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Journée internationale de la liberté de presse : Des responsables de médias s’expriment

Publié le mercredi 3 mai 2006 à 07h00min

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Yacouba Traoré

Yacouba TraoréLe 3 mai de chaque année, la communauté mondiale célèbre la journée internationale de la liberté de la presse. Journée de réflexion, d’introspection des professionnels de médias. Le journal Sidwaya a donné la parole à des patrons, directeurs ... des organes de presse burkinabè pour apprécier l’évolution de la liberté de presse au Burkina Faso et se prononcer sur le projet de convention collective.

Yacouba Traoré, directeur de la Télévision nationale du Burkina (TNB)

La liberté de presse au Burkina se constate. Au niveau de la presse écrite, vous voyez qu’à côté de Sidwaya, il y a des journaux privés qui sont là avec une liberté de ton qui est bel et bien constatée et qui est évidente.

Au niveau de la radio et de la télévision, il en est de même. Donc sur le terrain, on constate une liberté d’expression des médias.

Maintenant, je pense qu’il ne faut pas être prétentieux. Nous n’avons pas encore atteint le niveau de liberté de presse des anciennes démocraties. Quand je prends l’exemple de l’Angleterre, ils ont atteint un stade tel qu’on ne parle même plus de ministère de l’Information. A partir du moment où les instances de régulation existent, on n’a plus besoin de ministère pour gérer l’information.

Les anciennes démocraties ont atteint un niveau, auquel nous souhaitons accéder. Mais, il faut reconnaître aussi que nous sommes jeunes en matière de démocratie par rapport à eux. Nous allons à notre rythme. Nous marchons, trébuchons et nous nous relevons pour continuer.

La liberté de la presse au Burkina est un fait, et même Reporters sans frontières (RSF), l’a reconnue.

Pour que nous puissions atteindre les anciennes démocraties, il faut que la presse travaille au renforcement de notre démocratie. Nous avons une partition à jouer. Nous disposons d’une marge de liberté et il faut en profiter sans en faire du libertinage et permettre à la démocratie de se renforcer. A travers les élections présidentielle et municipales, l’on a senti cette liberté, parce que nous avons une marge de manœuvre qui est large, parce que ce n’est pas celui qui paie qui a droit aux couvertures médiatiques. Les couvertures médiatiques payantes, sont un sujet assez délicat.

Et je pense qu’il faut que les responsables se penchent la dessus, par exemple en dégageant des subventions uniquement pour les couvertures médiatiques en vue de donner la liberté aux médias de service public d’aller là où il faut.

Pour ce qui concerne la convention collective, je trouve qu’elle est une bonne chose. Mais je pense qu’elle s’adresse beaucoup plus aux médias privés parce que les situations ne sont pas les mêmes. Je crois que les syndicats sont mieux placés pour parler de cette question.

Lamoussa Robgo

Lamoussa Robgo, directeur de la Radiodiffusion du Burkina (RNB)

Je crois qu’au niveau du Burkina, il y a véritablement la liberté de la presse.

Et cela, surtout par rapport au poste que j’occupe. Parce que cela fait deux ans que je suis directeur de la radio et en deux ans, je n’ai jamais reçu d’instructions particulières, ni de mon directeur général, ni du ministre de l’Information me disant, il faut traiter l’actualité dans tel ou tel sens. Cela veut dire déjà, que c’est la rédaction de la Radio qui décide de la façon de traiter l’information. Au niveau des émissions que nous diffusons, ce sont les journalistes et les animateurs seuls qui décident du contenu à donner à l’émission.

La RNB est une radio de service public avec des missions bien précises et je crois que chacun de nous essaie au maximum de respecter, de créer des conditions de telle sorte que l’information que nous allons diffuser reflète véritablement les attentes des auditeurs, au niveau de notre média. Au Burkina, les journalistes parlent, écrivent librement en respectant les règles déontologiques de notre métier et je crois qu’on ne peut pas demander mieux.

Je dis cela en référence aux années 90 ou ce n’était pas évident. Même au niveau de notre rédaction, il y avait des affiches du genre « ne parlez pas de telle ou telle chose », etc. Mais aujourd’hui, tout cela n’existe plus. Beaucoup d’efforts ont été consentis, peut-être qu’il y a des aspects à améliorer.

