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Lutte contre la fraude sur le marché des motos : Le groupe SIMMO-Mégamonde veut s’impliquer

Publié le vendredi 3 mars 2006 à 07h30min

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Suite à l’enquête sur la fraude dans le domaine des motos parue dans notre édition du jeudi 23 février 2006, nous avons enregistré une réaction du PDG du groupe SIMMO-Mégamonde, M Nasser Basma qui évoque un autre aspect de la fraude (l’utilisation abusive des marques), critique les méthodes de contrôle de l’organisme de vérification (COTECNA) et propose la suppression de la valeur de référence. Il commence par apprécier le travail de la coordination de lutte contre la fraude.

La Coordination fait du bon travail mais elle ne peut à elle seule venir à bout de la fraude. Il en est de même des agents des douanes pris isolement. Les fraudeurs sont nettement plus organisés et mieux équipés que les douaniers. Il faut, à mon avis, une action concertée entre l’Etat, le secteur privé et les populations pour une plus grande efficacité dans la lutte contre la fraude qui est une maladie grave pour notre jeune nation.

Le Burkina ne peut pas se permettre de perdre de précieuses ressources à cause de la fraude. Il faut donc y trouver une solution et mon groupe est même prêt à apporter son appui aux structures de lutte, notamment en moyens matériels et logistiques pour une plus grande efficacité de celles-ci sur le terrain.

Nous sommes disposés à le faire en tant que citoyen soucieux du développement de ce pays mais aussi en tant qu’industriel dont les activités pâtissent de la fraude. Le groupe SIMMO-Mégamonde souffre surtout de la fraude sur ses marques pourtant protégées par les lois de la propriété intellectuelle. Des commerçants véreux font entrer des motos frauduleusement et y apposent les sigles et logos de notre groupe profitant de la crédibilité de notre image, de notre « branding ».

Ils grugent ainsi d’honnêtes citoyens et portent atteinte à la notoriété de notre maison car bien souvent, leurs produits naturellement moins chers sont de mauvaise qualité. Ce qui nous cause pas mal de désagréments car il est difficile de lancer un « brand » pour le voir ainsi pirater, attaquer par des fraudeurs. Les autres sociétés ne sont pas non plus à l’abri. Leurs marques sont allègrement fraudées.

Il suffit de faire un tour sur le marché pour voir de fausses Yamaha ou de fausses Suzuki. Les populations qui ne savent pas différencier le vrai du faux en font alors les frais. L’Etat doit faire quelque et nous sommes prêts à l’y accompagner car la généralisation de la fraude dans ce domaine est le prélude à l’atteinte générale de tous les secteurs de l’économie nationale. C’est arrivé dans des pays de la sous-région et il faut plus que jamais prendre les devants car notre pays qui a beaucoup progressé, ces dernières années, ne mérite pas de voir ses efforts ainsi annihilés.

La COTECNA doit revoir sa copie

Dans l’enquête, la COTECNA a nié l’existence de deux formes de détermination des valeurs des motos dans ses services. Je confirme l’existence de cette pratique. Nous nous sommes déjà plaints de cette situation auprès de cette structure qui n’a pas pour autant revu sa copie. Et pourtant, elle doit le faire au lieu de se réfugier derrière des artifices du genre, « nous ne donnons qu’un avis, la douane est souveraine, etc. » Comment peut-on comprendre que pour des motos de même type, des importateurs déclarent moins que les autres sans que la COTECNA ne procède au redressement ou redresse très modérément. En effet, pendant que la plupart des importateurs de motos déclarent acheter leurs motos à 325 dollars, d’autres déclarent acheter les mêmes motos à seulement 110 dollars et la COTECNA avalise. Or pourtant, les premiers et c’est notre cas, commandent par milliers contre vraiment de petites quantités (40 à 400 motos au maximum) pour les seconds. Pourquoi la COTECNA ne nous aligne pas sur les valeurs pour les mêmes produits. Les grandes différences entre nos valeurs ne se justifient pas. Au contraire, elles créent une situation d’inégalité et favorisent la pertes de recettes douanières.

La douane est certes souveraine dans sa tarification mais elle n’a pas pour rôle de refaire systématiquement le contrôle des valeurs à la place de la COTECNA qui est présente partout dans le monde entier et qui, mieux, est censée connaître les prix. Elle est, du reste, bien payée pour cela.

