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Municipales : Course effrénée pour le pouvoir local

Publié le lundi 17 avril 2006 à 09h08min

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Cette fois-ci, c’est la bonne. La campagne pour les municipales du 23 avril a déjà entamé sa deuxième semaine. Mais tout comme à la présidentielle, on note une fois de plus une kyrielle de partis. En tout, 73 formations sont engagées dans cette course au pouvoir local. Une attitude qui peut valoir son pesant d’or, mais qui peut également entraîner de cuisants revers...

Depuis le 1er avril, les dés sont jetés. Les municipales se déroulent toutefois sans tambours ni trompettes. Désillusion ? Carence financière ? Vacuité des propos ? Le marketing politique pêche. Enormément...

Le landernau politique national aura tenu tout le peuple en haleine sur ces élections municipales. De report en report, certains étaient finalement devenus sceptiques. D’autres avaient vu en ces agissements des " manœuvres dilatoires " pour favoriser le pouvoir en place.

Un pouvoir qui fut à un moment donné, secoué par des tensions internes et des luttes de positionnement. L’opinion est encore mémorative des épisodes de Bobo-Dioulasso. Plus récemment, il a été question de querelles au sein du CDP Ouahigouya et Gourcy. C’est sans doute toutes ces raisons qui ont amené le président du parti, Roch Marc Christian Kaboré, a tapé du poing sur la table. En effet, le 24 mars dernier, il a prononcé des exclusions à l’encontre de " certains camarades dont le comportement [était] contraire à la vision du parti ".

L’autre point d’achoppement qui a cristallisé les débats était relatif au non renouvellement des démembrements de la CENI après la présidentielle du 13 novembre 2005. Ici encore, le consensus était quasiment rompu puisque certains partis politiques comme l’UNDD et le PAI accusaient l’institution de Moussa Michel Tapsoba, la CENI, de " nager dans l’illégalité ".

En son temps, Soumane Touré (PAI) avait même déclaré que la " démocratie burkinabè allait droit dans le mur du fait des actes de la CENI ". Puis les politiciens se sont une fois de plus retrouvés pour accorder leurs violons. C’est à l’issue de ces débats houleux que le principe du " report technique " des élections a été arrêté avant que l’Assemblée nationale ne les fixe définitivement au 23 avril. Aujourd’hui, pour emprunter une expression chère aux sportifs et notamment aux amateurs des courses hippiques, la vérité est sur le terrain.

Par monts et vallées, les candidats vont à la chasse aux voies. Ces élections marquant la communalisation intégrale du territoire, beaucoup privilégient la campagne de proximité. Les enjeux sont énormes car il s’agira d’élire, selon des sources généralement bien informées, 17 979 conseillers municipaux pour la gestion des 08 arrondissements, des 49 communes urbaines et des 302 communes rurales. C’est ce fait qui explique peut-être cette pléthore de partis politiques.

Constitués de plus en plus dans le but de promouvoir les ambitions personnelles de leurs leaders, les partis politiques ont fusé de partout au Burkina Faso sans un projet de société d’envergure. On en dénombre de nos jours, plus d’une centaine. Est-ce pour autant que la démocratie burkinabè peut se targuer de posséder plusieurs projets de société ? Le débat reste ouvert. Parmi les prétendants aux conseils municipaux, beaucoup sont ces formations politiques que les électeurs découvriront en même temps que les élections.

Cette situation est symptomatique du fait que ces partis sont généralement constitués en faisant usage des associations des ressortissants de cantons, de villages et amicales de préfectures... Dans les différents discours que l’on entend, les partis politiques ne tiennent pas suffisamment compte de la spécificité de ces consultations.

Celle-ci tient au fait que les municipales constituent une occasion de responsabiliser et d’autonomiser davantage les populations à la base. Les fameux programmes sont truffés de bonnes intentions. Cette remarque est plus vraie en ce qui concerne les débutants. Mais il n’est pas non plus exclu que " des vieux de la vieille " tombent dans ces travers.

Vers un repositionnement
de l’opposition ?

