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Lutte contre la pauvreté en Afrique Subsaharienne : Les batailles ciblées de l’Union européenne

Publié le samedi 18 février 2006 à 07h38min

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Sari Suomalainen, représentante de l’UE au Burkina

En dépit des multiples efforts qui sont déployés tant par la volonté politique des gouvernants que par l’abnégation des populations, l’Afrique subsaharienne a toujours du chemin à faire pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).

Toutefois par le biais de son partenariat avec l’Union européenne (UE), de meilleures perspectives de progrès s’ouvrent à l’horizon. Car dans son engagement d’aide au développement, l’Union accorde une priorité exceptionnelle à l’Afrique.

Pour preuve on notera que l’UE (Commission + Etats membres) représente à présent 55 % de l’aide mondiale au développement des pays pauvres.

Intégrer l’économie africaine à la dynamique de l’économie mondiale, favoriser l’émergence de la bonne gouvernance, la démocratie et lutter contre le VIH/Sida etc, sont désormais les batailles que l’UE a engagées sous la direction de son président, M. José Manuel Barroso pour vaincre la pauvreté sur le continent africain.

L’UE a toujours cru aux valeurs cardinales de la paix, de l’intégration économique et, la cohésion sociale comme des facteurs déterminants de la prospérité des nations. Riche de cette expérience d’une quarantaine d’années, elle s’engage maintenant à partager les fruits de l’Union dans la diversité avec les peuples défavorisés dans un esprit de solidarité.

L’Afrique subsaharienne est un partenaire privilégié.

Cela paraît se justifier car cette région du continent a toujours tenté de s’organiser au sein de regroupements telles : l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), la Communauté de développement de l’Afrique australe (SDAC), la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) afin d’emprunter les voies de succès de l’UE.

Aujourd’hui au-delà de l’engagement, l’Union est à pied d’œuvre dans la lutte contre la pauvreté sur tous les fronts stratégiques.

Quand l’Afrique trace le chemin de son développement

Pour tout progrès, il faut croire prioritairement en ses propres forces et ses propres options. Cela dans l’optique d’assumer son devenir et l’Afrique a de plus en plus conscience de la nécessité de cet élan.

En effet, si la décennie 1990 fut synonyme pour le continent africain de perte de tout son intérêt géographique, de baisse sensible de l’aide au développement et de multiplication des conflits, ces dernières années laissent transparaître une volonté de la part des leaders africains de surmonter leurs difficultés et de progresser sur les chemins de la sécurité et du développement. Cet espoir repose sur la transformation de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) en Union africaine (UA), l’abandon de son principe de non-intervention et l’adoption en octobre 2001 du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD).

Fortement soutenue par les multiples partenaires, l’Union européenne en première ligne, cette nouvelle dynamique s’appuie sur le renforcement des schémas de l’intégration régionale en Afrique. Les multiples guerres ont eu des répercussions néfastes tant sur les économies nationales que régionales.

C’est pour juguler les désastres socio-économiques qui ont porté un coup de frein au progrès, que les leaders africains ont pris conscience de la nécessité d’assurer la stabilité à leurs frontières et d’intervenir dans les tensions survenant dans leur entourage. De là est née une nouvelle volonté de gérer les crises, de plusieurs communautés économiques régionales.

Progressivement l’esprit d’intégration suit son chemin. Le consensus est général maintenant en Afrique pour considérer la régionalisation comme une étape essentielle de l’insertion des pays dans le commerce international. C’est ainsi que les intégrations régionales sont conçues dans la perspective d’élargir des marchés nationaux trop segmentés, de procéder à des économies d’échelle, d’harmoniser les politiques économiques et les cadres institutionnels et de constituer de puissants leviers de développement afin d’éradiquer la pauvreté extrême.

Au regard de cette détermination de l’Afrique à relever les défis du développement, l’Union européenne qui est manifestement le premier promoteur du régionalisme apporte son soutien à l’édification des plans stratégiques de lutte contre la pauvreté.

