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Moussa Michel Tapsoba, l’homme qui fait problème à la CENI

Publié le vendredi 3 mars 2006 à 08h04min

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Moussa Michel Tapsoba, président de la CENI

Le problème de la CENI, c’est son président, disent en chœur les " amis " de Moussa Michel Tapsoba. Dissident du PAI (Parti africain de l’indépendance), chose qui lui vaut toujours des inimitiés qui ne rouillent pas, et représentant du GERDDES, organisation félonne aux yeux d’une certaine frange des militants des droits de l’homme, le président de la CENI est un concentré de problèmes.

Avec son arrêté illégal portant reprise des activités des démembrements de la CENI, il a fourni le fouet inespéré, avec lequel ses nombreux " amis " vont le battre. Dans la tourmente actuelle, il peut se consoler d’avoir la bienveillance de Blaise Compaoré. Mais pour combien de temps ?

S’il y a une structure dont la naissance a été longue et douloureuse, c’est bien la CENI. Le débat pour ou contre l’existence d’une Commission d’organisation des élections, ombiliquement indépendante de l’Etat et notamment du Ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation (MATD) date du Forum pour la réconciliation nationale de 1992.

Les grands gestionnaires de l’Etat n’en voulaient absolument pas pour diverses raisons et ont toujours préféré les Commissions nationales d’organisation des élections (CNOE) dans lesquelles les préfets conservaient un rôle éminent, en particulier sur la question sensible de la confection des listes électorales.

Et même quand l’idée a fini par s’imposer, la CENI resta un temps une structure ad hoc avant de connaître son évolution actuelle. Entité permanente de nos jours, sa composition tripartite (majorité- opposition- société civile) fut une concession tardive* du parlement dominé par le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP, parti au pouvoir) qui préférait une composition exclusivement partisane. Et ce n’était que justice quand on connaît le rôle actif tenu par la société civile dans l’histoire démocratique et électorale du Burkina.

Mais la difficulté à admettre cette composante comme partenaire des organisations politiques dans l’encadrement du processus électoral repose sur la rengaine que la société civile, loin d’être la force tampon neutre qu’elle prétendait être, reproduisait les mêmes clivages qui divisent le monde politique. Le parti majoritaire qui tenait les organisations civiques pour des groupes oppositionnels n’entendaient pas se laisser contourner. Si le pouvoir devait absolument composer avec la société civile, tant qu’à le faire avec une société civile qui ne lui est pas hostile.

Dans sa composition actuelle, la CENI compte en effet cinq représentants de la société civile à raison de : trois représentants des communautés religieuses, un représentant des autorités coutumières et un représentant des associations des droits de l’homme et des libertés. Avant d’en arriver là, la CENI dans sa période ad hoc, avait été dirigée par des hommes d’église. C’est par cet artifice que le pouvoir tenta de réduire l’influence jugée hostile des organisations de défense des droits de l’homme qui furent jusque-là les porte-drapeaux des luttes pour des changements démocratiques.

Parmi les organisations des droits de l’homme, le GERDDES est incontestablement avec le MBDHP les deux principales. Le GERDDES avait cette particularité de circonscrire son activité dans le créneau du développement démocratique. Depuis les municipales de 1995, ces deux organisations avaient mis sur pied un Collectif pour l’observation indépendante des élections, Collectif qui officia également pendant les législatives de 1997 et la présidentielle de1998. Depuis l’assassinat en 1998 de Norbert Zongo, alors président de la Société des éditeurs de la presse privée (SEP), association membre du Collectif des observateurs, ce dernier n’a plus fonctionné.

Au moment où la structure permanente de la CENI était mise en place, le MBDHP était plus préoccupé par les activités d’un autre collectif, celui contre l’impunité. Dans les conditions du moment, le GERDDES, organisation réputée modérée, faisait la bonne affaire du pouvoir, parmi des organisations religieuses et coutumières fortement suspectées par l’opinion publique d’être des faire-valoir.