Une des insuffisances se situe au niveau de la formation des acteurs des médias. J’ai l’impression que les journalistes ne savent pas ce que veut dire la liberté de la presse. Chacun pense dire et écrire ce qu’il veut. La liberté de la presse suppose aussi le respect des textes en vigueur, le respect d’autrui.

Le manque de formation amène certains journalistes à déborder. Et quand, l’autorité « tape sur eux », ils se plaignent. Alors qu’en réalité, bien souvent, on se rend compte que le traitement de l’information n’a pas été professionnel.

Quant à la convention collective, je suis d’avis que son avènement arrangerait effectivement le vécu quotidien des journalistes. Une chose est de voir cette convention collective exister, une autre est de la voir appliquer. Parce que la convention collective en terme de projet est très ambitieuse. Est-ce que les patrons de presse pourront suivre le rythme ? C’est la grande question que je me pose. Sinon, je reconnais que la situation des journalistes est difficile et souvent très précaire surtout pour ceux-là qui travaillent dans le privé.

La convention collective, pourrait être un instrument pour résoudre cette situation de précarité, mais il faut que les patrons de presse acceptent aller jusqu’au bout. Ils se plaignent souvent des ventes à perte des journaux ou de la publicité qui ne rentrent pas. Quand tout le monde se dit que c’est la convention collective qui peut résoudre le problème, on se pose des questions. Est-ce qu’aujourd’hui, il y a une radio privée au Burkina, capable de payer un animateur ou un journaliste à 150 000 ou à 200 000 F CFA ? Je ne sais pas. Ce sont des réflexions à mener. Mais je suis d’avis que la précarité existe et qu’il faut changer cela. Doit-on passer par la convention collective ou par autre chose ? Il faudrait poursuivre la réflexion afin qu’un cadre d’exercice de ce métier soit bien défini et que chacun de nous puisse bénéficier des retombées de notre métier.

Issaka Lingani

Issaka Lingani, directeur de publication de l’Opinion

Il faut dire que les choses ont énormément évolué au Burkina depuis ce qu’on a appelé un peu partout en Afrique « Le printemps de la presse privée » avec l’éclosion de nombreux titres au début des années 1990. Nous avons connu la Révolution dans notre pays, période d’exception particulièrement idéologique. Il y avait un seul journal sinon deux, à savoir Sidwaya, le quotidien du peuple et Carrefour Africain. Avant il y avait l’Observateur qui a dû disparaître à la suite d’un incendie et ensuite d’un intégrisme qui n’avait pas dit son nom puisqu’il n’avait pas eu son autorisation de paraître après l’incendie en question. Depuis lors, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts, notamment avec l’adoption du code de l’information qui élargit la liberté des journalistes. On peut dire que les choses vont de mieux en mieux et on constate aujourd’hui qu’il existe beaucoup de titres.

Certains sont morts comme on le dit, d’autres ont survécu et continuent toujours de faire leur petit bonhomme de chemin. Que ce soit au niveau de la presse écrite ou de l’audiovisuel, on voit par exemple qu’il y a beaucoup de radios et même deux chaînes de télévision privée ; d’autres projets de télévision sont en cours paraît-il. Sur le plan du vécu des libertés par les journalistes, on constate qu’il y a de moins en moins de tracasseries qu’on connaissait par la passé ; les journalistes sont plus acceptés dans leurs opinions diverses. Cela se ressent par la pluralité des lignes éditoriales aussi bien des médias audiovisuels que de la presse écrite. Chacun a sa vision qu’il défend avec les moyens qui sont les siens.

On peut donc dire que nous vivons véritablement une liberté au niveau de la presse et même que les journalistes eux-mêmes s’émancipent, parce qu’au delà des textes les journalistes eux-mêmes doivent pouvoir vivre la liberté de la presse réellement, c’est-à-dire mettre un peu de bémol sur l’autocenseure des uns et des autres. On peut donc affirmer que la liberté de presse est une réalité au Burkina et qu’on gagnerait à faire en sorte que les textes évoluent pour s’adapter à cette réalité ; parce qu’honnêtement le code de l’information à certains points est aujourd’hui dépassé même par le vécu quotidien notamment la question de dépénalisation des délits de presse.