L’Union européenne dans l’action

Un front commun dans la lutte contre la pauvreté a pris corps. L’Europe s’est mobilisée à côté de l’Afrique pour combattre les maux qui entravent le développement économique et l’épanouissement social des populations. A savoir :

- aider le continent à poursuivre le processus de démocratisation, gage de liberté, de respect des opinions,

- asseoir une bonne gouvernance dans la gestion des biens publics et du financement,

- assurer le développement des infrastructures socioéconomiques de base (école, centre de santé primaire, eau potable...),

- éveiller les consciences des populations au sujet des droits humains,

- enfin la mise sur pied d’un plan de prévention et de traitement des maladies tels : le paludisme, la tuberculose et le VIH/Sida qui déciment les bras valides et compromettent le devenir économique du continent.

Ces préoccupations de l’UE se situent au cœur des nouveaux défis que l’Afrique cherche à résoudre.

En effet, depuis 1990, qui a vu l’amorce du processus démocratique, l’Afrique a toujours besoin d’être épaulée dans sa mise en œuvre et le respect des schémas classiques de cette démocratie qui sont : le respect de la constitution, l’organisation d’élections libres et transparentes, la lutte contre la corruption et l’acceptation de l’alternance démocratique.

Si dans certains pays des efforts louables sont à noter (Sénégal, Ghana, Bénin, Afrique du Sud...), par contre d’autres pays demeurent soit en marge de ce processus (Côte d’Ivoire, Togo, le Soudan...) soit dans le refus obstiné de l’alternance.

Ce tâtonnement nécessite le soutien des partenaires au développement notamment l’UE pour parfaire le processus démocratique et les bases d’une économie intégrée véritable.

Dans son allocution prononcée à Bruxelles le 29 septembre dernier devant les parlementaires européens, M. Louis Michel, Commissaire en charge du développement et de l’aide humanitaire souligne que l’Union doit veiller :

- au renforcement du Haut-commissariat aux droits de l’Homme ,

- à la création d’un système mondial d’alerte rapide en cas de catastrophes naturelles,

- à la mobilisation des ressources supplémentaires pour la lutte contre le VIH/Sida, la tuberculose et le paludisme. Il a insisté sur le fait qu’une focalisation sur l’Afrique est indispensable. Cette attention particulière que l’UE attache à l’Afrique subsaharienne, est justifiée par le fait que cette région connaît un spectaculaire enchaînement de circonstances défavorables : Sida, recrudescence du paludisme, diminution de la production vivrière par personne, détérioration des conditions de logement et dégradation de l’environnement, de sorte que la plupart des pays de la région ne pensent pas pouvoir atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).

D’autres fléaux tenaillent cette partie de l’Afrique notamment la sous-alimentation, le faible taux de scolarisation à l’école primaire, la pandémie du VIH/Sida et les guerres civiles sont autant de catastrophes qui pourraient empêcher d’atteindre les OMD sans l’aide soutenue de l’UE et d’autres partenaires au développement.

Aussi pour accélérer le développement de l’Afrique, l’UE dans son appui ciblera ses actions dans des domaines bien définis. Notamment la gouvernance, l’interconnexion et l’équité. Dans ce volet, l’Union s’activera à faciliter la stabilité et la paix en dotant l’Union africaine et les organisations sous-régionales des moyens financiers nécessaires pour résoudre les conflits du continent.

En ce qui concerne l’interconnexion des réseaux et des échanges en Afrique, un partenariat euro-africain est envisageable pour mettre en place des infrastructures transfrontalières durables indispensables à l’interconnexion du continent.

Par-dessus tout, l’UE veut aussi éradiquer la pauvreté en Afrique en stimulant une croissance durable. Et cela passera par l’accès à des services de base stables, au plein emploi et à des emplois productifs. En effet, le chômage des jeunes et des femmes engendre de nos jours l’exode rural et de surcroît l’immigration sans issue d’un grand nombre d’Africains vers l’Europe où ils espèrent s’affranchir de la précarité et s’intégrer socialement dans la vie active.

Pour pallier cette désillusion de l’exode, l’UE intégrera dans ces actions, des mesures incitatives pour promouvoir l’émergence de société équitable dans un cadre de développement durable en Afrique.

Selon le commissaire Louis Michel, le sens de cet engagement est de parvenir à "honorer les Objectifs du Millénaire pour le développement que tous les membres de l’ONU se sont engagés à réaliser d’ici à 2015".

