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Koudougou : Sous haute tension

Publié le lundi 24 avril 2006 à 08h05min

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On a voté le dimanche 23 avril 2006 à Koudougou pour le compte des élections municipales. 12 partis politiques étaient en lice avec un face-à-face UNDD -CDP. Si dans la matinée l’ambiance était quelque peu détendue, la tension avait commencé à monter au fur et à mesure qu’on s’acheminait vers la fin du scrutin.

Le chef-lieu de la région du Centre-Ouest, Koudougou, semble une ville où les élections se suivent et se ressemblent, du moins du point de vue de l’ambiance, qui y est particulière. Le dimanche 23 avril dernier, on n’a pas dérogé à la règle.

La commune de Koudougou, pour ces municipales, a enregistré 73 bureaux de vote sur les 10 secteurs, avec 36 087 inscrits. Mais le paradoxe, c’est qu’à l’élection présidentielle on notait 40 165 inscrits. Et les problèmes n’ont pas manqué pour la présidente de la Commission électorale communale indépendante (CECI), Justine Ilboudo, et ses collaborateurs. En effet, la CECI a passé pratiquement toute la matinée à gérer les plaintes de nombreux électeurs.

Ainsi, on a enregistré des électeurs qui possédaient leur carte, et dont les noms ne figuraient sur aucune liste électorale. Aucune solution n’a pu être trouvée pour eux, donc ils ne pouvaient accomplir leur devoir de citoyen. Il y a eu le cas de ceux qui ont voté lors de la présidentielle et ne pouvaient voter pour ces municipales parce que leur nom ne figurait plus sur la liste électorale, et aussi ceux qui ne retrouvaient pas leur carte d’électeur.

Il y a également eu le cas de ce président du bureau de vote n°5 du secteur 6, Madi Kaboré, qui n’apposerait pas sa vraie signature sur les bulletins de vote et manquerait de respect à l’endroit des gens, nous ont indiqué les responsables de la CECI. Il était question de le relever mais il a dû se conformer aux règles en vigueur.

Au bureau de vote n°1 du secteur 1, c’est la liste du bureau de vote n°4 qui s’y est retrouvée. Ce qui explique que jusqu’à la fin de la matinée, des électeurs ne pouvaient pas voter. Mme Ilboudo et son équipe tentaient de trouver des solutions. On annonçait des troubles par-ci et par-là.

Fraude ou pas fraude ?

Ainsi, des militants de l’UNDD ont conduit à la compagnie de gendarmerie de Koudougou une personne accusée de fraude à l’école Centre-Sud, et qui détiendrait par-devers elle 17 cartes d’électeur. Cette dernière aurait déclaré qu’il n’en était rien, parce que ce sont des cartes des membres de sa famille qui avaient déjà voté. Des militants du CDP étaient également sur les lieux et les éléments de la gendarmerie ont dû calmer les esprits.

Le pire a pu être évité aux écoles Sud A et B, où l’affrontement était perceptible. Depuis l’ouverture des bureaux de vote en ces lieux, la plupart des électeurs, après avoir voté, restaient sur les lieux. Il y avait toujours du monde dans la cour. Les uns et les autres s’accusaient de posséder des armes blanches. Ces personnes seraient des militants du CDP et de l’UNDD.

Il a fallu que les forces de l’ordre interviennent pour faire évacuer les lieux. Et on ne laissait entrer que ceux qui voulaient voter et repartir. Le commandant de la compagnie de Koudougou, le lieutenant Seydou Kadio, s’est entretenu avec des éléments des différentes parties pour calmer les esprits. Il nous a fait savoir ceci : "Nous croisons les doigts tout en espérant que la tension va baisser ".

Mais autour de 17h, nous avons appris que dans les départements de Poa, Kindi, Nandiala, des véhicules convoyaient des personnes pour qu’elles puissent voter. Au bureau de vote n°3 du secteur 10, l’ambassadeur Juliette Bonkoungou est venu accomplir son devoir de citoyenne mais, malheureusement, elle ne possédait pas de carte d’électeur. Des négociations étaient en cours pour qu’elle puisse le faire. Finalement, Juliette Bonkoungou n’a pas voté. Il y a eu un début de tension mais le président dudit bureau de vote est resté sur sa position, se référant aux textes.

Chacun proclame sa victoire

Dans les différents états- majors, chacun est convaincu de sa victoire. Le coordonateur régional du CDP, Hubert Yaméogo, qui a voté au secteur 6 où il est candidat, et que nous avons rencontré à l’école Burkina au secteur 10, est très confiant quant à l’issue favorable du scrutin pour son parti. Il dit avoir sillonné plusieurs bureaux de vote dans la commune et les villages du département de Koudougou, et a affirmé que tout se déroulait bien.

Hubert Yaméogo est optimiste et ne l’a pas caché ; " Nous n’avons pas de doute qu’à la fermeture des bureaux de vote, le sourire sera dans notre camp ". C’est le même sentiment qui règne dans le camp de l’UNDD. Le candidat UNDD au secteur 10, Adama Ouédraogo, affirme que si tout se passe dans les règles de l’art, son parti gagnera haut la main ce scrutin du 23 avril, car le maire Marcellin Yaméogo, qui avait été révoqué et n’est pas candidat, a fait du bon travail.

La population dans sa majorité, dira Adama Yaméogo, veut de cette équipe de l’UNDD à la tête de la municipalité. Mais ses craintes restent liées aux fraudes de la part de leurs adversaires. Ce candidat avec lequel nous avons échangé à l’école Benebnooma, où il a voté, a été clair : " Si nous sentons des irrégularités, nous n’allons pas le tolérer. Il mentionne aussi que son parti n’a pas de problème, "sauf si on nous en crée ".

Le leader de l’UNDD, Me Hermann Yaméogo, que nous avons tenté d’approcher, n’était pas sur place. L’homme, après avoir voté, a beaucoup tourné pour rassurer ses militants et s’imprégner des difficultés sur le terrain. Son frère cadet, Salvador Yaméogo, dont le parti, le RDF, est à la conquête de la mairie de Koudougou, a voté au bureau n°2 du secteur 1, et déclare avoir senti des tensions dans certains bureaux de vote.

Mais l’état d’esprit est de faire en sorte que tout se passe bien. Pour Salvador Yaméogo, "logiquement, aucun des 12 partis en lice à Koudougou ne peut obtenir la majorité et nous devons en principe figurer parmi les trois premiers partis à l’issue des résultats ".

Les supputations vont bon train ici, mais les observateurs espèrent que tout se passera dans les règles républicaines. L’incertitude plane donc sur la ville de Koudougou.

Par Antoine BATTIONO (Envoyé spécial)

Le Pays

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