Moussa Michel Tapsoba, représentant du GERDDES à la CENI avait par contre une image plus controversée. Si certains lui reprochaient des griefs qui datent de la période révolutionnaire (il fut entre autres, ministre de l’Eau), d’autres, notamment ses anciens camarades du PAI ne lui pardonnent pas d’avoir abandonné le navire au moment où celui-ci traversait des eaux troubles.

De même, dans les cercles du pouvoir, Moussa Michel Tapsoba ne compte pas que des amis. Certains le trouvent peu maniable et même arrogant. Mais dans cette adversité, son meilleur soutien, et il est de taille, semble être le président du Faso lui-même. C’est certainement en raison de cela que Moussa Michel Tapsoba n’a pas, comme d’autres dans des situations similaires, connu la mauvaise fortune. Mais les déboires actuels de la CENI qui sont en partie liés à la personnalité de son président montrent que certains ne désespèrent pas d’en finir avec lui.

La CENI au pilori
A la faveur de la décision du Conseil constitutionnel annulant l’arrêté du président de la CENI de prolonger les mandats de ses démembrements, on a entendu une kyrielle de critiques tendant à dire que la CENI en fait à sa tête. De fait, la CENI n’avait pas la compétence requise pour modifier l’article 34 qui dispose que le mandat des membres des démembrements de la CENI prend fin avec la proclamation des résultats définitifs de leurs circonscriptions électorales respectives. Initialement prévues pour se dérouler en septembre 2005, les élections municipales se situaient à moins de deux mois de la présidentielle.

Ce délai était manifestement insuffisant pour reconstituer de nouveaux démembrements, compte tenu des réalités nouvelles sur le terrain, en particulier les difficultés liées à la sempiternelle question des représentations, au regard de la multitude des organisations politiques et civiles. De plus, organiser une prestation de serment pour tous ses démembrements n’est pas une mince affaire.

Il était donc entendu pour tous les acteurs de la CENI que les démembrements qui avaient été mis en place allaient officier pour les deux élections. Le report au 12 février 2006 du scrutin municipal ne devait pas changer la donne en ce qui concerne le consensus initial sur les démembrements. Pour des questions d’intendance, les mandats furent un temps suspendus jusqu’à leur rétablissement le 15 décembre par un arrêté de la CENI.

On sait désormais comment le consensus fut rompu. Il était pourtant facile d’imaginer que le pacte du silence ne pouvait fonctionner que dans la mesure où l’affaire arrangeait tout le monde. Mais dès lors qu’un larron se sent lésé, et ce fut le cas avec l’épisode de Bogodogo où la structure décentralisée de la CENI a rejeté le dossier du parti de Arouna Dicko (le RPN), tout était susceptible d’être remis en cause.

L’enjeu de la crédibilité et de l’indépendance

Si la question de l’indépendance de la CENI a perdu un peu de son caractère polémique, cela tient sans doute à l’implication de l’ensemble de la classe politique dans la gestion de la structure électorale. De plus, le mode de gestion est tel qu’aucun parti ne peut raisonnablement se plaindre de ce que cette structure serait au service exclusif d’un parti.

Au contraire, les grands partis longtemps habitués à des positions de pouvoir se trouvent ici dans une compétition serrée avec les petits partis, qu’ils soient de l’opposition ou de la mouvance du pouvoir. Les décisions importantes, de l’avis général, sont prises sur une base majoritaire après de larges discussions. Paradoxalement, dans une institution censée organiser la vie démocratique, la pratique du vote n’y est pas courante.

Dès le départ, les commissaires de la CENI semblent s’être entendus sur la nécessité de dépasser les intérêts partisans pour ne pas compromettre les missions qui leur ont été dévolues. Apparemment, les choses semblent avoir bien fonctionné si l’on considère les plaintes émanant de certains grands partis qui auraient certainement souhaité confiner leurs représentants dans un rôle de simples relais. Mais dans la bataille pour sa crédibilité, l’image du premier responsable est essentielle.