Jusqu’à preuve du contraire, au Burkina les cas où des journalistes ont été envoyés en geôles sont extrêmement rares ; ce qui veut dire qu’il ne sert à rien d’avoir dans les textes des contraintes physiques alors que dans le vécu quotidien ce n’est pas appliqué. Pour ce qui est du projet de convention collective, je dirai que c’est un véritable serpent de mer. C’est comme si on n’en voulait pas. Et je ne sais pas qui n’en veut pas. Est-ce les journalistes ? les responsables des organes de presse ou l’Etat ? Je ne sais pas trop qui ne veut pas de cette convention collective qui est une nécessité impérieuse.

On ne peut pas continuer à naviguer à vue. On ne sait pas quels sont les droits et des devoirs des uns et des autres et cela fait qu’on donne raison à ceux qui disent que le journalisme en Afrique et notamment au Burkina est un métier tellement ouvert que n’y viennent que ceux qui ont échoué à tous les concours et examens ailleurs. Pourtant c’est un métier noble qui mérite d’être codifié. Il faut qu’on sache qui est journaliste, comment on devient journaliste et comment on évolue au sein du métier.

Ce sont là des impératifs. On ne peut pas continuer à naviguer comme cela, surtout qu’on a atteint ce niveau de démocratie et de liberté de presse, sinon cela risque de se retourner contre le métier lui-même. Le Burkina Faso est un pays où il est plus facile de créer un journal. La loi dit que si vous avez l’idée de création d’un journal, vous écrivez au procureur pour l’informer de votre projet en précisant le lieu et périodicité de parution et le lieu de sa diffusion. Le procureur a deux semaines pour vous répondre. S’il ne vous répond pas dans les deux semaines, vous êtes autorisés à paraître légalement. C’est dire que n’importe qui peut créer un journal.

Et s’il n’y a pas de règles qui codifient ce métier, il faut craindre qu’on ait du n’importe quoi. Il ressort du vécu quotidien que les journalistes ne sont pas payés au niveau où il se doit. C’est vrai que les journaux, radios et télévisions ont des problèmes économiques sérieux mais il faut aussi valoriser le métier en faisant en sorte que le journaliste puisse vivre de son travail, sinon on développe d’autres phénomènes tels que la corruption, les « gombos », les reportages juteux qui dénaturent le métier. A mon avis, il faut une convention collective. Il faut travailler à cela.

Je crois que le Conseil supérieur de la communication (CSC) s’est engagé à accompagner les organisations des professionnels dans ce sens et de plus en plus les acteurs prennent conscience qu’il faut discipliner le métier parce que tout le monde y a intérêt. Je suis étonné qu’au niveau des journalistes rien n’est fait pratiquement. Les journalistes doivent s’organiser, convoquer des réunions pour se retrouver sur la question et pousser la roue. J’attends au niveau des journalistes qu’ils bougent mieux pour faire aboutir le projet de convention collective.

Hervé Taoko

Hervé Taoko, rédacteur en chef exécutif du journal le Pays

La liberté de la presse est relative dans la mesure où il s’agit d’un combat qui doit être permanent. La liberté est une recherche permanente.

A partir du moment où on la cherche on ne peut pas dire qu’elle existe dans sa totalité au Burkina. Il est vrai qu’il ya eu des avancées. Il y a de plus en plus des titres qui se créent, qui évoluent mais en même temps les journalistes sont confrontés à un certain nombre de difficultés dans l’exercice de leur profession. Je veux parler des conditions matérielles, financières et techniques de travail.

On peut dire que la liberté existe mais elle n’est pas totale au Burkina. La preuve lorsque vous écrivez un article qui est un peu dérangeant, tout de suite dans certaines rédactions il ya des coups de fil qui viennent de l’extérieur pour vous demander des explications ; souvent vous pouvez être convoqué à la gendarmerie ou à la justice. J’en veux pour preuve la récente intrusion des forces de l’ordre dans les Editions le Pays, puis l’interpellation de notre journaliste Antoine Battiono. Au regard de tous ces faits, je dirai que la liberté de la presse existe mais les journalistes doivent s’organiser pour la conquérir davantage.

Sur la question de la convention collective, je pense que pour que ce projet puisse voir le jour, il faut que l’organisation se fasse à trois niveaux. D’abord au niveau des journalistes, les premiers concernés parce que ce sont des hommes de terrain.

