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Ressources animales à l’Est du Burkina : Quelle politique pour valoriser l’élevage ?

Publié le jeudi 9 février 2006 à 03h54min

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Le ministre Tiémoko Konaté

Du 02 au 04 février dernier, le ministre des Ressources animales, Tiémoko Konaté a entamé une tournée à la rencontre des acteurs de l’élevage à l’Est du Burkina. Cette démarche vise à établir un climat de confiance entre les acteurs et les premiers responsables du département en charge des ressources animales et partant à dégager šdes pistes et des stratégies pour mieux valoriser l’élevage au Burkina Faso.

Tiémoko Konaté est allé prendre le « pouls » de la réalité des ressources animales à l’Est du Burkina Faso. En plus des visites de sites de production agro-sylvo-pastorale, le ministre en charge des ressources animales a eu des séances de travail avec les différents acteurs de l’élevage de la région de l’Est. Au cours de sa tournée de trois jours, il s’est rendu à Nadiagou pour une visite du poste de contrôle vétérinaire, à Pama, à Kikidéni, à Fada N’Gourma, à Bilanga, à Bogandé et enfin à Manni.

Une sortie que le ministre Tiémoko Konaté a qualifiée de « réussie et de satisfaisante » dans la mesure où les entretiens ont permis aux différents acteurs d’évoquer leurs préoccupations et de converger leur vision pour valoriser le potentiel des ressources animales. Avec les producteurs, les échanges ont permis au premier responsable du département de s’imprégner des difficultés qui minent le développement des activités pastorales.

Ils ont soumis à l’attention du ministre un mémorandum en cinq points : la sécurisation des activités pastorales, l’amélioration de la productivité des animaux, de la compétitivité et de l’accès au marché, la professionnalisation des acteurs et le renforcement du cadre institutionnel. De telles dispositions vont non seulement clarifier la pratique du pastoralisme à l’Est où les conflits agriculteurs-éleveurs sont récurrents mais aussi valoriser le potentiel génétique du cheptel. Une option à laquelle tient fermement le ministre Konaté qui n’a cessé lors des travaux d’inviter les acteurs à étudier la question dans toutes ses dimensions. Car les producteurs ont relevé que l’introduction du zébu brésilien à l’Est contrairement aux autres régions n’a pas été une réussite.

Les techniciens pensent plutôt qu’il est prématuré de tirer des conclusions sur cette expérience et proposent la conduite d’une étude qui déterminerait clairement les raisons de cet échec.

L’insécurité foncière, un mal national

Les éleveurs de l’Est sont confrontés à l’insécurité foncière. Cette situation se traduit très souvent par des affrontements parfois meurtriers entre les éleveurs et les paysans. « Les conflits sont le fait des préjugés qu’ont les populations locales sur les éleveurs. Quand par exemple, un agriculteur confie ses animaux à un éleveur peulh, si ces bêtes détruisent le champ de l’agriculteur, l’éleveur a des problèmes », a expliqué un éleveur, Kolado Maïga, président de la section Gourma du RECOPA (Réseau de communication sur le pastoralisme).

Evoquant le drame de Baléré, il a avoué que le problème demeure. M. Maïga a également confié que ses bergers qui ont eu récemment maille à partir avec les producteurs auraient passés ces derniers à tabac. « Quand on a amené l’affaire devant les services compétents, j’ai été condamné à leurs payer 500.000 FCFA. Ce n’est qu’avant hier (NDLR : l’entretien a lieu le 02 février) que je me suis acquitté des frais de dédommagement », a-t-il précisé. Et d’ajouter que des dédommagements peuvent aller parfois au-delà de 1.000.000 FCFA.

Kolado Maïga estime que la situation doit changer d’autant plus, soutient-il que les agriculteurs et les éleveurs sont des frères et doivent créer un climat d’entente et de paix. « Nous menons des activités de sensibilisation auprès des protagonistes pour leur expliquer les zones de pâture et d’accès aux points d’eau, les pistes à bétail afin de réduire les conflits ».

De son côté, le président de l’Est du RECOPA, Aboubacar Amadou Maïga a ajouté que les actions de sensibilisation du RECOPA ont permis aux frères ennemies d’hier de s’asseoir sur la même table pour parler le même langage. Les vols de bétail, l’insécurité foncière, les conflits agriculteurs-éleveurs, sont des problèmes d’ordre national à prendre à bras le corps, selon Tiémoko Konaté. Il pense que leur résolution passera par ceci : « il faut établir une collaboration franche avec les comités locaux de la police de proximité d’une part, et d’autre part déterminer quoi appartient à qui ».

Pour le ministre des ressources animales, l’insécurité foncière et les conflits qui en découlent vont trouver une solution dans le cadre global de la loi d’orientation sur le foncier en milieu rural. Voilà pourquoi, il a invité les éleveurs de la région de l’Est à s’organiser pour prendre une part active au forum sur la sécurisation foncière, prévu courant avril prochain.

Pour cela, ils doivent d’après M. Konaté y aller avec des propositions concrètes s’ils veulent être les acteurs de leur propre développement.

Jeter du lait et en importer ?

La tournée du ministre a été une opportunité pour l’ensemble des acteurs de diagnostiquer l’état de la filière élevage. L’étroitesse et les difficultés d’accès au marché, les conditions de délivrance des certificats internationaux de transhumance ont été aussi soulignés

Les producteurs de l’Est peinent à écouler leurs produits. Lors des débats, un producteur a confié qu’en hivernage ils sont obligés de jeter du lait dans la brousse, faute de marché. Paradoxalement, notre pays dépense 10 milliards de FCFA pour importer du lait. Que faut-il faire alors pour permettre aux producteurs de ne plus jeter du lait et réduire par ricochet nos importations de lait ? A cette préoccupation des producteurs, Tiémoko Konaté estime qu’il faut déployer des mécanismes à même de conserver plus durablement le lait made in Burkina. Dans l’ensemble, il se dit favorable à une politique de consommation du lait. Produire plus de lait avec moins d’effectifs du cheptel, a-t-il-préconisé. Il a de ce fait exhorté les services techniques à appuyer la réflexion pour améliorer non seulement le potentiel génétique du cheptel mais aussi et surtout sa productivité. Cela va se traduire par la mise sur pied de programmes de gestion des ressources naturelles en vue de mieux les rentabiliser.

Enfin, les producteurs ont évoqué la question du certificat international de transhumance. Une sorte de carte d’identité des animaux transhumants. Le directeur provincial des ressources animales de la Kompienga, Désiré Ouédraogo invoque pour sa part la lenteur mis par les éleveurs pour approcher les services techniques en cas de difficultés. « Le certificat international de transhumance (CIT) est un problème, car à la frontière très souvent le document perd sa valeur. Quand bien même nos éleveurs sont en règle, ils doivent y payer 150 à 200 FCFA par tête », a-t-il conclu.

S. Nadoun COULIBALY (coulibalynadoun2002@yahoo.fr)
Sidwaya

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