Pour les partis ayant participé à la présidentielle, les municipales constituent un deuxième exercice pour caresser la légitimité populaire. Elles sont surtout une occasion pour l’opposition de se repositionner après la débâcle de la présidentielle. Pour cela, l’électorat attend autre chose que les jérémiades et autres critiques stériles.

Il veut de véritables forces de proposition. Il ne sert à rien de déclarer que les lendemains seraient enchanteurs si on était élu, sans en montrer concrètement le chemin. Il y a longtemps que les Burkinabè ne croient plus aux prestidigitateurs. Le sentiment du monopole de la vérité absolue, immuable, est le propre des dogmes religieux. En démocratie, il y a nécessairement des débats contradictoires à mener, des projets différents à proposer pour forger la conviction des électeurs.

En cela, nombre de partis peuvent saisir ces municipales pour renforcer leur ancrage et bien se positionner dans la perspective de l’alternance. D’autres par contre qui ont pris part à la présidentielle (et qui sont à nouveau engagés) doivent encore réussir le pari de la visibilité. Fait d’autant plus important qu’ils se sont comme littéralement terrés dans l’anonymat après le Waterloo du 13 novembre dernier.

CDP-ADF/RDA :
droit dans les yeux !

Après avoir barri de toutes ses forces pour soutenir Blaise Compaoré à la présidentielle, l’éléphant revient à la conquête de ses terres. Cette fois-ci, c’est le chacun pour soi. Gilbert Ouédraogo l’a du reste déclaré : " Nous soutenons Blaise Compaoré mais pas le CDP ". L’ADF/RDA devra donc croiser le fer avec le méga parti. La compétition s’annonce surtout très serrée à Bobo-Dioulasso et à Ouahigouya.

A Bobo, le maire Célestin Koussoubé a, on le sait, atterri dans le parti de Gilbert avec armes et bagages. Même si ces détracteurs estiment que ce départ est un " épiphénomène ", il n’en demeure pas moins qu’il pourrait entraîner une redistribution des cartes. Le 04 avril dernier, lors du meeting de l’ADF/RDA, Koussoubé a même déclaré " maîtriser la situation " à Bobo.

En cela, il est soutenu par Gilbert Ouédraogo qui estime qu’il est à la fois le " maire sortant et le maire entrant de la ville ".Confrontation " étincelante " avec le CDP/ Houet en perspective donc... A Ouahigouya, Bernard Lédea Ouédraogo et Issa Joseph Diallo ex-Maires de la commune, entretiennent toujours le flou sur leur appartenance au CDP.

Leur absence au meeting du 1er et du 02 avril à Ouahigouya et à Gourcy signifie-t-elle qu’ils ont pris leur distance d’avec Salif Diallo, commissaire politique régional du Nord au CDP ? Rien n’est moins sûr. Le député Tahéré Ouédraogo n’a pas encore claqué la porte du CDP, mais c’est comme si car, il ne cache pas son soutien à l’ADF/RDA. C’est dire qu’il n’ y aura pas de cadeau dans ces régions.

A ces municipales, l’ADF/RDA joue gros. Elles constituent un baromètre pour savoir si le parti est toujours la première force politique après le parti au pouvoir. Du côté de Koudougou, trois partis se dégagent : le CDP, L’UNDD et le RDF. Hermann Yaméogo aura donc en face, son frère Salvador, et les candidats CDP. La " guerre des deux frères" aura-t-elle lieu ?

A Ouagadougou, après dix (10) ans, Simon Compaoré est encore dans les starting blocks pour un autre mandat de cinq ans. Même si l’édile de la ville semble serein, la tâche risque de ne pas être facile car si se faire élire ne semble pas poser de problème pour lui, il risque de ne pas être très à l’aise au sein du Conseil municipal.

Dans les cinq arrondissements de la capitale, la participation des partis se structure comme suit selon la CENI : Bogodogo (41 partis), Boulmiougou (40), Baskuy (36), Signoghin (32), Nongremassom (29). Il y a donc des milliers de candidats pour 163 conseillers. Au soir du 23 avril, l’équation risque d’être serrée quand viendra le moment du choix des maires

L’Evénement

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