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Dossier Thomas Sankara : Après les déclarations de triomphe des auteurs...

Publié le samedi 22 avril 2006 à 00h00min

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Voilà une dizaine de jours que l’affaire Thomas Sankara occupe à nouveau les devants de l’actualité. Suite au rendu du Comité des droits de l’Homme de l’ONU sur la communication plainte des ayants droit du président défunt.

Il convient d’abord de rappeler que le Burkina Faso, contrairement à ce que pourraient penser beaucoup de personnes, ne traîne pas ce dossier comme un boulet à ses pieds.

La Journée nationale de pardon, tenue le 30 mars 2001, ne constitue pas seulement un exercice de catharsis collectif. Elle est et demeure dans son fondement philosophique, une réelle ambition de regarder en face et sans tabou, notre histoire.

C’est pourquoi, même s’il y a encore des sceptiques, la démarche comporte plusieurs vertus. D’abord, elle constitue une marche vers la réconciliation, qui donne le temps au temps. Cela en raison encore de la trop grande fraîcheur de ces événements douloureux, période révolutionnaire et post révolutionnaire, dans la conscience nationale. Ensuite, elle se veut un cheminement vers les familles meurtries avec patience, dans le but qu’elles adhèrent au processus au moment jugé opportun.

Mais alors, diront certains où est la part de vérité dans tout ça, le triptyque vérité-justice-réconciliation étant le bréviaire entendu et tenu par une partie concernée.

D’où la venue dans le propos de la saisine de la justice, porte du reste laissée entrouverte par la Journée nationale de pardon. Et c’est ce qu’ont fait madame Sankara et ses enfants.

La quête de vérité...

Le rapport à la vérité demeure une des plus vieilles questions à laquelle est confrontée l’humanité. Mais la vérité à y regarder de près n’a-t-elle pas plusieurs strates et parfois aussi contradictoires les unes que les autres ? Sans trop s’aventurer dans des aspects ou considérations philosophiques, le 15 octobre 1987 à la vérité a été et est avant tout, le résultat d’une contradiction au sens dialectique du terme.

Autrement dit, aucune juridiction fusse-t-elle composée de personnes les plus rompues aux choses du droit ne peut démêler objectivement, les causes et raisons ayant abouti à cette tragédie. D’où intervient ici, la nature ondoyante de la notion de vérité qui oscille allègrement sur des plans doublement subjectif et objectif ?

A la vérité, le combat engagé par le collectif d’avocats, à la base, était d’avance perdu parce que justement oscillant en permanence entre combat politique et combat juridique. Selon leur intérêt du moment où selon la tribune d’expression, ils mettaient l’un ou l’autre en avant.

Telle que première, cette quête de justice est la copie conforme du tableau manichéen, propre à la période du 4 août 1983 au 15 octobre 1987. Thomas Sankara est le mouton de sacrifice, tombé de par le cynisme de ses compagnons d’alors. Trop simpliste pour que cela soit en phase avec le vrai.

C’est pourquoi, il est difficile de parler vérité, sans établir le lien avec d’autres concepts que sont la réalité, l’objectivité, l’impartialité ou la neutralité. Qu’elle fut la réalité du 15 octobre, si tant est que ceux qui crient justice pour Thomas Sankara, peuvent objectivement soutenir que lui aussi ne voulait pas envoyer ses "amis" ad Patres, avec le support de la Force d’intervention

du ministère de l’Administration territoriale et de la sécurité (FIMATS) sur les fonts baptismaux et alors placés sous le commandement de l’ex-mercenaire Askia Vincent Sigué.

Qui ne se souvient alors de cette phrase, certes tombée aux oubliettes, mais tout aussi célèbre qu’une autre et venant d’un homme politique sankariste : "nous nous sommes longtemps occupés de nos ennemis, maintenant nous allons nous occuper de nos amis".

Les avocats du Collectif international "Justice pour Thomas Sankara" depuis leur croisade, sont-ils objectifs, impartiaux et neutres, eux qui font de cette affaire leur vitrine, fonds de commerce pour leur notoriété pour leur proche in fine. Tout ça a l’allure d’une vengeance pour soutenir cette quête de vérité.

La vérité, ils ne peuvent la soutenir, si vraiment c’est elle qu’ils recherchent.

La révolution du 4-Août a périclité de par la faute de son premier chef. Ce leader emblématique qui a force de parler jusqu’à en plus soif, a oublié qu’il agissait au nom du peuple et non pour sa propre image d’adoré et l’adulé. Les brimades subies par ce même peuple, dégagements, mises à la retraite d’office, mises au banc du pays ont été les germes de l’implosion du système.

C’est cela la vérité crue et c’est pourquoi aussi, le chemin du pardon choisi cadre mieux avec la recherche du vrai dans cette affaire.

Le grand déballage n’est à l’avantage de personne parce que toute la classe politique actuelle est concernée et elle le sait. Aussi, l’entendu du comité est sage à plus d’un titre. Reconnaissance officielle du lieu de sépulture de Thomas Sankara, indemnisation pour l’angoisse que la famille a subie, empêcher que des violations analogues se reproduisent à l’avenir.

A la vérité, la Journée nationale de pardon ne dit pas autre chose et elle essaie courageusement d’amener, même ceux qui sont encore à la traîne à s’inscrire dans cette dynamique.

Souleymane KONE

L’Hebdo

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