La COTECNA doit donc revoir sa copie et faire convenablement son travail et éviter que les recettes douanières ne soient perdues par sa faute. Ce qui est actuellement le cas.

Elle dit également lutter contre la fuite des devises par une surfacturation de prix. Je voudrais dire qu’une telle pratique est improbable dans le domaine de la moto car les transactions sont vraiment faibles (50 à 100 millions pour les plus significatifs) et il ne viendrait à l’idée de personne de déclarer acheter une moto par exemple à 1000 dollars. Le problème rencontré et dénoncé par nous, c’est la minoration des prix.

La valeur de référence n’a pas de raison d’être

S’agissant de la valeur de référence dont il est question dans l’enquête, je pense qu’elle n’a pas vraiment de raison d’être puisque instaurant un double avantage pour les industriels que nous sommes : SIFA, SIMMO et DIACFA.

Ce qui ne se justifie pas, à mon avis, quoique nous y trouvions notre compte. En effet, le Code des investissements nous classe déjà dans la première catégorie douanière et relègue les autres en troisième catégorie. Cela est suffisamment avantageux pour les industries pour qu’on charge encore les autres. Nous pensons que cela contribue plutôt à engendrer de la fraude car les autres auront tendance à vouloir se soustraire à une telle charge douanière. En tout état de cause, si la COTECNA fait bien son travail, l’état devrait trouver son compte. Nous, nous pensons qu’une concurrence saine passe par une tarification douanière basée sur la réalité des investissements.

Le reste est une question de stratégie de vente. Mais, l’état est souverain et nous respectons sa décision.

Les motos chinoises sont de bonne qualité

Des intervenants dans l’enquête ont laissé entendre que les motos chinoises sont de mauvaise qualité et perturbent le marché. Je m’inscris en faux par rapport à de telles allégations qui relèvent plus de spéculations que de faits avérés. En effet, la moto chinoise est de bonne qualité parce qu’elle subit les mêmes processus de normalisation que les autres marques de par le monde. Elle bénéficie plutôt d’un environnement de production qui lui permet d’être plus compétitif. Ce qui n’enlève rien à sa qualité.

Notre partenaire Jincheng (JC) fabrique d’ailleurs des pièces pour les constructeurs d’avions tels que Boeing. En outre, les grandes marques sont en train de se délocaliser en Chine pour pouvoir bénéficier des avantages du marché chinois et conserver leur position de leader sur le marché mondial. La moto chinoise ne peut donc pas perturber le marché. Elle l’a même dynamisé et si elle n’était pas de qualité, les consommateurs ne l’achèteraient pas.

Ce n’est pas seulement une affaire de prix puisque les motos indiennes présentes sur le marché sont encore moins chères mais ne connaissent pas le même engouement. En dehors de cela, il faut reconnaître que les motos japonaises sont nettement très chère. Nous l’avons constaté à notre début pour en avoir vendu en seconde main.

Il faut voir les choses ainsi et aussi en termes d’approche de marché comme nous le faisons en proposant des packages aux clients (assurance, casques, service après vente dans un garage). Bref, notre relation commence après la vente. Nous sommes de ceux qui pensent qu’il ne sert à rien de vouloir réaliser de super profits immédiatement alors que les populations n’ont pas les moyens d’acquérir nos produits.

Il faut tabler sur le long terme et c’est ce que nous faisons en proposant des produits abordables. Du reste, lorsque les prix sont abordables, la consommation augmente. Nous trouvons ainsi notre compte tout comme les autres acteurs de la chaîne (vendeurs de carburant, assureurs, mécaniciens etc.) et nous croyons que c’est ainsi qu’on fait tourner une économie. Enfin, je voudrais saluer les efforts de Sidwaya pour éclairer la lanterne des populations sur un secteur sensible comme celui de la moto qui est promis à un bel avenir. Les prix des hydrocarbures resteront longtemps élevés.

La moto se positionne comme l’alternative pour des économies d’énergies pour les pays en développement comme le nôtre. Même dans les pays développés, la moto est en train de revenir. Il appartient donc à l’état et aux acteurs du domaine d’en tirer un meilleur parti en luttant contre la fraude sous toutes ses formes. Je voudrais aussi remercier les clients et les partenaires du groupe pour leur confiance. Nous avons foi en la moto et nous osons croire que la mauvaise passe que nous vivons en ce moment ne sera bientôt qu’un souvenir.

Nasser Basma

Sidwaya

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