Il faut que les journalistes s’organisent. Je pense aux associations des journalistes. Il ya en réalité beaucoup d’associations de journalistes mais il faut que ces associations puissent coordonner leurs actions concernant la convention collective de sorte que leurs propositions puissent être suivies de faits concrets.

Le deuxième niveau concerne les directeurs de médias. Il faut que ceux-ci fassent un effort, qu’ils apportent tout leur appui parce que la convention collective est une question de synergie d’actions.

Si les journalistes se mobilisent pour faire aboutir la convention collective et qu’au niveau des directeurs de médias il ya une réticence, parce que comme quelqu’un disait une fois il ya certains directeurs qui estiment qu’en appliquant cette convention ils risquent de fermer leur entreprise parce que les salaires des journalistes vont augmenter et ils seront obligés de déclarer leurs agents à la caisse si cette logique prévaut, cela risque d’être très compliqué. Mais pour que cette logique ne prévale pas il faut que l’Etat joue sa partition et qu’une réelle volonté politique accompagne l’action des journalistes, des directeurs des médias. L’Etat doit apporter son appui aux directeurs d’organes de presse mais aussi il faut que ces directeurs apportent à leurs tour leur appui à leurs collaborateurs.

Edouard Ouédraogo

Edouard Ouédraogo, directeur de publication de L’Observateur Paalga

La liberté de la presse a été redéfinie en 1991 par la déclaration de Wendock qui institue la journée internationale de la presse. Les termes de cette liberté sont consacrés dans le code de l’information du Burkina Faso, à savoir la loi 56 ADP du 30 décembre 1993. Cette loi stipule que tout journal peut paraître sans autorisation préalable, ni dépôt de cautionnement.

Cela signifie que le gouvernement ne peut bloquer un envie de faire publier un journal par le piège de l’autorisation préalable. A partir du moment où le verrou de l’autorisation préalable a sauté, on peut dire que la liberté de la presse est garantie. Mais je ne veux pas dire que notre code est parfait. Non, il y a beaucoup de choses à revoir. Il faut élaguer le code d’un certain nombre de dispositions, notamment les articles qui prévoient des peines d’emprisonnement des journalistes. La liberté sera totale au Burkina, le jour où dans notre code, il n’y aura plus un seul article permettant d’envoyer un journaliste en prison dans l’exercice de son métier.

Bien sûr, le journaliste reste justiciable des actes qu’il pose. Nous voulons des sanctions pécuniaires mais jamais une peine de prison. De fait, les journalistes ne vont pas en prison au Burkina, mais la possibilité d’envoyer un journaliste en prison existe sur le plan du droit.

Cependant, il faut que cela soit clair, nous ne prônons pas l’impunité pour le journaliste, nous voulons simplement la suppression de la peine de prison. Car, le travail de journaliste est un travail d’opinion, de pensée, d’idée et tous les instruments internationaux de droit de l’homme prohibent que quelqu’un puisse être mis en prison à cause de ses opinions. La liberté de presse évolue favorablement, dans la mesure où beaucoup de pays se sont inscrits dans la perspective heureuse de la dépénalisation des délits de presse.

Cela est une réalité au Togo, et la Côte d’Ivoire promet d’emboîter le pas.

A Libreville, le président gabonais Omar Bongo en 2003, avait promis à l’Union internationale de la presse francophone qu’il se fera l’apôtre de la dépénalisation.

Les présidents ont été saisis, mais je crois que le plus souvent, les chefs d’Etat semblent ne pas faire un problème en se disant que de toute façon dans leur pays aucun journaliste n’est en prison.

C’est un raisonnement politique. Ils jouent sur le tableur du réalisme en se réservant la possibilité d’en servir les dispositions consacrant la peine de prison.

Quant à la convention collective, c’est un serpent de mer, on en parle, mais on ne la voit jamais venir.

Depuis 1995 sur financement canadien, un projet de convention avait déjà été élaboré. Mais l’approche selon moi, pèche. Un projet de convention ne peut pas être élaboré par une seule partie. Il doit l’être consensuellement par les journalistes et avec ce qu’on appelle à tort ou à raison, les patrons de presse.

