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L’Oeil des Parents : Bien plus qu’un simple relevé de notes scolaire

Publié le lundi 17 avril 2006 à 09h10min

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" L’œil des parents " est un site web qui informe les parents sur la vie du Lycée de la Jeunesse. C’est le nouveau mode de liaison entre les parents et le lycée. L’ambition de ses initiateurs : impliquer tout le monde éducatif burkinabè."Après avoir consulté les résultats de mon enfant sur le site ’’L’œil des parents’’, je le félicite parce qu’il a bien travaillé. ’’L’œil des parents’’, je pense que c’est un système utile. Il met en déroute la parade des mauvais élèves qui ne remettent pas leurs relevés de notes à leurs parents ou ne leur donnent pas de bonnes informations.

Pour moi, ’L’œil des parents’’, c’est la transparence", affirme Amadou Diop, parent d’un élève au lycée de la Jeunesse.

" L’œil des parents " est un site web d’informations et de communication entre le lycée de la Jeunesse, les enseignants, les parents d’élèves. Le bureau de l’Association des parents d’élèves (APE) l’utilise. Par ce canal, il convoque ses réunions, diffuse des informations sur ses activités. Avec " L’œil des parents ", l’objectif principal est de permettre aux parents de s’informer en temps et en heure sur le travail scolaire de leurs enfants.

Ainsi, reçoivent-ils des données concernant les programmes de cours, les devoirs, les notes et moyennes obtenues par l’élève, sa conduite, ses absences, etc.
"Certains parents s’intéressaient très peu à la vie scolaire de leurs enfants.

C’est pourquoi, nous avons trouvé ce moyen pour établir le contact. ’L’œil des parents’’ est donc la Technologie de l’information et de la communication (Tic) liant et amenant les parents à participer et s’intéresser à la vie scolaire de l’établissement ", soutient Aziz Touré, chargé des études au Lycée de la Jeunesse.

Le site s’avère un bon moyen permettant aux parents qui ne peuvent pas par manque de temps ou pour non présence au Burkina, de s’informer. Le web étant sans frontière. Les parents accèdent aux résultats de leurs enfants là où ils se trouvent.

Avec le site : www.asinfor.zcp.bf, "Les parents, au vu des résultats scolaires de leurs enfants, jugent de l’utilité de cours de soutien pour ces derniers", renchérit, Pascal Ouédraogo, responsable technique du site et membre de l’Association service informatique (Asinfor). Et Aziz Touré de marteler : "Par le biais du site, les enfants dont les parents suivent les performances ont de bons résultats".

Une information continue

L’information concernant l’élève est confidentielle et est disponible mensuellement. Les autres informations sont accessibles selon leurs programmations. Les parents, avec un identifiant et un mot de passe accèdent seulement aux résultats scolaires de leurs enfants et aux informations générales sur l’établissement. Tous les 700 élèves du Lycée de la Jeunesse sont d’office inscrits sur le site. En début d’année scolaire, l’établissement remet aux parents une enveloppe contenant le code d’accès aux différentes données.

Projet pilote au sein du Lycée de la Jeunesse, " L’œil des parents " existe depuis 2003. La phase d’expérimentation est prévue pour durer 4 ans. Un protocole d’accord a été signé entre le lycée en partenariat avec le Bureau de l’Association des parents d’élèves (APE), et l’Asinfor, chargée de la réalisation et de la gestion du site web. " Seulement 30% du taux de cotisation du bureau APE a permis d’assurer la collecte des donnés ", assure Pascal Ouédraogo. Aussi, déclare-t-il, " Les parents n’ont pas de suppléments à payer. Ils paient uniquement le temps de connexion permettant d’avoir les résultats de leurs enfants".

Au Burkina Faso, très peu de parents disposent d’internet à domicile. Ceux qui consultent les données scolaires le font au cybercafé ou à leur lieu de service. "Près de 30% des parents se connectent ", constate Emmanuel Sanou, président de l’Asinfor. Mais la majorité des parents ignorent tout du maniement d’internet.

"J’ai initié mon père à la consultation du site", reconnaît d’un air pudique, Judith Tiao, élève en terminale informatique. Pour pallier cette insuffisance, l’Asinfor " compte offrir aux parents qui le désirent la possibilité d’être initiés à l’outil informatique, à la recherche, à la messagerie ", souligne Emmanuel Sanou. En 2008, avec l’usage des Short messages service (SMS), les parents qui ne seront pas familiarisés avec le net pourront avoir les résultats de leurs enfants.
Avec " L’œil des parents ", bien des peurs sont nées. Ces craintes sont visibles aussi bien du côté des enseignants que des élèves.

La peur des Tic

"L’appellation, ’’L’œil des parents’’ m’a fait sourire au début du projet. Je l’ai vu comme un parent en train de surveiller son enfant de manière policière", déclare Sékou Traoré, professeur certifié d’anglais dans ledit lycée, avant de se rendre compte que " L’œil des parents " est une approche nouvelle en matière d’éducation. C’est un trait d’union, un outil permettant un partenariat entre parents et enseignants. "Le site permet aux parents de venir vers nous pour discuter du travail de leurs enfants".

