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Gestion de l’espace publicitaire : Le vide et ses conséquences

Publié le samedi 11 mars 2006 à 07h23min

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Depuis la disparition de Zama Publicité, l’absence de régulation de l’espace publicitaire national se fait cruellement ressentir. Auditeurs de radios, téléspectateurs ou simples badauds dans les rues sont gratifiés de spots et messages dont le moins qu’on puisse en dire est qu’ils sont absurdes, incohérents et d’une puérilité qui en dit long sur les capacités de leurs concepteurs.

Des avions qui décollent puis reculent pour arriver à destination, des animateurs qui vocifèrent des insanités sous prétexte de faire la promotion d’une soirée de gala, des "sensibilisateurs" qui heurtent et la réserve et la décence en brandissent des phallus en bois sur lesquels ils enfilent des capotes sous les regards attentifs de gamins à peine sortis de l’adolescence. Caractérisée par une lamentable médiocrité, l’offensive publicitaire se signale dans beaucoup de cas par des atteintes répétées à la morale.

Incapables de concevoir leurs produits en s’inspirant des coutumes, du vécu et des réalités du terroir, les publicités "importent" à tour de bras et finissent par agacer et irriter ceux-là mêmes qu’ils prétendent appâter et séduire. L’on se rappelle cette affiche géante qui a mis les femmes en colère parce qu’on y voit une boucle d’oreille à l’oreille d’un jeune éphèbe alors que culturellement, une telle image est tout simplement une abomination.

En demandant la privatisation de Zama publicité, la Banque mondiale a, comme d’habitude, fait preuve d’une inconscience totale dont le résultat a été d’affaiblir la capacité de communication du pays. Le paradoxe dans tout cela est que nous sommes à l’heure des grands défis, (désertification, Sida) et que par conséquent, la sensibilisation et l’éducation des masses revêt une importance particulière et doit donc être menée dans un cadre d’expression rigoureux et bien codifié.

A l’heure du tout électronique et du tout instantané, le pouvoir de mobilisation ou de démobilisation, d’intéressement ou de désintéressement des médias est tel qu’on ne peut raisonnablement laisser une telle force aux mains du secteur privé sans une réglementation et une contrôle rigoureux. Au même titre que l’eau ou l’électricité, la communication est un secteur hautement stratégique dans lequel l’Etat doit manifester sa souveraineté et surtout veiller au grain.

Le Conseil supérieur de la communication devra donc créer en son sein un comité d’éthique et de contrôle du message publicitaire. Cette structure aura pour tâche le contrôle de la totalité de la publicité proposée sur le sol national. Elle pourra également se prononcer sur la pertinence au nom de certaines télénovélas dont la diffusion consacre à abrutir certains groupes vulnérables.

De même, nombre de clips doivent faire l’objet d’un examen attentif de la part de ce comité qui pourra alors décider de leur retrait ou de leur maintien. Il faut assainir de toutes les manières possibles la consommation communicationnelle des burkinabè car d’elle dépend au bout du compte du dynamisme et de la stabilité du pays entier.

Pour la sous-région Ouest-africaine, le Burkina Faso est le moins disant en matière de créativité et de richesse de ses messages publicitaires. Cela est imputable en premier à ce fameux "vide" à la fois juridique, éthique et professionnel à cause duquel n’importe qui se permet n’importe quoi et n’importe comment.

Luc NANA

L’Hebdo

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