Il faut des discussions, pour aboutir à des compromis qui donnent un maximum de garantie aux travailleurs tout en préservant la pérennité des entreprises de presse. Pour l’instant, il n’y a pas une seule convention sur laquelle les différentes parties ont échangé. Contrairement à ce que pensent les gens, les patrons de presse ne rament pas à contre-courant. Rien que pour la stabilité rédactionnelle des journaux, nous avons intérêt qu’une convention collective soit adoptée. Elle viendra codifier et stabiliser notre milieu de travail.

Remi Dandjinou

Rémy Djandjinou Directeur de programme de Canal 3

Le directeur des programmes de Canal 3, envisage la notion de liberté de presse sous un double aspect théorique et pratique. Du point de vue théorique, s’il se félicite de l’existence d’un ensemble de textes, notamment la dépénalisation du délit de presse qui prescrit et garantit la liberté de la presse, il se plaint qu’au plan pratique, certaines conditions, notamment d’ordre économique n’autorisent pas le plein épanouissement de cette liberté. Ainsi donc, poursuit-il, le cadre juridique permet à la liberté de la presse de s’exprimer et cela se traduit non seulement par la pluralité des opinions à travers les journaux, les radios et les télévisions existants, mais aussi par la diversité des lignes éditoriales. Même si l’on peut discuter le bien-fondé de tel ou tel article, il est clair, de l’avis de M. Djandjinou, que le Burkina reste un pays où, de façon théorique, la liberté de la presse est une réalité.

Toutefois, la liberté de la presse en tant que telle, n’est pas encore entièrement usitée par les médias au Burkina, fait-il remarquer, en ce sens qu’il ne peut y avoir de liberté que lorsque cette liberté participe à créer véritablement une opinion nationale.

S’il est vrai, poursuit-il, que les médias, notamment la presse écrite, qu’elle soit publique ou privée participent, à travers les investigations, à faire avancer les choses, cette presse ne peut être libre si elle continue à être le relai de points de vue politiques qu’ils soient étatiques ou de courants politiques d’opposition.

S’agissant de la question du pouvoir économique, M. Djandjinou indique qu’une limite objective de la presse burkinabè réside dans le fait que les uns et les autres ne sont pas toujours logés à la même enseigne quand il s’agit de compétir. Il déplore en effet que les médias publics qui sont subventionnés se retrouvent à compétir sur un pied d’égalité que les privés en matière de marchés de publicité par exemple. La liberté de la presse, résume le directeur de programme de Canal 3, est une réalité dans les textes mais reste à conquérir dans les faits.

Et cela, précise-t-il n’est pas propre au Burkina, mais c’est un débat qui se pose dans tous les pays, même ceux dont la pratique journalistique est plus ancienne que la nôtre.

Se prononçant sur la question de la convention collective, M. Djandjinou, faisant sienne une citation du Centre national de presse Norbert-Zongo (CNPNZ) soutient qu’il ne peut avoir de liberté de presse quand les journalistes vivent des conditions de corruption, de peur et de pauvreté.

En ce sens, si les conditions de peur ne sont plus d’actualité dans le contexte burkinabè du fait de tout ce qui s’est passé, reconnaît-il, il n’en est pas de même pour celles de la corruption et de la pauvreté. La convention collective est dans un tel contexte d’importance, selon lui, car c’est une garantie pour le journaliste non seulement mais aussi pour la qualité du travail de la presse.

C’est un outil indispensable, insiste-il, à l’évolution de la presse pour la liberté véritable.

Cela n’est nullement un serpent de mer, il suffit d’un minimum de consensus, qui tienne compte des réalités économiques de chacun, tant au niveau des patrons de presse que des journalistes. Il est anormal, martèle-t-il, que le Burkina Faso soit l’un des seuls pays où il n’existe pas de carte de presse, tout comme il est anormal que le travail de journaliste ne soit pas reconnu comme un travail à part entière.

Cette convention est en définitive nécessaire, selon M. Djandjinou, pour que le journaliste ne soit pas non seulement la vache à lait du patron de presse, mais aussi pour qu’il n’ait pas les yeux plus grands que le ventre.

En tout état de cause, conclut le directeur de programme, l’avenir de la presse au Burkina ne peut être que radieux, car après tout ce qu’il y a eu comme printemps et automne des radios et télévisions, arrive une phase qui sera certainement celle de la consolidation des acquis et de la décantation naturelle des choses.

Ladji BAMA (stagiaire)

Sidwaya

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