Ainsi, au lieu d’attendre la fin du trimestre pour recevoir le bulletin scolaire, les parents disposent des résultats mensuellement. Et ceux qui veulent discuter ou rencontrer les enseignants le font afin de trouver les moyens pouvant permettre de soutenir l’élève dans ses études.

Au début, certains professeurs ont perçu le site comme un contrôle de leur travail. "L’existence du site a conduit les enseignants à être méticuleux, rigoureux ", reconnaît le chargé des cours du lycée, Aziz Touré. Du dévouement des professeurs pour la correction des devoirs dépend la mise en ligne des données des élèves.
"Nous avions déjà les bulletins de notes. Et si le site doit encore raconter nos faits et gestes, cela représente une trop grande surveillance pour nous. Le terme ’’L’œil des parents’’ est évocateur.

Cela fait peur. C’est pourquoi les élèves l’ont surnommé ’’L’œil du diable’’" ; confie Judith Tiao. Cette crainte des élèves est perceptible par rapport à leurs notes et moyennes en classe. " L’an passé sur le site, nos résultats ont été introduits avec des erreurs. Quand bien même nous l’avions signalé, il a été impossible pour nous de voir les rectifications prises en compte ".

Les élèves se plaignent également de la rapidité avec laquelle les notes sont transmises à l’informaticien. Les erreurs de décompte de points sont difficilement prises en compte dans les notes finales. Pour l’enseignant, Sékou Traoré, les enseignants essaient de faire au mieux leur travail afin d’éviter les erreurs de correction ou de décompte pouvant pénaliser les élèves. La solution trouvée est la vérification des copies avant que les notes soient transmises.

Concernant le site web, les élèves mettent l’accent sur le fait qu’ils n’en sont pas destinataires. " Si comme on le dit, c’est pour rendre compte de la vie scolaire, les concepteurs auraient pu faire un site pour le lycée auquel tous les acteurs étaient invités à participer", constate Judith. Sékou Traoré est pour que les concepteurs dudit site greffent des modules qui puissent intéresser les élèves afin de minimiser l’aspect policier.
L’Asinfor, bientôt, prévoit introduire un module de téléchargement de devoirs. Ce module, avec base de données, permettra aux élèves de partager et d’échanger les sujets de devoirs.

Cet échange se fera seulement entre différents établissements scolaires. Ce module nécessite l’inscription au site de plusieurs lycées. C’est encore un projet. Outre cela, l’album de Cursus Pro sera un système d’archivage de données sur les élèves d’une même promotion. Cet album numérique favorisera le suivi du parcours scolaire et maintiendra le contact entre élèves.

Englober le monde éducatif

"Pour qu’un lycée fasse partie du site, il faut que nous nous y prenions très tôt, bien avant la rentrée scolaire. Nous sommes donc en pourparler avec des établissements afin qu’ils bénéficient des services de notre site. Nous avons contacté plusieurs lycées de la place : le Collège de la Salle, le lycée technique de Ouagadougou, le lycée Montaigne, le lycée Vénégré...", affirme Pascal Ouédraogo. Sur un ton confiant, il poursuit. " Notre ambition est de connecter tous les établissements du Burkina Faso, de créer un réseau au plan national afin d’agrandir notre trafic et de conquérir le marché sous-régional.

Ce trafic nous permettra de monnayer nos prestations à différentes structures bancaires, associations de lutte contre le sida, ONG, acteurs culturels et autres structures d’assurance car nous deviendrons une interface du monde éducatif par laquelle plusieurs prestataires voudront toucher la cible que sont les élèves". La conquête de la clientèle des lycées de la sous-région sera un travail de longue haleine tout comme convaincre bon nombre de responsables d’établissements à adhérer à la philosophie de l’Asinfor.

Car, bien de résistances existent toujours. Néanmoins, Sékou Traoré soutient que : "Il y a dix ans de cela, l’ordinateur était vu comme un outil pour gens aisés. Maintenant, il est à la portée de tout le monde. Bientôt, ce serait pareil pour ’’L’œil des parents’’".

Pour réaliser le site, les concepteurs ont utilisé des logiciels libres. Ces logiciels garantissent quatre niveaux de liberté. La liberté d’utiliser les logiciels selon ses besoins. Ils peuvent être copiés et distribués avec la liberté d’améliorer le programme, et de rendre public les progrès apportés de telle sorte que d’autres personnes en bénéficient.

Ils coûtent moins chers comparativement aux logiciels commerciaux. PHP, Apache sont au nombre des logiciels libres utilisés par l’Asinfor pour minimiser les coûts de réalisation et de conception de " L’œil des parents ". " Nous faisons de l’information au service de la grande masse, du développement. Les retombées pour nous constituent à la fois une satisfaction morale et l’acquisition d’une expérience dans un secteur nouveau", conclut Pascal Ouédraogo.

" L’œil des parents ", pour l’heure, engendre des craintes. Lorsque les élèves y seront associés, il sera encore plus utile et pertinent comme canal de communication. Il sera un outil moderne d’échanges entre les acteurs de l’école. Au Burkina, Pascal Ouédraogo et Emmanuel Sanou sont les pionniers de ce système.

Ramata.sore@gmail.com

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