S. P. : Malgré tout, 46% de la population burkinabè vit en-deçà du seuil de pauvreté. Qu’inspire cela au secrétaire permanent des Engagements nationaux ?

A. A. O. : Je pense que nous, nous essayons d’apporter notre contribution à la lutte contre la pauvreté. Mais je ne rêve pas que c’est nous qui allons supprimer la pauvreté. Il n’y a pas de bâton magique pour cela. Nous pensons toujours que un CSPS en plus, une école en plus, une maison des jeunes en plus, un crédit à un groupement féminin en plus, permet un tant soit peu de diminuer cette pauvreté. Autrement, si nous pouvions trouver ce bâton magique-là, on ne parlerait plus de pauvreté.

S. P. : Parlez-nous tantôt des audits qui ont été faits au niveau de 4 projets. Est-ce vous pouvez nous dire exactement quels ont été les dysfonctionnements que ces audits ont pu révéler ?

A. A. O. : D’abord, je dois préciser que ce ne sont pas des audits sur les Engagements nationaux. Et les audits n’ont jamais dit qu’il y a eu des dysfonctionnements au niveau des Engagements nationaux, puisque les Engagements nationaux ainsi pris, ne veulent rien dire. Comme je l’ai dit, les projets audités sont des œuvres humaines. Dans l’exécution des projets, il y a des voies à suivre. Nous avons édicté des manuels de procédures pour chaque projet. Les audits avaient pour objectif, de voir si ces manuels-là sont respectés. Effectivement, il y a eu 5 projet sur les 4 où il a été montré que l’exécution respecte les procédures. Il n’y a eu qu’un seul où il a été relevé quelques flottements et là, nous avons dit que nous allons y remédier.

S. P. : Qu’en est-il du budget ? Est-ce qu’il a été suivi comme il se devait ?

A. A. O. : Mais c’est là l’objet même de l’audit. Pour la mise en œuvre du projet, il y a un budget. Ce budget a des objectifs à atteindre. La question était de chercher à savoir si ces objectifs ont été atteints, physiquement, financièrement. Il faut dire que ces objectifs peuvent être atteints physiquement, mais financièrement il peut y avoir des insuffisances. Et les insuffisances se situent dans l’utilisation du manuel même de procédure. Il y a des procédures de passation des marchés, des procédures d’acquisition des équipements, même au niveau du personnel, il y a un problème de gestion. Ce sont des questions qu’on retrouve partout et à notre niveau, nous avons pensé qu’il faut mettre l’accent sur la formation de tout le monde. Depuis le chef de projet jusqu’aux plus petits agents. En cela, le directeur des archives a promis de nous aider dans la formation des agents concernant le classement des archives, etc.

S. P. : Pouvez-vous nous donner un chiffre global des financements des Engagements Nationaux depuis 12 ans ?

A. A. O. : Il est assez difficile de pouvoir donner un chiffre en la matière, mais je vous renvoie au document du bilan décennal où il y a un chiffre par province jusqu’à la dixième année. Cela fait en gros beaucoup de milliards qui ont été engloutis dans la mise en œuvre des projets des Engagements nationaux. Je profite pour répondre à une certaine presse qui tente d’entretenir la confusion sur le rôle et la place des Engagements nationaux. Les gens pensent que nous gérons tous ces milliards - là au niveau des Engagements nationaux. Mais non, les projets ne sont pas logés à la présidence ici, mais au sein des ministères techniques et exécutés par ceux-ci selon leur politique gouvernementale.

Nous ne jouons qu’un rôle d’accompagnateur, de coordonnateur dans la gestion de ces projets. Les Six engagements n’englobent pas toute la politique gouvernementale, ce sont des aspects précis qui sont mis en exergue. Il est de notre devoir de coordonner et de rendre compte au chef de l’Etat qui est l’initiateur de ces engagements. Il faut que les gens comprennent que les sommes colossales dont ils parlent ne sont pas gérées au niveau du secrétariat permanent. Certes nous avons une responsabilité morale dans leur exécution parce que les demandes de déblocage de fonds passent par nous et nous donnons notre avis mais chaque projet a son compte au Trésor et géré par le chef de projet, de manière autonome.

Ladji BAMA (bamayacou@yahoo.fr)

Sidwaya

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