Des critiques essuyées par la structure de M. Tapsoba, on peut en effet conclure à sa responsabilité personnelle dans la décision de fermer les yeux sur la disposition de l’article 34. En sa qualité de représentant de la société civile soucieux de la moralité des moeurs politiques, il lui revenait d’indiquer la voie la moins mauvaise pour régler la question des démembrements. Plus encore, sa qualité de président de l’institution faisait de lui le premier garant du respect de la loi, du moins dans ce qui était son champ de compétence.

Plus que jamais, Moussa Michel Tapsoba mesure à présent la pertinence d’une telle position d’autant que les acteurs politiques donnent à fond dans l’hypocrisie alors que leur responsabilité est aussi claire que l’eau de roche. La question que tout le monde se pose est pourquoi ce qui est possible aujourd’hui au sein du Parlement n’a pas pu l’être hier.

Il aurait seulement suffi que le président de la CENI saisisse le gouvernement sur le cas de figure qui se présentait pour dégager sa responsabilité. Quelles considérations ont pu endormir la vigilance de M. Tapsoba ? On ne le sait, mais à présent, l’occasion est fort belle pour ses détracteurs de ruer dans les brancards les yeux fermés. Mais aux politiciens de mauvaise foi qui faisaient feu de tout bois à la rencontre entre le gouvernement et les partis politiques, le ministre de l’Administration territoriale a dû rappeler que la CENI n’est certainement pas la seule fautive.

Mais derrière certaines récriminations contre le président de la CENI, c’est l’existence même de la société civile à la CENI ou à tout le moins sa place qui est remise en cause. Un président de parti ne s’est-il pas étonné de la portion congrue qu’occupent les partis politiques à la CENI alors qu’ils y sont majoritaires ?

Au-delà de ce qui se présente comme des querelles de préséance, il y a des velléités de contrôle plus serré de l’organisation qui ne ferait pas le jeu que certains auraient souhaité. Mais de cela, on ne tardera pas à en savoir plus à la prochaine révision du Code électoral.

Germain B. Nama


Michel sème les ennemis au vent

Difficile de faire la part des choses entre ce qui relève de la gestion de la CENI par son premier responsable et ce qui participe du règlement de comptes. Moussa Michel Tapsoba est certainement victime de cette ambiguïté, lui qui fut membre du bureau politique du PAI, ministre révolutionnaire de l’Eau, haut responsable d’une organisation de la société civile et aujourd’hui président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Tout est là. Il doit prouver que ce parcours atypique n’est pas un handicap, mais plutôt une chance.

Pour l’instant, les choses paraissent plutôt malaisées. En septembre 1983, la révolution avait à peine un mois quand des travailleurs de la Voltelec, actuelle Sonabel, organisés au sein du STOV (syndicat contrôlé par le PAI), prennent le DG et son adjoint en otages et installent un conseil provisoire de gestion.

En novembre de la même année, un groupe de travailleurs d’obédience Païste de l’Office des Postes et Télécommunications procèdent à l’arrestation, Kalachnikov au poing, de quelques anciens directeurs généraux de l’Office, réunissent le personnel devant l’établissement et tiennent avant la lettre un tribunal populaire révolutionnaire.

Entre ces deux actions d’éclat, une marche sur la mairie de Ouagadougou est décidée le 21 septembre par des CDR dans le but d’y déloger le maire. Ces différentes actions mettent au premier plan des militants de la LIPAD-PAI sans avoir été, semble-t-il discutées et programmées par les instances du parti. Quelques responsables s’indignent de ce cours anarchiste et exigent que le parti s’en démarque publiquement. Parmi ces responsables frondeurs, il y a un certain Moussa Michel Tapsoba.

Touré Soumane, que l’on soupçonne d’être la tête pensante de ces coups d’éclat, repère cet impertinent dont le comportement est vécu par lui comme un crime de lèse-majesté. Dans le même temps, les cercles étroits du Conseil National de la Révolution (C NR) commencent à s’inquiéter de l’activisme débordant du PAI. Commence alors une lutte d’influence au sein des Comités de défense de la révolution.

