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Voyage d’études de diplomates taïwanais : Yacouba, la mer à... Dori !

Publié le jeudi 6 avril 2006 à 07h59min

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Les diplomates taïwanais en stage à l’Institut diplomatique et des relations internationales de Ouagadougou (IDRI) ont effectué un voyage d’études du 13 au 24 mars 2006 au Sahel et dans l’Ouest Burkina. Cette sortie a permis aux stagiaires de découvrir les potentialités économiques, les diversités sociales et les richesses culturelles du Burkina Faso. Le parcours peut se résumer en un chemin vers la sagesse africaine.

La mission de l’IDRI quitte Ouagadougou le 13 mars 2006 aux alentours de 8 heures. Aux abords du fleuve Nakambé, elle fait sa première escale au pied d’un imposant baobab, incarnation de la majesté et de la sagesse africaines.

Korsimoro offre la seconde escale. Les Taïwanais, reconvertis en reporters amateurs, visitent l’école de Korsimoro B. Malgré les congés, le Directeur de ladite école, Monsieur Saidou OUEDRAOGO, et un de ses adjoints, continuent de dispenser les cours.

Dans les deux classes, le nombre des filles dépasse largement celui des garçons. Au CM1, par exemple, sur 43 élèves, on dénombre 26 filles et 17 garçons. Cela traduit le dynamique changement des mentalités.

Avant de se rendre à Kaya, la mission se rend au barrage de Korsimoro où de nombreux maraîchers vaquent à leurs occupations pour contribuer à changer le goût de la sauce des urbains.

A Kaya, le groupe est reçu par la tradition au musée provincial. Une synthèse de la vie des communautés burkinabè se présente aux visiteurs.

Au hall des artisans sur le marché de Kaya, les Taïwanais se procurent quelques produits artisanaux, dont des chapeaux, pour se mettre à l’abri du soleil. Selon certains artisans, l’équipe doit s’attendre à une rude canicule à Dori.

Les stagiaires touchent de la main les réalités d’une famille nombreuse à Rimassa, un quartier de Kaya. Ils contemplent l’harmonie dans laquelle hommes et animaux partagent le quotidien sous les hangars et les arbres.

Les enfants de la cour et du quartier montrent leur curiosité de voir ces « nassara » leur serrer la main et de prendre des photos avec eux. Le groupe s’embarque pour Dori.

A Yalgo, le véhicule de la mission dépasse une Peugeot bâchée dont le nombre des passagers sur le toit est supérieur à celui de l’intérieur. Au-dessus du véhicule, les passagers discutent de la place avec les animaux, les bagages et les engins à deux roues.

Le conducteur a fait sien le proverbe qui dit : « Rien ne sert de courir, il faut partir à point ». N’est-ce pas prudent pour un véhicule de transport mixte qui doit braver le chemin accidenté où charrettes, ânes, gros camions et autres usagers ignorent royalement le code de la route ? C’est tout ça l’Afrique en développement !

A la rencontre du Burkina profond

Vers 16 heures, la mission arrive à Dori. Elle a successivement des audiences avec le Directeur régional de l’Hydraulique, le Secrétaire général de la région du Sahel et le maire de Dori.

Il a été respectivement question du programme de visite du barrage de Yakouta, d’une visite de courtoisie aux autorités régionales et d’une prise de contact avec le premier responsable de la commune.

Le 14 mars 2006, les diplomates taïwanais visitent le barrage de Yakouta et les travaux annexes (adduction d’eau potable, construction d’un château d’eau), dont la finalisation permettra de satisfaire les besoins de la population de Dori en eau potable.

Les reporters occasionnels ont apprécié la beauté du désert en passant une soirée agréable sur les dunes de Djomga, au secteur 6 de Dori.

Le 15 mars 2006, l’équipe rend visite aux pêcheurs de Dani, aux abords du barrage de Yakouta. Ils observent une prise d’un couple de pêcheurs et font un tour en pirogue qu’un des diplomates qualifie de meilleure expérience de sa vie. Pour celui qui a visité la grande muraille de Chine et les merveilles de l’Empire du milieu, cette déclaration est sans commentaire.

La modestie du paysage et l’humilité des hommes peuvent aussi impressionner. N’est ce pas là la richesse d’un peuple qui n’a ni pétrole, ni diamant ?

Le plaisir des Taïwanais atteint son optimum le mercredi 15 mars 2006 de 16 heures à 18 heures. Ils ont pu goûter à la vie des nomades du désert en faisant 12 kilomètres à dos de chameau.

La sobriété et la chaleur de la vie des villageois ont touché le cœur de leurs hôtes d’un soir. A la vue des cases, un des stagiaires exprime son étonnement par la question suivante : "Y a-t-il des tremblements de terre par là". La réponse est naturellement non.

Il poursuit, "Si c’était le cas, c’est la catastrophique, on ne s’imagine pas de telles constructions à Taïwan". Le 15 mars 2006, le groupe a un entretien avec le maire de Dori, monsieur Boubacar DICKO, soucieux de "vendre" sa commune. Il expose aux diplomates le projet d’assainissement de la ville.

Ce projet est évalué à 113 millions de francs CFA. La ville jumelle Nancy-le-Vieux a débloqué 65 millions de francs CFA et Dori est à la recherche de la somme restante. La réalisation du projet permettra de disposer de canalisation et de mieux gérer les ordures ménagères.

Les stagiaires taïwanais ont pris note des besoins du maire, qui, au-delà de l’assainissement, a souhaité l’établissement de liens de coopération culturelle entre sa ville et des communautés ou associations taïwanaises.

Le reste du séjour, la mission a visité le Centre d’échange de connaissances et de sagesse (CECOSA), animé par le Docteur Ly Boubacar, les mosquées de Dani dans le Sahel et le lac Dem dans le Centre Nord.