C’est pour donner davantage un coup d’accélérateur à ce pari, qu’à partir de 2010, l’UE consacrera au développement une enveloppe supplémentaire de vingt milliards d’euros chaque année. Mais surtout en faisant de la lutte contre le VIH/Sida l’épicentre de la lutte contre la pauvreté.

L’UE face au VIH/Sida en Afrique

L’équation du développement ne peut être résolue sans au préalable songer à l’existence d’une population saine. Cette logique implacable pousse l’UE à agir de façon plus efficace, plus active et plus rapide, afin de concrétiser son défi dans la lutte contre la pauvreté en Afrique. D’ailleurs selon le commissaire Louis Michel "Le VIH/Sida, le paludisme et la tuberculose représentent les principales maladies mortelles qui sévissent dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne et d’Asie, ainsi que le principal obstacle au développement".

Pour cette raison, la Commission opte pour une série d’actions concrètes et peu coûteuses, tout en étant efficace. Parmi ces actions, nous pouvons citer :

- la distribution gratuite de moustiquaires et de contraceptifs ;

- l’accès gratuit aux services de consultation et de dépistage volontaires du VIH/Sida.

En collaboration avec les partenaires mondiaux tels que l’Organisation mondiale de la santé (OMS), ce programme d’action de la Commission cherche à renforcer les réseaux régionaux en vue de promouvoir l’accès à des médicaments sûrs et d’un prix abordable. De même, elle vise également à renforcer les capacités de réglementation des pays partenaires et de soutenir de nouveaux travaux de recherche.

Pour plus de conscientisation, le programme d’action œuvrera dans chaque pays à l’organisation d’un dialogue politique sur les problèmes de stigmatisation et de discrimination.

Ainsi que sur les droits de l’Homme, les préoccupations liées aux catégories vulnérables, comme les orphelins et les enfants. La communication propose aussi de rechercher des synergies avec des programmes connexes en ce qui concerne par exemple, l’hygiène sexuelle et la santé génétique. Actuellement, l’Union fournit à elle seule une contribution de 239,02 millions d’euros par an (moyenne annuelle 2003-2006) à la lutte contre le VIH/Sida, le paludisme et la tuberculose. Une part importante de cette somme alimente le Fonds mondial dont l’UE est le deuxième donateur.

Soutenir la production locale des antrirétroviraux (ARV) en Afrique

L’Action de prévention ira de pair avec l’accès des malades à des soins appropriés grâces aux ARV. Le constat alarmant qui s’impose est que les malades du VIH/Sida sont au Sud tandis que les médicaments se trouvent au Nord.

Les statistiques montrent que dans les pays en développement, seuls 2 % des patients dans le besoin ont accès à des traitements antirétroviraux. L’Afrique à elle seule compte 70 % des personnes affectées et infectées, seulement 12 % des patients ont accès au ARV.

Cela est tristement lourd de conséquences. Là encore, la Commission européenne s’est engagée à mettre sur pied un programme destiné à soutenir des initiatives visant à promouvoir la production locale de préservatifs, de moustiquaires traités aux insecticides à longue rémanence, d’antirétroviraux, de thérapies à base d’antimisinine et de médicaments contre la tuberculose. Malgré la chute drastique des prix de 10 000 à 30 euros grâce à l’association des molécules de traitement de première intention, l’accès aux ARV échappe toujours au plus grand nombre.

Car sur les 4,3 millions de malades que compte l’Afrique subsaharienne, seule 12 % en bénéficie.

La riposte doit être de taille. C’est pourquoi dans l’aide au développement 2008-2013, le Conseil européen a arrêté l’enveloppe financière à 22,7 milliards d’euros pour le dixième Fonds européen de développement (FED) contre auparavant 13,5 millions d’euros pour le neuvième FED qui couvre 2003-2007. Cette augmentation de l’assiette financière pour l’appui au développement a été louée par le commissaire Louis Michel "Aujourd’hui l’Europe met plus que jamais le partenariat au centre de son action".

Théodore ZOUNGRANA (tzoungrana@yahoo.fr)
L’Hebdo

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