En août 1984, le gouvernement révolutionnaire est dissout. Le nouveau gouvernement qui sera formé ne compte aucun membre du PAI. Moussa Michel Tapsoba y occupera cependant le portefeuille de l’Eau, dans un contexte de chasse aux sorcières lancée contre les militants de son parti au sein des structures CDR. Il avait auparavant remis sa démission du PAI. Cela explique-t-il en partie ses déboires ? Possible.

D’autres lui font aussi grief de certaines de ses décisions lorsqu’il était ministre de l’Eau.
En ligne de mire, le contrat d’embauche qu’il a fait établir dont les conditions étaient essentiellement politiques. On peut là lui reprocher un certain zèle, mais l’ambiance de l’époque était en générale inquisitoriale.
A cet égard, nombre de ceux qui nous gouvernent aujourd’hui peuvent difficilement lui jeter la pierre.

N’empêche que Moussa Michel Tapsoba ne compte pas que des amis dans les hautes sphères du pouvoir. Il n’est donc pas sûr que le parapluie présidentiel suffise à le protéger des peaux de banane.

GBN


Municpales : Les défis sont énormes

Le 23 avril prochain (si la date tient), le Burkina Faso enclenchera sa politique de communalisation intégrale au travers des élections municipales. Quel doit être le rôle des acteurs ? Quelles conditions pour la réussite du processus ? C’est sur ces problématiques que les députés du groupe parlementaire Convention des Forces Républicaines (CFR) ont réfléchi les 11 et 12 février derniers.

Pour ce regroupement, les municipales ne doivent pas être une occasion de règlements de comptes politiciens. Les risques encourus si elles l’étaient, seraient immanquablement l’exacerbation des frustrations et l’instabilité sociale permanente. Un autre défi des élections consistera en l’amélioration des conditions de vie des populations.

Le Congrès pour la Démocratie et le Progrès(CDP), semble en faire une grande préoccupation. Les 15 et 16 février 2006, ses journées parlementaires ont en effet porté sur la lutte contre la pauvreté en milieu rural avec comme axe précis les aspects liés au commerce. Ce choix n’est pas fortuit puisque la grande partie des électeurs se recrute en milieu rural.

C’est également à ce niveau que l’incidence de pauvreté est la plus marquée. En ce qui concerne les municipales, tout en ne dévoilant pas sa stratégie, le CDP entend une fois de plus " frapper fort ". Avant de jeter également son dévolu dans cette échéance, le groupe parlementaire Justice et démocratie a choisi de réfléchir sur les forces et les faiblesses du processus électoral burkinabè.

Ainsi, il ressort que le processus électoral dispose d’un cadre normatif et institutionnel favorable, est quadrillé par des contre-pouvoirs et a lieu dans une homogénéité sociale. Toutefois, la pauvreté, l’ignorance, la corruption, la politisation de l’administration... sont des maux à extirper pour un véritable ancrage démocratique.

L’un dans l’autre, les échanges auront permis aux différentes formations de s’outiller dans l’attente des chaudes empoignades. Reste à espérer que les politiciens en tirent véritablement la substantifique moelle. Comme le disait l’un d’eux, une odieuse confusion entre régionalisation et régionalisme, ne sonnerait que l’échec lamentable du processus.

AFB

L’Evénement

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Vos commentaires

  • Le 22 janvier 2009 à 00:22, par ché En réponse à : Moussa Michel Tapsoba, l’homme qui fait problème à la CENI

    Bonsoir depuis la France (limoges), suis burkinabè et suit très bien l’évolution de la ceni du burkina depuis cinq ans.

    Laissez le 1er responsable de la ceni en paix car il a aussi fait du bon travail !!! ne voyez pas que le négatif vous aussi

    je vois plutôt de la jalousie dans certains propos ; à ouaga le problème réside là : dès que tu "perce" on te voit d’un mauvais œil et gate ton nom !!!
    arrêtez car cela est très déplorable pour notre Faso

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