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Grippe aviaire : L’autodafé du Pharaon n’a pas eu lieu

Publié le vendredi 7 avril 2006 à 09h00min

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C’est en principe hier que l’opération d’abattage de la volaille du village de Gampèla et ses environs devait commencer. Retard des autorités, colère et incompréhensions de la population contre le "Prince Isaac", propriétaire du camping (le Pharaon) où le virus H5N1 a été mis en évidence, sont, entre autres, les faits qui ont milité à l’avortement de l’autodafé.

Hier aux environs de 8 heures, nous avons appris que l’opération d’abattage de la volaille de Gampèla et de Barogo allait commencer dans les heures qui suivaient. Un tour au ministère des Ressources animales ne nous a pas permis d’avoir les renseignements nécessaires. Qu’à cela ne tienne, nous avons mis le cap sur le site situé à une dizaine de kilomètres sur l’axe Ouaga-Fada-N’Gourma. Autour de 9 heures, nous y avons trouvé le préfet du département de Saaba, Alexandre Maurice Ouédraogo, et les responsables des services vétérinaires qui s’affairaient pour le début de l’opération en attendant les autorités qui devaient venir de Ouagadougou.

Vu le grand retard accusé, les vétérinaires décidèrent de se scinder en deux équipes, une qui restera au camping et l’autre dans les villages pour commercer l’abattage. Mais, c’est sans compter avec la colère de la population contre le Prince Isaac, le propriétaire du camping. Elle a énergiquement exigé que le dernier poulet ou pigeon de la "porte d’entrée" de la grippe soit abattu avant d’entreprendre quoi que ce soit. Un peu plus tôt, Ferdinand Ouédraogo du camping le Pharaon, a été amené par la police de Saaba, qui l’a gardé pour éviter son lynchage par la foule en colère. En effet, vendeurs et éleveurs de la Cité An II et III de Bargo et de Gampèla, et nous en oublions, qui étaient sur lieux, l’accusent d’y avoir volontairement amené des poulets contaminés de l’extérieur du pays.

Une coïncidence troublante

Le président de l’association Wend-panga des vendeurs de volailles du Kadiogo, Saïdou Yaogo, s’explique : "Il y a deux semaines, il est venu au marché de la Cité An II pour vendre ses canards et pintades, ce qui est suspect puisque d’habitude il en achète, pendant que nous redoutions l’éventualité de la déclaration de la maladie. Il a dit sans sourciller que les autorités ont eu des milliards contre une éventuelle infection. Il s’est plaint de n’avoir rien reçu et a affirmé pouvoir amener cette maladie dans notre pays.

Ailleurs, je peux croire, mais chez lui non, car tout le monde sait qu’il est capable du pire". Ce témoignage, beaucoup l’ont soutenu. Pour certains, c’est une coïncidence troublante que le propriétaire du camping doit assumer et pour d’autres, c’est le vecteur principal du virus et il doit être traité comme tel. Le président de la Commission villageoise de gestion des terroirs (CVGT) du village de Barogo, Ouédraogo Moussa Sylvain, s’est voulu plus menaçant : "Dès qu’on m’a dit que la maladie a été découverte à Prince bar, j’ai immédiatement émis de sérieux doute, tant son propriétaire est de mauvaise foi.

Nous sommes d’accord qu’on abatte nos volailles qui constituent la seule source de devise pour sauver les hommes et animaux burkinabè, mais il faut au préalable commencer par la volaille de ce site, ici et maintenant ; ensuite il faut fermer ce bar parce que nous n’accepterons pas de vivre dans la misère du fait de cette situation, alors que son propriétaire nous nargue par son opulence". Selon toujours Ouédraogo Moussa, depuis trois semaines Ferdinand a vendu l’essentiel de sa volaille sans alerter les autres du danger qui nous menaçait.

L’effet du calmivet s’est fait attendre

Le président du CVGT de Gampèla, Yanogo Emile, n’a pas dit autre chose : "Nous pleurons aujourd’hui parce que c’est une affabulation ; nous sommes toutefois prêt à nous soumettre aux autorités que nous invitons à mener des investigations sur la personne de Ferdinand pour éviter la catastrophe ; c’est ce dont nous avons besoin plus que des 1 500 F par poulet".

Au Camping du Pharaon, il ne reste que des perroquets et des pigeons. Pour capturer ces derniers, les vétérinaires ont utilisé un produit endormant du nom de calmivet qui, visiblement n’a pas eu d’effet. Le Directeur des services vétérinaires, Mamadou Paré, qui, est venu sur les lieu aux environs de 12 heures, a dû réajuster la dose ; mais rien n’y fit. Du moins, nous avons quitté les lieux autour de 15 heures alors que les pigeons rivalisait de vol au firmament et se posaient de temps à autre dans le campement.

A en croire le Docteur Mamadou Paré, les recherches vont se poursuivre sur tout le territoire national et s’il est établi que le virus ne s’est pas propagé, les mesures restrictives seront levées. Plus tard dans la soirée, à 17h, la directrice de la Santé animale, Esthel Kanyala, nous apprenait au téléphone que le calmivet n’avait pas encore eu ses effets. C’est comme si le Camping du Pharaon refusait l’autodafé, qui est pourtant la condition sine qua non pour que les populations adhèrent massivement à l’opération d’abattage. Les autorités, qui semblent être toujours dans le balbutiement, ont peut-être intérêt à presser le pas pour éviter que cette petite résistance soit contagieuse.

Abdou Karim Sawadogo

Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 7 avril 2006 à 10:18, par Sally En réponse à : > Grippe aviaire : L’autodafé du Pharaon n’a pas eu lieu

    J’aimerais savoir comment l’infection a pu se déclancher en plein milieu du burkina ?
    même pas vers la frontière avec le niger ?
    Ensuite je pense que nos autorités n’ont rien fait pour empêcher cela tout en sachant que c’est la seule source de revenu de nos populations !
    Nous ne prenons jamais rien au sérieux !
    On verra ce que ça va produire comme effet

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