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La décentralisation : un processus de longue haleine

Publié le lundi 24 avril 2006 à 08h28min

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Près de cinq (5) mois après la présidentielle, les électeurs burkinabè ont été rappelés, hier 23 avril, à élire enfin, environ dix-huit (18) mille conseillers pour gérer quarante neuf (49) communes urbaines auxquelles viennent de s’ajouter, cette année, trois cents deux (302) communes rurales.

En décidant d’ériger des communes rurales avec toutes les difficultés qui vont s’ensuivre, les autorités burkinabè ont franchi un pas supplémentaire dans la responsabilisation des populations à se prendre en charge. Elles ont en même temps, rompu avec cette hésitation à choisir entre la décentralisation urbaine et la communalisation intégrale.

Les soixante treize (73) partis politiques en compétition ont eu trois (3) semaines pour expliquer à des populations pour la plupart analphabètes et pauvres, cette forme nouvelle de gestion de la cité. Ils ont dû, chacun certainement à sa manière, tenir le « langage de la vérité » à ces braves gens qui relèvent que l’action du pouvoir central en leur direction, connaît des insuffisances et que l’Etat ne parvient pas toujours, même s’il est animé de bonne volonté, à répondre à leurs besoins.

La décentralisation est née de cette constatation. Il s’agit désormais de ce plus de démocratie qui devrait favoriser les initiatives locales, de cette possibilité pour les populations de créer les moyens nécessaires au développement de leur milieu et de contrôler leurs élus. Bref, il est question de la démocratie à la base qui, en réalité, n’est pas une initiative nouvelle. Depuis l’indépendance du pays en 1960, il y eut plusieurs tentatives de décentralisation qui n’ont pas résisté pour la plupart, à l’épreuve du temps.

En fait, le processus actuel s’inscrit dans une continuité. Il n’est pas imposé de l’extérieur même s’il faut reconnaître que des bailleurs de fonds l’ont fortement recommandé, parce que c’est un des moyens les plus efficaces pour les populations, de se prendre directement en charge.

Nos candidats aux postes de conseillers ont dû lever certains doutes sur les responsabilités de l’Etat réformé, dans cette phase de l’histoire du pays. L’Etat reste, à l’étape actuelle, le principal agent de développement. Personne n’a intérêt à son affaiblissement. L’Etat ne peut aujourd’hui se débarrasser de ses prérogatives, en les transférant aux communes sous peine de voir tout s’écrouler.

La réalité, c’est que ces communes sont, dans leur écrasante majorité, démunies tant sur les plans des compétences humaines que dans les domaines des infrastructures et des ressources financières. Pendant longtemps, le pouvoir central doit être présent en espérant qu’avec le temps, les communes s’en sortiront. Autrement dit, tout n’est pas de créer des communes ; le plus important est de les faire vivre.

Pour ce faire, il faut beaucoup d’imagination pour créer les ressources nécessaires à cette œuvre grandiose. Une œuvre de longue haleine, une aventure, diront d’aucuns. Les Burkinabè, en votant hier, ont accepté cette « aventure ». Le plus long voyage commence, dit-on, toujours par un pas. Il faut affronter les réalités du terrain et enterrer, sinon oublier ces promesses démagogiques que certains de nos candidats nous ont fait entendre tout le long de la campagne.

Il n’est pas étonnant que, dans certaines localités, les populations ne furent pas promptes à sortir ou encore moins à écouter des candidats dont certains disent (comble du ridicule !) ne pas révéler leur programme. Et que dire de ces nombreuses pages blanches dans les colonnes de Sidwaya, de ces chaises vides à la télévision nationale, de ces temps d’antenne non occupés à la RNB que le Conseil supérieur de la communication a gratuitement accordés à des candidats pour être plus visibles dans les médias de service public.

Les municipales ne sont pas à banaliser. Elles sont par définition, des élections de proximité ! Qu’on se le dise : les prétendants aux hautes fonctions nationales devraient apprendre à subir la sanction de la base. Un désaveu à ce stade est politiquement suicidaire.

Nombre d’hommes politiques l’ont compris : pour réussir aux législatives de 2007, il faut bien préparer les municipales de cette année. Il en sera désormais ainsi pour les consultations politiques, soyez en sûrs. Avec cette élection, c’est une nouvelle page politique de ce pays qui s’ouvre avec certes ses difficultés mais aussi ses espoirs.

Comme à la dernière présidentielle, les Burkinabè se sont rendus aux urnes dans le calme, la sérénité même si ces municipales ont été reportées par deux fois. Une preuve supplémentaire de la maturité de ce peuple et de l’enracinement de la démocratie.

Par Bessia BABOUE

Sidwaya

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