Ces différents lieux ont offert aux hôtes d’autres facettes de la culture et de l’économie du Burkina Faso. Le lundi 20 mars 2006, le groupe se rend dans l’Ouest Burkina.

Bobo-Banfora, la longue marche

Dans l’Ouest Burkina, les diplomates taïwanais ont visité la Société industrielle du Faso (SIFA), l’usine de production de cycles et cyclomoteurs, la Société burkinabè des Fibres textiles (SOFITEX), l’usine d’égrenage du coton (Bobo III), l’or blanc.

A la SIFA, l’équipe a suivi avec une attention soutenue l’exposé des responsables. Elle a pris connaissance de la chaîne de production des cycles et cyclomoteurs. Malgré une rude concurrence, la SIFA parie sur la qualité pour bénéficier de la fidélité de la clientèle.

A la SOFITEX, la problématique d’une plus grande transformation du coton burkinabè a fait l’objet de discussions entre les stagiaires et leurs guides.

La délocalisation au Burkina Faso d’usines textiles de Taïwan permet de disposer d’unités de filature et de tissage. Cela comporte sans doute des avantages mutuels.

Les diplomates taïwanais ont également apprécié des richesses culturelles telles que la mosquée de Dioulassoba, les Cascades de Karfiguéla, les Dômes de Fabédougou et le Lac de Tengrela.

L’harmonie et la symbiose de la nature ont amené l’équipe à marcher près de 15 kilomètres. A Bobo, inspirée par la sagesse africaine, elle dénomme le jus de pois sucré « l’eau de la sagesse ».

Ecole de la sagesse, chacun a une responsabilité Durant son séjour à Dori, la mission a consacré la journée du 16 mars 2006 à l’école de la sagesse. Le maître des lieux, élégamment habillé dans un style fulbé, visiblement épanoui et d’un air confiant reçoit les Taïwanais.

Après les salutations d’usage, l’inventeur et le promoteur du Centre d’échange de connaissances et de sagesse (CECOSA), le Docteur Ly Boubacar, aborde une diversité de thèmes.

La vie, le mariage, la richesse, la sécurité, le conflit, le travail, la liberté, l’égalité et d’autres sujets fort intéressants ont fait l’objet d’échanges.

La vie, selon le Docteur Ly, n’est pas un combat, mais une responsabilité ou une mission. Elle est aussi un mouvement. La sagesse commence lorsque l’homme prend conscience et connaissance de sa mission, et se détermine à l’accomplir.

Seule cette démarche confère une dignité au vivant. Pour réussir sa mission, l’homme doit développer les sept valeurs universelles (confiance en soi, connaissance, audace, dynamisme, persévérance, application et bienveillance) et disposer de sept facultés : penser, concevoir, percevoir, exprimer, vouloir, décider et réaliser.

Tel est le chemin qui permet à l’être humain de contribuer à la construction du monde, fonction originelle à lui confiée par le Créateur.

L’école de la sagesse utilise la démarche de la synthèse qui est constructive. Elle privilégie le relationnel et le caractériel et rejette le matériel et la démarche analytique qui dissèque et déstructure.

Selon l’inventeur de l’école de la sagesse, « toute chose retourne à son origine ». La vie est un voyage. Le corps meurt, mais pas la vie.

Le mariage, en tant que lien, a comme finalité l’unité. Le lien du mariage n’est ni la sensation (matériel), ni le sentiment (émotionnel), ni la signification (intellectuel), mais le sens (spirituel). Aujourd’hui, la majorité des couples cohabitent par désir, mais ne sont pas réellement mariés.

La richesse n’est perceptible que lorsqu’elle est mise en mouvement. L’homme riche est celui qui échange, qui distribue et qui partage. La richesse peut être matérielle, intellectuelle ou spirituelle.

La sécurité est simplement la mobilité et la sincérité. Le conflit naît toujours de l’arrêt des échanges, d’un manque de continuité et de fluidité.

Un bon travailleur est celui qui est sur l’axe de sa mission. La liberté "n’existe que dans un seul domaine : la pensée". L’égalité n’existe que dans l’idéal. La seule éducation, c’est apprendre à l’enfant à retrouver son idéal.

Selon le Docteur Ly, le voisin le plus proche, le plus pacifique et le plus permanent de l’homme est le ciel. Il doit apprendre à communiquer avec ce voisin. Cet effort de rapprochement permet l’élévation de l’homme, sa marche vers la sagesse. "Le sage ne voit jamais la laideur, il ne voit que la valeur".

L’inventeur de l’école de la sagesse a pour objectif de créer un mouvement pour l’anoblissement de la politique. Il ne supporte pas la démocratie contemporaine qui favorise la dictature des ignorants.

Il est favorable à une démocratie où seuls les sages ont le droit de vote. La masse fait toujours un mauvais choix. « L’imperfection du sage est au-dessus de la perfection de la masse », avertit cet homme politique reconverti, soucieux de rendre l’homme meilleur par l’éducation.

Il est convaincu que l’ignorance représente le péché originel et le bonheur, toujours éphémère, n’existe que lorsque l’homme a accompli sa mission.

Comme toute école digne de ce nom, le CECOSA interdit l’alcool, la viande et les belles de nuit. N’est-ce pas là un pas vers la sagesse que de résister à ses trois choses ? Le Docteur Ly, un autre Socrate, est convaincu que tous les hommes de la planète recevront l’enseignement de l’école de la sagesse.

Et un proverbe allemand indique bien à propos : « On fait un premier pas vers la sagesse en interrogeant un sage ». Les diplomates taïwanais de l’lDRI sont, eux, sur le chemin de la sagesse africaine.

Poussi Sawadogo

(IDRI/Ouagadougou)

Observateur Paalga

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